Sur le tournage des GARDIENS DE LA GALAXIE : Entretien avec Zoe Saldana (Gamora) – 1ère partie
Article Cinéma du Mercredi 08 Octobre 2014

Changement de lieu: nous entrons par la porte entr’ouverte d’un des grands plateaux et accédons par une petite rampe à la porte ronde d’un décor ô combien réjouissant pour tout fan de Science-Fiction : l’intérieur plus vrai que nature du Milano, le vaisseau de Peter Quill. Charles Wood, le chef décorateur, a créé des formes si logiques et si «pratiques » que l’on se sent immédiatement à l’aise dans la soute où nous nous trouvons. De chaque côté de l’espace intérieur, on remarque d’énormes vérins factices qui sont sensés déployer les ailes du Milano, pour l’instant rétractées, quand il entre en phase d’atterrissage. Des consoles techniques sont disposées aux endroits stratégiques pour mieux nous convaincre que tout est fonctionnel. Une échelle aux barreaux alternés permet de monter dans le cockpit du vaisseau, mais nous ne le verrons pas aujourd’hui, car l’étage supérieur du Milano, habituellement fixé à sa base, a été démonté pour être stocké. La fin du tournage approche, et les studios Marvel veillent à protéger tout leur patrimoine de décors afin de le réutiliser dans la suite des GARDIENS DE LA GALAXIE. Mais il est temps de nous rendre silencieusement sur un autre plateau où le tournage a lieu…

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Entretien avec Zoe Saldana (Gamora)

Nous arrivons précisément au moment d’une nouvelle mise en place, et Zoe Saldana profite de cette pause pour venir parler avec nous. Après avoir conquis le cœur des cinéphiles en incarnant de manière bouleversante Neytiri dans AVATAR et en devenant la nouvelle Uhura des deux STAR TREK réalisés par J.J. Abrams, la voilà prête à devenir une troisième icône de la Science Fiction cinématographique, la guerrière génétiquement modifiée Gamora. Même recouverte de maquillage vert et de quelques petites prothèses sur les pommettes et le front, Zoe Saldana est toujours ravissante et gracieuse, ce qui n’est pas un mince exploit. Elle croise ses longues jambes gainées de cuir noir dans le fauteuil en face de nous et attend nos questions en souriant.

Pourriez-vous nous parler de ce qui vous a attiré quand les dirigeants des Studios Marvel vous ont proposé ce projet, et des difficultés que vous avez eu à surmonter pour jouer ce rôle ?

Oui, vous avez raison, parlons des choses agréables en premier ! (rires) Ce qui m’a donné envie de tourner dans ce film, c’est l’opportunité de travailler avec James Gunn. Quand j’ai lu son script, je l’ai trouvé drôle, avec une intrigue solide, très bien conçue et pleine d’esprit. James a trouvé un ton très original, qui n’est ni simpliste ni coulé dans le moule des films de Science Fiction ou de superhéros que l’on a déjà vu. Il ne se borne pas à suivre des formules classiques. En tant que femme, j’aime tout particulièrement jouer des personnages qui ont du sens, qui mènent leur propre destin, et qui ne sont pas que des petites amies du héros, ou des épouses un peu effacées. Et dernièrement, ces choix m’ont souvent entraînée dans l’espace ! (rires) C’est pour ces raisons que le personnage de Gamora m’a semblé très attirant. Mais je dois dire que je me posais beaucoup de questions, car je n’avais jamais joué une extraterrestre de cette manière auparavant, je veux dire une guerrière aussi redoutable et aussi sauvage. La difficulté principale de ce rôle, comme vous pouvez l’imaginer, ce sont les quatre à cinq heures de maquillage qui sont nécessaires chaque matin, et les retouches constantes pendant le tournage, qui ont tendance à me distraire et à altérer un peu ma concentration. Mais d’un autre côté, comme c’est une expérience inédite, je la trouve très intéressante. J’aime expérimenter de nouvelles choses.

Après avoir incarné successivement Neytiri et Uhura, avez-vous hésité avant d’accepter de jouer à nouveau une héroïne d’un grand film de Science-Fiction ? N’avez-vous pas craint d’être définitivement cataloguée dans ce registre cinématographique ?

Si, bien sûr. Je dois dire que cela m’a traversé brièvement l’esprit quand j’en ai parlé avec ma famille et mon équipe. Je n’aimerais pas être une actrice cataloguée, car je n’aime pas les stéréotypes quels qu’ils soient, mais je crois aussi que l’on doit toujours garder la liberté de choisir les projets pour lesquels on a un vrai coup de cœur. La pensée de me retrouver avec l’étiquette de « Reine de la Science-Fiction » collée à ma carrière ne me réjouissait pas, mais refuser une si belle opportunité juste à cause de cette crainte n’était pas une option à laquelle je pouvais me résoudre. De toutes manières, prendre une décision uniquement basée sur la peur n’est pas un raisonnement sain. Pourquoi rater l’occasion de travailler avec un réalisateur étonnant comme James Gunn, qui est encore un rebelle, un artiste qui n’est pas intégré dans le système hollywoodien ? J’aime travailler avec des personnalités atypiques comme celle-là, comme j’ai eu la chance de le faire avec James Cameron, qui est un des véritables pionniers de notre génération. Dès que j’ai lu le script des GARDIENS DE LA GALAXIE, j’ai été séduite par cet univers et ces personnages. Et j’ai aimé le statut particulier que Gamora avait au sein de ce groupe. Je dois dire aussi que les dirigeants des Studios Marvel ont déployé beaucoup d’efforts pour me faire savoir qu’ils souhaitaient travailler avec moi sur ce projet. Ils m’ont dit qu’ils trouvaient que le projet correspondait parfaitement à mes capacités de comédienne et qu’ils seraient très heureux de m’accueillir dans la famille Marvel. C’était extrêmement aimable et sympathique. Et j’ai pensé que ce serait effectivement très agréable d’entrer dans cette famille et d’entamer une belle relation professionnelle avec elle.

Marvel vous a certainement parlé assez vite de la possibilité que LES GARDIENS DE LA GALAXIE devienne une franchise cinématographique de trois épisodes ou même plus…

Oui. Je crois que ce serait très amusant de retrouver ces personnages dans d’autres aventures. Et quand je pense à la réaction que ma petite nièce aura quand elle verra agir Gamora, eh bien je me dis que ce sera un bon modèle de comportement pour elle ! (rires) Cependant, sur le point précis des suites envisagées, je dois préciser que je ne planifie pas les choses aussi loin dans le futur. Avant de répondre oui à la proposition de Marvel, je me suis d’abord demandé tout bêtement comment j’avais envie de passer cet été. Etais-je prête à rester à Londres, en ayant la peau peinte en vert pendant toute cette belle saison ? Est-ce que je pouvais rater la perspective de tourner avec des acteurs formidables qui allaient saisir eux aussi l’opportunité de jouer des rôles différents de ceux dans lesquels on les avait vus jusqu’à présent ? Une troupe de comédiens qui vous intrigue et qui vous plaît, c’est aussi une bonne raison de se lancer dans un projet. Prenez Dave Bautisa, par exemple : Dave vient du catch et s’est lancé avec succès dans une nouvelle carrière d’acteur. Et quand vous verrez le film, je suis certaine qu’il vous étonnera. Chris Pratt, dont c’est le premier rôle principal au cinéma, vient de la comédie, et il s’est métamorphosé physiquement d’une manière extraordinaire pour jouer le rôle de Peter Quill. Et James Gunn lui aussi entreprend une transformation artistique avec ce film, car il quitte le registre des petits films indépendants que les fans adorent pour réaliser sa toute première superproduction destinée à un large public. James est très courageux, et il suit son propre instinct jusqu’au bout de ses convictions. J’aime me retrouver en compagnie de personnes comme celles-là, qui tentent des choses nouvelles, non conventionnelles. Pour toutes ces raisons, j’ai eu envie de vivre cette expérience des GARDIENS DE LA GALAXIE. Et je ne le regrette pas.

Pouvez-vous nous parler de votre personnage et de sa trajectoire au cours de ce premier épisode ?

Eh bien si j’en crois mon neveu, Gamora est une tueuse à gages, mais qui a un code de l’honneur et une honnêteté sans faille. Je ne sais pas si c’est l’un de ses plus grands défauts ou l’une de ses plus grandes qualités, mais quand Gamora voit quelque chose d’injuste se passer devant ses yeux, elle ne peut pas s’empêcher d’intervenir. C’est plus fort qu’elle. Gamora est aussi une femme qui a beaucoup souffert en étant enlevée de la planète où vivait son peuple, les Zen Whoberi , après qu’il ait été exterminé par les Sakaarans. Tous les membres de sa famille sont morts, et après avoir subi ce deuil terrible, elle a été témoin de beaucoup d’actes de violence perpétrés par Thanos, qui en a fait sa fille adoptive et l’a élevée pour la transformer en une guerrière impitoyable, une sorte d’arme vivante. Elle a suivi un entraînement très rigoureux qui lui a permis d’apprendre de nombreuses formes de combats de toutes origines. Mais Thanos ne lui a jamais prodigué l’affection d’un père . Gamora a un frère et une sœur qui ont vécu les mêmes expériences, mais chacun a réagi selon son cœur. Gamora a voulu fuir cet environnement, car elle sait qu’elle ne lui appartient pas. J’ai pu trouver beaucoup d’éléments à exploiter dans son histoire pour mieux l’incarner. A sa manière, elle évoque aussi le destin des « garçons perdus du Soudan », ces 20 000 garçons que l’on a envoyé vivre loin de leurs familles pendant la guerre civile qui a ravagé le pays entre 1983 et 2005. Ils ont été kidnappés dans leurs villages et forcés à devenir des guerriers et de tueurs, alors que la plupart de ces gosses avaient le cœur pur… Je me suis servi de cela pour jouer les tourments intérieurs de Gamora et comprendre comment son esprit pouvait « fonctionner » malgré tous les traumatismes terribles qu’elle a subis.

Avez-vous du vous entraîner pour vous préparer à jouer les scènes de combats du film ?

Oui. J’étais curieuse de voir comment ils allaient être conçus. J’ai déjà interprété des personnages qui avaient recours à différentes techniques de combat. Mais Gamora a la particularité d’utiliser une épée et un bâton pour se battre. Dès le début, je me disais « C’est une femme, et il faut essayer de la rendre très attirante même quand elle se bat. » Je l’imaginais se déplaçant comme un toréador qui captive, séduit et hypnotise le taureau jusqu’au moment où la bête va aller d’elle-même vers le coup de grâce et la mort. Gamora peut attirer ses ennemis pour qu’ils se rapprochent et c’est à ce moment-là qu’elle va saisir l’occasion de les tuer. Je trouvais cette perspective très excitante, et j’avais hâte d’en arriver à ces scènes-là ! (rires)

La suite de cet entretien avec Zoe Saldana paraîtra bientôt sur ESI !

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