Star Trek 7 & 8 : Une nouvelle génération d'effets visuels
Article Cinéma du Dimanche 20 Septembre 2015

Après avoir passé en revue l'histoire des trucages de la série originelle et des six premiers films, penchons-nous sur les deux premières aventures cinématographiques de l'équipage de la série Star Trek : The Next Generation. Entre 1994 et 1996, ces films ont marqué la transition entre les trucages traditionnels et les images de synthèse. Alors qu'une page de l'histoire des effets spéciaux se tourne, la franchise atteint des sommets...

Par Pierre-Eric Salard

Après le très réussi Star Trek VI : Terre Inconnue (1991), à l'occasion duquel l'équipage originel de l'USS Enterprise (Kirk, Spock et leurs collègues) tire sa révérence, les cadres de la Paramount - à commencer par le producteur Rick Berman - établissent une stratégie implacable pour tirer un maximum de profit de la création de Gene Roddenberry. Ils développent trois séries dérivées pour la petite lucarne : Star Trek : The Next Generation (1987-1994), Star Trek : Deep Space Nine (1993) et Star Trek Voyager (1995). L'arrêt de The Next Generation, en 1994, leur permet de produire un film centré sur les aventures de l'équipage de cette série. Star Trek Generations (1994) sort ainsi six mois après la diffusion du dernier épisode de The Next Generation... et précède de deux mois le pilote de Voyager ! L'avenir télévisuel de la franchise est assuré et la relève cinématographique en place... quitte à prendre le risque de lasser le public en lui offrant trop de déclinaisons en même temps... Quoi qu’il en soit, 1994 représente une année charnière pour Star Trek !

Passage de relais

Mais revenons en 1993. A partir d'une idée de Rick Berman, Ronald D. Moore (Battlestar Galactica 2003) et Brannon Braga (Star Trek Voyager) écrivent un scénario qui se penche sur la transition entre les deux générations d'explorateurs « des frontières de l'infini ». Le passage de relais entre les deux équipages de l'USS Enterprise s'avère d'ailleurs littéral ! Le film s'ouvre sur l'inauguration de l'USS Enterprise NCC-1701-B, en présence de trois des cadres du précédent vaisseau : Chekov (Walter Koenig), Scotty (James Doohan) et l'Amiral Kirk (William Shatner). Mais un appel de détresse force le vaisseau flambant neuf à s'introduire dans une anomalie spatio-temporelle, le Nexus, un gigantesque ruban d'énergie. L'Enterprise se tire de ce mauvais pas, non sans perdre plusieurs parties de sa structure - dont celle où se trouvait Kirk. L’amiral est porté disparu... Une centaine d'années plus tard, le vaisseau USS Enterprise NCC-1701-D de la « Nouvelle Génération » rencontre à son tour l'anomalie... et retrouve l'Amiral Kirk, resté prisonnier du Nexus ! Le film offre par la suite au Capitaine Jean-Luc Picard (Patrick Stewart) un tête-à-tête (mollasson) avec son illustre prédécesseur... dont la destinée s'avérera bien décevante !



Générations

David Carson, un vétéran des séries The Next Generation et Deep Space Nine, se voit offrir le poste de réalisateur. Les studios Paramount acceptent de financer la production de Star Trek Generations à hauteur de 35 millions de dollars. Mais ce budget s'avère insuffisant pour tourner le film sur des sites exotiques. Le tournage doit donc se limiter aux alentours de Los Angeles et de Las Vegas. Dès le lancement de la pré-production, le directeur artistique Herman Zimmerman (Star Trek VI : Terre Inconnue, The Next Generation) s'active, en collaboration avec l'illustrateur John Eaves (Ghosts of Mars, Iron Man 2), afin de moderniser le pont de l'USS Enterprise D, qu'il avait lui-même dessiné sept ans plus tôt. Afin de rogner les coûts de production, d'anciens décors de la franchise sont recyclés - certains datant du tournage de Star Trek : Le Film (1979) ! Pour la cinquième fois dans l'histoire de la saga cinématographique, la confection de la majorité des trucages (dont les séquences spatiales) est confiée au studio Industrial Light & Magic (ILM). Composite Image Systems Hollywood (CIS), le studio interne de Paramount TV, obtient celle des effets moins spectaculaires, comme les tirs de phasers et les téléportations. Le superviseur des effets visuels pour CIS, Ronald Moore (à ne pas confondre avec le scénariste Ronald D. Moore), était d'ailleurs déjà à l'oeuvre sur le pilote de The Next Generation...

L'art du recyclage

Moore profite donc de l'opportunité offerte par Generations pour retravailler les trucages créés pour la série, sept ans auparavant. Rappelons qu'en l'espace de sept ans, le cinéma est entré de plein pied dans l'ère du numérique ; en 1994, Terminator 2 : Le Jugement Dernier et Jurassic Park viennent tout juste de révolutionner les méthodes de post-production ! Star Trek Generations devient donc le premier film de la saga à utiliser à plusieurs reprises les images de synthèses. Le logiciel de composition d'images Autodesk Flame est ainsi utilisé pour donner une apparence tri-dimensionnelle aux téléportations – un effet mis au point dans la série, en 1987, par deux futurs spécialistes des effets spéciaux, Gary Hutzel (Firefly, Battlestar Galactica 2003) et Rob Legato (Titanic, Avatar) ! Notons cependant que le numérique est utilisé avec parcimonie dans Generations. La majorité des séquences spatiales sont tournées de manière traditionnelle, avec des maquettes. ILM récupère donc le modèle réduit de l'USS Enterprise NCC-1701-D, que ses artistes avaient conçu pour Rencontre à Farpoint, le pilote de The Next Generation. Repeinte, la maquette bénéficie de l'ajout de nombreux détails supplémentaires sur sa coque, ainsi que d'une refonte de son système d'éclairage interne. Dans le même soucis de recyclage – une véritable constante dans la production de cette saga cinématographique -, ILM récupère la miniature de l'USS Excelsior, un vaisseau ayant fait son apparition dans Star Trek III : A la Recherche de Spock. Grâce à quelques retouches de son design, l'Excelsior devient l'USS Enterprise NCC-1701-B (qui apparaît dans le prologue du film) ! Les modifications structurelles de la maquette, tels l'ajout de ponts supplémentaires, permettent de montrer les dégâts causés par le fameux ruban d'énergie du film sans pour autant abîmer la belle relique... A partir d'un design de John Eaves, les maquettistes d'ILM confectionnent parallèlement une toute nouvelle maquette : l'observatoire interstellaire d'Amargosa. Pour l'anecdote, cette miniature sera ultérieurement modifiée et réutilisée pour les besoins d'un épisode de Deep Space Nine, tout comme celle de l'USS Excelsior/Enterprise B ! Notons qu'une autre maquette est modifiée et réutilisée : celle du dock spatial de Star Trek : Le Film... d'où est inauguré l'Enterprise B dans Star Trek Generations. Pour montrer la destruction d'un oiseau de proie Klingon, les artistes d'ILM se servent d'une astuce encore plus rudimentaire : il s'agit de plans conçus pour les films précédents !

L'aide du numérique

Dans une séquence spectaculaire du prologue du film, l'USS Enterprise NCC-1701-B s'introduit dans le Nexus afin de porter secours à deux vaisseaux en détresse. Dans ce cas précis, les vaisseaux, ainsi que le ruban d'énergie, sont modélisés et animés par ordinateur. Les interactions entre l'anomalie et les vaisseaux en détresse sont également conçues en images de synthèse. Les infographistes d'ILM animent les émissions de particules provenant des boucliers des navires. Si les images de leurs destructions sont tirées de la collection d'explosions dites « traditionnelles » du studio, les centaines de débris qu'il faut faire tournoyer dans l'espace doivent être animés individuellement... Ces séquences en images de synthèses sont supervisées par John Knoll (responsable des trucages de la trilogie des Pirates des Caraïbes, et accessoirement co-auteur du célèbre logiciel de retouche d'images Photoshop !), qui avait lui-même filmé les sauts en hyperespace du pilote de The Next Generation ! Hollywood est décidément un tout petit village... Knoll profite de cette opportunité pour retravailler son trucage. A cet effet, l'USS Enterprise D est modélisé en 3D, ce qui permet de manipuler sa structure et de montrer son étirement au moment du saut ! En hommage à Star Trek : Le Film, John Knoll développe également un programme permettant de générer, en images de synthèse, des torpilles spatiales plus impressionnantes que dans les derniers films. Les avantages du numérique sautent aux yeux des vétérans de l'industrie, qui peuvent créer des séquences qu'il n'auraient même pas osé imaginer quelques années auparavant ! Lorsque le Capitaine Picard chercher à analyser la trajectoire du mystérieux Nexus, il se rend à la salle de cartographie spatiale de l'Enterprise. Si les cartes apparaissent d'abord en deux dimensions, elles finissent par être projetées en 3D... sans interrompre l'action ! Pour réaliser cet effet novateur (pour l'époque), le décor est construit sur le plus haut plateau des studios Paramount, où d'immenses diapositives sont projetées sur des écrans pour figurer les cartes 2D. Au moment où les images de synthèse doivent remplacer les dessins, les acteurs s'immobilisent. Les techniciens retirent les écrans à diapositives par le plafond, pendant qu'un immense fond bleu est abaissé. Les comédiens peuvent ensuite reprendre le fil de l'action, comme si de rien n'était ! Après l'incrustation des images de synthèse, réalisées par les Santa Barbara Studios, un habile montage permet de camoufler l'astuce... et d'offrir aux spectateurs une séquence inédite au cinéma ! Mais malgré l'apport inestimable du numérique, la scène la plus mémorable du film est conçue à l'aide d’effets spéciaux traditionnels...

Le chant du cygne

Gravement endommagé par l'attaque surprise d'un Oiseau de proie Klingon, l'USS Enterprise D est voué à la destruction. L'équipage se rassemble dans la « soucoupe » du vaisseau, qui peut se séparer de la partie centrale. L'explosion du réacteur précipite un spectaculaire atterrissage en catastrophe sur la planète Veridian 3... Afin de montrer les perforations causées au réacteur de l'Enterprise, les artistes d'Industrial Light & Magic maquillent d'abord la maquette du vaisseau. La séparation entre la soucoupe et le réacteur est ensuite conçue à l'aide de miniatures. La rentrée dans l'atmosphère de la planète est appuyée par l'ajout de traînées de chaleur numériques, superposées à une maquette de la soucoupe. La séquence du crash sur Veridian 3 nécessite l'élaboration d'un storyboard très précis, dessiné par l'artiste Mark Moore (Star Wars 4, Alien 3, Iron Man). Ce storyboard permet de visualiser en détail les besoins nécessaires en matière de trucage. Une maquette de la soucoupe de 3,60 mètres de large est ainsi confectionnée, ainsi qu'un paysage miniature à l'échelle 1/120ème, dont la fabrication est supervisée par le maquettiste Lorne Perterson (Star Wars, E.T., A.I.). Une plate-forme de bois, longue de 24 mètres, est ainsi assemblée sur le parking d'ILM, avant d'être recouverte par des reliefs sculptés en mousse d'uréthane et par des arbres miniatures. Le premier plan du cadre reste vierge afin d'être - ultérieurement - remplacé par de la végétation numérique, dont les détails seront davantage visibles à l'écran. Lors du tournage des plans où la soucoupe survole le terrain, sa maquette est suspendue sur des fils (effacés par ordinateur en post-production) au-dessus ce ce diorama. Enfin, lorsque le vaisseau percute le paysage, la maquette est fixée sur un chariot situé sous le décor. Un câble relie cette installation à un 4x4, qui tire littéralement la miniature à travers les collines miniatures de Veridian 3 ! Une fente, discrètement aménagée dans le décor, permet de laisser passer le poteau soutenant la maquette. Plusieurs caméras filment ce plan à 240 images par seconde ; lorsque la cadence de l'action est ramenée à 24 images par seconde, la masse de la soucoupe paraît crédible ! Le paysage est ensuite prolongé à l'aide de peintures sur verre. Enfin, à l'occasion d'un plan montrant l'épave de l'Enterprise D, de nombreux figurants sont incrustés dans une peinture sur verre. Parmi ceux-ci se trouve le superviseur des effets visuels John Knoll, ainsi qu'une grande partie de son équipe. Ils auront assisté - de toutes les manières possibles - au chant du cygne de l'USS Enterprise NCC-1701-D...

Premier Contact

L'Enterprise D n'est plus ? Le scénario de l'opus suivant nous dévoile son successeur, l'Enterprise NCC-1701-E ! Suite au succès commercial de Star Trek Generations, les studios Paramount lancent rapidement la production d'un huitième volet de la saga, intégralement tourné vers les aventures de l'équipage de The Next Generation. Star Trek : Premier Contact (1996) fait d'ailleurs office de suite aux meilleurs épisodes de la série, puisqu'il narre le retour des terribles Borgs. Ces extraterrestres cybernétiques ont la fâcheuse habitude d'assimiler les races qu'ils rencontrent. Les individus perdent toute individualité et sont transformés en véritables cyborgs ! Triste sort... Alors qu'ils tentent d'attaquer la Terre, les Borgs balayent la flotte de la Fédération des Planètes Unies. Le capitaine Jean-Luc Picard, qui avait été assimilé -temporairement – par les Borgs dans la série, finit par trouver un moyen pour détruire le gigantesque vaisseau Cube des Borgs. Mais. un engin s'en échappe et disparaît dans une faille spatio-temporelle. Devant les yeux médusés de l'équipage de l'Enterprise, la Terre devient instantanément le refuge de milliards de Borgs ! Le passé vient d'être modifié ; les Borgs ont empêché le « premier contact » entre les humains et une race extraterrestre. Afin de sauver l'avenir, l'Enterprise n'a plus qu'à voyager dans le passé...



Voyage en apesanteur

La réalisation du film est confiée à Jonathan Frakes, l'interprète de Riker dans The Next Generation. Auteur de plusieurs épisodes de la série, il signera ultérieurement le médiocre Star Trek Insurrection et l'insoutenable remake des Sentinelles de l'Air. Alors que la sortie du film est prévue pour novembre 1996, la pré-production ne débute... qu'en janvier de la même année ! L'équipe du film ne dispose que de dix semaines pour préparer les nombreux décors nécessaires aux spectaculaires scènes de Premier Contact ! Jonathan Frakes demande expressément que l'ambiance de certaines séquences s'inspirent de plusieurs chefs d'oeuvre de la science-fiction, dont Star Wars, 2001 : L'Odyssée de l'Espace et Star Wars. Dans l'état de l'Arizona, un ancien silo à missiles de l'US Air force, haut de 44 mètres, est reconverti en base de lancement de la fusée qui sera à l'origine du fameux « premier contact ». A nouveau vaisseau, nouvelle ambiance : le poste de commandement de l'Enterprise E bénéficie d'un décor inédit. Pour un fois, il ne s'agit pas du recyclage d'un décor d'un précédent film ! Les plateaux des studios Paramount sont alors littéralement envahis par Star Trek, puisque les scènes en intérieurs de Premier Contact y sont tournées en même temps que plusieurs épisodes des séries Deep Space Nine et Voyager ! Le directeur artistique Herman Zimmerman, véritable pilier de la saga cinématographique, s'échine à recréer des sections entières de l'Enterprise... version Borgs ! Le vaisseau se faisant lentement assimiler, ces décors doivent faire ressentir la présence des extraterrestres... et ils rappellent effectivement l'ambiance de certaines séquences d'Aliens ! Le plus grand plateau du studio est monopolisé par le tournage d'une scène se déroulant sur la coque de l'Enterprise, dans l'espace – et donc en apesanteur. Tous les plans de cette séquence nécessitant l'utilisation de trucages, l'illustrateur Joseph Musso (La Tour Infernale) élabore un storyboard de 120 dessins. Ce document de travail permet de déterminer quels éléments du décor, effets spéciaux et angles de caméra seront absolument nécessaires. Un décor circulaire, représentant la coque de l'Enterprise, est construit. Il est ensuite entouré par un fond vert qui sera remplacé en post-production par des images de la Terre et des étoiles. De nombreux câbles, attachés aux comédiens, permettent de simuler l'apesanteur. Lorsque les personnages marchent à l'aide de bottes aimantés, les chaussures des comédiens sont simplement lestées de poids de sept kilos. Leurs mouvement s'en trouvent logiquement ralentis ! « Ce fut la scène la plus compliquée du film », se rappelle le réalisateur Jonathan Frakes. « Il fallait préparer chaque plan pendant plusieurs heures avant de pouvoir filmer... »

Le retour de l'Enterprise

Le design du nouvel USS Enterprise NCC-1701-E est élaboré par John Eaves et Herman Zimmerman. « Nous voulions que ce vaisseau semble plus puissant et racé que son prédécesseur », précisent les scénaristes Brannon Braga et Ronald D. Moore. « Il s'agit presque d'un navire militaire ! » Après avoir soigneusement étudié les structures des précédents vaisseaux, John Eaves dessine un Enterprise aux lignes plus modernes que celles de l'Enterprise D. Il allonge notamment les réacteurs du navire d'exploration. « L'enterprise D est plus effilé, plus lisse et, surtout, il représente le meilleur moyen de contrer n'importe quelle menace Borg ! », ajoute Zimmerman. Les studios Paramount font de nouveau appel à Industrial Light & Magic pour concevoir les nombreux trucages du film. « Voilà pourquoi les trucages de ce film ressemblent davantage à ceux d'un épisode de Star Wars qu'aux précédents volets de Star Trek », s'amuse le réalisateur. Les effets visuels sont à nouveau supervisés par John Knoll, qui décide de ne pas abuser des images de synthèse. « La structure de l'Enterprise est complexe », explique-t-il. « Il n'aurait pas été terriblement difficile de le modéliser. Mais de nombreuses heures auraient été nécessaires pour l'éclairer correctement par ordinateur ! En outre, nous nous occupions alors d'une demi-douzaine de projets, dont l'édition spéciale de la trilogie Star Wars ! Nos infographistes ne pouvaient pas être sur tous les fronts... » Paradoxalement, le nouvel Enterprise est modélisé en 3D pour une scène précise : celle où le navire plonge dans la faille spatio-temporelle, à la poursuite des Borgs. Il aurait été trop compliqué de reproduire les reflets lumineux de l'anomalie sur la coque du vaisseau...

La mère de toutes les batailles

Des ordinateurs sont également utilisés pour concevoir des animatiques - des « storyboards animés » rudimentaires permettant de déterminer les éléments nécessaires aux plans truqués. Star Trek : Premier Contact reste pourtant le dernier volet de la saga à utiliser majoritairement des trucages traditionnels. Pour l'Enterprise E, les maquettistes d'ILM construisent une toute nouvelle miniature de 3,30 mètres de longueur. Un premier modèle, en bois, est moulé en plusieurs éléments de fibre de verre. Ceux-ci sont ensuite assemblés autour d'une armature en aluminium, et peints. Plusieurs réseaux électriques différents permettent d'alimenter le système d'éclairage de la maquette selon la position de celle-ci. Il est effectivement rare que la miniature soit filmée plusieurs fois sous le même angle ! Le soucis du détail est poussé à son paroxysme : des néons éclairent de l'intérieur de minuscules hublots... où sont disposées des diapositives illustrant les décors du film ! Afin d'offrir un style inquiétant au Cube Borg, plusieurs plaques de métal sont découpées à l'acide, puis superposées. Chaque maquette est filmée plusieurs fois, et ce pour chaque plan : éclairée devant un fond noir, puis non éclairée devant un fond bleu. Cela permet de créer un cache, nécessaire à l'incrustation du vaisseau sur l'arrière plan. La caméra est programmée pour reproduire à chaque fois le même mouvement autour de la miniature. Il faut ensuite tourner plusieurs prises, devant un fond noir, où seules les lumières internes de la maquette sont allumées. Au montage, les différentes prises sont superposées et les maquettes prennent vie à l'écran ! Notons qu'une des plus impressionnantes batailles spatiales de la saga se déroule pendant ce film. : des dizaines de vaisseaux de la Fédération coopèrent pour réduire à néant le Cube Borg. Pour les besoins de cette séquence, toutes les maquettes créées pour la franchise sont réquisitionnées, et de nouveaux navires sont créés sous Alias et animés sous Softimage ! Le compositing de film s'avère évidemment fastidieux pour les artistes d'ILM... Les vaisseaux de la Fédération étant plus massifs que les chasseurs de la saga Star Wars, leurs évolutions sont plus lentes et posées. La séquence ressemble davantage à une bataille navale. Les spectateurs assidus remarqueront d'ailleurs que, même dans l'espace, les navires restent sur un axe horizontal ! Cette situation ne les empêchera pas de porter un coup fatal au Cube Borg. L'explosion de ce gigantesque engin de mort - une maquette de 75 centimètres de largeur – a été filmée à 300 images par seconde.

Toute résistance est futile

Introduits dans la série The Next Generation, les Borgs possédaient déjà une apparence aisément identifiable. Après avoir officié sur la plupart des épisodes des séries Star Trek des années 1990, le maquilleur Michael Westmore (Oscar des Meilleurs Maquillages pour le film Mask, en 1985) est appelé à s'occuper de Premier Contact. Chaque Borg possède un maquillage unique – et Westmore en produit un nouveau par jour ! De nombreuses heures sont nécessaires pour apposer ces grimages sur les douze acteurs incarnant des Borgs. Afin de gagner du temps, les cyborgs situés en arrière-plan ne sont que des mannequins au maquillage rudimentaire ! Mais un personnage nécessite un maquillage particulièrement impressionnant : la Reine Borg. Son interprète, Alice Krige, doit quotidiennement patienter quatre heures dans l'atelier des maquilleurs avant de pouvoir rejoindre les plateaux de tournage ! Le tout premier jour, après avoir mis des lentilles de contact argentées, l'actrice jeta un froid parmi l'équipe du film. « Tout le monde se mit à reculer », se souvient la comédienne. « Je me suis dit : 'Grands Dieux, ils ont inventé ce maquillage et ils en ont peur !' (rires) ». Lors d'un stupéfiant plan du film, la Reine Borg apparaît à l'écran... sans son corps ! Seules la tête et les épaules sont suspendues dans les airs, avant d'entamer une descente pour se connecter sur le reste du corps. « Je considère que ce plan est la trucage le plus impressionnant du film », convient le réalisateur Jonathan Frakes. En réalité, Alice Krige porte un costume bleu - où seule sa tête est visible. Une grue la déplace sur le plateau. « Il fallait que je joue l'étrange satisfaction de ressentir la connexion avec mon corps (rires) », ajoute Krige. Son costume bleu, faisant office d'un fameux « écran bleu », est ultérieurement effacé de l'image. A partir du tournage, il faudra cinq mois aux artistes d'ILM pour compléter ce plan. Mais le résultat vaut largement cette peine... et en a effrayé plus d'un ! Il est donc regrettable que les studios Paramount n'aient pas fait appel aux équipes d'Industrial Light & Magic pour les films suivants... qui seront synonymes d'échecs pour la franchise ! Longue vie et prospérité.

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