Avant-première ESI : 2012 – L'année où la Terre s'arrêta
Article Cinéma du Dimanche 26 Avril 2009

En novembre prochain, les salles de cinéma accueilleront le plus spectaculaire des films catastrophes de toute l'histoire du cinéma. Inspirée par une prophétie Maya, la prochaine production de Roland Emmerich, coutumier du genre, promet d'éclipser les cataclysmes de ses précédents films, Independence Day ou Le Jour d'Après. La fin du monde sonnera en 2012, ou ne sera pas...

Par Pierre-Eric Salard

Le roi du film-catastrophe

Après voir fait ses armes sur des productions allemandes, Roland Emmerich embrasse la science-fiction avec Stargate, la Porte des Etoiles (1994), dont la réussite initie une longue franchise. Dès 1996, il démontre ses talents pour les destructions massives avec Independence Day, où les capitales mondiales sont instantanément rasées par un gigantesque souffle de flammes. Deux ans plus tard, il confirme son goût pour le genre apocalyptique avec le remake américain de Godzilla. La ville de New-york s'y retrouve quasiment rasée pour la seconde fois d'affilée ! Vingt-cinq ans après Tremblement de terre (1974) et la Tour Infernale (1975), Emmerich s'impose comme le maître du genre et initie une nouvelle mode de films catastrophes, dont Armageddon et Deep Impact sont les plus illustres représentants. Le réalisateur persiste et signe avec Le Jour d'Après (2004), une oeuvre aux relents écologistes où l'humanité paye pour son comportement irresponsable vis-à-vis de son berceau naturel. Tsunamis, inondations et températures insupportablement basses s'y succèdent dans un déluge apocalyptique. Roland Emmerich pouvait-il aller plus loin dans le genre du film-catastrophe ? Pouvait-il trouver un concept plus universel que la rébellion de la nature à l'échelle du globe ? Il semble que le réalisateur n'en ait aucun doute...



Le Déluge des Mayas

En février 2008, lors de la tournée promotionnelle de son dernier film, 10 000, Roland Emmerich annonce que son projet suivant sera un film catastrophe intitulé 2012. Le nouvelle est accueillie avec enthousiasme sur internet, où les fans du réalisateur devinent rapidement que le titre du film se réfère à la date finale du calendrier Maya. En effet, le « cycle long » (un décompte des jours sur une période d'environ 5125 années) de ce dernier se termine le 21 décembre 2012. Selon les théories de certains ésotéristes et millénaristes, cette échéance du calendrier de l'ancienne civilisation méso-américaine déclenchera la fin du monde actuel et l'émergence d'un monde nouveau. Autrement dit : l'apocalypse ! La pop-culture s'est depuis longtemps emparée de cette soi-disante prophétie. De nombreux essais, romans et documentaires s'en sont inspirés. Même les extraterrestres de la série The X-Files devraient coloniser notre planète lors de ce fameux solstice d'hiver de l'année 2012 ! « A partir du titre du film, il est effectivement facile de deviner son thème », raconte Roland Emmerich. « Il suffit d'aller sur internet, de se connecter à un moteur de rechercher et de taper « 2012 ». C'est ce que j'ai fait, il y a deux ans, lorsque je recherchais le sujet de mon film suivant. Les résultats furent fascinants : pas moins de 240 millions de pages répertoriées ! C'est gigantesque ! Il existe tellement d'hommes qui croient que l'apocalypse arrivera en 2012 ! Or vous le savez : j'adore les films catastrophes. J'avais dit que je n'en tournerai plus, mais l'occasion était trop bonne ! Pourquoi ne pas faire le plus grand film du genre ? Et puis, cette fois-ci, il ne s'agit pas de destructions causées par l'homme, mais d'une catastrophe naturelle à très grande échelle ! Après 2012, personne ne pourra, ne voudra produire d'autres films de ce genre avant longtemps (rires) ! La fameuse prophétie Maya m'a donc inspirée une excellente histoire. En fait, c'est même le plus vieux récit du monde : celle du mythe du Déluge ».

L'Arche de Noé du 21ème siècle

Emmerich écrit alors un premier traitement en collaboration avec Harald Kloser, le compositeur, co-scénariste et producteur exécutif de 10 000. Selon les dernières informations, l'histoire débuterait en 2009, lorsqu'un scientifique américain découvre que le soleil subit des tempêtes d'une intensité inédite. Les graves conséquences que cela pourrait engendrer sur Terre le pousse à contacter un conseiller scientifique de la Maison Blanche. Mais le chef de cabinet du gouvernement, imbu de lui-même, ne lui permet pas de prévenir le Président des Etats-Unis... Un an plus tard, ce dernier, prenant connaissance du cataclysme encouru, organise une réunion secrète avec les principaux leaders du monde. Mais la population civile n'est pas mise au courant et ne sait pas encore que l'enfer l'attend... Début 2012, les premiers signes de l'apocalypse se manifestent, tels des tremblements de terre sur la côte ouest américaine, de gigantesques lames de fond et des fissures dans la croûte terrestre, sur toute la surface du globe... Le film se concentre ensuite sur les membres de la famille du héros, un chauffeur de limousine, écrivain à ses heures perdues. Ils tenteront de survivre aux plaies de l'apocalypse : séismes qui engloutissent Los Angeles, éruptions de volcans, pluies acides et tsunamis. Ils apprendront bientôt que les principaux dirigeants du monde ont financé un mystérieux projet permettant à l'élite de survivre et de rebâtir ultérieurement une civilisation. Mais l'Arche de Noé du troisième millénaire embarquera-t-elle de simples civils ne désirant qu'échapper au second Déluge ? L'accroche du film suggère une réponse : « Comment les gouvernements de notre planète aideraient six milliards de personnes à affronter la fin du monde ? Ils ne le feraient pas ». Le scénario de 2012 semble cependant réunir tous les joyeux poncifs auxquels Emmerich nous a habitué... pour le plus grand plaisir des amateurs de grand spectacle !

Un budget apocalyptique

Fin février 2008, Roland Emmerich fait le tour des principaux studios hollywoodiens, qui manquent alors de scripts valables à cause de la fameuse grève des scénaristes. Selon sa méthode habituelle, le metteur en scène rencontre chaque dirigeant afin de leur expliquer ses aspirations créatives et les projections budgétaires. La plupart d’entre eux se montrent intéressés par son projet. Il propose ainsi ses productions « clé en main », un procédé qui lui avait permis de vendre efficacement Independence Day et Le Jour d'Après. Après un courte bataille de chiffres, Sony Pictures Entertainment remporte l'enchère et annonce que son studio, Columbia Pictures, financera et distribuera le film. Mais 2012 nécessite 200 millions de dollars de budget, un record dans la filmographie de Roland Emmerich. « Oui, le film coûte très cher », précise le réalisateur. « Mais vous assisterez à la fin du monde, après tout (rires) ! Les financiers qui ont lu le scénario l'ont confirmé : nous ne pouvions pas nous passer de ce montant. Vous savez, quand Harald (Kloser) et mois avons écrit le traitement, nous n'avons absolument pas pensé au budget nécessaire. Nous avons simplement écrit l'histoire que nous désirions voir au cinéma. Ce n'est qu'après avoir terminé le scénario que nous nous sommes demandés : « Mais comment allons-nous réussir à le transposer à l'écran ? » (rires) ! C'est vrai, tout cet argent ajoute de la pression sur nos épaules. Mais je pense que l'adrénaline permet de se dépasser et de faire le travail au mieux... » Le production est enfin lancée, sous le titre de travail Farewell Atlantis (Adieu Atlantide).



L'engloutissement de l'Himalaya

Au cours du printemps 2008, le casting s'embellit de noms prestigieux. John Cusak (Chambre 1408) obtient le rôle principal, alors que Danny Glover (L'Arme Fatale) se retrouve propulsé Président des Etats-Unis - quelques mois avant Barack Obama ! Notons que, si James Earl Jones (Star Wars) avait eu l'honneur d'incarner le premier Président afro-américain dans The Man (1972), Morgan Freeman en a joué un autre dans Deep Impact, un film catastrophe bien connu. « Au cinéma, quand le président est un Noir, c’est qu’une météorite est sur le point de détruire la Statue de la Liberté », avait déclaré l'humoriste américain Jon Stewart lors de la cérémonie des oscars 2008. Il n'avait peut-être pas tord... Le casting est complété par Amanda Peet (Identity), Thandie Newton (Mission : impossible 3), Oliver Platt (Nip/Tuck) et Chiwetel Ejiofor (Serenity). « C'est vraiment excitant de tourner dans ce film », raconte Oliver Platt. « Mon seul regret est de ne pas tourner davantage de scènes devant un fond bleu. J'ai toujours rêve de courir à travers des projectiles enflammés. Mais je joue le Chef de Cabinet de la Maison Blanche, je n'ai donc pas le droit à mes scènes d'action (rires) ! » Enfin, Woody Harrelson (A Scanner Darkly) signe pour le savoureux rôle d'un prophète que personne n'écoute, un personnage que l'acteur compare au Cassandre du mythe grecque. « Je joue un marginal qui parle de l'apocalypse depuis longtemps, mais le monde entier pense qu'il est fou », explique Harrelson. « J'avoue que je réagirais de la même manière face à un tel pessimisme (rires) ! Je ne sais pas pourquoi Roland a pensé à moi pour ce rôle, mais il me va comme un gant ! » Le tournage du film est ensuite annoncé pour juillet 2008 à Los Angeles. Or la menace d'une éventuelle grève du syndicat des acteurs hollywoodiens pousse Roland Emmerich à le décaler d'un mois et à déménager la production pour les studios de Vancouver. Lorsque le tournage s'achève, quelques mois plus tard, Sony Pictures Imageworks (Spider-Man, Hancock) prend le relais et s'attelle à la confection des invraisemblables effets visuels du film... Une première bande-annonce, dévoilée en novembre 2008, montre un gigantesque tsunami engloutir un temple tibétain : le ton est donné. Originellement prévu pour juillet 2009, la date de sortie du film est finalement repoussée à novembre 2009. « Les films de la saga James Bond ont rencontré un tel succès en novembre que nous avons voulu sortir un autre blockbuster à cette même période », explique Rory Bruer, président de Sony Distribution. Notons que le studio a déjà un planning encombré pour la saison estivale, avec de nombreuses sorties importantes, dont Anges et Démons et The Taking of Pelham one two three. 2012 devrait être achevé d'ici l'été prochain, mais ce délai supplémentaire pourrait bénéficier aux effets visuels du film. Pour les spectateurs, ce sont quatre mois de sursis avant d'affronter l'apocalypse concoctée par le roi Roland !

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