TWISTERS : Un tournage sur pellicule 35mm, l’évocation des grands espaces américains, et la conception des tornades
Article Cinéma du Vendredi 26 Juillet 2024
C’est Dan Mindel, connu pour ses collaborations avec J. J. Abrams (MISSION : IMPOSSIBLE III, STAR TREK, STAR WARS : LE RÉVEIL DE LA FORCE) et le regretté Tony Scott (SPY GAME : JEU D'ESPIONS, DOMINO), qui dirige la photographie du film. Les premières conversations entre Mindel et Lee Isaac Chung ont confirmé leur complicité artistique : « Dès le premier coup de fil, Isaac et moi avons discuté de cette Amérique des grands espaces qu’on trouve dans les vieux films d'aventures et on s’est dit qu’on souhaitait voir davantage de ces paysages grandioses dans le cinéma contemporain », déclare-t-il. « L'idée d’en avoir la possibilité m'a immédiatement séduit. En plus, on sensibilise le public à certains aspects écologiques des phénomènes extrêmes liés au changement climatique et c'est un point que je me sens le devoir de souligner. Isaac est d’une grande honnêteté intellectuelle : c'est un réalisateur inspiré et créatif tout en restant humain. Ça faisait longtemps que je n'avais pas travaillé avec un metteur en scène qui connaît le prénom de tout le monde sur un plateau. C'est très important d’être sensible au travail d’équipe sur un tournage. C’est une qualité que j'admire beaucoup ».
Pour se préparer à TWISTERS, Mindel a visionné des westerns, des road-movies et d'autres films montrant une certaine vision de l'Amérique rurale des années 50, pour la plupart datant de l’âge d'or d'Hollywood. Une exception parmi ses sources d’inspiration est cependant à noter : LA DERNIÈRE SÉANCE de Peter Bogdanovich, de 1971. « C'est un film en noir et blanc, situé dans le nord du Texas, à la campagne. Le film est plongé dans l’univers de l’Americana qu'on recherchait pour TWISTERS, nostalgique tout étant moderne, émouvante mais pas naïve », explique-t-il.
Mindel et son équipe ont tourné en 35 mm avec des caméras Panavision XL et des caméras à l’épaule Arriflex 435 et 235. Il a utilisé des caméras de série T, de série C ainsi que des objectifs anamorphiques Panavision de la ligne Primo. Des outils parfaitement adaptés pour filmer des paysages et des prises de vue panoramiques, qui sont la marque de fabrique de l'esthétique de Mindel.
Le tournage en pellicule présentait néanmoins un inconvénient : Chung et Mindel ne pouvaient pas visionner les rushes rapidement car l'Oklahoma manque de laboratoires de développement capables de travailler dans l’urgence. Ces rushes ont donc été développés à Los Angeles et ce décalage a empêché le réalisateur et son chef-opérateur de revenir sur leur travail pendant quelques jours après le tournage des prises. « Malgré tout, filmer en pellicule était un formidable plus », reconnaît Mindel. « La dimension tactile et le rendu des couleurs de l’argentique nous ont vraiment permis de restituer l’atmosphère et la texture visuelle de l'Oklahoma, en mettant en valeur sa beauté sauvage qui renforce la force viscérale de l'action ».
Pour se conformer à la météo changeante de l'Oklahoma, Chung et Mindel ont essayé de tourner sous des ciels gris par souci de continuité, sauf si le récit exigeait des ciels dégagés.
Quand le temps tournait à l'orage, il était difficile pour les deux hommes d'arrêter de tourner, même si c'était l’option la plus raisonnable. « Les mesures de sécurité que nous avons mises en place devaient absolument être respectées : personne ne doit se blesser sur un plateau », affirme Mindel. « Pourtant, il m’est difficile d’interrompre un tournage, quelle qu’en soit la raison, en particulier quand on tourne un film sur lequel on espère la venue d’orages et qu'ils arrivent enfin ! C'était perturbant pour moi comme pour Isaac de devoir tout arrêter pour se mettre à l'abri juste au moment où l’allure du ciel devenait spectaculaire ! »
La conception des tornades
Toutes les tornades du film s’inspirent – au moins – d’une authentique tornade et ont été créées en alliant effets physiques et effets numériques.
Il y a six scènes de tornades dans le film, mais une dizaine d’entre elles ont été mises au point : en effet, une tornade est accompagnée de sa « jumelle » et une autre finit par en engendrer plusieurs. Pour référence, l’équipe pouvait s’appuyer sur des images originales d'orages super-cellulaires et de tornades filmées pour les besoins du tournage par les consultants techniques, en particulier par le chasseur d'orages professionnel Sean Casey. « Le travail de Sean Casey ajoute une tout autre dimension de réalisme au film », déclare le producteur exécutif Thomas Hayslip. « Sean sait mieux que quiconque comment s'approcher au plus près des orages et les filmer, et on l'a donc engagé pour suivre les orages. Il sortait et filmait un maximum d'images réelles à l’épaule, ou avec des caméras posées sur pied et des drones. Son travail a fourni à l’équipe des effets visuels des éléments tangibles pour leur conception des tornades. C'est toujours beaucoup mieux de partir d’une matière réelle et d'être capable de l’enrichir plutôt que de tout concevoir ex nihilo ».
Lee Isaac Chung, qui a accompagné les vidéastes chasseurs de tempêtes au cours de certaines excursions et les a aidés à les filmer, affirme avoir voulu que ses tornades aient des « personnalités » bien distinctes, et pas seulement dans leur allure. Il voulait que chacune d'entre elles marque de façon particulière l'histoire et les personnages, et révèle un nouvel élément sur ceux qui sont obsédés par ces phénomènes climatiques. « À chaque séquence, le regard des personnages sur les tornades évolue. Je voulais montrer ces différents points de vue, du plus scientifique au plus personnel, et raconter en quoi ces tempêtes impactent la vie des gens de diverses manières », raconte-t-il.
La tornade finale s’inspire de trois tornades différentes : une tornade en biseau plus large que haute qui a balayé le Kansas en 2023 et a été filmée par les chasseurs de tornade engagés par la production ; une tornade qui a frappé El Reno en 2013 et a évolué en une tornade à multiples vortex, avec des vents soufflant à près de 500 km/h et qui, à un moment donné, a mesuré de plus de 4 km de large ; et enfin, une troisième qui a frappé Mayfield dans le Kentucky en décembre 2021 et qui a fait 76 victimes. « Il y a une photo terrible qui a été prise à l'intérieur du cinéma de Mayfield, qui montre comment la tornade a ravagé le mur supportant l'écran, et l'état de destruction de la ville à l'extérieur », déclare Chung. « Cette photo est devenue une référence essentielle pour l’équipe et on voulait que le film évoque la force émotionnelle et symbolique de ce cliché ».
Il n’a pas échappé à Chung qu’il était assez ironique de réaliser un film sur des tornades, dont la séquence finale montre les héros trouvant refuge dans un cinéma et contraints de contempler l’impact dévastateur de la tempête, au moment où les murs de l’établissement sont éventrés. En réalité, c'était même l'une des raisons principales qui l’ont poussé à entreprendre TWISTERS. « Avant de faire le film, je me disais souvent qu’on a constamment l’œil collé à nos écrans de téléphones et que cela nous isole et nous divise », explique-t-il. « Ça m'a fait penser à la valeur de l'expérience qui nous pousse à nous intéresser à des phénomènes qui nous dépassent. Quand j'ai lu cette séquence dans le scénario, elle correspondait exactement à ce que je pensais – ce désir des hommes de s'approcher de ce qui les émerveille et les terrifie dans la nature, et ce besoin de s’unir pour prendre soin de la Terre ».
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