Le retour de Superman au cinéma : Entretien avec le producteur Peter Safran
Article Cinéma du Lundi 28 Juillet 2025

ENTRETIEN AVEC LE PRODUCTEUR PETER SAFRAN

Votre filmographie de producteur est impressionnante. En quoi le projet de SUPERMAN se distingue-t-il des autres ?


?C’était un rêve qui se concrétisait. Je voulais tourner une nouvelle version de SUPERMAN depuis 1978, quand j’ai découvert celle de Richard Donner, avec Christopher Reeve. J’étais adolescent, à Londres, je l’ai vu à Leicester Square et, depuis, j’ai eu envie d’en faire un moi-même. C’était donc un véritable rêve éveillé de pouvoir faire ce film avec James Gunn qui, à mes yeux, est le meilleur réalisateur de films de super-héros à l’heure actuelle. Le tournage a été spectaculaire. On a vraiment pu faire tout ce qu’on voulait pour raconter cette histoire d’une manière nouvelle et faire découvrir Superman à toute une nouvelle génération. On voulait imposer David Corenswet comme le Superman de cette nouvelle ère. On a pris un plaisir fou à faire ce film. Les acteurs avaient une attitude très positive et avaient tous envie d’être là. On a entamé le tournage à Svalbard, en Norvège. Il faisait – 10°C et David Corenswet était allongé dans la neige, sur une plaque de glace, mais il gardait le sourire parce qu’il était heureux d’être là. Cette atmosphère a imprégné tout le tournage jusqu’au bout – à Atlanta, à Cleveland, à Cincinnati, jusqu’à la fin du tournage. On ressentait une énergie positive qui, d’ailleurs, fait écho à la tonalité du film qu’on voulait réaliser. C’est toujours formidable quand l’atmosphère du tournage correspond aux valeurs qu’on défend dans le film.

Est-ce que le projet que vous a présenté James Gunn correspond à ce que le spectateur découvrira à l’image ?

?James m’a appelé pour me dire qu’il avait trouvé une entrée en matière pour l’intrigue, d’un point de vue thématique. Il savait de quoi devait parler le film. Une fois qu’il a eu ce postulat de départ, il ne s’en est jamais éloigné. Avec n’importe quel projet de film, mais plus encore avec un film de super- héros, il faut se poser la question du pourquoi. Pourquoi est-ce qu’on raconte cette histoire ? Et pourquoi maintenant ? James est très rigoureux en la matière. Il a un thème central qu’il veut explorer, et qui est une manière de formuler un point de vue sur la condition humaine. Et ce n’est pas toujours évident de trouver cette thématique ou de construire une grosse production comme SUPERMAN autour de ce thème. Il m’a donc expliqué qu’il voulait se poser la question de savoir comment survivre dans le monde tel qu’il est devenu aujourd’hui quand on a le point de vue de Superman, c’est-à-dire un point de vue bon et bienveillant. Mais comme Superman est foncièrement bon et extraordinairement puissant, il n’est pas forcément le personnage le plus intéressant qui soit. Il n’a pas toujours eu la densité psychologique qu’exigent les héros des grandes histoires. Mais James y a beaucoup réfléchi, et ce qui l’a frappé, c’est qu’il y avait un matériau intéressant à creuser dans les choix qui nous façonnent et font de nous les êtres que nous sommes devenus, et la tension entre l’identité kryptonienne de Superman et son éducation humaine. Cela rejoint la question de savoir si on peut survivre dans le monde actuel quand on ne voit que ce qu’il y a de bon chez les gens. À mes yeux, c’était la question la plus intéressante et une base solide pour construire le film. Quand les spectateurs découvriront le film, ils se rendront compte à quel point ce thème est fort.

Outre le fait que vous avez toujours voulu produire un SUPERMAN, pourquoi ce personnage était-il un choix judicieux pour lancer le nouvel univers cinématographique de DC Studios ?

Superman, c’est le tout premier super-héros, et cela faisait plus de dix ans qu’il n’y avait pas eu de film qui lui soit entièrement consacré. Les plus récents ne dégageaient pas cet optimisme qu’on voulait retrouver avec notre version – un optimisme qui nous ramène au film de 1978. Par conséquent, il nous paraissait évident d’entamer notre DC Universe avec le super-héros des origines. Ce film parle avant tout d’amour et de compassion et de la bonté inhérente à l’être humain. Je pense que ce sont des valeurs dont on a besoin plus que jamais aujourd’hui. Dans un monde de plus en plus polarisé et clivé, ce film s’adresse à tout le monde. C’est un film qui rassemble, dans un esprit humaniste, avec ce credo consistant à voir la part de lumière chez tous ceux qui nous entourent.

Pourquoi avez-vous confié le double rôle de Superman et Clark Kent à David Corenswet ?

Il suffit de le voir ! (rires) Il ressemble à Superman ! Il fait 1m93, il a de beaux cheveux sombres, les yeux bleus, et il a tout du type 100% américain. Il vit dans les environs de Philadelphie. Il est marié à une femme qu’il a connue au lycée. Il incarne le parfait archétype de l’Américain, et cela faisait un bon moment qu’on n’avait pas vu à l’écran un Superman de cette envergure. Mais il insuffle surtout une vraie bonté au personnage. C’est un père de famille, un garçon adorable. Il a pris soin des acteurs et des techniciens. Il est animé par la même générosité qu’on attend de Clark Kent et de Superman. On a visionné sa bande démo le premier jour des auditions – en tout cas la première semaine – et dès qu’on l’a vue, on s’est dit qu’on pouvait lancer le film et qu’on tenait notre acteur. Ensuite, quand il est venu passer un essai caméra, il n’y a plus eu le moindre doute. Il a un charisme fou. Il a été formé à Juilliard, comme Christopher Reeve qui avait environ le même âge à l’époque. Il est animé par une vraie rigueur, une véritable éthique professionnelle, et il a des qualités artistiques qui le distinguent des autres. J’ai hâte que le public le découvre. C’est un acteur de cinéma à l’ancienne et il n’y a plus beaucoup de garçons comme lui aujourd’hui.

Qu’est-ce que Rachel Brosnahan apporte au rôle de Lois Lane ?

L’alchimie entre Rachel et David fonctionne à merveille. Quand on a fait des essais caméra pour Clark Kent et Lois Lane, on avait retenu trois actrices et trois acteurs et on a organisé différentes combinaisons tout au long de la journée. Et quand Rachel et David ont tourné leur bout d’essai ensemble, ils ont fait des étincelles. Il y avait beaucoup d’autres comédiens qui étaient bons et qui apportaient quelque chose d’intéressant, mais ensemble, ils étaient encore meilleurs que séparément. Elle est charismatique, magnétique. Elle dégage une intelligence naturelle qu’elle a magnifiquement insufflée au personnage de Madame Maisel. Elle est futée. Sous les traits de Lois, elle est l’égale de Superman à tous égards et on le ressent tout au long du film. On n’a pas l’impression d’avoir affaire à un super-héros qui protège un être humain, mais qu’ils forment un véritable duo. Elle rend coup pour coup, et on comprend pourquoi l’être le plus puissant de la planète est attiré par cette femme en particulier. Elle est indépendante, elle est forte, et ils forment une équipe incroyable. Chacun apporte quelque chose que l’autre n’a pas.

Comment avez-vous eu l’idée d’engager Nicholas Hoult pour camper Lex Luthor, le super-vilain le plus emblématique de l’univers de Superman ??

Tous les acteurs sont épatants, mais Rachel, David, et Nick Hoult, dans le rôle de Lex Luthor, sont extraordinaires ensemble. Je trouve que Nick a livré la plus belle interprétation de Lex Luthor qu’on ait jamais vue. Et même si j’aime beaucoup les autres – Gene Hackman était phénoménal, Michael Rosenbaum, dans Smallville, était épatant –, mais jamais un acteur n’avait incarné Lex Luthor d’une manière aussi fascinante. Il me fait penser à Jack Nicholson dans DES HOMMES D’HONNEUR dans la mesure où il croit agir dans l’intérêt général. Il est vraiment convaincu du bien-fondé de ce qu’il fait – il ne cherche pas seulement à s’enrichir ou à acquérir plus de pouvoir. À ses yeux, il agit pour sauver l’humanité. Et même si sa méthode est un peu à côté de la plaque, en voyant le film, on peut se dire que, au fond, il sait ce qu’il fait. Nick a incarné un formidable personnage avec Lex Luthor. C’est l’un des grands méchants de l’univers DC et Nick l’a beaucoup enrichi. C’est un personnage extraordinaire servi par un acteur qui l’est tout autant.

James a réuni toute une bande d’autres héros. Pouvez-vous nous parler du Justice Gang ?

Le Justice Gang est un mélange formidable. Nathan Fillion a souvent travaillé avec James et moi au cours des vingt dernières années et il a toujours des idées brillantes. Nathan est formidable dans le rôle de Guy Gardner – et je crois d’ailleurs que James l’a choisi pour lui donner cet air stupide avec cette coupe au bol ! (rires) Edi Gathegi, qui interprète Mister Terrific, est un vrai coup de cœur pour nous. C’est un personnage sensationnel, assez méconnu dans le DCU, sauf pour les vrais fans de DC. Mais c’est un personnage passionnant qui devrait avoir un bel avenir au sein du DCU. Quant à Isabela, elle a donné à Hawkgirl un vrai supplément d’âme. Historiquement, Hawkgirl est un personnage majeur, assez connu, et Isabela lui a insufflé sa propre personnalité si bien que le public va tomber amoureux d’elle !

Que pouvez-vous nous dire de Metamorpho, sans trop en révéler ?

Anthony Carrigan incarne Metamorpho, et tout comme Mister Terrific, c’est un personnage plus méconnu. Ses facultés sont utilisées de manière très logique dans le film et le personnage est d’une telle richesse que, à mon avis, les spectateurs vont tout de suite l’adorer. Je suis convaincu qu’il va devenir un vrai chouchou des fans.

Dans tout film de Superman digne de ce nom, le Daily Planet, qui emploie Clark Kent, occupe une place importante, tout comme Jimmy Olsen, personnage emblématique de Metropolis. Jimmy Olsen est un personnage classique issu de la mythologie de Superman. Il est aussi important que Lois Lane et Lex Luthor. Et Skyler Gisondo dégage une assurance qui tranche avec son physique. Il a cette allure juvénile qui convient au personnage, mais il possède une assurance et une confiance en soi propres à un homme beaucoup plus imposant physiquement. On comprend pourquoi plusieurs femmes dans le film sont attirées par Jimmy. Il est brillant, intelligent, éloquent et il dégage un charisme qui saute aux yeux.

Pourquoi avez-vous décidé d’entamer le tournage à l’autre bout du monde, à Svalbard, en Norvège ??

James tenait par-dessus tout à tourner la Forteresse de la Solitude en décors réels, dans un environnement arctique. Il voulait que l’équipe, et plus encore le public, ressente la réalité de la neige et du froid. C’est l’ouverture du film. C’est donc la toute première séquence qui ouvre le cycle de ce nouveau DCU. C’est notre premier long métrage qui sort en salles, et James voulait que la séquence inaugurale soit tout simplement époustouflante. Et Svalbard est, de fait, époustouflant. C’est un lieu magique.

Pourquoi avez-vous choisi de tourner à Cleveland, dans l’Ohio ?

Tout d’abord, Cleveland est le berceau de Superman. Jerry Siegel était originaire de Cleveland et il y a fait ses études avec Joe Shuster, si bien qu’on trouvait l’idée de tourner dans la ville où ce personnage est né poétique. Ensuite, Cleveland possède beaucoup de bâtiments datant d’une époque qui nous parlait – des bâtiments qui sont restés intacts depuis leur construction. Le style architectural qu’on voulait – concocté par notre chef-décoratrice Beth Mickle et James – se trouve d’ailleurs à Cleveland, ce qui nous a semblé idéal. Enfin, les autorités de Cleveland étaient plus qu’enthousiastes à l’idée de nous accueillir. On a toujours envie d’aller là où on se sent bien accueillis. Pendant le tournage sur place, les habitants ont été extrêmement chaleureux et enchantés qu’on fasse un film sur leur célébrité locale. C’était donc un excellent choix. Et, non loin de là, Cincinnati abrite un lieu extraordinaire où on a pu situer notre palais de justice. C’était tout simplement magnifique.

Qu’est-ce que le public va découvrir dans ce SUPERMAN qu’il n’a sans doute jamais vu auparavant ??

Dans ce film, Superman est confronté à l’un des plus grands défis de sa vie. Ses convictions les plus profondes sont ébranlées. Il doit se livrer à une véritable introspection pour mieux comprendre qui il est et ce qu’il devrait être, au lieu de se contenter de se voir comme les autres le perçoivent. Il doit s’interroger sur son identité et faire un choix pour savoir dans quelle direction il veut s’engager.

À votre avis, pourquoi ce personnage continue-t-il de toucher autant le public ?

Les BD sont lues avec beaucoup de succès depuis 90 ans et ce n’est pas un hasard si elles touchent chaque génération successive. Elles explorent les peurs et les espoirs de chacune de ces générations, de chacune des époques. Je pense qu’aujourd’hui les gens vont trouver dans notre SUPERMAN quelque chose dont ils ont besoin – dont nous avons tous besoin : un moyen d’apaiser les divisions, de rassembler les gens de manière totalement apolitique. Je crois que le film s’adresse à tout le monde parce qu’il nous dit seulement qu’il faut parfois se mettre à la place de l’autre pour comprendre son point de vue. Le fait que Superman soit capable de survivre dans ce monde tout en voyant ce qu’il y a de bien chez les gens pourra peut-être nous encourager à voir le bien chez les autres.

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