WILLOW, la suite d’un film culte – Entretiens exclusifs avec Jonathan Kasdan, showrunner, et avec les acteurs de la série – 1ère partie
Article TV du Lundi 09 Janvier 2023

Les personnages du blockbuster de Fantasy des années 80 produit par George Lucas et réalisé par Ron Howard sont de retour dans l’attachante série de Disney +

Il aura fallu attendre 34 ans pour découvrir ce qu’il était advenu de l’apprenti sorcier Willow Ufgood, mais il est bel et bien le héros de la nouvelle série très sympathique de Disney+. “Par le biais de quel sortilège ?!”, pourrait-on se demander en se rappelant que le film original avait reçu un accueil plus que mitigé lors de sa sortie en 1988. Tout repose sur la ferveur des jeunes spectateurs de l’époque, qui avaient été enthousiasmés par ce premier film de Fantasy à grand spectacle produit par Lucas, bénéficiant de magnifiques trucages de magiciens d’ILM, à une époque où il était encore techniquement impossible de transposer LE SEIGNEUR DES ANNEAUX au cinéma.

En dépit de ses défauts – baisses de rythme, gags parfois poussifs - cette aventure était portée par des personnages fort sympathiques, à commencer par Warwick Davis, dont le charisme rayonnait sur le grand écran. Lucas avait vu juste en le repérant pendant le tournage du RETOUR DU JEDI, et en se disant qu’il faudrait lui écrire un rôle sur mesures. Même s’il n’était encore qu’un tout jeune acteur en 1988, Davis était effectivement irrésistible dans le rôle de ce petit bonhomme courageux, prêt à défier une reine maléfique et les forces des ténèbres pour protéger un bébé destiné à unir les royaumes…Les enfants des années 80 qui avaient adoré WILLOW ont grandi et la nostalgie faisant son effet, ce semi-échec commercial de George Lucas est devenu une référence de la culture populaire, au fil de ses rediffusions à la télévision et de son exploitation en vidéo. Et lorsque l’un des fans du film a eu l’opportunité inespérée de collaborer avec Lucasfilm sur un film réalisé par Ron Howard, il a saisi la chance de pitcher son idée de suite.

Ce fan, c’est Jonathan Kasdan, qui nous a raconté avec un enthousiasme communicatif comment il a prolongé la saga des héros de son enfance. Nous nous sommes entretenus aussi avec Willow lui-même, le très sympathique Warwick Davis, et avec deux des acteurs qui incarnent ses nouveaux compagnons de voyage. Cette fois-ci, la mission du groupe d’aventuriers consiste à sauver un prince. Aux côtés de Willow, se trouvent Dove (Ellie Bamber, vue dans le thriller NOCTURNAL ANIMALS) une servante timide qui révèle ses dons au cours du périple, Kit (Ruby Cruz, révélation de la série policière MARE OF EASTTOWN) la princesse dont le frère a été enlevé, Jade (Erin Kellerman, qui jouait la terroriste de FALCON ET LE SOLDAT DE L’HIVER) sa dame de compagnie à la langue bien pendue, et qui apprend à devenir une guerrière, ainsi que Graydon (Tony Revolori, qui fut l’un des personnages de THE GRAND BUDAPEST HOTEL) et Boorman (Amar Chadha-Patel, le seigneur Yakota de la série LA ROUE DU TEMPS) qui devront chacun développer de nouveaux talents pour survivre. Joanne Whalley, qui incarnait Sorsha, la fille de la diabolique reine Bavmordia, dans le film original, est devenue une souveraine bienveillante. On apprendra qu’elle est la mère adoptive d’Elora – le bébé de l’opus initial – et que Madmartigan et elle sont devenus les parents de la princesse Kit, et de son frère jumeau, qui a été kidnappé. Derrière la caméra, l’équipe de réalisation réunie par le showrunner Jonathan Kasdan (SOLO: A STAR WARS STORY, DAWSON’S CREEK) est composée de Stephen Woolfenden (OUTLANDER), Debs Paterson ( LE LIVRE PERDU DES SORTILEGES : A DISCOVERY OF WITCHES), Philippa Lowthorpe ( THE CROWN), et Jamie Childs (DOCTOR WHO ) qui ont dirigé deux épisodes chacun. Les co-auteurs des scenarios sont John Bickerstaff (LES ROMANOFF ), Hannah Friedman ( OBI-WAN KENOBI ) et Jonathan Kasdan.

Entretien exclusif avec Jonathan Kasdan, showrunner

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Comment ce projet a-t-il débuté ?

WILLOW est sorti en salles en 1988, quand j’avais neuf ans. A l’époque, on voyait peu de films de Fantasy, et j’ai été fasciné par cet univers et par le personnage de Willow, ce petit bonhomme si courageux qui bravait tant de dangers et de créatures effrayantes. Je suis retourné voir le film, tellement il m’avait plu, et je me souviens avoir été très impatient qu’il y ait une suite. Mais le problème, c’est qu’elle n’est jamais venue…J’étais terriblement déçu ! Tout en évoluant professionnellement, j’ai gardé l’envie de revoir ces personnages, et j’ai fini par me dire “Si personne ne pense à développer une suite, il faut que je m’en occupe moi-même ! ” (rires) J’ai entrepris de noter les idées que j’avais accumulées dans ma tête, en imaginant un deuxième volet destiné au cinéma. Mais j’étais accaparé par mes projets, car entretemps, j’avais mené une carrière de comédien, puis écrit & réalisé mon premier film en 2007, IN THE LAND OF WOMEN. J’ai enchaîné avec THE FIRST TIME en 2012, puis j’ai réalisé des épisodes de la série ROADIES, mais toujours en songeant régulièrement au film qui avait marqué mon enfance. Et puis quand mon père (Lawrence Kasdan, NDLR) m’a proposé de co-écrire SOLO avec lui, j’ai mis de côté mes projets personnels car je ne pouvais pas refuser de travailler sur un STAR WARS ! Ensuite, de nombreuses circonstances favorables se sont présentées les unes après les autres, comme si le destin s’arrangeait pour me permettre de faire avancer étape par étape mon idée de suite de WILLOW. D’abord, j’ai pu rencontrer Warwick Davis pendant le tournage de SOLO, et vérifier qu’il était à priori d’accord pour reprendre le rôle. C’était déjà un point capital. Et puis nous avons changé de metteur en scène, et là, j’ai halluciné quand j’ai appris que c’était Ron Howard qui allait arriver. Le réalisateur de WILLOW ! J’ai saisi la première occasion pour lui présenter calmement mon projet, malgré ma fébrilité, et il était partant ! Mais à une seule condition : que j’abandonne l’idée de film, et que je conçoive cette suite comme une série pour Disney+. J’étais complètement paniqué, car cela représentait dix fois plus de travail d’écriture qu’un film, mais Ron savait que c’était ce qu’il fallait faire. J’ai tenté de biaiser en lui répondant “ Es-tu vraiment sûr que nous ne pourrions pas envisager plutôt un film très long ? ” (rires) et il m’a dit “Non, Jon. C’est la seule et unique manière d’y arriver ! ” et bien sûr il avait raison. L’étape suivante à consisté à en parler à la présidente de Lucasfilm, Kathleen Kennedy, au cours d’une de ses visites sur le plateau de SOLO. Elle a été un peu surprise, mais la chance nous a souri encore une fois, car il y avait encore un créneau disponible dans le planning de production de Lucasfilm. Et comme Ron soutenait le projet, Kathleen l’a validé et est allée en parler à Disney+, qui a donné également son feu vert. J’étais sidéré que tout se passe si vite et si bien !

Comment avez-vous collaboré avec Warwick Davis sur l’évolution de son personnage ? Quelles suggestions a-t-il faites, et quelles sont celles que vous avez retenues ?

Comme nous, Warwick avait envie que l’on apprenne comment les événements vécus par Willow l’avaient changé. Dans chaque vie, il y a des joies, des peines, des épreuves qui vous marquent à jamais. On retrouve bien ce qui rendait Willow attachant et positif, mais à présent, il porte un autre regard sur la vie, plus profond, plus expérimenté. Warwick avait envie d’exprimer l’impact émotionnel de toutes ces années sur Willow, et de donner plus de gravité au personnage en l’incarnant ainsi. Il m’a dit que la série a été une expérience extrêmement gratifiante pour lui.

Comment avez-vous travaillé sur la structure narrative de la série pour vous assurer qu’il y aurait le bon mélange d’émotions, d’action et d’humour dans chaque épisode, et aussi une fin à suspense qui donne envie de voir la suite ?

Ah, merci de poser cette question, car c’est certainement l’une des tâches les plus importantes pendant le processus de l’écriture d’une série. Nous avons utilisé la bonne vieille technique du tableau avec des colonnes verticales parallèles représentant chaque épisode, et des post-it de couleurs différentes. Chaque couleur symbolisait une ambiance précise : l’action, l’effroi, des événement magiques, la comédie, les moments émouvants, etc. Et sur chaque post-it nous inscrivions un résumé de la scène. Avec ce système de couleurs, on pouvait voir facilement les composantes du déroulement de chaque épisode en regardant sa colonne de haut en bas, et avoir aussi une vision d’ensemble de tous les épisodes en s’éloignant pour observer toute la largeur du tableau. Après, on pouvait déplacer une scène de comédie issue d’un épisode qui en avait déjà plusieurs pour rééquilibrer un autre qui nous semblait un peu austère. Idem pour les autres éléments de l’histoire, et les trames du développement de chacun des personnages. C’est un système simple mais très efficace que l’on retrouve dans toutes les salles de réunion d’écriture de séries. Mais cela, c’est juste une méthode de travail. Le plus important, c’est de trouver des idées qui vont surprendre et captiver les spectateurs, et de s’assurer que les dialogues et l’évolution de chacun des protagoniste les rendront crédibles et intéressants.

La suite de notre dossier WILLOW apparaîtra bientôt comme par magie sur ESI ! Bookmark and Share


.