YOROÏ : Entretien avec l’acteur et co-scénariste Orelsan
	Article Cinéma du  Vendredi 31 Octobre 2025 
Après une dernière tournée éprouvante, Aurélien décide de s'installer au Japon avec sa femme Nanako, enceinte de leur premier enfant. Alors que le jeune couple emménage dans une maison traditionnelle dans la campagne japonaise, Aurélien découvre dans un puits une armure ancestrale qui va réveiller d'étranges créatures, les Yokaïs…
Entretien avec l’acteur et co-scénariste Orelsan/Aurélien Cotentin
Quel a été votre rôle dans la production de YOROÏ ?
J'ai écrit le film avec David Tomaszewski, je joue dedans et j’ai aussi participé à la production du film. Ça signifie que je me suis impliqué à tous les niveaux et à toutes les étapes du film, surtout à celui de l'écriture. C'est vraiment une histoire que j'ai écrite de la même façon que j'aurais pu écrire un album ou mon premier film, COMMENT C’EST LOIN. YOROÏ, c’est un projet que j'inscris dans l'ensemble de ma carrière.
D’où vient l’histoire de YOROÏ ?
L'histoire est venue du réalisateur David Tomaszewski. Il faut savoir qu’avec David, on a fait beaucoup de clips ensemble entre 2009 à 2021. En 2012, on avait fait un clip où on était en chevaliers du Zodiaque pour le morceau “Ils sont cools”. À cette époque, on avait déjà commencé à écrire un film qui se résumait à un mec qui trouvait une armure. Mais on n'avait pas été beaucoup plus loin, on manquait un peu de technique à l'époque. Et il y a quatre ans, alors que j'étais en train de finir l’album “Civilisation”, David est venu me voir et il m’a dit qu’il avait trouvé une idée de film, dans la continuité de ce qu'on avait commencé. Et il m’a précisé : “Sauf que tu pars au Japon avec ta femme et voilà, tu tombes sur une armure qui attire des Yokaïs, des monstres japonais”. À partir de ce moment-là on a écrit ensemble pendant un peu plus de deux ans. J'aime bien écrire et c'est exactement le genre de film que j'avais envie de scénariser : un mélange d’action et de fantastique, un peu semi-autobiographique et avec de l'humour.
Quelle a été votre motivation principale pour créer YOROÏ ?
C’était l’envie de faire une comédie d'action fantastique, à l’image de ce qu’on regardait dans les années 90, accompagnée d’une proposition musicale. Bref un projet qu’on ne voit pas souvent au cinéma.
Comment est-ce que vous avez travaillé le scénario avec David ?
Est-ce que le processus a été long ? Je ne saurais même pas dire combien de versions on a écrites, mais je crois que la version de tournage, c’était une V17 ! De mon côté, j'adore écrire depuis l'époque de COMMENT C’EST LOIN. J'avais commencé à me passionner pour l’écriture de films, à écouter des podcasts et à lire tous les bouquins de scénarios de la Terre. On a fait une première version du scénario qui était tellement longue que des partenaires nous ont demandé si ça ne nous disait pas de la transformer en série. On voulait en faire un film, donc on a eu un gros travail pour couper et revenir sur une histoire plus équilibrée.
Est-ce que vous aviez une envie particulière de revenir au cinéma, dix ans après COMMENT C’EST LOIN ?
Oui, bien sûr. Je me rappelle que lorsque je faisais l'album “La fête est finie” ((2017), j'avais déjà des pitchs de côté. J’avais envie d’y retourner, mais ce n'était pas encore le bon moment. C’est d'ailleurs pour cette raison que j’avais commencé à m’entraîner pour des scènes d’action : on n’avait pas encore de projet de film avec David, mais je savais que je voulais travailler sur un projet de film d’action.
Donc la préparation physique pour YOROÏ remonte à plusieurs années ?
Oui, entre 7 et 8 ans, avec plus ou moins de régularité.
Comment est-ce qu’elle s’est intensifiée pour YOROÏ ?
En général, je m’entrainais régulièrement, au moins deux fois par semaine. Puis il y a eu une période avec les cascadeurs au début de la préparation du film, et à la fin de cette préparation, je m’entrainais 6 à 7 heures par jour. À l’époque, je partais d’une base de zéro. Je n’étais pas comme les gens qui ont fait du taekwondo, du karaté ou de la gym, et qui sont souples. Moi, je n'étais pas vraiment souple, j'avais juste fait du basket. Et c’est pour ça qu’il a fallu tout construire. Et ça a pris du temps.
Est-ce que la préparation physique a été la partie la plus difficile dans la production du film ?
Non, le plus difficile, ça a été de tout faire à la fois. Parce qu'il fallait apprendre les textes, modifier l’histoire parfois, réécrire le scénario, s'entraîner. Au bout d'un moment, je faisais aussi de la muscu pour jouer le rôle d’Orelsama. Et il fallait aussi travailler l'acting. Donc c’est plutôt la somme de tout cela qui a été le plus compliqué. Et il faut ajouter à ça que je venais d'avoir un bébé. En soi, aucune partie n’a été désagréable, et en même temps, c'était un rêve.
À quel point YOROÏ fait référence au cinéma ?
David, c'est le plus grand passionné de cinéma que tu peux rencontrer. Il connaît tout, c'est une encyclopédie.. À l'âge de 15 ans, il gagnait déjà des concours de courts-métrages de STAR WARS. De mon côté, je suis un gros fan de films, de séries et aussi de mangas. Dans YOROÏ, on a voulu qu'on retrouve ce ton qu'on peut choper dans les mangas, à travers un mélange d'humour, de l'action et de sérieux. L'ensemble devait être cohérent. On sent un immense respect pour la culture japonaise et ses légendes. C’était important. On s'est beaucoup renseignés sur les Yokaïs mais aussi sur l’architecture de la maison située au Japon. Aussi, on a trouvé une actrice franco-japonaise, Clara Choï, qui joue le personnage de Nanako. On voulait vraiment que le film respecte le Japon et que les gens qui s'intéressent à cette culture soient satisfaits en regardant le film.
Avez-vous vu ou revu des films avant le tournage ?
Il y a plein de films sur les yokaïs. Par exemple, LA MALEDICTION DES YOKAÏS, un vieux film des années 60 réalisé par Kimiyoshi Yasuda. On a aussi regardé LA GUERRE DES YOKAÏS (2005) un long-métrage de Takashi Miike. Sans oublier BABY CART, une saga de films de samouraï des années 70 dont je suis archi fan. Et il y a eu aussi JIGOKU (1979) un des premiers films d'horreur japonais qui nous a vachement influencés avec HOUSE (1977). En mélangeant ça, avec JUMANJI et SOS FANTÔMES, vous avez nos influences.
On perçoit aussi l’influence de Cronenberg dans la manière dont sont créés ces monstres qui viennent vous attaquer chaque nuit.
Cronenberg, ça fait partie des premiers films qu’on a regardés, au même titre que ceux de Verhoeven. C’est ça qu'on voulait voir dans les monstres. Aujourd'hui, tout est CGI, et ça ne nous intéressait pas. On voulait qu'il y ait un truc plus organique. On a travaillé avec Olivier Afonso et son Atelier 69 qu’on connaît depuis le clip de “Ils sont Cools”. Pour YOROÏ, on était dans une logique similaire : avoir des monstres plus réels, avec des dimensions qu’on pouvait maîtriser.
Comment est-ce que vous avez travaillé le personnage d’Aurélien du film ?
Ce qu'on trouvait cool, c'était de l’inscrire dans la lignée de ce que j’ai fait jusqu’à maintenant. J'ai l'impression de jouer des Orelsan toujours un peu différents : l'Orelsan de Bloqués, n'est pas l'Orelsan de COMMENT C’EST LOIN ou d'un clip plus premier degré comme “Jour meilleur”. Ce sont des petites parties de moi et on a envisagé le personnage de cette manière. Dans YOROÏ, c'est une version d'Orelsan qui n’est pas très loin du burn-out et qui a décidé de fuir avec sa femme enceinte. On s'est dit que c'était un Orelsan un peu fuyant, même s’il a toujours une pointe d’humour. À la différence du Orelsan de Bloqués qui est complètement naïf et un peu bébête.
L’idée était d’aborder des sujets à la manière dont vous les abordez dans vos morceaux ?
C'est vrai que dans YOROÏ, il y a une forme de mélange de tous les albums. C'était important d'avoir des thèmes traités différemment mais des thèmes qui me ressemblent. C’était l'occasion de faire un bilan alors que le héros arrive à un certain stade de sa vie : il approche de la quarantaine, sa femme est enceinte et il se pose plein de questions. Comme pour mieux régler des sujets que je croyais avoir réglés. Il y avait cette idée où faire évoluer le héros, quelque part, ça me ferait évoluer.
Combien de temps a duré le tournage ?
Trois mois environ, entre le Japon et la France. Au Japon, on a tourné toutes les scènes en extérieur, notamment à Osaka. En France, on a reproduit la maison, avec des cascadeurs et des monstres 100% français.
Comment est-ce que vous avez préparé les scènes de combat et les chorégraphies ?
On a bossé avec l’équipe de Manu Lanzi et Anthony Pho pour le tournage en France. Je me suis entraîné longtemps avec eux, et ensuite on faisait ce qu'on appelle des prévisualisation dites “préviz”, c’est-à-dire filmer des scènes de baston avec un iPhone et de les améliorer pour se rapprocher le plus possible du tournage avec les caméras. Pour chaque scène, on faisait trois à quatre préviz différentes. À chaque fois ça nous prenait une journée : on y allait, on écrivait la scène, et on réécrivait de manière à voir ce qui rendrait le mieux dans le film. Au Japon, il y a une scène de baston entre mon personnage et celui de Nanako dans les rizières. On a travaillé cette scène avec Koji Kawamoto et ses équipes japonaises qui ont notamment travaillé sur JOHN WICK. Je suis parti m'entraîner un mois au Japon, et ils nous ont montré la chorégraphie. C’était fou.
Comment est-ce que vous avez travaillé avec cette armure qui vous colle à la peau ?
L'armure, ça a été un vrai casse-tête. Déjà, elle sort de la tête de David. Il l'a pensée à travers des dizaines de pièces qu’il connaît par cœur. Il a dessiné chaque yokaï sur l'armure et a ensuite travaillé la bonne forme avec l’équipe d’Olivier Afonso. Le problème c’est que quand tu regardes Les Chevaliers du Zodiaque, c'est cool, mais les armures, dans la vraie vie, jamais tu peux marcher avec. (rires) J’avais deux heures de préparation pour l’enfiler chaque jour et j’avoue qu’à la fin je n’en pouvais plus (rires). Et ça a pas mal compliqué les scènes d’action, vu que l’armure pouvait empêcher les mouvements. Comme une combinaison de plongée. Donc au final, ça collait bien avec l’idée du héros qui en avait marre d’être dans une armure.
Quelle est la place de la musique dans YOROÏ ?
On a fait toute la musique du film parce qu'on voulait qu’il n’y ait que des musiques originales. Donc tous les morceaux qui sont dans le film, on les a créés, même celui qu’on peut entendre dans une scène qui se déroule dans un supermarché. Il y a un mélange de morceaux originaux à moi et il y a aussi des morceaux qu’on a façonnés avec le compositeur du film, David Soltany. On a parfois adapté des morceaux que j’avais écrits et on est parti enregistrer à Londres avec le London Symphony Orchestra qui est le meilleur orchestre du monde. C'était fou. C'est un orchestre qui a fait les musiques de la saga HARRY POTTER et a enregistré plein de musiques de films composées par John Williams. C'est vraiment un orchestre mythique. Skread a bossé sur l’ensemble de la bande-originale et David s’est aussi beaucoup investi dedans.
Comment avez-vous trouvé Clara Choï ?
Il y avait beaucoup de critères : il fallait trouver une une actrice qui parle japonais, mais qui pouvait aussi me chambrer et avoir un sens de la vanne. Tout a marché avec Clara. Elle est super forte, elle a fait le Conservatoire, elle a fait beaucoup de films, du théâtre, et en même temps elle communique quelque chose de cool. Le plus important, ça a été l’alchimie et on l’a bien travaillée ensemble. C’était pas évident de jouer ce couple parce que tous les deux on est un peu timides et il y avait beaucoup de pudeur. Et j’aimais beaucoup l’idée que mon personnage qui est fuyant et mou soit face à une Nanako plus dynamique, avec cette idée de poids plume méga forte.
Comment est-ce que vous avez travaillé avec David, qui réalise ici son premier long-métrage ?
On est assez complémentaires. De mon côté je suis plus sur la vanne, sur l’humour, et un peu le côté action et combats. David est vraiment sur l’image, les décors, la direction artistique et la direction d’acteurs. On se retrouvait sur l’écriture du scénario et l’histoire. C’est notre complémentarité qui fait que YOROÏ a ce ton là. Parce que lui il va être intransigeant sur la beauté, là où moi je vais être sur la blague. Je pense que le mélange des deux est intéressant.
Qu’est-ce que représente Orelsama dans ce film ? C’est le yokaï ultime ? Quel est son rapport avec Aurélien ?
Pour moi Sama, c’est deux choses : c’est d’abord le pire d’Aurélien, il représente vraiment ses bas instincts. C’est Aurélien qui a décidé d’être méchant et de se laisser emporter par tous ses mauvais sentiments et son burnout. Et Sama, c’est aussi une caricature du leader populiste : pour les gens, il dénonce des vérités, alors qu’il est content de rien, a juste la haine, veut créer du chaos basé sur un sentiment de réaction. Et en même temps il est kiffant parce qu’on a tous envie d’être quelqu’un qui n’en fait qu’à sa tête de manière humoristique et sous couvert de liberté. Il est vraiment jouissif à jouer.
Si vous voulez tout connaître sur l’histoire des trucages, dans le cinéma, les séries, le maquillage, le cinéma d’animation et les plus belles attractions des parcs à thème, offrez-vous EFFETS SPÉCIAUX : 2 SIÈCLES D’HISTOIRES, la bible des SFX, unanimement célébrée par la presse comme l’ouvrage absolument incontournable sur le sujet, avec 848 pages, 2500 photos dont beaucoup exclusives, et les interviews de 160 des plus grands spécialistes mondiaux ! Vous découvrirez des anecdotes incroyables sur les tournages des films et séries cultes, et vous saurez exactement comment les moments les plus étonnants de vos œuvres favorites ont été créés !
Pour vous procurer ce livre de référence en un clic sur Amazon, c’est par Ici.
 
	
			













