STAR WARS : L’ASCENSION DE SKYWALKER : Entretien exclusif avec Billy Dee Williams (Lando Calrissian), Anthony Daniels (C-3PO), et Joonas Suotamo (Chewbacca)
Article Cinéma du Vendredi 31 Janvier 2020
Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau
Billy, qu’avez-vous ressenti en incarnant à nouveau Lando Carlrissian dans L’ASCENSION DE SKYWALKER, 39 ans après son apparition dans L’EMPIRE CONTRE-ATTAQUE ? Dans le film, il a acquis une sagesse qu’on ne lui connaissait pas…
Billy Dee Williams : J’ai été très heureux que J.J. Abrams, pour lequel j’ai la plus haute estime, fasse appel à moi et me demande de jouer dans ce film. Vous savez, Lando est un personnage que j’aime et qui ne m’a jamais quitté. L’incarner dans sa maturité et explorer des facettes plus profondes de sa personnalité m’a beaucoup plu. Presque tous les jours, des gens viennent me voir pour me parler de Lando avec enthousiasme, car il a marqué leur enfance. C’est formidable pour un comédien de mon âge de jouir d’une carrière aussi longue, et d’apparaître dans un film de cette ampleur. Et me retrouver aux manettes dans le cockpit du Faucon Millenium, c’était un pur plaisir, un peu comme s’amuser dans un magasin de jouets tout illuminé ! (rires)
Anthony, vous êtes le seul acteur qui a joué dans les neuf épisodes de la saga des Skywalker. Que ressentez-vous en songeant que C-3PO est le « fil d’or » qui relie tous ces épisodes, et comment décririez-vous votre expérience personnelle de STAR WARS ?
Anthony Daniels : Je me sens tout simplement fier d’en faire partie. Tout cela ne vient pas de moi, bien sûr, puisque c’est George Lucas qui a eu l’idée que ce personnage agisse comme un homme ordinaire, comme chacun d’entre nous. Je crois que l’une des raisons pour lesquelles les gens aiment C-3PO, même s’il est parfois un peu agaçant, voir irritant…
Joonas Suotamo : …même s’il est SOUVENT agaçant ! (rires)
Anthony Daniels : Oh, tais-toi ! (rires) Joonas joue mon ami Chewbacca. C-3PO et Chewie s’entendent très bien tous les deux, n’est-ce pas ?
Joonas Suotamo : Absolument ! Enfin, surtout dans les derniers films ! (rires)
Anthony Daniels : La raison pour laquelle le public s’identifie à C-3PO, à mon sens, vient du fait que nous souffrons tous de ne pas disposer d’assez de pouvoir pour agir comme bon nous semble, sans être contraints d’obéir à un roi, un gouvernement, un dictateur, à ce que les banques nous imposent, à ce que les grandes industries décident, etc. Nous sommes tous des gens ordinaires, et C-3PO est constamment entraîné dans des situations qu’il ne peut ni contrôler, ni résoudre. Nous pouvons donc comprendre ce qui lui arrive et éprouver de l’empathie à son égard. Je considère que j’ai eu beaucoup de chance de l’incarner, même si, comme vous le savez sans doute, je ne voulais pas accepter ce rôle au début. Et pourtant, 43 ans plus tard, je suis toujours là ! Évidemment, la magie du personnage est qu’il ne vieillit pas. Quand on regarde son visage doré, cela n’a rien à voir avec celui-ci (A.Daniels pointe son visage du doigt). Ces traits-là ont vieilli.
Joonas, quels sont les enjeux de L’Ascension de Skywalker que vous avez préférés ?
Joonas Suotamo : Même si la résistance a été en partie décimée à la fin de l’épisode précédent, les combattants qui restent se regroupent et se soutiennent mutuellement. Nous essayons de combattre les forces du Premier Ordre, qui ont pris une ampleur encore jamais vue auparavant. Les perspectives sont si décourageantes pour nos héros que j’ai tout de suite trouvé cette histoire passionnante. C’est une aventure sensationnelle.
Anthony, vous avez vu plusieurs générations de spectateurs réagir aux différents épisodes de la saga, depuis le développement du phénomène culturel et du succès incroyable et inattendu qui a accompagné la sortie du film original jusqu’aux volets les plus récents. Comment trouvez-vous que le public a évolué au fil des décennies, et comment pensez-vous que les jeunes générations considèrent STAR WARS ?
Anthony Daniels : C’est intéressant de se rappeler que quand l’Episode 4 est sorti en 1977, il n’a pas été distribué commercialement en cassettes VHS ou Betamax quelques mois plus tard. La seule manière de revoir le film consistait à retourner dans un cinéma et à acheter à nouveau un ticket. A l’époque, les films sortaient, et puis disparaissaient vite de l’affiche, sauf s’ils devenaient de grands succès. Aujourd’hui, avec tous les modes de diffusion des films dont nous disposons, nous pouvons nous les procurer rapidement, les revoir autant de fois que nous le souhaitons, et les accélérer : pour ma part, c’est ce que je fais pendant les scènes où je n’apparais pas. (rires) Tout cela a permis aux fans de disséquer, de critiquer les films jusque dans leurs moindres détails, et aussi d’avoir encore plus le sentiment qu’ils leur appartiennent. C’est un public beaucoup plus informé qu’avant, mais il est aussi beaucoup plus vaste. Il s’est développé de manière exponentielle depuis le premier film, qui avait d’abord généré des niches de fans ça et là. Personne n’avait entendu parler de STAR WARS avant le jour de sa sortie. C’est devenu un phénomène quand des gens sont allés chercher leurs amis pour leur parler du film qu’ils venaient tout juste de découvrir, et qu’ils les ont littéralement amenés avec eux dans les salles pour le revoir rapidement en leur compagnie. Aujourd’hui, les opinions critiques sont beaucoup plus répandues, et tout le monde à son mot à dire sur internet à propos d’un film, qu’il s’agisse d’une personne qualifiée pour le faire ou non. Mais on pourrait arguer que n’importe quel fan est qualifié et a le droit de faire connaître son opinion. Cela suscite des conversations très intéressantes entre amateurs de STAR WARS, et en ce qui concerne L’ASCENSION DE SKYWALKER, j’espère que tous les spectateurs trouveront des choses qu’ils aimeront beaucoup dans le film, et peut-être des choses qui leur plairont moins, car c’est intéressant à entendre non seulement pour la famille que nous formons, nous qui avons participé au film, mais aussi pour la grande famille constituée par tous les fans de STAR WARS.
Joonas, en arrivant, vous avez poussé un cri typique de Chewbacca. Mais faites-vous de même pendant le tournage ?
Joonas Suotamo : Oui, je fais cela parfois pour interagir avec mes partenaires, en me disant que ma performance sera si brillante que l’on sera obligé de l’utiliser telle quelle dans le film ! (rires) La « bibliothèque de sons » originale qui sert à réaliser les cris de Chewie dans les films est principalement constituée de grognements d’ours, parfois plaintifs, comme si on l’avait attaché pendant longtemps à un piquet ! (rires) De mon côté, quand je joue, je peux moduler mes « réponses » à ce que disent mes partenaires d’une manière bien plus variée que ne le peuvent des ours, enfin je l’espère ! (rires)
Billy Dee Williams : C’est un excellent exercice vocal.
Joonas Suotamo : Oui, cela « ouvre » vos cordes vocales. La difficulté de jouer Chewbacca consiste aussi à s’assurer qu’il ne dépasse pas du cadre, vu sa différence de taille avec tous les autres personnages. Je me rappelle avoir souvent agacé J.J. pendant le tournage, parce qu’entre chaque prise, je me ruais sur le moniteur pour voir la relecture du plan qui venait d’être filmé, afin de vérifier comment je me plaçais dans le cadre ! Quand Carrie Fisher disait dans l’Épisode 4 ‘Pouvez-vous éloigner ce tapis ambulant de mon visage ?’, cela exprime bien le fait que dans STAR WARS, Chewbacca est un peu comme une excellente pièce de mobilier, essentielle dans le décor d’une pièce : il faut qu’il soit là ! On a pu se rendre compte de cela dans SOLO : quand un nouveau personnage apparaissait dans une scène, dès qu’on le voyait à côté de Chewie, c’était comme s’il était intégré à partir de ce moment-là dans l’univers de STAR WARS. Cela me donne la lourde responsabilité de jouer Chewbacca de la manière la plus fidèle que je le peux. Mais selon les scènes qui sont imaginées dans ces films, Chewbacca a aussi à faire des choses nouvelles, parfois. En tous cas, c’est un honneur d’avoir succédé à Peter Mayhew dans ce rôle. Il nous a quitté récemment, hélas. Mais j’ai eu la chance immense de jouer Chewie aux côtés des héros de mon enfance, Billy et Anthony, et faire partie de cette saga tant aimée.
Billy Dee Williams : Chewbacca est un personnage très réconfortant.
Joonas Suotamo : Oui, il sait bien serrer les gens dans ses bras pour leur remonter le moral !
Et c’est aussi un excellent co-pilote…
Joonas Suotamo : Exactement !