MATRIX RESURRECTIONS : Entretien avec Yahya Abdul-Mateen Ii et Jessica Henwick
Article Cinéma du Lundi 27 Decembre 2021

Entretien avec YAHYA ABDUL-MATEEN II (Morpheus)

Comment avez-vous réagi lorsqu’on vous a proposé d’auditionner pour le rôle de Morpheus ?


Mon Dieu, tout s’est passé tellement vite ! J’étais sur un autre tournage et j’ai lu un article qui racontait qu’un nouveau MATRIX était en préparation. Je me suis alors dit « J’ai hâte de le voir quand il sortira ». Et puis, j’ai reçu un e-mail me disant que j’avais la possibilité de passer une audition. J’ai passé l’audition et, environ une semaine plus tard, j’ai reçu un coup de fil de Lana qui me proposait d’intégrer l’équipe ! Je me souviens encore que je donnais des interviews dans un hôtel quand j’ai reçu cet appel. J’étais fou de joie et de gratitude ! L’audition ne s’était pas déroulée de manière traditionnelle. On a joué la scène, mais au-delà du jeu, il fallait surtout qu’on s’entende bien. On a parlé de moi, du genre d’artiste que j’étais, de ma méthode de travail. Et on a parlé de la méthode de Lana. J’avais le sentiment qu’elle ne cherchait pas seulement à réunir d’excellents acteurs, mais des gens qui sachent bien travailler ensemble, qui aient plaisir à se retrouver ensemble et qui instaurent des rapports familiaux. C’est ce qu’elle a réussi à mettre en place. Mais entre le premier e-mail que j’ai reçu et l’appel téléphonique me confirmant que j’étais pris, tout s’est passé très vite !

Parlez-nous de votre personnage…

Morpheus tente de savoir qui il est et quel est son rôle dans l’univers de la Matrice. Il cherche à découvrir l’étendue de ses pouvoirs et à comprendre quelle est sa marge de manœuvre. Il essaie d’échapper au rôle qu’on lui a assigné. Ce qui distingue ce film des précédents, c’est qu’il y a beaucoup plus de personnages qui, tout comme Neo, sont en pleine quête d’identité. Neo s’est de nouveau engagé dans cette voie, et il en va de même de Trinity, et Morpheus est désormais l’un des personnages qui cherchent à mieux se connaître et à vivre une sorte de renaissance. Sincèrement, la complexité de Morpheus est telle que je n’ai pas encore tout saisi à son sujet (rires). Mais le personnage fonctionne. Mon interprétation du rôle revient à affirmer que je crois dans l’univers du film et que j’ai cherché à me montrer à la hauteur du projet. L’intrigue de MATRIX RESURRECTIONS offre tout un ensemble de possibilités narratives d’une grande complexité. Mais c’est un périple exaltant que de camper ce personnage qui évolue dans plusieurs univers. Je savais depuis le début que j’étais entre de bonnes mains avec Lana aux commandes. Et c’est dans cet état d’esprit que j’ai abordé le rôle.

MATRIX s’est intégré à la culture populaire mondiale. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Le phénomène MATRIX imprègne notre culture depuis la sortie du film. Il n’a jamais cessé de le faire depuis, et l’idée de prendre une décision au lieu de suivre aveuglément le chemin qu’on est censé emprunter – la pilule rouge au lieu de la bleue – est très forte. C’est un débat qui agite la société depuis la sortie du film. Sans parler de l’influence du phénomène sur les costumes, sur les séquences d’action, sur la mise en scène – beaucoup de réalisateurs ont tenté d’imiter des scènes marquantes de la trilogie. Les trois premiers films sont encore d’une grande modernité et j’espère que ce dernier opus s’inscrit dans la droite ligne de la saga.



Entretien avec JESSICA HENWICK (Bugs)

Comment avez-vous abordé l’interprétation de Bugs ?


Avec Lana, je n’ai jamais évoqué [mon personnage] Bugs. Pas une seule fois. Quand je me suis rendue à Berlin pour la rencontrer, on a parlé de tout et de rien, et on a tourné les scènes. Lorsque j’ai décroché le rôle, je me suis dit qu’on allait en parler, mais on a parlé de la vie à San Francisco ! On n’a jamais discuté du personnage. Elle me faisait confiance en me laissant entendre qu’elle me guiderait et en espérant qu’on serait sur la même longueur d’ondes ! (rires) Elle vous demande d’interpréter le personnage sous de très nombreux registres, si bien qu’il faut être parfaitement préparé en arrivant sur le plateau. On ne peut pas se faire une idée figée du personnage (elle serre les mains très fort). On ne peut pas non plus se faire une idée figée du texte (là encore, elle serre les mains très fort), parce qu’elle y apportera des changements à coup sûr. C’est incontestablement la réalisatrice la plus fascinante avec qui j’aie jamais travaillé, notamment dans sa direction d’acteur. Elle filme dans la continuité. On tourne de longues séquences de 20 à 30 minutes sans raccord. J’ai apprécié sa méthode parce qu’elle permettait de maintenir un rythme soutenu sur le plateau et qu’on était obligés de rester sur le qui-vive : on pourrait penser que c’est pour se couvrir, mais pas du tout. Il fallait vraiment donner le meilleur de soi. On avait le sentiment de tourner une grosse production comme un reportage capté sur le vif.

Qui est Bugs ?

Bugs est quelqu’un comme vous et moi. Elle est fan de Neo et de la Matrice. C’est ça qui est délirant. Elle a le même regard sur Neo que les spectateurs : elle a envie de le voir dans son costume en train de dire ses répliques. Dans l’histoire, Bugs est une véritable adepte du personnage. Elle croit que Neo est toujours en vie. Elle est certaine de l’avoir vu, alors que personne ne la croit. Elle est entourée d’une bande de personnages hétéroclites et ils partent tous à sa recherche.

Parlez-nous de votre collaboration avec Keanu…

J’adore tourner avec Keanu. Il est adorable. C’est un amour et, pour notre premier jour de tournage à San Francisco, il avait une seule réplique. Il devait dire quelque chose du genre « Comment ? » ou peut-être « Pourquoi ? » C’était une réplique qui tenait en un seul mot. Mais en le voyant dans son costume et en l’entendant prononcer sa réplique, je me suis sentie obligée de répondre « Neo ». C’était un moment totalement surréaliste. Je ne suis pas du genre à m’emballer pour les acteurs avec qui je tourne ou que je rencontre, mais à ce moment-là je me suis dit « Mon Dieu ! C’est Keanu Reeves ! » (rires)

La préparation physique pour le film a du être très intense…

J’ai commencé à m’entraîner 11 mois avant le début du tournage – j’avais déjà suivi des entraînements pour d’autres projets, mais jamais d’une telle ampleur. Je n’ai entamé mon apprentissage des chorégraphies qu’au bout de trois mois d’entraînement. J’ai appris certaines figures mais qui, finalement, n’ont pas servi au film. Au départ, on voulait vraiment rendre hommage à Kenshin, ce personnage de manga, à la fois très rapide et vif. C’est comme ça que je voyais Bugs – un peu comme un lapin, au ras du sol, énergique, plus rapide que les autres et plus futé. Je voulais qu’elle se batte en utilisant son intelligence. C’était un vrai défi quand on arrive dans [le décor de] l’usine parce que l’espace était si étroit que je ne pouvais pas encercler quiconque. Mais c’était fascinant d’effectuer toutes ces cascades. On apprenait une figure bien particulière et puis, comme Lana laisse une place à l’imprévu et aux accidents de parcours, elle regardait si la lumière avait changé et elle modifiait éventuellement la chorégraphie – et le résultat était radicalement différent de ce qu’on avait répété pendant trois mois. Mais c’était toujours exaltant. Bookmark and Share


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