KRAVEN LE CHASSEUR : Les origines de l’ennemi iconique de Spider-Man. Entretien exclusif avec Aaron Taylor-Johnson (Kraven) – 1ère partie
Article Cinéma du Mercredi 04 Decembre 2024

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Depuis une quinzaine d’années, les cinéphiles ont pu apprécier Aaron Taylor-Johnson dans les rôles principaux de films fantastiques marquants : KICK-ASS, qui a revisité ironiquement l’univers des super-héros, le GODZILLA de 2014 qui a initié le Monsterverse américain, puis AVENGERS, L’ÈRE D’ULTRON, dans lequel il était le Pietro Maximoff / Quicksilver du MCU. Il a incarné récemment le fiancé de Lily-Rose Depp, la victime du vampire dans NOSFERATU, et explose l’écran, bardé de muscles et charismatique dans ce KRAVEN LE CHASSEUR spectaculaire et prometteur signé par J.C. Chandor.

Ne nous voilons pas la face : en arrivant hélas après les désastreux MORBIUS et MADAME WEB, produits par Sony / Columbia, KRAVEN LE CHASSEUR est injustement dénigré d’avance à cause de ces deux ratages, par des gens qui n’ont rien vu du film. C’est absurde, mais typique de ce qu’on lit sur internet, puisque créer la polémique et détruire d’avance permet de récolter des clics rémunérateurs.

Ce n’est pas notre cas. Les quelques scènes que nous avons visionnées avant de parler en exclusivité avec Aaron Taylor-Johnson nous ont non seulement convaincu qu’il fallait donner sa chance au film, mais qu’il serait une solide transposition des origines d’un super-méchant, respectueuse de l’héritage de ce personnage emblématique des comics de Marvel, créé en 1964 par Stan Lee et par le dessinateur Steve Ditko.

Le réalisateur de KRAVEN LE CHASSEUR, J.C. Chandor, est un cinéaste talentueux et exigeant qui a signé l’excellent thriller A MOST VIOLENT YEAR, que ESI vous recommande chaudement de visionner, si vous ne connaissez pas son travail. En choisissant de traiter les origines de Kraven le chasseur sous la forme de la saga d’une famille maffieuse, les créateurs du film ont, semble-t-il, trouvé une approche psychologique et visuelle bien adaptée. Dans les quinze minutes âpres et convaincantes que nous avons vues, la violence du personnage et ses pouvoirs sont bien traités comme il le fallait. Bref, il nous semble que toutes les conditions sont réunies pour que KRAVEN LE CHASSEUR soit en fait une bonne surprise, et un divertissement que les amateurs de films de super-héros (et de super-villains) à l’esprit ouvert découvriront avec plaisir en salles à partir du 18 décembre.

Entretien avec Aaron Taylor-Johnson (Sergei Kravinoff / Kraven)

Quelles nouvelles opportunités avez-vous trouvées dans l’approche réaliste que J.C. Chandor a choisie pour réaliser KRAVEN LE CHASSEUR ? Et comment avez-vous travaillé ce rôle avec lui ?


En étroite collaboration. Je dois dire que nos échanges ont été d’emblée très fructueux, et ce, dès que J.C. m’a contacté et fait parvenir la première version du scénario pour que nous puissions en discuter. Tout ce processus de collaboration a été élaboré aussi avec le producteur Matt Tolmach et le PDG de Sony Columbia, Tom Rothman. KRAVEN est un projet sur lequel nous avons travaillé dur pendant trois ans. Je suis extrêmement fier de ce film et j’ai hâte de pouvoir le partager avec les spectateurs du monde entier. Vous avez pu en voir seulement 15 minutes avant notre conversation, mais je crois que quand vous le verrez en entier, vous serez agréablement surpris, diverti, et que vous prendrez plaisir à découvrir comment ces personnages évoluent au fil du récit…

Le studio m’a demandé de ne pas décrire de manière précise ces extraits dans l’interview, mais je peux dire en toute franchise que les scènes que j’ai vues sont convaincantes, qu’il s’agisse des moments dramatiques ou des séquences d’action. On voit que les équipes techniques et artistiques se sont investies à fond. Et sans aucune flagornerie, vous êtes impressionnant et crédible dans le rôle principal.

Merci Pascal. C’était vraiment important pour moi, pour J.C. et toute l’équipe que le résultat soit réussi. Cela rejoint ce que j’ai appris pendant le tournage de GODZILLA, il y a dix ans. En me lancant à 22 ans dans ce qui était mon premier blockbuster d’un grand studio, j’ai acquis de nouvelles connaissances et cela m’a aidé à aborder un projet comme KRAVEN en sachant ce qu’il fallait veiller à intégrer dans le film pour qu’il fonctionne bien. C’est d’autant plus difficile que quand on entreprend une adaptation de comics, on doit gérer l’héritage d’un personnage connu et apprécié par des millions de fans. Il y a une attente très forte. Un espoir de retrouver la présence physique et l’aspect du personnage de BD sur le grand écran. Mais passer de la page dessinée aux prises de vues réelles tournées avec des acteurs est un exercice complexe. Une transposition dans une toute autre forme de narration. Nous avons donc commencé par définir le ton qui convenait le mieux à ce personnage et cette histoire. Ensuite, j’ai eu besoin d’enrichir le rôle en donnant à Kraven de nouvelles strates de complexités, des émotions contradictoires et de fortes motivations sentimentales. Il s’agit d’un criminel, mais il a du coeur, une logique et un code d’honneur qui permettent de comprendre pourquoi il agit ainsi…Je dois dire que dans beaucoup d’adaptations de comics que j’ai vues dernièrement, cette partie fondamentale des personnages est négligée. Au coeur de l’histoire de Sergei Kravinoff / Kraven, il y a une saga familiale. Deux frères qui ont une très belle relation, en dépit d’un contexte complexe et conflictuel. Mon personnage adore et protège du mieux qu’il le peut son frère cadet, parce qu’ils ont été élevés tous les deux dans un environnement toxique, par un père qui est un chef de gang russe. Depuis leur plus jeune âge, leur père leur serine que leur devoir sera de lui succéder à la tête de cette organisation criminelle. Mais pour Sergei, il n’en est pas question. Non seulement il refuse de diriger ce gang, mais il ne veut surtout pas devenir quelqu’un comme son père. Sa seule option a consisté à s’évader de ce carcan en s’enfuyant et en allant vivre loin de lui. Depuis, Sergei s’est construit son propre monde sous le nom de Kraven, pour se protéger de l’influence paternelle. Mais cela ne l’a pas empêché de mener des activités répréhensibles. Et les événements qui se déroulent l’entraînent sur un chemin de violence et de rage qui va s’avérer bien pire…C’est passionnant de montrer que Kraven croit avoir des repères éthiques solides, une sorte de “boussole morale” qui justifie ses actions, alors qu’en réalité, il se berce d’illusions et dérive de plus en plus vers le crime pur et simple. Tout cela est basé sur les racines du personnage, et sur la manière dont il a été traité dans des comics des années 80 / 90. Nous avons été inspirés aussi par la description de sa psychologie dans “Kraven’s Last Hunt”, cette magnifique série de BDs écrite par J.M. DeMatteis et dessinée par Mike Zeck, un crossover consacré au combat ultime entre Kraven et son ennemi juré Spider-Man. Nous sommes partis de son état d’esprit à ce moment-là et avons “remonté le cours du temps” en imaginant toutes les étapes psychologiques qui ont précédé. De toute évidence, Kraven a de nombreux démons à affronter, et un passif émotionnel très pesant…Ces recherches nous ont permis d’enrichir le personnage dans le film, tout en traitant l’action de manière âpre et réaliste. Nous ne nous sommes pas fixés de limite, vous savez. Nous avons présenté les choses comme nous jugions utile de le faire.

Comment avez-vous mêlé le côté surnaturel des pouvoirs de votre personnage au traitement réaliste de l’histoire ?

La clé de tout cela est J.C. Shandor. Quand un cinéaste qui a réalisé A MOST VIOLENT YEAR et qui vient de l’univers des films indépendants réalistes produits par A24 se consacre à un projet comme KRAVEN, il ne va pas l’aborder comme un blockbuster Marvel. J.C. a d’abord travaillé sur l’histoire, la profondeur des personnages, et tout ce qui pouvait enrichir le récit. C’est pour cette raison que le film est fortement ancré dans la réalité. Pour le côté super-héros, comme vous le savez, Kraven n’en est pas un. Il s’agit d’un homme qui a été entraîné depuis le plus jeune âge pour être un chasseur exceptionnel, qui se sert de ce qu’il a appris pour se défendre, et qui devient un tueur violent et sans merci. Dans ce film, on le voit se consacrer à la mission qu’il s’est fixée pour des raisons personnelles, et agir de manière sanglante. Il ne s’agit pas d’exploits de super-héros. Nous nous sommes inspirés des comics pour expliquer comment sa force physique a été amplifiée, et le personnage de Calypso est l’une des pièces de ce puzzle. Une synergie et un partenariat se développe entre Kraven et elle en raison de cela. Mais je pense que la véritable force de Kraven est plus profonde et spirituelle qu’un super-pouvoir.

La suite de notre entretien avec Aaron Taylor-Johnson à propos de KRAVEN LE CHASSEUR surgira bientôt dans les pages d’ESI sans que vous l’ayez vue venir !



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