LES DERNIERS JEDI : Entretien exclusif avec Kelly Marie Tran (Rose Tico) – 2ème partie
Article Cinéma du Lundi 19 Mars 2018
Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau
La passion de certains fans de STAR WARS n’est-elle pas un peu débordante, parfois ?
L’expérience que j’en ai eue pour l’instant n’a été que positive. J’ai rencontré des gens enthousiastes, mais toujours polis, gentils et respectueux. Et je les comprends d’autant mieux que je suis moi aussi une fan : j’adore tout ce qui concerne la saga HARRY POTTER, et mes frères et sœurs également. Même si cela peut parfois être assez impressionnant, tout ce que l’on reçoit des fans que l’on rencontre, c’est de la bienveillance et de l’affection.
Dans les films de la saga, il y a beaucoup de trucages et de décors dans lesquels on combine des éléments réels et des fonds verts. Comme il s’agit de la première superproduction « à effets spéciaux » dans laquelle vous jouez, quel a été le moment où vous avez dû avancer presque sans repères de ce qui allait être ajouté ensuite, en vous fiant seulement aux indications du réalisateur ?
Oh, il y a eu beaucoup de moments de ce genre pendant le tournage ! J’ai trouvé cela très intéressant parce que d’un côté, le travail accompli par les équipes des décors, des costumes et des créatures est extraordinairement crédible et vous immerge dans une autre réalité, et de l’autre, vous vous retrouvez parfois devant un simple fond vert et vous devez alors faire appel à votre imagination pour visualiser ce qui devrait vous entourer ! En tant qu’actrice, je trouve que les deux aspects de cet exercice sont passionnants, parce que quand je suis entourée par ces environnements fantastiques issus de l’imagination de ces artistes, je peux m’appuyer sur leurs créations pour être transportée dans ce monde pendant que je joue, tandis qu’un tournage sur fond vert est plus proche de ce que l’on fait au théâtre, en imaginant tout un monde alors que sur les planches, il n’y a qu’un ou deux meubles et quelques accessoires.
Y a-t-il eu malgré tout des moments où vous vous êtes sentie perdue, et où l’équipe technique a dû vous dire « là, on ajoutera un environnement de vaisseau spatial derrière toi » pour vous aider un peu ?
Oui, mais on nous a fait confiance pour nous laisser nous adapter à ces situations. Et je crois que cela en dit long sur la bienveillance de Rian Johnson envers ses acteurs : il savait que j’étais une novice dans ce domaine des trucages et que je n’avais pas l’expérience de tourner ainsi, mais cela ne l’a pas empêché de me choisir, et de m’encourager à jouer comme je le sentais sur le plateau. Mes propositions étaient bien accueillies, et tout cela créait une émulation très agréable. C’était une ambiance de tournage vraiment enthousiasmante et positive.
Pourriez-vous nous décrire comment les décors réels, les personnages d’extraterrestres et les droides présents sur le plateau vous aidaient à jouer votre rôle ?
Dans le film, j’interagis avec plusieurs créatures. Quand on arrive sur le plateau pour jouer la scène avec de tels personnages, au début, on n’imagine pas forcément que les équipes qui les ont créés ont passé près de deux ans et demi à les concevoir et à les fabriquer pour arriver au résultat qui va être filmé ce jour-là. Je me souviens que quand je les voyais répéter les animations de la créature avant les prises, j’étais stupéfaite par le réalisme de ses mouvements, et par la qualité du rendu de son aspect. Même vue de très près à l’œil nu, elle paraissait vivante ! C’est quand même incroyable de se retrouver en face d’un personnage animatronique et d’être profondément émue par ce qu’il dégage, tant il est crédible ! Je dois même avouer avoir pensé que cette créature m’avait certainement volé la scène tant elle jouait bien ! C’est hallucinant de voir le degré d’expertise et de talent qui est investi dans ces personnages.
Vous avez eu droit à votre propre figurine. C’est l’un des signes que l’on fait partie des personnages principaux d’un film de la saga !
Hé oui ! (rires) Quand on me l’a annoncé, je me suis dit que ce serait sans doute bizarre de me voir ainsi, mais amusant aussi. Et c’est bien le cas !
Quelle impression avez-vous eue en rencontrant Chewbacca ?
Joonas Suotamo , l’acteur de grande taille qui le joue et qui a pris la succession de Peter Mayhew est adorable, drôle et très enthousiaste. Dès qu’on le rencontre, il est tellement sympathique qu’on a envie de le prendre dans ses bras et de lui faire la bise ! Comme je suis plutôt petite, je craignais d’être un peu impressionné par ce géant, mais nous sommes vite devenus les meilleurs amis du monde. Et franchement, tous les acteurs du casting ont été très agréables avec moi.
Avez-vous été impressionnée par les décors de la base rebelle dans lesquels vous avez joué ?
Oui, beaucoup. La plupart de ces décors ont été inspirés par les environnements des bases de la résistance que l’on avait vus dans les films précédents de la saga, ce qui signifie que les équipes de décoration ont dû les reconstituer minutieusement. Avant le tournage, je prenais beaucoup de plaisir à venir les observer sans les déranger pendant qu’elles préparaient ces décors. Et il y avait aussi des vaisseaux fabriqués grandeur natures qui étaient très impressionnants à voir. Le décor du casino de Canto Bight était incroyable aussi, gigantesque, et rempli par des centaines d’aliens !
Justement, avez-vous eu parfois un peu de mal à vous dégager du côté ludique qu’il y a à se retrouver sur le plateau d’un film de STAR WARS ? Avez-vous du parfois vous ressaisir pour rester bien concentrée sur votre prestation d’actrice ?
Je suis certaine qu’il a dû m’arriver de dévisager un peu trop longtemps certains acteurs lorsque je les voyais arriver pour la première fois sur le plateau ! (rires) Comme je vous le disais, même quand je ne travaillais pas à ce moment-là, je venais assister au tournage tous les jours. Je voulais tout voir, comme une gamine qui a le nez collé sur la vitrine d’une confiserie ! Pendant que je scrutais ce que faisaient les équipes techniques, il fallait parfois que je m’astreigne à dominer mon enthousiasme et ma curiosité. Faisant moi aussi partie du film, je devais garder mon sang-froid et je ne pouvais pas me comporter comme une fan survoltée ! Mais le tournage m’attirait comme un aimant. C’était difficile de rester impassible quand Luke Skywalker arrivait sur le plateau. Même si je veillais à ne pas déranger Mark Hamill, vivre des moments comme ceux-là fait un peu vaciller votre perception de la réalité !
Vous nous avez expliqué à quel point vous étiez tenue au secret à propos de votre rôle, mais quelles étaient les mesures de sécurité concrète qui étaient mises en place, par exemple quand vous deviez vous rendre sur le plateau ?
Eh bien la production avait prévu des voitures avec des vitres teintées qui nous attendaient pour nous transporter d’un plateau à l’autre. Et dès que nous avions fini de jouer une scène, nous devions porter une grande tunique noire avec une capuche par-dessus notre costume, afin que personne ne puisse deviner quels personnages nous jouions, ni tenter de prendre une photographie en douce pour la revendre aux journaux. Les mesures de sécurité étaient tellement strictes que j’ai été très agréablement surprise que l’on me laisse aller d’un département à l’autre pour voir ce que les gens étaient en train de préparer. En revanche, certains jours l’ambiance était beaucoup plus stricte : il y avait très peu de gens admis sur le tournage, pour préserver le secret autour de ces scènes-clés.
Avez-vous dû signer beaucoup de documents expliquant toutes ces règles de confidentialité ?
Oh oui, une pile au moins haute comme cela ! (Kelly Marie Tran place sa main droite à une vingtaine de centimètres au-dessus de la surface de la table qui se trouve entre nous) . On y spécifiait par exemple que je n’avais pas le droit de mettre un pied en dehors du plateau sans porter la tunique noire avec la capuche rabattue par-dessus mon costume. Cela peut paraître délirant, mais il se trouve que des gens avaient utilisé des drones pour filmer et photographier les décors extérieurs du Réveil de la Force. Et depuis cela, les mesures de sécurité ont été renforcées.
Avez-vous suivi un entraînement pour vous préparer à réaliser certaines cascades vous-même ?
Oui, et cela a été pareil pour quasiment tous les acteurs du film. Je peux vous dire que c’était dur, vraiment très éprouvant. Surtout quand votre notion de l’hygiène de vie consiste à manger régulièrement des pizzas ! (rires) A partir de décembre 2015, nous avons fait de la course à pied, de la gymnastique « cardio », de la danse… Et nous avons soulevé des haltères. J’avais presque l’impression de me retrouver dans un camp d’entraînement de l’armée ! Nous avons continué à pratiquer ces exercices physiques pendant toute la durée du tournage.
Parlez-nous de votre collaboration avec Daisy Ridley…
Daisy est une camarade de travail très agréable. Je ne peux pas vous parler des scènes que nous avons tournées ensemble, mais elle m’a beaucoup aidée en m’expliquant son expérience du tournage du film précédent. Jouer dans un film de STAR WARS est une situation que fort peu de gens ont eu l’occasion de vivre. J’étais extrêmement contente de pouvoir en parler avec Daisy et avec John Boyega, qui sont tous les deux très ouverts et très généreux. Et cela m’a beaucoup aidée.