LES TORTUES NINJA – 8ème partie : Entretien avec Robert Weaver, Co-superviseur des effets visuels
Article Cinéma du Vendredi 21 Novembre 2014

Univers 3D et scènes d’action

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Robert Weaver fait partie des vétérans d’ILM qui ont vécu la transition vers le numérique, puisqu’il a rejoint le studio en 1991, quand celui-ci utilisait encore les trucages sur pellicule, et a travaillé en tant que directeur technique sur BACKDRAFT, HOOK, LA MORT TE VA SI BIEN, et sur THE MASK, qui a marqué un tournant dans l’utilisant des effets 3D en 1994. Il a exercé ensuite les mêmes fonctions sur des films comme JUMANJI, MARS ATTACKS, JURASSIC PARK 3, THE DAY AFTER TOMORROW, LES CHRONIQUES DE RIDDICK, AVATAR, COWBOYS & ALIENS, BATTLESHIP et STAR TREK INTO DARKNESS.

Comment votre travail sur le film a-t-il débuté ?

Pablo Helmann et moi nous sommes partagés la tâche de créer les effets visuels du film. J’ai passé trois mois sur le tournage, à superviser le travail de la seconde équipe. Nous avons tourné en capture de performance et en prises de vues réelles beaucoup de scènes de cascades et d’actions qui employaient les méthodes du « parkour » (les figures acrobatiques accomplies en escaladant des architectures urbaines, selon l’approche inventée en France par David Belle, NDLR), ainsi que des combats à base d’arts martiaux. Et ensuite, nous avons réuni toutes les pièces du puzzle ici pour créer les séquences du film. Parmi les spécialités d’ILM figure notre manière de photographier et d’enregistrer les volumes des décors extérieurs ou intérieurs dans lesquels le tournage a lieu, ce qui nous permet ensuite de les reconstituer en 3D dans les moindres détails quand nous revenons à ILM pour travailler sur les effets visuels. Nous prenons des dizaines de milliers de photos haute résolution de chaque décor, avec toutes ses textures, et nous utilisons un appareil laser de télémétrie Lidar pour enregistrer et mesurer les volumes exacts, afin que la copie virtuelle de cet environnement soit hyperréaliste et impossible à distinguer du décor original. Nous pouvons aussi nous servir de photos prises sous des angles différents pour reconstituer des volumes, mais quand nous avons travaillé à New York, nous nous sommes énormément appuyés sur le Lidar pour recréer les environnements complexes de Manhattan.

Pourquoi recréez-vous systématiquement les décors en 3D ?

Parce que cela donne au réalisateur la possibilité de créer plus tard un plan qui lui manque ou auquel il n’avait pas pensé pendant le tournage dans les décors réels. Cela lui laisse aussi la possibilité de créer une variante d’un plan déjà tourné mais dans des conditions peu satisfaisantes, par exemple en toute fin de journée, avec la lumière qui baisse, les acteurs qui sont fatigués, etc. Pour un réalisateur, c’est un luxe formidable de pouvoir se dire qu’il a une solution de secours disponible pendant la post-production du film, alors qu’il a déjà largement avancé sur le pré-montage du film. Les réalisateurs qui ont entendu parler de cette option veulent tous pouvoir l’utiliser, et une fois qu’ils l’ont fait, ils s’en servent sur tous leurs autres films, surtout quand il s’agit de films d’action ou de films fantastiques avec de nombreux effets visuels ou personnages virtuels.

Un repaire numérisé dans ses moindres détails

Le décor du repaire souterrain des tortues n’a pas du être facile à reproduire, car il semble regorger de détails et de petits objets…


Effectivement, ce décor était à la fois très beau, très grand et tellement détaillé que c’est difficile à imaginer quand on n’a pas eu la possibilité de le voir sur place « en vrai ». Du coup, nous nous sommes beaucoup amusés à effectuer tout le travail de reconstitution de cet environnement et de ses nombreux accessoires avec le Lidar et les photographies en haute résolution. Ensuite quand nous transposons ces relevés volumétriques et ces milliers de photos en une modélisation en images de synthèse, nous recréons des textures tridimensionnelles pour compléter les informations des photos. Nous avons appliqué cette démarche sur les armes suspendues aux murs, sur les tuyaux des canalisations d’égouts, et sur l’espèce de planche suspendue grâce à laquelle les tortus déboulent d’un passage pour arriver dans leur antre.

Dans quels plans réalisés après le tournage dans le vrai décor avez-vous utilisé la copie 3D du repaire des tortues ?

Par exemple dans la scène où les tortues, après avoir rencontré la journaliste April O’Neil, ont été filmées pour la première fois par les médias. Comme leur existence est révélée alors que Splinter exigeait que les tortues agissent en secret, nos héros rentrent en silence dans leur repaire, afin de ne pas réveiller leur maître, dans l’espoir un peu naïf qu’il ne sera pas au courant. Bien sûr, il les prend en flagrant délit à la fin, et entreprend de leur infliger des exercices pénibles pour les punir.

La suite de notre dossier Tortues Ninja / ILM paraîtra bientôt sur ESI !

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