WALLACE & GROMIT, LA PALME DE LA VENGEANCE : Le retour en grande forme des personnages iconiques de Nick Park - 3ème partie
Article Animation du Mercredi 26 Fevrier 2025
Dans LA PALME DE LA VENGEANCE, plusieurs personnages aimés des fans font leur retour, mais on y découvre aussi de nouveaux venus dans l’univers de Wallace & Gromit. « J’adore choisir les voix des personnages », explique Park. « C’est jubilatoire et nous avons des acteurs épatants. Bien entendu, il y a Ben Whitehead qui campe Wallace, et Peter Kay est de retour : il prêtait sa voix à l’agent Mackintosh dans LE MYSTERE DU LAPIN-GAROU, mais il a pris du galon. Et il forme une jeune policière, Mukherjee, interprétée par Lauren Patel qui est formidable. Quant à Reece Shearsmith, il prête sa voix à Norbot, le nain de jardin intelligent. » Quelle a été la réaction de Lauren Patel quand elle a appris qu’elle avait décroché le rôle ? « J’ai découvert que j’avais obtenu le rôle une demi-heure avant de monter sur scène pour mon tout premier spectacle ! », se souvient-elle. « Mon agent m’a appelée et j’étais là, devant la porte des toilettes, et j’ai lâché un grand ‘Aaaaaah !’ Mais je ne pouvais en parler à personne parce que ce n’était pas encore officiel. Je me rappelle que j’avais un trac fou en montant sur scène, mais, dans un petit coin de ma tête, je me disais ‘je vais avoir un rôle dans le prochain Wallace & Gromit, mais je n’ai pas le droit d’en parler à qui que ce soit !’ »
L'IMPORTANCE DES DÉCORS
Outre le développement du scénario et le casting vocal, la direction artistique est un autre axe majeur de la fabrication du film. Le chef-décorateur Matt Perry précise : « Je m’occupe de tout ce qui est visible à l’écran, en dehors des marionnettes ou des effets visuels. Sans oublier la logistique : nous cherchons à faire tout ce que nous demandent les réalisateurs tout en respectant les contraintes budgétaires. Du coup, je planifie tout le film, puis je le découpe en plusieurs éléments et j’élabore les plannings. Parfois, il est évident que cela dépasse très largement notre budget, et on se met alors à négocier pour savoir combien de décors on peut vraiment se permettre de construire et jusqu’où on peut aller dans les détails. C’est l’aspect sans grand intérêt de la question, mais on vise aussi l’excellence artistique afin que les décors soient les plus beaux possible. » Matt Perry fait partie de l’équipe depuis LE MYSTERE DU LAPIN-GAROU, mais ce nouvel opus posait de nouveaux défis. « Il y a un charme artisanal et un rien vintage dans la saga Wallace & Gromit qui correspond à la période qui va des années 50 aux années 70. On a rencontré quelques difficultés pour ce film car il aborde certains enjeux liés à l’intelligence artificielle et à l’informatique qui n’appartiennent pas à cette époque. On a donc dû modifier la période à laquelle se déroule l’intrigue et la situer plutôt dans les années 90 et à l’essor de la micro-informatique. C’était difficile de traduire ce changement dans les décors. »
Étant donné l’envergure des scènes d’action de la fin du film, il a fallu construire les décors à différentes échelles : « La séquence finale se déroule sur un aqueduc qui enjambe une gorge », explique Matt Perry, « mais on n’a construit que certaines parties de ce décor grandeur nature pour que les personnages soient dessus. Par ailleurs, on a fabriqué l’intégralité de la gorge en miniature pour les arrière-plans. L’aqueduc nous amène jusqu’à la limite avec le Yorkshire, et si on regarde le ciel dans cette direction, il est gris, morose, sinistre, mais si on jette un œil dans l’autre direction, le ciel est bleu et ensoleillé. C’est une petite vanne de Park, sans méchanceté, sur l’opposition entre le Lancashire et le Yorkshire. »
QUELQUES CHANGEMENTS DE TAILLE
Si l’allure des personnages ne semble guère avoir changé au fil des années, certaines modifications ont malgré tout été apportées aux maquettes. « On a un peu fait évoluer Wallace », reconnaît Anne King, chef-marionnettiste. « Sur certains modèles des premiers Wallace, les jambes étaient toutes maigres. Et Nick Park a décidé de raccourcir un peu son chandail. » Crossingham précise : « Nous n’avons pas changé l’ADN des personnages. Ce sont de petites modifications. Concernant Gromit, nous avons un peu changé la forme de son museau. C’est très subtil. »
Mais le plus grand changement concerne les matériaux utilisés. En effet, au départ, les personnages étaient entièrement sculptés dans de la plasticine, mais au fil des années de nouveaux éléments ont fait leur apparition. « Le problème avec la plasticine, c’est qu’il s’agit d’un matériau difficilement maniable », explique Anne King. « Il faut le sculpter longuement et il demande beaucoup d’entretien. Du coup, pour ce film, nous avons largement réduit la quantité de plasticine utilisée et nous avons davantage opté pour des marionnettes en silicone afin d’accélérer l’animation. Il s’agit toujours de gagner du temps dans le studio. Par exemple, la policière Mukherjee a des jambes de silicone, et son débardeur est en résine très robuste pour faciliter la tâche aux animateurs et pour qu’ils puissent avoir un élément solide. Ensuite, le bras est en silicone, les mains et la tête en plasticine – autant d’éléments qui peuvent être totalement sculptés pour créer des expressions. » Étant donné qu’il fallait produire plusieurs marionnettes Norbot, une autre technique a été nécessaire : le prototypage rapide. « Il s’agit d’un mélange de silicone, de résine et d’impression 3D », complète Anne King. « Les têtes sont imprimées en 3D et peintes, et concernant les Norbots maléfiques, la couleur de la peau est légèrement différente. Ce sont les seules marionnettes sans plasticine du tout, et on en a fabriqué 56 au total. »
Le redoutable Feathers McGraw comportait ses propres difficultés : « On a essayé d’en réaliser un en silicone », poursuit Anne King, « mais le résultat n’était pas très probant. Comme il est dépourvu de toute expression, tout doit passer par sa gestuelle qui nécessitait qu’on change constamment les mouvements de son corps. Du coup, toute la partie noire de son corps est en plasticine. La marionnette d’origine était une sorte de masse rebondie avec des jambes amovibles. Quand on a une grosse équipe avec plusieurs marionnettes, il faut faire en sorte que tous les exemplaires soient identiques. Ses yeux sont deux têtes d’épingle qu’on ne peut pas mouler si bien qu’on a dû acheter d’innombrables quantités d’épingles – par boîtes de 50 –, puis toutes les mesurer et sélectionner celles qui avaient la bonne taille. Cela nous a pris un temps infini ! »
L’ANIMATION PREND VIE !
À l’époque d’Un mauvais pantalon, Feathers était, pour l’essentiel, animé par Nick Park et Steve Box car l’équipe était assez réduite. Mais dès lors que la production a gagné en ampleur, le superviseur de l’animation Will Becher a joué un rôle crucial. « Je supervise l’équipe », dit-il, « pour faire en sorte que tous les animateurs respectent la bonne tonalité de chacun des personnages. Notre équipe compte 32 animateurs et 7 assistants animateurs. Nous avons réuni certains de nos animateurs les plus anciens, qui étaient déjà là à l’époque du MYSTERE DU LAPIN-GAROU, il y a vingt ans, et d’autres qui travaillent avec nous depuis dix ans, sans oublier de nouveaux venus qui se sont formés chez Aardman. C’est une équipe formidablement variée. Nous avons six animateurs en chef : un par personnage principal. Ce sont ceux qui déterminent la tonalité et certaines caractéristiques du personnage. Mon rôle consiste à faire en sorte que l’ensemble des animateurs cernent bien tous les personnages qu’ils animent. C’était merveilleux de voir tous ces gens, qui sont dépositaires d’un tel savoir, reformer une équipe et de les entendre échanger leurs connaissances entre eux. »
Les bibles d’animation jouent un rôle crucial dans ce cheminement. « Nous avons une réunion hebdomadaire avec les animateurs », précise Will Becher, « pendant laquelle nous visionnons tous les plans, image par image, en prêtant attention aux choses qui fonctionnent vraiment bien, à celles qui ne fonctionnent pas, à la manière dont les personnages adressent un clin d’œil, à leur manière de se tenir, à leur posture etc. Cela fait écho à une version de travail des bibles de personnages que j’ai créées comportant tous ces détails : la forme de la bouche, la couleur des paupières, etc., sans oublier quelques infos sur les émotions des personnages. » Le rôle de l’animateur ne se résume pas à des compétences techniques : « L’animateur doit avant tout comprendre les émotions des personnages et tenter de faire émerger ces émotions chez une petite marionnette. Les animateurs, au fond, sont tous des acteurs. » Pour mettre au point la caractérisation des personnages, chaque scène est jouée devant la caméra par les deux réalisateurs, Nick Park et Merlin Crossingham. Un dispositif en prises de vue réelles qui, d’après Will Becher, « est un moyen efficace d’évoquer tel ou tel moment dans l’interprétation d’un personnage qui permet ensuite à l’équipe d’avoir un élément concret à partir duquel travailler. Mais on ne s’en sert pas comme d’un point de repère dont il faut absolument se rapprocher, mais davantage comme d’une indication sur ce que le personnage pense ou ressent. On s’inspire de l’essentiel de ces images en prises de vue réelles : Park et Crossingham sont de brillants acteurs et ils nous fournissent un excellent cadre, sans que ce soit nécessaire de les imiter. »
VERS LE FILM NOIR
Le directeur de la photo Dave Alex Riddett fait partie de l’équipe de Wallace & Gromit depuis le tout début. Même s’il n’est crédité au générique qu’à partir d’Un mauvais pantalon, il se souvient d’avoir réglé les éclairages de la séquence sur la lune d’Une grande excursion. Quand on lui demande quel est son meilleur souvenir de LA PALME DE LA VENGEANCE, il répond : « J’ai adoré éclairer le pingouin. Il a une forme très simple et on a cherché à révéler cette ‘part d’ombre’ qui lui est propre, à mettre en lumière cet esprit maléfique qui est en lui. En ce qui le concerne, l’éclairage doit être assez simple : en prison, on a utilisé une lumière bleutée d’un côté et un éclairage à la bougie, dans des tons chauds, de l’autre, pour mettre la forme du personnage en valeur. Mais il s’agit ensuite d’éclairer ses yeux – deux petites billes – afin de suggérer que cette petite créature est traversée par des idées maléfiques. Quand il est en prison, l’atmosphère bascule vers le film noir pour nous rappeler qu’on a affaire à un personnage malveillant. Les moments où il sort de l’ombre pour entrer dans la lumière relèvent de cette démarche. Ce qui est formidable dans la saga Wallace & Gromit, c’est qu’elle s’inspire toujours de plusieurs courants cinématographiques : on s’inspire de toutes sortes de genres. Park sait parfaitement passer d’un registre à l’autre et on peut donc très bien passer de la comédie façon studio Ealing au cinéma horrifique de la Hammer, du suspense hitchcockien à l’univers de James Bond. C’est un monde qui croise ces différents registres avec fluidité. Et c’est un rêve pour un chef-opérateur ! »
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