Notre visite du tournage de FREE GUY – 3ème partie
Article Cinéma du Lundi 30 Aout 2021
Shawn Levy et Ryan Reynolds parodient l’univers des jeux vidéo et la banalité du quotidien dans une aventure de science-fiction drôle et touchante.
Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau
Entretien avec Shawn Levy, réalisateur, producteur, co-scénariste & Ryan Reynolds (Guy) producteur, co-scénariste.
Shawn, que pouvez-vous nous dire à propos de la séquence que nous vous avons vu tourner avec Ryan Reynolds ?
Shawn Levy : Dans ce plan, Guy ne remarque pas les violences qui se déchaînent autour de lui, parce qu’il est absorbé par ses pensées. Il devient peu à peu conscient du côté étrange du monde dans lequel il vit. Et nous tournons cette scène de manière à refléter cela, car les cascades avec la voiture de sports, la fusillade et les effets spéciaux qui devraient occuper tout l’écran dans une scène action normale sont montrées à l’arrière-plan, avec un léger flou. Inversement, plus notre héros réalise qui il est vraiment, plus il voit clairement les éléments qui l’entourent : ils deviennent de plus en plus nets. Voilà l’idée visuelle que nous utilisons ici.
C’est inhabituel pour Ryan de ne pas être celui qui conduit la voiture de sport, une arme à la main…
Shawn Levy : Absolument ! Ryan était génial et hilarant dans les deux DEADPOOL, mais son personnage de FREE GUY est totalement différent. Guy est un parfait innocent dans un monde cynique. Ryan est connu pour son humour dévastateur et souvent ironique, mais ici, il est comme Tom Hanks dans BIG, ou Will Ferrell dans ELFE, d’une certaine manière. Il incarne un garçon optimiste et toujours bienveillant qui vit dans un univers blasé ultra violent. A partir du moment où Guy découvre sa vraie identité, il décide de venir au secours de Free City en utilisant ses valeurs positives, en faisant le bien sans recourir à des actes destructeurs ou criminels. Il évolue peu à peu et dans le troisième acte du film, il se rapproche d’un héros d’action, mais toujours en agissant avec son cœur.
À en juger par le maquillage, le costume de cuir hérissé de pointes et l’arme énorme de l’un des cascadeurs qui vient de passer à côté de nous, vous vous êtes bien amusé en parodiant le look de certains personnages de jeux vidéo d’action…
Shawn Levy : Oui ! Et le plus drôle, c’est qu’en arrivant ce matin, ce cascadeur pensait qu’il allait seulement conduire une voiture, sans avoir à porter un maquillage ni une tenue aussi délirante ! Par la suite, je me suis rendu compte que j’allais avoir besoin d’un figurant supplémentaire pour représenter un des avatars des joueurs du monde réel qui s’amusent dans Free City. J’ai vite demandé à mes équipes de maquillage et aux départements des costumes et des accessoires d’improviser quelque chose pour lui, et ils se sont débrouilles pour réaliser tout cela en un temps record. C’est un film très amusant à faire, car visuellement, nous n’avons aucune règle à respecter pour rester relativement crédible. Les explosions peuvent être beaucoup plus grandes, les maquillages plus délirants, les accessoires absurdes, etc. Tout ce que l’on voit dans Free City est conçu pour servir d’exutoire aux joueurs, pour satisfaire tous leurs désirs. Nous prenons beaucoup de plaisir à imaginer ces designs.
Comment décririez-vous à nos lecteurs ce qui va différencier FREE GUY des autres films dont l’action se déroule dans un jeu vidéo ?
Shawn Levy : Je crois qu’il va se différencier de plusieurs manières. Contrairement à READY PLAYER ONE, dans lequel l’univers du jeu est décrit en images de synthèse stylisées, celui de FREE GUY est conçu en prises de vues réelles, avec de vrais décors ou des rajouts numériques photoréalistes. Nous ne tentons pas d’imiter l’aspect de la réalité virtuelle vue grâce à un casque, et nous n’utilisons aucun personnage animé en 3D : tout va avoir un aspect réel. Quand les héros du film se lancent dans des actions typiques de ce que l’on fait dans les jeux vidéo, ces scènes ont l’aspect de la réalité, sans chercher à leur donner un aspect artificiel ni caricatural. Du côté de l’histoire, il ne s’agit pas de l’adaptation d’un jeu vidéo connu, ce qui nous laisse beaucoup plus de liberté pour faire ce que nous voulons. Comme le film ne subit pas la contrainte de devoir imiter les situations ou les épreuves que l’on a affrontées en jouant à des jeux précis, nous tentons de créer le sentiment de vivre une expérience inédite dans un jeu vidéo auquel personne n’a jamais joué. Cela nous apporte énormément de liberté créative.
Ryan, vous avez travaillé sur le script du film. Pouvez-vous nous parler de votre implication sur cet aspect du projet ?
Ryan Reynolds : Avec plaisir. Shawn, Zack Penn et moi-même avons collaboré sur l’écriture du scénario pendant environ six mois. C’est vraiment un travail d’équipe qui ressemble au processus que nous avions utilisé sur DEADPOOL. Chacun s’empare d’une partie différente de l’histoire et travaille dessus, puis il passe sa copie aux deux autres pour leur permettre de réagir, de suggérer de nouvelles idées et des améliorations. Je trouve que c’est une excellente manière de procéder, car elle permet à vos partenaires de découvrir ce que vous avez fait avec un œil neuf, et donc de repérer plus vite ce qui ne va pas. J’aurais été bien embêté si je m’étais retrouvé tout seul face à une page sur laquelle j’aurais inscrit ‘Acte 1, scène 1’ ! Je ne crois pas que je serais allé très loin comme cela ! On est plus forts à plusieurs, et les idées des autres vous stimulent. Une grande partie de notre effort commun a consisté à tout faire pour créer des moments de l’histoire qui soient vraiment originaux et pour imaginer des personnages capables de surprendre et de divertir le public. En tant que fan de cinéma, je crois qu’il n’y a rien de plus agréable que de découvrir la première bande-annonce d’un film dont on ignore tout, et d’être si agréablement surpris que l’on a hâte qu’il sorte, pour aller le voir en salles.
Shawn Levy : Je vais me permettre d’ajouter quelque chose, car Ryan est un peu trop modeste. Le script original du film a été écrit par un jeune scénariste qui s’appelle Matt Lieberman. Il était déjà très créatif, et porté par cette idée forte du personnage principal qui ignore qu’il n’est qu’un figurant, une silhouette de second plan d’un jeu vidéo, puis qui en prend conscience, et devient un vrai héros. Mais Ryan, en tant que co-scénariste, et Zak et moi en tant que producteurs, avons essayé de développer des thèmes qui soulignaient les aspirations profondes des personnages principaux. Si nous jouons à des jeux vidéo, c’est parce que cela nous permet d’entreprendre virtuellement des aventures qui sont inaccessibles dans nos vraies vies. Tout est plus grand, plus exaltant que dans la réalité. Nous voulions donc que les sentiments de ces personnages soient plus forts. Il y a aussi une relation romantique qui se développe entre les personnages que jouent Ryan et Jodie Comer. Et tout cela est porté par le plaisir que l’on éprouve à voir les réactions d’un héros pur et innocent confronté à des situations extrêmes.
Vous n’avez pas prénommé Guy par hasard : cela signifie « Gars » ou « type » en anglais. C’est donc l’appellation la plus générique que l’on puisse donner à un personnage masculin…
Shawn Levy : Exactement. Son nom souligne qu’il est l’une des silhouettes anonymes qui peuplent les rues de Free City, et servent d’arrière-plan aux actions des joueurs. Et c’est ce qui le rend d’autant plus touchant et intéressant quand il commence à imaginer ce que pourrait être sa vie s’il la contrôlait, au lieu de subir les événements qui se déroulent sans pouvoir y faire quoi que ce soit. Je crois que ce thème, cette aspiration, peut trouver une résonnance en chacun de nous, de multiples manières.
Same player shoot again : vous avez gagné le droit de lire bientôt la suite de notre visite du tournage de FREE GUY !