Retour sur la convention D23, édition 2015 : les impressions d’ESI – 1ère partie
Article Cinéma du Vendredi 30 Octobre 2015

Par Pascal Pinteau

Destination : Anaheim, Californie.

C’est dans le gigantesque centre de convention d’Anaheim, en Californie, à deux pas du parc Disneyland original (et du parc Disney’s California Adventure, inauguré en 2001), que s’est tenu du vendredi 14 au dimanche 16 août l’édition 2015 de la convention D23, nom qui fait référence à l’ouverture du tout premier studio de Walt Disney à Hollywood en 1923. Encore plus ambitieuse que les précédentes, cette 4ème édition du grand rendez-vous bisannuel de Disney et ses filiales Pixar, Marvel et Lucasfilm avec les fans a été l’occasion de nombreuses annonces spectaculaires et de la projection des premiers extraits exclusifs des films d’animation ou en prises de vues réelles que nous découvrirons dans les prochaines années. Soulignons d’emblée que la grande majorité des projets présentés appartenaient aux registres du Merveilleux, du Fantastique et de la Science-Fiction, ce qui confirme que Disney a bien conscience de la popularité croissante de ces genres cinématographiques, et persiste dans ces registres malgré les déceptions que furent JOHN CARTER (avec lequel le studio n’a finalement pas perdu d’argent, et qui est le prototype même du bon film qui n’a pas trouvé son public et que l’on redécouvrira dans 20 ans) et l’excellent A LA POURSUITE DE DEMAIN (TOMORROWLAND) délicieuse fable futuriste qui a eu le grand tort d’oser être optimiste à une époque où le cynisme est omniprésent, tout particulièrement chez les critiques de cinéma…Bref, Disney mise encore sur nos genres favoris et c’est tant mieux. Un mot avant de commencer cette chronique : Nous revenons sur le déroulement de la convention D23 de cette année non pas tant pour vous décrire les principales annonces de la programmation cinéma de Disney, qui ont été répercutées instantanément sur le web et les réseaux sociaux, mais plutôt pour partager avec vous nos impressions sur l’ambiance, l’ampleur et les nombreuses surprises agréables pas forcément autant médiatisées que d’autres que nous avons pu découvrir pendant cet événement…Alors, suivez-nous amis d’ESI, et faisons ensemble ce voyage sous forme de flashback, si vous le voulez bien ;)

La grande fête des fans

Ce qui frappe d’emblée, quand on pénètre dans le centre de convention d’Anaheim, c’est l’esprit bon enfant et l’humour au premier et au second degré dont font preuve les nombreux fans qui arrivent costumés tôt le matin. Leurs tenues sont très soignées et depuis les rachats successifs de Marvel et de Lucasfilm par Disney, ces talentueux cosplayeurs s’amusent parfois à créer des personnages composites très amusants issus de ces différents univers. Nous avons pu voir ainsi arriver de bon matin un Dingo/Qui Gon Jin avec sa tenue de Jedi et son sabre laser, une Fée Clochette réinventée en héroïne Marvel, un capitaine Crochet passé du mauvais côté de la Force, et un couple de la Belle et la Bête fusionné avec la princesse Leia et Chewbacca ! Si certains de ces visiteurs costumés vont participer un peu plus tard au concours de Cosplay pour y montrer leurs réalisations – certaines tenues et accessoires ont demandé plus d’un mois de travail à leurs créateurs – d’autres fans viennent avec ces atours uniquement pour partager leur passion et leur bonne humeur communicative. L’excitation est d’ailleurs palpable, car cette version Disney du Comic-Con de San Diego est devenue un évènement vraiment incontournable pour les fans. Les révélations, les annonces et les extraits qui y sont présentés par les patrons de Mickey, d’Iron-Man, de Luke Skywalker et de Buzz Lightyear sont pour la plupart des exclusivités révélées en avant-première aux visiteurs de D23, qui savent qu’ils vont être traités en V.I.P. et probablement avoir droit à des goodies en éditions ultra-limitées que les petits malins échangeront ensuite à prix d’or sur Ebay ! Il faut aussi saluer le professionnalisme remarquable, le sens du détail et le souci permanent de qualité avec lesquels sont organisés les conférences, expositions, et stands que l’on découvre pendant la convention. La réputation de D23 grandit pour d’excellentes raisons et ce rendez-vous prend de plus en plus d’ampleur tous les deux ans et place à chaque fois la barre un peu plus haut. Ce que nous découvrons en ce mois d’août 2015 surpasse encore ce qui avait été présenté lors de l’édition 2013, à laquelle nous avions aussi assisté. Mais avant d’arpenter ensemble les halls du centre de convention d’Anaheim, n’oublions pas de parler des détails concrets. Pour obtenir un accès valable pendant toute une journée, un visiteur doit débourser 61 dollars. Des forfaits sont également disponibles pour 3 jours d’accès, pour ceux qui veulent voir les principales conférences et explorer sans se presser les immenses halls du centre où sont répartis des dizaines de stands conçus notamment par Walt Disney Animation, Pixar, Marvel, Lucasfilm et Walt Disney Imagineering, ainsi que par des dizaines de sociétés qui collaborent avec Disney ou commercialisent des produits tirés des principales licences du groupe (produits dérivés, jeux vidéo, figurines, accessoires, BDs, etc). Cette année WDI s’est vraiment surpassé pour célébrer le 60ème anniversaire de Disneyland, en organisant une exposition rendant hommage à six décennies de création de certaines des plus belles attractions au monde. En slalomant parmi les vitrines et les décors du parcours, on découvre des documents et accessoires uniques sortis des archives des parcs (le plan original dessiné en un week-end par Herb Ryman selon les instructions de Walt Disney regardant par-dessus son épaule, juste avant un rendez-vous avec des investisseurs !), et notamment des maquettes, des illustrations et des personnages Audio-Animatroniques des premières attractions de Disneyland : Alice sortie de son pays des merveilles, Wendy et les garçons entraînés par Peter Pan dans un monde d’aventures, les pirates des Caraïbes, les ours craquants de COUNTRY BEAR JAMBOREE, le Yeti original de la montagne russe du MATTERHORN, etc. Un véritable régal pour les afficionados des parcs à thème ! Cette exposition était accessible en permanence, mais la file d’attente assez longue en raison de la grande affluence de visiteurs. Pour profiter pleinement de toutes les conférences, présentations, expositions et concerts qui ont lieu pendant ces trois jours, la stratégie idéale consiste à planifier minutieusement son emploi du temps heure par heure plusieurs semaines à l’avance et surtout à réserver via internet des places qui s’envolent très vite pour les principales conférences. Pendant la convention, les fans qui ne veulent rien rater (même si ce n’est pas toujours possible, car certains évènements très intéressants ont parfois lieu en même temps, ce qui oblige à faire des choix !) courent d’un hall à l’autre pour profiter au maximum de tous ces rendez-vous qui permettent de rencontrer des artistes de premier plan et de les entendre s’exprimer sur leurs créations. Ou d’assister à un concert avec un orchestre symphonique doublé d’une conférence du grand journaliste de cinéma Leonard Maltin, à l’occasion de la sortie d’un coffret de CDs compilant les musiques des cartoons de la série des SILLY SYMPHONIES. Et entre deux conférences, les visiteurs retournent découvrir les stands du grand hall. Cette année, en se promenant, on pouvait par exemple :

- Admirer les costumes originaux de STAR WARS EPISODE VII LE REVEIL DE LA FORCE et un certain BB8.

- Se faire scanner la tête en 3D et la faire greffer sur une statuette en résine imprimée en 3D, avec au choix le corps d’Iron Man, d’un Stormtrooper ou d’un Mousesketeer de l’ancienne émission de télé THE MICKEY MOUSE CLUB. (en déboursant quand même 120 dollars pour une figurine personnalisée de 17cm, et 1000 dollars (plus les taxes !) pour une effigie de 38cm. Ouch !)

- Contempler l’impressionnante collection des chemises hawaïennes que John Lasseter a fait fabriquer à l’occasion de la sortie de chacun des films de Pixar, et dont on retrouve les personnages dans les motifs.

- Découvrir en avant-première le pilote de la nouvelle série des MUPPETS, dans laquelle les personnages sont montrés non pas pendant leur show, mais dans la « vie réelle » en coulisses et dans leurs vies privées, entre eux et parmi les humains. La grande trouvaille de ce premier épisode est la rupture entre Kermit et Miss Piggy, car notre grenouille préférée a jeté son dévolu sur une cochonne plus jeune et nettement plus aimable ! La jalousie qui dévore Piggy alors qu’elle prétend se moquer de cette affaire donne lieu à plusieurs scènes absolument hilarantes, bien plus drôles et plus percutantes que ce que l’on a pu voir dans les deux derniers longs métrages des Muppets. Une série à suivre de près, donc, en espérant qu’une chaîne française ait l’idée judicieuse de la programmer.

- Assister à la présentation des nouvelles attractions créées pour Shanghai Disneyland, dont le rollercoaster TRON L’HERITAGE et une toute nouvelle version des PIRATES DES CARAÏBES, intitulée PIRATES OF THE CARIBBEAN: BATTLE FOR THE SUNKEN TREASURE. Elle sera basée non plus sur l’attraction culte de Disneyland, mais sur la saga cinématographique qui a connu un énorme succès en Asie, et particulièrement en Chine. Ce sont donc les personnages de Jack Sparrow, du capitaine Barbossa, de Davy Jones et son équipage de marins maudits que l’on retrouvera dans cette aventure qui « plongera » les visiteurs dans une bataille sur et sous la mer, à la recherche d’un fabuleux trésor.

- Avoir un avant-goût de WORLD OF AVATAR, l’aire dédiée au film de James Cameron qui ouvrira en 2017 dans le parc Animal Kingdom de Walt Disney World. La maquette originale du land était présentée dans ce petit stand, ainsi que quelques accessoires des personnages de Na’vi que l’on pourra y voir. La visite du site sera conçue comme un voyage sur Pandora, afin d’y découvrir ses habitants, sa flore et sa faune. Les décors végétaux reproduiront les effets de bioluminescence à la nuit tombée (c’est à dire vers 18/19h, car elle tombe vite en Floride !) et deux attractions principales fonctionneront dès l’ouverture : une visite en bateau de la jungle de Pandora, où l’on croisera aussi bien des bêtes inoffensives que les principaux prédateurs de ce monde (représentés par des animatroniques), et une découverte de ses paysages « vus du ciel » à dos de Banshee, grâce à des sièges en forme de reptiles géants, et à un écran colossal sur lequel les images préparées par Weta Digital seront projetées à une très haute résolution (4 ou 8K) et à 60 images par seconde, pour renforcer le réalisme de la présentation.



- Jouer en avant-première dans le tout nouveau STAR WARS : BATTLE POD, cabine d’arcade dotée d’un écran hémisphérique pour immerger le joueur-pilote dans les panoramas des plus grandes batailles de la saga.

- Se découvrir affublé de différents maquillages 3D – le lapin en retard, le chapelier fou - dans le miroir magique d’Alice, grâce aux techniques de détection des traits du visage et de réalité augmentée.

Vous l’aurez compris grâce à ces quelques exemples, décrire toutes les animations et l’ensemble du programme de D23 dans cet article est un exercice impossible, tant il est riche : nous poursuivrons donc en vous racontant par le détail nos impressions pendant les trois principales présentations auxquelles nous avons assisté, en commençant par la cérémonie de la remise des DISNEY LEGENDS, le vendredi matin.

La célébration de longues carrières, tous métiers confondus

La particularité de la cérémonie des DISNEY LEGENDS est d’honorer, de rendre hommage et de récompenser avec le même faste, devant une salle de 7500 places, des employés très différents de l’ensemble des sociétés du groupe Disney. Célébrités et employés totalement inconnus du grand public sont traités ainsi de la même manière, qu’il s’agisse du talentueux artiste Carson Van Osten qui a supervisé le département des produits dérivés (et dessiné lui-même de nombreux logos, comme le principal Mickey ornant tous les documents de la compagnie ou celui figurant sur la tour-réservoir symbole des Disney Studios de Floride), de la première ambassadrice de Disneyland choisie par Walt Disney lui-même Julie Reihm Casaletto, de l’actrice du soap opera de la chaîne ABC ALL MY CHILDREN Susan Lucci, de l’animateur Andreas Deja (qui donna vie notamment au méchant Jaffar d’ALADDIN et au redoutable Scar du ROI LION) du génial compositeur Danny Elfman (auquel on doit les bandes originales de L’ETRANGE NOËL DE MR JACK, SPIDER-MAN, BEETLEJUICE, le générique des SIMPSON, etc…) ou d’un certain George Lucas, créateur d’un univers de SF dont vous avez peut-être vaguement entendu parler. Touchants chacun à leur manière, et ravis par ce titre de « légende Disney », ce trophée remis par le PDG de Disney Bob Iger et par l’accueil enthousiaste des fans, les récipiendaires ont pris la parole à tour de rôle pour évoquer les temps forts de leurs carrières. Le virtuose de l’animation Andreas Deja a bouleversé la salle en se rappelant, la voix brisée par l’émotion, les mots d’une jeune femme reconnaissante: « Merci d’avoir dessiné mon enfance ». Il a aussi conseillé à Bob Iger d’envisager enfin la création d’une attraction dédiée au dessin animé LE LIVRE DE LA JUNGLE, qui fut à l’origine de sa vocation pendant son enfance, et qui remporta un succès colossal en 1967 dans son Allemagne natale (rappelons que ce fut le dernier long métrage d’animation supervisé personnellement par Walt Disney, juste avant sa mort en décembre 1966). Deja a ajouté « Si vous construisez une attraction sur LE LIVRE DE LA JUNGLE, les touristes allemands vont affluer en masse pour la voir ! Je vous le garantis ! ». Ce à quoi Iger a répondu ensuite de manière dubitative en disant « Un Rollercoaster Baloo ? un manège Mowgl ?…humm…nous allons y réfléchir, Andreas… »



Danny Elfman, lui, a fait sourire en confiant qu’il était extrêmement rare de le voir éveillé avant le début de l’après-midi – il travaille surtout la nuit – et avoué « à ses collègues vampires de la salle » que le fait même qu’il s’expose à la lumière du jour dès 9h du matin constituait déjà un événement en soi ! Il a expliqué ensuite que sa collaboration avec Disney dépassait le simple cadre du cinéma, puisqu’il avait signé récemment la musique de l’attraction MYSTIC MANOR, l’excellente réinvention façon « cabinet de curiosité » de la célèbre HAUNTED MANSION (le Manoir hanté) réalisée pour Hong Kong Disneyland. Mais c’est George Lucas, que l’on sait discret sur sa vie privée et d’un abord généralement froid et distant, qui a le plus surpris par ses propos particulièrement chaleureux. Après avoir remercié Bob Iger de cet honneur, il a raconté au public qu’il avait assisté avec ses parents à l’inauguration de Disneyland en 1955, et que dès ce tout premier jour, il avait été énormément influencé par les attractions, les séries, les dessins animés et les films en prises de vues réelles de Disney, ajoutant modestement qu’il pensait avoir beaucoup plus reçu de Disney qu’il n’avait pu apporter de par ses collaborations avec le studio au fil des ans. « Je vais d’ailleurs vous confier un secret : Jar Jar Binks m’a été inspiré par Goofy ! Et je sais que cette confidence vous aidera à le regarder d’un autre œil à présent. » a-t-il ajouté en provoquant les rires de la salle, et en défendant une fois encore ce personnage de faire-valoir comique lourdaud des préquelles de STAR WARS dont on peut dire qu’il a fait l’unanimité…contre lui !



Alors que l’on croyait la cérémonie achevée, Bob Iger a annoncé une surprise non inscrite au programme…et c’est ainsi que Johnny Depp est arrivé sur scène, salué par une standing ovation pour devenir lui aussi une « Légende Disney ». Souriant, spontané et sincère comme à son habitude, Depp a déclaré au public :« Je dois dire que je n’aime pas beaucoup le mot fan, car il établit une sorte de hiérarchie que je n’apprécie pas, en plaçant les acteurs au-dessus du public. Je crois qu’en réalité, c’est l’inverse, et que vous les spectateurs, vous êtes mes employeurs et mes patrons. Je me considère comme votre employé très reconnaissant, et je vous remercie de me permettre de mener une belle carrière et une très belle vie. » Une jolie déclaration dont beaucoup de stars pourraient s’inspirer, tel Bruce Willis, de plus en plus distant et désagréable avec les fans et les journalistes au fur et à mesure que les années passent et qu’il se compromet dans des films de moins en moins intéressants.



La suite de cette visite de D23 paraîtra bientôt sur ESI !

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