Dans les coulisses de BEETLEJUICE BEETLEJUICE – Entretien avec la cheffe costumière Colleen Atwood et le superviseur des créatures animatroniques et des effets spéciaux de maquillage Neal Scanlan
Article Cinéma du Vendredi 13 Septembre 2024

La cheffe costumière oscarisée Colleen Atwood a déjà collaboré avec Tim Burton sur ALICE AU PAYS DES MERVEILLES, SWEENEY TODD – LE DIABOLIQUE BARBIER DE FLEET STREET et SLEEPY HOLLOW – LA LÉGENDE DU CAVALIER SANS TÊTE.

Vous êtes une fidèle collaboratrice de Tim Burton…

Colleen Atwood : Oui. Au cours des années, ma collaboration avec Tim a évolué. Désormais, nous nous comprenons sans avoir besoin de parler. Il m’arrive de devoir lui apporter des objets et des idées pour le faire réagir, et il n’est pas systématiquement enthousiaste en les découvrant, mais à présent, nous pouvons en rire car certaines des choses qu’il me dit sont si prévisibles pour moi que je sais exactement comment il va réagir ! On s’en amuse beaucoup ! C’est pour nous deux une manière géniale de travailler et de créer des choses ensemble. 

Comment les costumes ont-ils évolué entre le premier opus et celui-ci ?

Aggie Rodgers, qui a conçu les costumes du film d’origine, travaillait bien évidemment à une autre époque avec des exigences et des méthodes différentes. Il y a beaucoup plus de costumes dans ce nouvel opus. Ils sont un peu plus sophistiqués, ils sont confectionnés dans un atelier, d’une manière plus ‘professionnelle’ que ce qu’elle avait pu faire à l’époque, même si elle a effectué un travail absolument fantastique, devenu mythique. D’une certaine façon, ce sont des costumes différents, c’est un film différent, mais ils ont des points communs : Beetlejuice a un costume rayé et un smoking, Lydia porte une robe rouge, mais ils ne sont pas identiques. Ce sont des versions différentes de ces costumes emblématiques. 

Comment avez-vous abordé les costumes du monde des morts ?

Dans le cinéma, on ne dispose jamais assez de temps de préparation, c’est bien connu. Nous avions l’impression de ne pas pouvoir nous plonger dans le développement des tenues de l’Après-vie aussi longtemps que nous l’aurions souhaité car nous devions commencer à les confectionner très rapidement. Mais en réalité, cela présente des avantages. On doit trouver des idées plus rapidement, et parfois elles sont meilleures que si on avait eu beaucoup de temps pour réfléchir : on passe d’un genre à l’autre, et d’une façon de travailler à l’autre, à un rythme vraiment rapide. Par exemple, on crée une robe pour une morte, elle a une scie en travers du corps ou bien une épée ou autre chose qui est coincé : on doit donc collaborer avec les équipes des effets visuels ou des trucages concrets et il faut faire en sorte que ce soit esthétique pour eux et que cela soit fonctionnel pour nous. Il y a donc de nombreux défis à relever dans ce film. 

Comment avez-vous créé les costumes des acteurs principaux ?

Quand des acteurs tournent un film aussi particulier que celui-ci, ils savent que le costume occupera une fonction importante. Ce qui compte, c’est qu’ils s’approprient leur personnage d’une certaine manière. Chacun d’entre eux a évolué. Par exemple, Michael voulait vraiment revoir le smoking d’origine. Les archives de la Warner me l’ont prêté, nous l’avons étudié, il m’a dit ‘c’est bien ça’, et puis on est passé à autre chose. Pour lui, le smoking était plus important que le costume à rayures. C’est ce qui, à ses yeux, caractérise le personnage, alors que le public, lui, adore les rayures. Pour Winona, on a juste fait ressurgir Lydia, avec des épaisseurs de vêtements, des tenues souples pour qu’elle puisse vraiment incarner sa Lydia, la faire virevolter et la rendre aussi flamboyante que possible. Concernant Astrid (Jenna Ortega), c’est une activiste et ses vêtements sont des tenues pratiques de tous les jours : ce ne sont pas vraiment des costumes de cinéma et c’est sans doute le personnage le plus réaliste de tous. Et puis, Catherine O’Hara campe une Delia dont le style vestimentaire reflète sa nature d’artiste, car elle s’habille de façon excentrique. Justin Theroux, lui, interprète Rory, un homme vraiment très stylé mais aussi un peu effrayant, qui suit toutes les tendances et tous les créateurs de mode. Comme il se trouve souvent auprès de Lydia, nous avons abordé leurs tenues comme celles d’une entité solidaire : ils vont de pair. 

Comment Michael Keaton a-t-il réagi en enfilant le nouveau costume de Beetlejuice ?

Quand Michael l’a essayé pour la première fois, je l’ai trouvé très drôle. J’étais à Los Angeles et nous avons fait un essayage chez lui. Après l’avoir enfilé, il s’est exclamé ‘Ah ouais !’. Nous avons dû accentuer le côté ventripotent de Beetlejuice en utilisant des rembourrages, car Michael est en excellente forme physique, ce qui n’est pas le cas de son personnage ! On lui a donc ajouté du ventre et Michael s’est tout de suite glissé dans la posture et la peau de Beetlejuice. Ça s’est passé vraiment très rapidement. 



La conception des créatures animatronique et des effets spéciaux de maquillage

Véritable légende dans ce domaine, le superviseur des créatures animatroniques et des effets spéciaux de maquillages Neal Scanlan, également oscarisé, a collaboré avec Burton sur SWEENEY TODD – LE DIABOLIQUE BARBIER DE FLEET STREET et CHARLIE ET LA CHOCOLATERIE. Il a travaillé précédemment sur les créatures des épisodes 7, 8 et 9 de STAR WARS et de ROGUE ONE, et sur les dinosaures de JURASSIC WORLD : FALLEN KINGDOM.

Comment avez-vous abordé la fabrication des créatures du film ?

Neal Scanlan :
Pour concevoir une créature, le processus commence toujours par une discussion, soit directement avec Tim, soit par le biais de l’analyse du script. Ce dernier contient parfois des indications qui vont nous donner un point de départ, une direction. Ensuite, notre équipe de graphistes et moi nous réunissons, et nous nous amusons bien à discuter de tout ce que nous pourrions faire, en envisageant différentes options. Nous recherchons aussi des références visuelles sur le web, étudions ce qui a été fait par le passé, et visionnons le film d’origine et d’autres œuvres de Tim qui pourraient nous inspirer. Tout cela nous aide à créer des esquisses de ces idées, et nous les montrons à Tim. A ce moment-là, soit il s’exclame ‘Ah oui, c’est exactement ça !’, soit il nous dit ‘Ça ne convient pas, mais ça va quand même la bonne direction’ et il nous oriente alors dans la bonne voie. Une fois que le graphisme définitif de la créature a été établi, on avait l’habitude - et c’est sans doute moins le cas aujourd’hui - de sculpter ce personnage et de sculpter les parties de son corps ou les éléments qui le composent. A présent, ces étapes sont plus fréquemment réalisées à l’aide d’un ordinateur. Cette modélisation en 3D nous permet de préciser l’aspect de ce personnage avant de nous lancer dans sa création physique. L’avantage, c’est que nous pouvons montrer à Tim encore une fois à quoi va ressembler la créature, avec ses couleurs, et son costume. Nous pouvons même la placer dans un décor virtuel pour nous permettre de voir comment elle va s’y intégrer. 

Une fois que Tim Burton avait approuvé définitivement un design, quelle était la suite du processus ?

À partir de là, on se consacre à la fabrication de la créature qui mobilise plusieurs départements aux multiples talents. Ce sont des artistes qui peuvent effectuer des moulages, peindre, insérer des cheveux dans une peau souple, dessiner les couches de muscles, etc. Ces départements travaillent en parallèle pour créer l’entité finale. Une fois achevée, on s’attelle à ce nous appelons la performance, c’est-à-dire que des acteurs nous rejoignent, et répètent les scènes en donnant vie au personnage. Concrètement, ils le font soit en manipulant des tiges métalliques, lorsqu’il s’agit de marionnettes actionnées à la main, soit en utilisant des outils comme l’animatronique, qui en réalité consiste à contrôler à distance des éléments robotisés, grâce à des servomoteurs et des radiocommandes.

Comment avez-vous fabriqué les personnages aux têtes réduites ?

Je suis sûr que les gens seront absolument ravis de les retrouver dans le film. Une « tête réduite » apparaissait dans le BEETLEJUICE initial et cette scène s’est gravée dans ma mémoire pour toujours ! C’est une idée brillante par sa simplicité, et tellement drôle. On devine très bien comment cette vision étrange a pu surgir dans l’esprit de Tim. Nous nous sommes dits qu’il fallait vraiment que ces personnages iconiques soient présents dans cette nouvelle aventure. Nous n’avions pas du tout envie de les modifier : c’était inutile, car ils sont trop bien tels qu’ils ont été créés initialement ! La seule différence, c’est qu’il y en a 15 dans ce nouveau chapitre. Nous voulions aussi qu’ils soient moins statiques que celui du film original, et qu’ils se lèvent du canapé et marchent. Nous avons même tourné un test vidéo avec Tim où l’un d’entre eux faisait du vélo ! (rires) Il ne s’agit pas d’une de mes créations, et je n’ai donc aucun mérite si leur aspect final est si amusant. Je les trouve absolument fantastiques. Le département des costumes a fait un travail formidable en redessinant leur silhouette, avec des épaules et des cols un peu plus larges. C’est une façon géniale de faire comme si ces têtes réduites étaient réellement liées au corps d’une personne normale, et non pas ajoutées au-dessus des têtes des acteurs qui jouent ces personnages. Dans le film d’origine, il y a des moments chocs, comme la scène emblématique de la tête hurlante de Beetlejuice, alors qu’il a les yeux qui lui sortent des orbites et qu’il tire la langue. Ce sont des moments effrayants mais aussi de comédie. Beaucoup d’entre eux jouent sur les effets du film d’origine, mais je suppose que l’élément de surprise et de peur que tout le monde adore est celui des têtes réduites. 

Il vous suffira de prononcer trois fois le nom de Beetlejuice pour faire apparaître bientôt la suite de ce dossier sur E.S.I. !

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