STAR WARS : L’ASCENSION DE SKYWALKER : Entretien exclusif avec Daisy Ridley (Rey) – 2ème partie
Article Cinéma du Samedi 25 Janvier 2020
Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau
Quels ont été les défis les plus difficiles à relever pour vous, pendant le tournage de ce dernier épisode ?
Il a fallu que je garde mon énergie jusqu’au bout, car le tournage a été très long et très physique. Je n’ai pas demandé à prendre une seule journée de pause ou d’arrêt maladie pendant ces sept mois, ce dont je suis très fière. D’autant que j’ai tourné pratiquement tous les jours. Et que je me suis entraînée aussi quotidiennement, en plus de ce que je faisais quand nous filmions. J’étais vraiment en forme. Je dirais que les plus grands défis étaient d’ordre physique : il y avait beaucoup de choses à faire, mais je bénéficiais de l’aide de notre formidable équipe des cascades. Émotionnellement aussi, il fallait que j’exprime des sentiments très variés dans mon interprétation. Heureusement, J.J. est le meilleur guide que je pouvais espérer pour m’aider à y parvenir. Tout cela a été positif : c’étaient de bons défis, des épreuves intéressantes et amusantes. Cela m’a donné aussi l’opportunité d’explorer de nouvelles facettes de la personnalité de Rey, ce qui m’inquiétait un peu au début, parce que c’était nouveau, mais j’avais confiance en J.J. car je savais qu’il avait la vision de l’ensemble du récit en tête, et qu’il saurait me guider vers le bon chemin.
Selon vous, quel est le pire défaut de Rey, quelles sont ses limites ?
Vous savez je ne crois pas à cela, à l’idée que les gens aient des limites qu’ils ne pourront jamais dépasser. Je suis persuadée que tout le monde possède des qualités potentielles qui peuvent se révéler, et leur permettre d’être aussi bons ou performants que les autres. Je préfère me concentrer sur les aspects positifs. Franchement, je trouve que Rey est une fille sensationnelle, j’aime beaucoup ce personnage. Je crois aussi que toutes les choses qui l’effraient et qui peuvent la rendre vulnérable ne la découragent jamais d’avancer quand elle affronte de grandes épreuves. Elle fait toujours face.
En devenant l’héroïne de cette nouvelle trilogie, Rey a eu un impact significatif sur le public féminin qui ne s’intéressait que minoritairement à la saga STAR WARS auparavant. Aujourd’hui, il y a beaucoup plus de petites filles, d’adolescentes et de femmes qui sont fans de STAR WARS. Que pensez-vous de cela, et de l’impact que votre personnage a eu depuis l’épisode 7 ?
Je trouve que c’est sensationnel. Honnêtement, je me souviens très bien que quand j’ai lu le script du REVEIL DE LA FORCE, j’ai pensé que le personnage de Rey était génial, et j’ai eu hâte de commencer à l’interpréter. Ensuite, quand le film est sorti et que j’ai découvert comment cette nouvelle héroïne était accueillie par le public, j’ai été surprise de constater – même si cela peut paraître curieux - qu’elle avait une grande importance à ses yeux, et que beaucoup de gens était touchés à titre personnel par ce que Rey vivait pendant cette première aventure. Ce n’était pas comme s’il s’était agi d’un personnage déjà formaté. Cette création toute nouvelle a touché une corde sensible, et a eu un impact si merveilleux que des gens ont voulu partager l’expérience du film avec leurs amis et leurs proches. Par le passé, cela ne pouvait pas se produire, car les femmes étaient rarement les héroïnes de ce type de films. Il y avait un manque de représentation flagrant, et je pense qu’avoir ouvert les portes de cet univers a permis à de nombreux spectateurs de partager les sentiments de cette jeune fille en se mettant à sa place, qu’il s’agisse d’hommes ou de femmes. Et c’est très important de s’identifier à quelqu’un qui est différent de vous grâce à une fiction. Cela vous ouvre de nouveaux horizons. J.J. a fait concrètement ce dont beaucoup de gens parlent en évoquant la diversité et en disant qu’il faudrait changer les choses : en composant le casting du REVEIL DE LA FORCE, il m’a engagée moi, puis John Boyega, et Oscar Isaac. Dans le volet suivant, c’est Kelly Marie Tran qui est arrivée, et dans cet épisode, c’est Naomi Ackie. Il a ouvert les portes à tant de gens que c’en est très émouvant…
On sent une vraie alchimie entre vous et Adam Driver quand on vous voit jouer ensemble à l’écran. Pouvez-vous nous en parler ?
J’ai toujours beaucoup aimé jouer avec Adam. C’est un acteur phénoménal. Il est totalement concentré sur son rôle pendant qu’il incarne Kylo Ren, mais cependant ce n’est pas difficile de tourner une scène avec lui. Je ne l’ai pas vécu moi-même, mais on m’a parlé de certains comédiens qui ne se soucient absolument pas de leurs partenaires quand la caméra n’est plus braquée sur eux. Ils cessent de travailler, vont se reposer dans leur loge et laissent les autres se débrouiller tout seuls, au lieu de rester à côté, hors cadre, pour leur donner la réplique pendant qu’ils jouent les plans en contre-champs. C’est un comportement très irrespectueux. Avec Adam, c’est tout le contraire : il est extrêmement disponible et attentif aux besoins de ses partenaires. Je me souviens notamment du tournage de la scène de notre confrontation dans l’épisode 7. Je me demandais avec une certaine angoisse comment j’allais réussir à faire monter en moi ce désir de me battre de toutes mes forces contre lui, à chaque nouvelle prise. Mais il m’a tellement donné ce dont j’avais besoin, notamment grâce à son regard et à l’intensité de sa présence, que cela m’a énormément aidée. Je ne suis pas sûre que d’autres comédiens m’auraient consacré autant de temps, et auraient été si patients avec moi. Travailler avec Adam a toujours été un plaisir. Particulièrement quand nous tournions nos scènes de combats avec les sabres laser. Ce sont des affrontements rapides, spectaculaires, qui sont réglés au centimètre près. Pendant les répétitions des mouvements, Adam me demandait souvent ‘Ça va ? La distance entre toi et moi est bonne ?’ Il veillait à respecter scrupuleusement l’espace de sécurité entre nous, afin que tout se passe bien. Et c’était très rassurant.
On imagine que vous avez dû travailler encore plus dur pour tourner votre combat sur les ruines de l’Étoile de la Mort, au-dessus de l’océan déchaîné, dans L’ASCENSION DE SKYWALKER…
Oui, et je peux vous dire qu’il est vraiment, vraiment impressionnant…(rires)
Est-ce la scène d’action qui a été la plus difficile à tourner ?
Sans aucun doute. D’abord à cause des conditions de tournage en Angleterre, au mois de novembre, car il faisait très froid. Nous étions entourés par d’énormes canons à eau qui nous arrosaient assez brutalement, Adam et moi. Bien sûr, dans la scène finale, les fonds bleus ont été effacés et remplacés par des effets visuels, mais nous étions totalement trempés, dégoulinants d’eau pendant chaque prise. Kathy s’était absentée, je crois, car quand elle est revenue et qu’elle m’a vue trembler de froid et souffler dans mes mains pour tenter de me réchauffer avant de me remettre en place, elle a été sidérée. C’était très dur à jouer, mais sensationnel aussi, parce que Adam et moi pouvions voir que toutes les personnes de l’équipe présentes sur le plateau étaient très impressionnées par le tournage de cette scène, et par les images brutes diffusées sur les moniteurs, sans les trucages. Là encore, je me suis dit ‘OK, si ça fonctionne déjà aussi bien que cela, c’est bon signe : la réaction des spectateurs sera encore plus forte.’
Aviez-vous du mal à exécuter les mouvements que vous aviez répétés, en étant frappée constamment par ces masses d’eau ?
Oh oui ! Et comme leurs impacts étaient assez fort, ils ont parfois décalé mes gestes. J’ai frappé Adam deux fois par accident, si je me souviens bien. Et pour les mêmes raisons, il m’a frappé les doigts pendant une prise. J’ai réussi à finir la scène sans brocher, mais dès que l’on a crié ‘Coupez !’, j’ai demandé une petite pause, parce que cela me faisait un mal de chien ! J’ai cru que les os de mes doigts étaient cassés, mais heureusement, ce n’était pas le cas. Les lames des sabres sont faites en plastique rigide translucide, qui laisse passer la lumière des LEDs qui se trouvent à l’intérieur. Mais comme il est légèrement flexible aussi, il ne faut pas frapper trop fort avec le milieu de la lame, sinon elle se met à se tordre et à osciller. Il faut donc garder constamment le contrôle de ses gestes et amortir le contact des lames même pendant un combat très rapide, pour éliminer cet effet indésirable d’oscillation.
Ce doit être compliqué à apprendre…
Effectivement, ce n’est pas évident à maîtriser. Il faut s’entraîner très longtemps pour y arriver.
Quel a été le moment le plus surprenant de votre expérience de STAR WARS ?
Probablement la révélation du plan de Rey avec la cagoule noire et le sabre laser rouge à double lame.
Vraiment ?!
Oui, je savais évidemment que cette scène existait, mais je n’étais pas au courant qu’on allait la révéler à la fin de la bande-annonce, pendant la convention D23. Au début, en voyant les images de Luke et de Han tout jeunes dans les images de la trilogie originale, je me suis attendrie et j’ai pensé ‘Oh comme c’est sympa d’avoir mis ces images dans le film-annonce !’ mais quand j’ai découvert le plan de Rey avec le sabre laser rouge, j’ai poussé un cri de surprise ! (rires) Ça a vraiment été un grand choc, comme une secousse qui s’est propagée dans toute la salle.
Même si vous ne pouvez pas parler de la fin du film, pouvez-vous nous dire ce que vous avez ressenti en la découvrant, pendant la lecture du script ? Avez-vous été surprise ? Satisfaite ?
J’ai été très émue. Comme je le disais, cela fait deux fois que je travaille avec toute cette équipe technique et artistique, et sur un plateau, même si tout le monde avance dans le même sens et se met au service de l’histoire à raconter et des émotions à exprimer, chacun est très occupé par son travail et se focalise sur ce qu’il ou elle a à faire. Les gens ne sont jamais émus aux larmes pendant le tournage d’une séquence parce qu’ils s’appliquent pour faire la meilleure prestation possible. Cependant, quand nous avons filmé une scène qui m’avait énormément émue à la lecture du scénario, les choses ne se sont pas passées comme d’habitude. Nous l’avons tournée en Jordanie, pendant notre dernière journée sur place, en fin d’après-midi, et il fallait faire vite, parce que nous allions perdre la lumière solaire dont nous avions besoin. Ce n’était qu’une petite scène, mais elle a été si touchante que les gens de l’équipe ont été bouleversés. Je ne les avais jamais vus réagir ainsi. Cela nous a rappelé que tous ces gens aiment sincèrement STAR WARS. Quand j’ai vu cela, je me suis dit ‘Bon sang, si les gens réagissent déjà de cette manière sur le plateau, alors que la scène n’est même pas montée, qu’est-ce que cela va donner quand les spectateurs la verront sur le grand écran, avec la musique de John Williams !’ (rires) J’ai été vraiment émue par ce moment, par ce que nous avons fait.
Un nouvel espoir : ce dossier contre-attaquera bientôt sur ESI !