Star Wars Stories 3 - Episode VII : Le Réveil de la Force – Au cœur du tournage
Article Cinéma du Vendredi 28 Novembre 2014
Ce dossier vous propose de suivre la production des cinq nouveaux films de la franchise Star Wars – à commencer par le tournage de l’Épisode VII —, ainsi que tous les projets préparés conjointement par Lucasfilm et Disney. La guerre des étoiles n’était qu’un début… Evidemment, si vous ne souhaitez pas être exposés à d’éventuels spoilers, nous vous déconseillons la lecture de cet article.
Par Pierre-Eric Salard
Alors que le tournage du tant attendu Episode VII s’est terminé au début du mois, nous vous invitons à découvrir les dernières nouvelles en provenance d’une galaxie lointaine en pleine expansion. Avec quatre films officiellement en production, une série télévisée et un nouvel univers étendu, Lucasfilm suit indéniablement les pas des prolifiques Marvel Studios, l’autre société achetée (relativement) récemment par The Walt Disney Company…
L’identité des nouveaux comédiens rejoignant les interprètes de la trilogie originelle avait été dévoilée à la fin du mois d’avril, quelques heures après une première lecture du scénario par les principaux membres du casting. L’occasion, pour les acteurs, de faire connaissance. « La nouvelle génération est très prometteuse », déclare Mark Hamill, qui loue par ailleurs les talents de la jeune Daisy Ridley, jusqu’à alors inconnue. Enthousiaste, il ajoute que l’occasion de retrouver le rôle de Luke Skywalker, plus de trente ans après la sortie de Retour du Jedi (1983), est un « cadeau inattendu ». S’il n’a plus joué dans des films à succès depuis de nombreuses années, Mark Hamill, 62 ans, a fait une riche carrière dans le doublage de personnages de jeux vidéo et de dessin animés – et plus particulièrement celui du Joker. Depuis le début de la décennie, il est cependant revenu, peu à peu, devant les caméras. On le retrouvera d’ailleurs dans quelques mois au sein de la distribution de Kingsman : The Secret Service, une adaptation cinématographique des comics de Dave Gibbons et Mark Millar, réalisé par le talentueux Matthew Vaughn (Kick-Ass, X-Men : Le commencement). Si nous savons que l’ancien contrebandier Han Solo, incarné par Harrison Ford, a un rôle plus important au sein de l’intrigue de La Force se réveille, Luke Skywalker devrait être — selon les rumeurs — au centre des enjeux. Ni Lucasfilm ni Disney n’ont dévoilé – à l’heure où nous écrivons ces lignes – le synopsis du film. Mais cette hypothèse est corroborée par les informations qui ont filtré à travers la chape de plomb qui entoure le tournage. L’univers étendu, qui s’est construit au fil des romans, comics, et jeux vidéo, ayant été récemment relégué au rang de « légende », nous ne savons pas si Luke Skywalker est devenu un maître Jedi respecté, l’époux d’une fougueuse Mara Jade à la chevelure rousse, et le fondateur d’un nouvel ordre Jedi. Le personnage semble cependant suivre les traces d’Obi-Wan « Ben » Kenobi, puisque Mark Hamill arbore désormais une barbe similaire à celle que portait Alec Guiness dans Un Nouvel Espoir (1977). « C’est dans mon contrat », s’amuse le comédien. « Je n’ai pas pu me raser depuis le lendemain de la lecture du scénario avec les autres acteurs, en avril ». Il n’a donc pas rejoint ses nouveaux partenaires dès le début du tournage, à la mi-mai. Les jeunes acteurs sont d’ailleurs aussi enthousiastes que les « anciens ». Outre Daisy Ridley et John Boyega, qui devraient interpréter deux des principaux personnages et qui ne dissimulent pas leur joie dans leurs nombreuses publications sur les réseaux sociaux, l’écossais Domhnall Gleeson a hâte de rejoindre les étoiles… et de pouvoir enfin discuter de son rôle ! « Je ne peux malheureusement rien dire », indique l’acteur qui incarnant Bill Weasley dans les deux derniers volets de la saga Harry Potter. « Il suffirait d’un rien, d’une toute petite faute d’inattention, pour que ma vie soit détruite ! », s’amuse-t-il. « Je me demande si John (Boyega) doit montrer ses messages à des avocats avant de les poster sur les réseaux sociaux ! À vrai dire, j’aime être surpris en allant voir un film, donc je ne dévoilerai rien avant la sortie du DVD ». Mais la célébrité – et ses revers — attend ces jeunes comédiens méconnus. « Je suis naturellement pessimiste », ajoute Domhnall Gleeson. « Peu importe les décisions, je m’attends toujours au pire. Donc je m’inquiète, évidemment, à propos du fait que cette expérience peut brusquement changer ma manière de vivre. Mais à la vérité, j’ai pu m’apercevoir que ma participation dans Harry Potter n’a absolument rien changé à ma vie. Je peux me promener sans que personne ne me dérange. Cela me convient parfaitement. L’unique raison pour laquelle je participe à l’Épisode VII, c’est que le scénario est génial. J.J. Abrams est génial, et le casting également. C’est tout ce dont un acteur a besoin. D’une certaine façon, ce n’est qu’un boulot parmi d’autres ».
De nouveaux talents
Depuis le début du tournage, la distribution s’est féminisée. Outre Gwendoline Christie (l’oubliable Brienne de Torth dans la série « Game of Thrones »), Lupita Nyong'o, la jeune récipiendaire d’un Oscar du meilleur second rôle féminin pour Twelve Years a Slave en mars dernier, a rejoint le casting. « Je peux enfin le dire fièrement : je m’envole vers une galaxie lointaine, très lointaine », s’empresse-t-elle de déclarer le 2 juin dernier. « C’est une merveilleuse opportunité. C’est sûr que cet univers est à mille lieues de celui de Twelve Years a Slave. Mais cette forme de diversité représente ce dont sont les faits les rêves ! » Suite à un long processus de casting organisé au Royaume-Uni et aux États-Unis, deux autres jeunes acteurs ont émergé parmi 67 000 candidats. L’Américaine Crystal Clarke, qui a participé à plusieurs pièces de théâtre et courts-métrages, fera sa première apparition sur le grand écran en 2015, aux côtés de Pierce Brosnan, dans l’adaptation du roman The Moon and the sun de Vonda McIntyre (qui, pour l’anecdote, a écrit ce qui est considéré comme l’un des pires romans de l’ancien univers étendu Star Wars, L’étoile de cristal). Adepte du « parkour » (souvenez-vous de l’ahurissant système de déplacement urbain des Yamakazis), l’anglais Pip Andersen a été aperçu dans quelques publicités, outre-Manche. « L’univers Star Wars a toujours découvert et stimulé de nouveaux talents », déclare Kathleen Kennedy, la présidente de Lucasfilm. « Nous voulions absolument rester fidèles à cette tradition pour le casting de l’Épisode VII. Nous sommes ravis que tant de gens se soient déplacés aux, et que nous ayons pu incorporer Crystal et Pip dans le film ». La présence de Tom Cruise – que le réalisateur a dirigé dans Mission : Impossible III – a également été évoquée, le temps que son agent fasse un démenti. Il n’est cependant pas impossible que J.J. Abrams ait réservé un petit rôle à son ami Simon Pegg (Shawn of the Dead, Star Trek, « Spaced »), un fan invétéré de la saga créée par George Lucas. Il double d’ailleurs un personnage dans un épisode dédié à Star Wars du dessin animé Phineas et Ferb, mais aussi dans The Clone Wars. L’acteur a visité le tournage. Anthony Daniels, l’interprète de C-3PO, a indiqué en juin que Simon Pegg était venu le voir pour s’excuser d’avoir un jour participé à une parodie des aventures des deux droides dans l’Épisode IV, pour le site College Humor. « Les plateaux de l’Épisode VII sont fantastiques », déclare l’acteur. « Je ne veux rien rater, mais vous avez besoin de croire en ces personnages. Je pense que mon apparition déconcentrerait les spectateurs. Le casting a été fait de manière intelligente, avec tous ces acteurs inconnus ». Gageons que J.J. Abrams lui a proposé une place… sous plusieurs couches de maquillage !
La pellicule contre-attaque
Un autre ami du réalisateur de cet Épisode VII est – partiellement – à l’origine du recrutement d’Andy Serkis, le roi de la « performance capture ». Après avoir donné vie à Gollum, King Kong, Caesar de La planète des singes et au Capitaine Haddock, Andy Serkis, qui est également le réalisateur de la seconde équipe de la trilogie du Hobbit, a accepté de jouer dans Le Réveil de la Force, tout en s’attelant à la préproduction de ses deux premiers films, des adaptations de La Ferme des animaux et du Livre de la jungle. « J’ai grandi avec Star Wars, et j’étais un gigantesque fan des films originaux », déclare Andy Serkis. « Je n’aurais jamais imaginé pouvoir y participer. C’est juste arrivé de manière naturelle ». J.J. Abrams s’est en effet intéressé à Andy Serkis lorsque Matt Reeves (Cloverfield, Let me in), un ami d’enfance, lui a montré les premières images brutes du tournage de La planète des singes : l’affrontement, avant l’intégration des images de synthèse. « Je voulais avoir l’avis de J.J. », explique Matt Reeves. « Il connaissait et appréciait déjà Andy. Mais J.J. a pu voir des séquences où Andy avait juste sa combinaison de Mo-cap, sans images de synthèse. C’est là qu’il s’est rendu compte à quel point Andy est un acteur talentueux. Il était époustouflé. Et maintenant, il joue dans Star Wars. Je ne sais pas si cela a eu une conséquence directe. Mais je crois qu’il a eu une révélation. Il m’a dit que c’était l’une des meilleures performances auxquelles il a assisté dans sa vie ». Il nous reste encore à découvrir si Andy Serkis incarnera encore un personnage créé en images de synthèse, ou si J.J. Abrams lui a offert un rôle à visage découvert, et à la mesure de son talent. « Lorsque j’ai rencontré J.J., il y a eu un incroyable feeling entre nous », se souvient Andy Serkis, très enthousiaste. « Il m’a dit que je m’intégrerai parfaitement dans cet univers. Je suis ravi. Être assis à cette séance de lecture (du scénario), l’autre jour, était tout simplement extraordinaire. C’était un évènement exceptionnel. C’était stupéfiant d’être avec les acteurs originaux. Les anciens comme les nouveaux sont enthousiastes à l’idée de travailler ensemble ». Notons que The Imaginarium, le studio créé en 2011 par Andy Serkis et dédié à la « motion capture », est en outre impliqué dans tout le processus de capture de performance des prochains épisodes de Star Wars. Mais Andy Serkis n’est pas le seul à être sur des charbons ardents. « Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu J.J. aussi agité et nerveux », confie Matt Reeves. « Or quand il est dans cet état, cela signifie qu’il s’apprête à faire quelque chose de vraiment excitant ». J.J. Abrams a effectivement toutes les raisons d’être stressé. Non seulement il est attendu au tournant par des millions de spectateurs (dont de nombreux trentenaires et quadragénaires déçus par la prélogie), mais il doit aussi affronter la pression des médias. De nombreuses photos de tournage volées ont déjà fait leur apparition sur Internet. Un problème qui n’est plus celui de George Lucas. « Je suis désormais à la retraite », glisse malicieusement le créateur de la saga. Après avoir débuté le 16 mai à Abu Dhabi, le tournage s’est poursuivi en juin au sein des studios Pinewood, près de Londres. Mais l’émirat prépare déjà l’avenir. La société Twofour54, qui avait organisé les prises de vues au printemps, cherche à préserver les décors construits dans le désert. Ces derniers seront ultérieurement exposés dans un musée. Notons qu’une caméra IMAX a été utilisée lors du tournage d’une (unique) scène dans le désert d’Abu Dhabi, qui pourrait figurer – ou non – la planète Tatooine. Si nous ne savons pas encore combien de scènes ont été tournées au format IMAX, les amateurs d’images spectaculaires peuvent dès à présent dénicher les – malheureusement rares – salles IMAX en France. J.J. Abrams est un adepte du format IMAX – et de la traditionnelle pellicule. Paradoxalement, alors que George Lucas a fait de sa prélogie le fer de lance de la démocratisation du tournage et de la diffusion numérique, J.J. Abrams est l’un des derniers cinéastes, à Hollywood, refusant d’abandonner les bobines. Avec Christopher Nolan, Judd Apatow ou encore Quentin Tarantino, il soutient l’entreprise Kodak, en grande difficulté, afin qu’elle puisse continuer à produire, malgré tout, des pellicules. « Si la pellicule disparait, le standard de la meilleure qualité périt avec elle », disait-il en 2013. En ce qui concerne le tournage en Angleterre, l’Épisode VII ne monopolise pas uniquement plusieurs plateaux de Pinewood. Les extérieurs du studio ont également abrité un décor ensablé, dans un style proche des déserts d’Abu Dhabi. En juin, un membre émérite de l’équipe de production des anciens épisodes a également pris ses quartiers à Pinewood. Il s’agit du sculpteur Brian Muir (Alien, Les gardiens de la galaxie), qui avait construit l’emblématique masque de Dark Vador, en 1977, à partir des esquisses de Ralph MacQuarrie. Mais l’Épisode VII a rapidement été confronté à une malédiction qui semble accompagner la production de chaque film initial d’une trilogie Star Wars. Les tournages respectifs des épisodes IV et I avaient été frappés par d’impressionnantes tempêtes de sable, en Tunisie. Le Réveil de la Force aura eu la blessure de Han Solo.
La jambe de Solo
Le 12 juin, alors que le tournage britannique a débuté quelques jours plus tôt, Internet rugit : Harrison Ford se serait blessé à la cheville, pendant une prise de vue. Comble de malchance : la blessure aurait été provoquée par un élément du décor du Faucon Millenium. L’information a cependant été démentie ; il y aurait eu un accident avec une porte. L’acteur, désormais âgé de 72 ans, est immédiatement hospitalisé. Lucasfilm annonce rapidement que sa cheville est cassée, mais que les prises de vues vont continuer le temps qu’il récupère de sa blessure. Bon gré, mal gré, le tournage se poursuit en l’absence de celui qui incarne l’un des rôles principaux. Les fans s’inquiètent : les dirigeants de Disney, qui ne voulaient pas que la sortie du film soit repoussée à 2016, aussi. Dans les premiers temps, l’équipe de production s’arrange pour tourner des plans dans lesquels Han Solo est absent. Le planning est modifié, tant que possible. Malheureusement, il s’avère que la blessure est plus grave qu’annoncée. Harrison Ford s’est cassé la jambe gauche ! « L’intervention chirurgicale a été un succès », déclare alors son agent. «Il va bientôt commencer la rééducation. Il est impatient de retourner travailler ». Même s’il souhaite aller à l’encontre de l’avis de ses médecins, l’acteur va finalement devoir rester en convalescence pendant pas moins de six à huit semaines – jusqu’au mois d’août. « Je n’ai pas assisté à l’accident, mais Harrison veut revenir sur le tournage aussi vite que possible », raconte Andy Serkis. Les options qui s’offrent à la production se réduisent. Tous les décors d’un film ne sont pas prêts dès le début d’un tournage ; ils sont construits selon les besoins du planning, et se succèdent au sein des plateaux. À la fin du mois de juin, l’équipe de production – qui ne cède pas à la panique ni à la pression — s’organise. Le planning du tournage est modifié de fond en comble. Il est vraisemblablement décidé de fabriquer certains décors et costumes plus tôt que prévu, en adéquation avec l’emploi du temps des acteurs disponibles. Malgré les inquiétudes liées à la blessure de Harrison Ford, la confiance renait. L’incident engendre cependant des rumeurs, qui ne pourront certainement pas être confirmées ou infirmées avant la sortie de l’Épisode VII. Il semblerait – fort logiquement – qu’un report de la sortie du film à 2016 (au lieu du 18 décembre 2015) ait été évoqué en haut lieu. Encore aurait-il fallu réussir à convaincre les dirigeants de Disney, qui souhaitent absolument sortir le film en 2015. Certaines rumeurs indiquent que le rôle de Han Solo aurait pu être réduit, ce dont on peut toutefois douter. Seul le planning est altéré. Mais l’équipe de J.J. Abrams s’arrange pour contourner les problèmes, et Lucasfilm finit par faire taire les rumeurs - une bonne fois pour toutes ? Rien n’est moins sûr avec un tel projet — en confirmant que la sortie de l’Épisode VII est toujours prévue pour 2015. Était-ce prévu dans le planning de tournage initial ? Le 8 juillet, soit un peu moins d’un mois après la fameuse blessure de Harrison Ford, l’équipe de production semble avoir pris ses quartiers dans la forêt de Dean, sur le site de Puzzlewood, pour réaliser des prises de vues en extérieur. Le sigle AVCO – le nom de code du Réveil de la Force, tiré de la salle de cinéma où J.J. Abrams a découvert l’Épisode IV en 1977 – est en tout aperçu à plusieurs reprises sur plusieurs des nombreux véhicules installés près du site. Durant une petite semaine, La guerre des étoiles s’invite ainsi dans une forêt qui a inspiré J.R.R.Tolkien pour la création de la Terre du Milieu au siècle dernier, avant d’accueillir le tournage d’épisodes des séries « Merlin » et « Doctor Who ». Le 21 juillet, J.J. Abrams réserve une surprise aux fans. Afin de promouvoir une dernière fois l’opération Star Wars : Force For Change avant sa clôture, quelques jours plus tard, le cinéaste s’exprime dans une vidéo tournée au sein des studios Pinewood. Rappelons que Force For Change est une campagne, menée conjointement par Lucasfilm et l’UNICEF, visant à récolter des dons en échange de la possibilité d’être tiré au sort pour jouer un figurant dans l’Épisode VII, diner avec J.J. Abrams ou encore découvrir le film en avant-première. Des fans de plus de 119 nationalités différentes ont participé à cette opération, qui a récolté plus d’un million de dollars rien que dans les premières 24 heures. « Star Wars et Lucasfilm se sont construits sur l’idée qu’en unissant la créativité et l’innovation, rien n’est impossible », souligne le communiqué de presse. Afin de montrer l’exemple, les studios Disney ont eux-mêmes participé à hauteur d’un million de dollars. Qu’importe ce qu’en diront les critiques en décembre 2015 : ce nouvel épisode aura au moins réussi à rassembler des fonds pour l’Unicef. Mais l’attrait de la vidéo de J.J. Abrams est surtout matérialiste. Pendant qu’il fait une dernière fois la promotion de l’opération Force For Change, un petit droide de l’Épisode IV lui rend visite, ainsi qu’un pilote de l’Alliance rebelle, arborant sa combinaison orange, tout droit venu de la trilogie dite « classique ». Et pour cause : J.J. Abras s’exprime devant un nouveau modèle de X-Wing, le fameux vaisseau de Luke Skywalker et des rebelles, maintes fois aperçu dans les épisodes d’origine. Le X-Wing rejoint ainsi le Faucon Millenium de Han Solo dans la nouvelle trilogie, qui – rappelons-le – se déroule une trentaine d’années après la destruction de l’Étoile de la mort dans Le Retour du Jedi (1983). Mais les fans assidus auront tôt fait de remarquer que le nouvel engin ressemble autant à l’emblématique X-Wing qu’à un autre vaisseau, très similaire, introduit dans l’univers étendu de Star Wars, le Z -95. Et pour cause : les designs des deux vaisseaux sont tirés des mêmes dessins de production, réalisés entre 1975 et 1977 par Ralph McQuarrie ! Ce nouveau modèle de X-Wing reproduit ainsi – quasiment trait pour trait – l’un des dessins réalisés pour l’Épisode IV. J.J. Abrams souhaite indéniablement revenir aux origines du mythe. D’autres esquisses de Ralph McQuarrie, archivées depuis plus trois décennies, avaient déjà pris corps sur le tournage à Abu Dhabi. Les créateurs de la série animée Star Wars : Rebels (dont le lancement, en octobre, a marqué l’inauguration du « nouvel » univers Star Wars) ont quant à eux maintes fois expliqué que les travaux de Ralph McQuarrie étaient leur principale source d’inspiration visuelle. L’avenir se construit évidemment sur le passé.
Le repos du Jedi
À la fin du mois de juillet, l’équipe de production s’envole, pour une poignée de jours, vers l’île de Skellig Michael, une petite île de 22 hectares au large de l’Irlande. Ce voyage était originellement programmé pour le mois de septembre, mais la blessure de Harrison Ford a provoqué cette modification du calendrier de tournage. Inscrite depuis 1996 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, cette île est inhabitée depuis le XIIe siècle. Un monastère y avait été établi entre le VI et le VIIIe siècle, avant d’être laissé à l’abandon. Les ruines de cet ancien de culte ont ainsi abrité le tournage de quelques scènes, en présence de Mark Hamill et Daisy Ridley. Jusqu’à maintenant, la saga Star Wars ne s’était pas - ou rarement - invitée dans ce genre d’endroits isolés et battus par les vents. Une terre où les beaux jours font partie du passé, où les vestiges rappellent que les civilisations ne sont pas éternelles. Un lieu idéal pour favoriser les méditations d’un Maître Jedi ! Notons que l’île de Skellig Michael est tellement petite – et dépourvue de structures modernes — que l’équipe de tournage s’est installée dans le comté de Kerry, situé à la pointe sud-ouest de l’Irlande. Si ces quelques jours de tournage ont ravi les élus et commerçants du comté, qui peuvent déjà compter sur la visite des aficionados (des agences touristiques proposant déjà, en été, des excursions sur Skellig Michael), ils ont provoqué l’ire de certains touristes et autochtones – l’île étant restée inaccessible durant trois ou quatre jours. La modification du calendrier du tournage a également eu d’éventuelles conséquences environnementales. L’équipe de J.J. Abrams s’est effectivement activée sur l’île en pleine période de reproduction des oiseaux, ce qui a provoqué le mécontentement d’une association de défense. Mais les autorités irlandaises déclarent avoir pris les précautions d’usage. Ces aléas ne sont guère inhabituels pour une superproduction tournée en extérieur, au sein d’un site naturel. Au mois d’août, afin de prendre les dernières dispositions avant le retour de Harrison Ford au sein de la production, le tournage est mis en pause durant deux semaines. Malgré la blessure de l’acteur (qui, selon Lucasfilm, s’est bien remis), J.J. Abrams et les producteurs Kathleen Kennedy et Bryan Burk auront donc réussi à poursuivre le tournage pendant plus six semaines. Han Solo est ainsi – enfin — de retour à la mi-août. Le tournage de l’Épisode VII va encore se poursuivre pendant quelques semaines, jusqu’u début du mois de novembre. J.J. Abrams s’est ensuite attelé à la supervision de la postproduction, qui s’étalera sur un peu plus d’un an. Soit un délai deux fois plus court que celui dont bénéficiait George Lucas pour les trois épisodes de sa « prélogie »… « La seule chose dont je suis sûr, c’est que J.J. rend absolument honneur aux trois films originaux », souligne Andy Serkis. « L’Épisode VII bénéficie de tout l’amour et de la sensibilité de ces films ». Si Le Réveil de la Force est prévu pour le 18 décembre 2015, aux États-Unis comme en France, la franchise renouera-t-elle, un jour, avec sa sortie traditionnelle en mai ? « Nous n’avons pas pris de décision définitive », explique Alan Horn, le président des Walt Disney Studios. « Cela pourrait changer. Nous pourrions revenir au mois de mai, à l’avenir ». Le premier film dérivé a toutefois été d’ores et déjà annoncé pour décembre 2016.
Entre de bonnes mains
Alors que le tournage de l’Épisode VII est terminé depuis quelques semaines, les équipes de Lucasfilm et Disney préparent activement les trois films suivants. Avec un rythme d’un film par an, il n’y a pas de temps à perdre. Les studios Pinewood ont d’ailleurs été réservés pour — au moins - un autre film (dérivé), dont les prises de vues devraient, selon toute vraisemblance, débuter au printemps prochain. J.J. Abrams délaissant sa mise en scène, l’Épisode VIII a été confié au talentueux Rian Johnson. Son implication ayant été dévoilée en juin, le réalisateur et scénariste américain, âgé de quarante ans, dispose de près de deux ans pour écrire le scénario et superviser la préproduction de l’Épisode VIII. Durant cette période qui le sépare du tournage, il pourra compter sur l’aide de son producteur attitré, Ram Bergman. Ils ont collaboré sur tous les longs-métrages de Rian Johnson : Brick (2005), Une arnaque presque parfaite (The Bloom Brothers, 2008) et Looper (2010). Né en 1973 dans l’état du Maryland (alors même que George Lucas avait déjà écrit un tout premier traitement pour un certain « The Star Wars » !), Rian Johnson a grandi en Californie, où il a suivi le cursus de l’USC School of Cinematic Arts. Comme, précédemment, George Lucas ou Robert Zemeckis. En 1996, il réalise et écrit un premier court-métrage, Evil Demon Golfball from Hell !!! – l’histoire d’un homme tourmenté par une balle de golf ! Il lui faudra cependant attendre neuf ans avant d’avoir l’opportunité de tourner son premier film, Brick. Doté d’un budget de moins de 500 000 dollars, Brick est un sympathique thriller avec Joseph Gordon-Levitt. Il a reçu le prix spécial du jury pour vision originale au Festival de Sundance, ainsi que le prix « sang neuf » au Festival du film policier de Cognac. En 2008, Rian Johnson signe la comédie Une arnaque presque parfaite, avec Adrien Brody, Rachel Weisz et Mark Ruffalo. Trois ans plus tard, il écrit et met en scène un long-métrage apprécié des amateurs de films de genre, et plus particulièrement des voyages dans le temps : Looper. Doté d’un budget de trente millions de dollars, ce thriller SF remportera un franc succès, engrangeant plus de 170 millions à travers le monde. À cette occasion, Rian Johnson retrouve Joseph Gordon-Levitt, qui devient un jeune Bruce Willis. Le scénario de Looper sera récompensé par une demi-douzaine de prix. Si Looper lui a permis de se faire définitivement remarquer, Rian Johnson signe également, en 2010 et 2012, trois épisodes emblématiques de la série « Breaking Bad » : Fly (qui se déroule presque entièrement avec deux personnages dans un même lieu), Fifty-One et Ozymandias. Ce dernier est d’ailleurs considéré comme l’un des meilleurs épisodes des passionnantes mésaventures de Walter White. Rian Johnson recevra également un prix de la prestigieuse Directors Guild of America pour la mise en scène de Fifty-One. Autant dire que la nouvelle trilogie est entre de bonnes mains. Car le jeune cinéaste n’est pas uniquement chargé de l’écriture et de la réalisation de l’Épisode VIII. Lucasfilm lui a également proposé d’écrire un traitement pour l’Épisode IX ! Le recrutement de Rian Johnson a généralement provoqué l’enthousiasme des aficionados et des analystes de l’industrie du cinéma. En réponse, le cinéaste un publié sur les réseaux sociaux un court extrait de L’étoffe des héros (1983), durant lequel l’astronaute Alan Shepard (Scott Glenn) fait une prière juste avant de devenir le second homme à voyager dans l’espace… « Je suis très touché par tous les encouragements que j’ai reçus », ajoute Rian Johnson. « Cette pensée (NDLR : la possibilité de réaliser un prochain Star Wars) me rend complètement heureux. J’ai toujours voulu jouer dans cet univers, depuis que mon père m’a emmené en voiture pour voir le tout premier film ». Mais le jeune cinéaste n’oublie pas les épisodes les plus récents. « Il y avait quelque chose de vraiment beau dans la prélogie », ajoute-t-il. Rian Johnson est déjà à pied d’œuvre dans les locaux de Lucasfilm. Il avoue d’ailleurs passer des soirées à montrer des classiques de l’histoire du cinéma à ses collaborateurs. Des équipes qui ne manquent pas de travail, l’Épisode VIII étant précédé par un film dérivé de la saga, réalisé par Gareth Edwards (Monsters, Godzilla). Nous reviendrons d’ailleurs sur ces « spin-offs » (dont les intrigues restent, à ce jour, inconnues), à l’occasion de notre prochain panorama de la production de La Force se réveille, qui sera consacré aux dernières semaines du tournage…