LES ANNEAUX DE POUVOIR, SAISON 2 – Entretien avec la réalisatrice et co-productrice exécutive Charlotte Brändström – 1ère partie
Article TV du Mercredi 28 Aout 2024

Propos recueillis par Pascal Pinteau

A la fin de la première saison des ANNEAUX DE POUVOIR, Halbrand, le compagnon de route de Galadriel, s’avérait être Sauron, ayant pris apparence humaine pour mettre en place l’irrésistible avènement des forces du mal, symbolisé par l’éruption volcanique de la montagne du destin dans le Mordor…Au début de cette deuxième saison, on apprend que Sauron a subi des déconvenues avant de devenir le prince de la manipulation, sachant habilement corrompre les dirigeants de la Terre du Milieu…ESI a évoqué ces enjeux passionnants avec la réalisatrice Charlotte Brändström.

Entretien avec Charlotte Brändström, réalisatrice et co-productrice exécutive.

Charlotte Brändström est née à Paris de parents suédois. Elle débute en 1988 en dirigeant le film UN ÉTÉ D’ORAGES. Elle travaille sur de nombreux téléfilms de TF1, tourne en Suède WALLANDER : ENQUETES CRIMINELLES, puis s’impose aux USA sur des séries comme GREY’S ANATOMY ou CHICAGO POLICE DEPARTMENT. En 2020, elle intègre l’équipe des ANNEAUX DE POUVOIR.

La caractéristique de votre parcours est d'avoir entamé votre carrière de réalisatrice en France, puis d’être allée travailler en Suède, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Pouvez-vous nous parler des bénéfices que vous avez acquis en découvrant les différentes approches de tournage de séries dans le monde entier, et nous dire aussi comment vous utilisez cette expérience aujourd'hui ?

Alors, c'est vrai que j'ai démarré en France avec un long-métrage. Ensuite, j'ai réalisé des séries télé américaines à Paris, en anglais, j'ai dirigé un long-métrage à Londres, puis je suis revenue en France et j'ai réalisé des films et des séries pour TF1. Et après, je suis partie en Suède pour mettre en scène des épisodes de WALLANDER : ENQUETES CRIMINELLES. Donc, c'est vrai que tout cela vous procure une expérience unique parce que vous arrivez à travailler avec des équipes très différentes, dans des langues différentes. Le plus difficile au départ dans ce métier, c’est d’apprendre le langage visuel de la réalisation. Si on compare cela avec la littérature, avant de développer son style d’écrivain, il faut déjà apprendre à écrire et maîtriser l'orthographe. Apprendre à réaliser, c'est apprendre à utiliser une caméra, à trouver un point de vue, à faire des choses techniquement et devenir meilleur à chaque fois que l’on entame un nouveau travail. On apprend aussi en collaborant avec les autres, en travaillant avec des grands chefs opérateurs. Je l’ai déjà dit quand j’ai participé au festival Série Mania, mais les équipes françaises n'ont rien à envier aux équipes étrangères, aux américaines, anglaises, etc. Sur ces séries anglo-saxonnes, il y a des très bons techniciens, et parfois des moyens plus importants, et d’autres manières de tourner. J'ai donc l'impression d’apprendre constamment des choses nouvelles, quoi que je fasse, à chaque fois. Quand j'ai commencé à travailler aux États-Unis, il y a une dizaine d'années, j'ai dirigés des épisodes de beaucoup de séries importantes. Ayant déjà beaucoup travaillé en Europe, grâce à toute cette expérience et à tout ce que j'avais appris, j'arrivais déjà à un certain niveau à ce moment-là. En Europe, on travaille quand même plus dans le détail, c'est-à-dire qu'on passe du temps, surtout en télé, on prépare beaucoup les choses avant le tournage, et ensuite, on les peaufine pendant le montage et le mixage. Donc, en fin de compte, en arrivant aux USA, j'avais un avantage sur pas mal de metteurs en scène américains grâce à toute cette expérience acquise, car j’avais pu travailler directement sur beaucoup de choses, sur les effets spéciaux et toute la postproduction. J’avais « mis les mains dans le cambouis » beaucoup plus que la plupart des metteurs en scène qui arrivent sur une série puis repartent rapidement sur une autre, comme cela se fait aux États-Unis. C’est en cela que cette expérience m’a beaucoup aidée.

Avez-vous mis au point une méthode particulière pour travailler sur LES ANNEAUX DE POUVOIR ?

Oui. Les techniciens avec lesquels je travaille sont les meilleurs du monde, autant en effets spéciaux concrets que pour les effets visuels numériques, l’éclairage, la direction de la photo, etc. Ce sont des gens extrêmement compétents. Et nous travaillons tous dans le même but : réussir à faire la meilleure série possible. Nous participons donc à de nombreuses réunions en amont, et nous discutons de tout. Pour ma part, j'ai une manière de travailler à laquelle je tiens beaucoup : j'ai besoin de maquettes des décors. C'est-à-dire que quand je prépare des scènes qui se déroulent sur des champs de bataille ou quand il s’agit de combats de navires en mer, ou de n'importe quelle grande scène d’action, je demande à l’équipe des décors de me construire des miniatures de tous ces environnements. Cela ressemble à des maquettes d’architecte, c’est fabriqué souvent avec des matériaux légers comme du carton plume, pour représenter les volumes de ce qui sera construit en studio, ou reproduire les caractéristiques des sites naturels que nous allons utiliser. J'ai aussi tout un stock de petites figurines que je peux placer dans ces maquettes. Dans la première saison, j’ai préparé de cette manière la bataille dans le village avec les cavaliers qui arrivent. J'avais des figurines et des petits chevaux et je les plaçais dans la maquette du village, pour concevoir la scénographie et décider quels étaient les axes de prises de vues qui allaient me permettre de filmer cela de la manière la plus intéressante et spectaculaire possible, pour raconter cette scène. Grâce à cela, avant même que l’on ne commence à construire ces décors à taille réelle, je pouvais expliquer à toutes les équipes comment je voulais le filmer. Cela nous a permis de nous assurer que le décor allait être positionné et construit de la manière la plus intelligente possible par rapport à la lumière solaire et aux contre-jours. Nous passons donc beaucoup, beaucoup de temps à tout préparer le plus précisément possible, en communiquant avec tous les départements artistiques et techniques de la production. Ensuite, on trouve sa manière à soi de travailler, au milieu de toute cette organisation, de cette collaboration avec énormément de gens…Même si c’est une démarche singulière, je n’aime pas créer les décors en 3D. Il y a des gens qui travaillent tout le temps sur ordi. Moi, j'ai besoin de toucher des choses concrètes et d'avoir les maquettes devant moi pour visualiser mon approche d’un tournage. Donc, en premier, je me sers de ces miniatures, puis je prépare mes listes de plans, qui décrivent comment j’ai décidé de les tourner. Je choisis mon point de vue, ma perspective d'avant chaque scène, et comment je pense qu'il faut qu'elle soit tournée pour raconter ces moments du récit. Ensuite, je fais venir le storyboardeur, je lui explique ma vision en lui donnant ma liste, et il prépare le storyboard. C'est une manière d'expliquer à tout le monde ce que je veux. Et puis après, ça évolue toujours pendant le tournage. Le processus créatif, de toutes façons, progresse par couches successives et change constamment. C'est-à-dire que même quand on répète les scènes le matin avec les showrunners et les acteurs, on se rend compte qu'on peut encore améliorer les dialogues, la conception des scènes, le jeu des comédiens. On trouve constamment des petites choses qui sont plus justes, plus intéressantes et mieux adaptées à la narration de la série. Donc, il faut savoir rester toujours flexible, quoi qu'il arrive et quelle que soit la série et le travail à accomplir. Voilà, comment je pourrais résumer mon expérience.

La suite de notre dossier consacré à la 2ème saison des ANNEAUX DE POUVOIR sera bientôt publiée sur E.S.I. !

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