Exclusif : Entretien avec Saoirse Ronan, l’héroïne de The Lovely Bones - Seconde partie
Article Cinéma du Mercredi 10 Fevrier 2010

A 15 ans, la carrière d’actrice de Saoirse (prononcer seur-chia ) Ronan a déjà démarré sur les chapeaux de roues. Après avoir été nommée aux Oscars pour Atonement , et avoir tenu le rôle principal de La cité de l’ombre , elle a été choisie par Peter Jackson pour « incarner » le bouleversant fantôme de Lovely Bones. Une nouvelle performance irréprochable, qui confirme que la jeune actrice, tel Christian Bale avant elle, saura continuer à nous surprendre dans les années à venir…

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Retrouvez la première partie de cet entretien


Pouvez-vous nous parler de votre travail avec Stanley Tucci ? Dans la vraie vie, il n’a pas du tout la tête du tueur du film…

Non, et il était d’ailleurs très heureux d’être maquillé ainsi, et d’être méconnaissable !  Stanley est adorable dans la vie et il préférait qu’on ne le reconnaisse pas à cause de ce rôle d’abominable tueur. Je l’ai d’abord rencontré brièvement lors d’une fête qui était organisée pour que tout le monde fasse connaissance avant le tournage. J’étais impatiente de le voir, parce que tout le monde le connaissait déjà, sauf moi, et parce que son personnage est évidemment très important pour Susie. Mais la première fois que nous nous sommes vraiment rencontrés, c’était pour tourner la scène du piège, dans le champ de maïs…Ce qui était une situation assez bizarre, comme vous l’imaginez. Mais nous nous sommes très bien entendus, en tant que personnes et qu’en tant qu’acteurs. Nous avons essayé différentes choses, et nous avons pris plaisir à travailler ensemble. C’était un moment très intense, bien sûr, en raison des circonstances de la scène.

Avez-vous beaucoup répété cette scène ?

Non, pas beaucoup, parce qu’elle est très physique, particulièrement quand Susie essaie de s’échapper. C’est cette partie-là que nous avons répété un peu, pour être au point.

Qu’avez-vous appris sur ce tournage, en tant qu’actrice ?

Chaque film que l’on tourne permet d’évoluer, et d’en apprendre plus sur soi-même et sur ce métier, surtout quand il s’agit de projets de grande qualité, comme celui-ci. Je suis encore toute nouvelle dans cette profession, donc j’apprends constamment, et j’aurais du mal à citer une chose plus qu’une autre qui m’a marquée sur le tournage de Lovely Bones. Mais je peux vous dire plus précisément ce que le personnage de Susie m’a apporté. Ce que j’ai retenu d’elle, c’est son attitude positive envers la vie et la mort, et la manière dont elle apprécie sa famille. J’ai retenu beaucoup de choses positives des émotions de ce film, rien de négatif. Ces sentiments-là, je les ai mis de côté. J’aimerais aussi réaliser un film, plus tard, pour en savoir plus sur le processus de création, et sur le travail qu’accomplit un metteur en scène avec sa troupe de comédiens. Je crois que ce serait une expérience très intéressante pour avoir une vision plus large du cinéma.

Quel genre de film aimeriez-vous réaliser ?

J’aimerais bien réaliser une comédie, bien que ce soit sans doute l’un des registres les plus difficiles du cinéma. Mon père et moi nous nous lançons souvent dans des routines comiques à la maison, et je crois que je prendrai plaisir à imaginer un film amusant.

A 15 ans, avez-vous l’âge requis pour voir les premiers films de Peter Jackson comme Bad Taste and Braindead ?

Je ne les ai pas encore vus, mais je dois dire que j’ignore quelle est leur classification…

Il s’agit plus de comédies gores que de films réellement violents…En dehors des effets de maquillages, il n’y a guère que le langage employé qui peut encore choquer les censeurs…

Oh, en ce qui concerne les jurons et autres expressions fleuries, ayant grandi en Irlande, je peux vous assurer que j’ai déjà tout entendu ! (rires)

Quelles sont les différences que vous avez constatées entre le travail de Peter Jackson et celui de Peter Weir ?

Ils ont des styles différents. Peter Weir est à la fois un acteur et un réalisateur, ce qui ne veut pas dire que Pete Jackson n’a pas ces capacités. Disons que Peter Weir accompagne énormément ses acteurs dans leur démarche, il reste toujours auprès d’eux, se soucie beaucoup de ce qu’ils pensent. Et il ne perd jamais son calme, même dans des circonstances éprouvantes. Nous avons tourné dans des conditions difficiles en Bulgarie et au Maroc, dans des décors naturels. Faire un film dans ces pays-là n’est pas la chose la plus aisée, surtout si vous avez l’habitude de travailler en Europe de l’Ouest ou aux USA. Mais en dépit de ces problèmes, il est toujours resté optimiste, décontracté, et nous a préservés du stress lié à l’environnement technique du tournage. C’était une atmosphère étonnamment sereine, en dépit des obstacles qu’il lui fallait franchir. Peter Jackson, quant à lui, s’implique dans tous les aspects du tournage, dans la direction de la photo, dans les décors, les effets visuels, etc, tandis que Peter Weir est plus focalisé sur le parcours émotionnel des personnages.

Comment s’est passé la collaboration avec Mark Wahlberg, Rachel Weisz and Susan Sarandon ?

Ce sont des gens formidables, avec lesquels j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler. Ils ont une grande expérience de ce métier, et c’était fantastique de pouvoir les observer, pendant que je tournais avec eux, mais aussi quand je ne participais pas aux scènes. C’est précieux de pouvoir côtoyer des gens si expérimentés et si talentueux. Cela m’a fait grandir.

A 15 ans, vous avez déjà derrière vous quelques films marquants, ce qui est remarquable. Qu’aimeriez-vous faire à présent ?

Une comédie, vraiment ! (rires) Et j’aimerais aussi beaucoup travailler avec Jim Sheridan, pas seulement parce qu’il est irlandais, mais parce que j’aime énormément ses films. Ils sont brillants.  Jim est originaire de Dublin, et c’est la ville à laquelle je me sens la plus attachée, même si je n’y ai pas vécu, parce que mes parents sont nés là-bas. Nous nous entendons bien, et j’espère que j’aurai l’occasion de tourner un film avec lui. Un film plus léger que Lovely Bones.

Quels sont les meilleurs souvenirs que vous garderez du tournage de Lovely Bones ?

Mon séjour en Nouvelle-Zélande. C’est un pays merveilleux, avec un climat exceptionnel, et les gens là-bas sont accueillants et toujours décontractés. C’est un sentiment merveilleux. C’est un pays qui a été préservé de beaucoup de choses, et qui ne connaît pas de problèmes graves. On le sent quand on y séjourne. J’y ai vécu des moments inoubliables. Et je m’y suis fait des amis formidables.

Quels sont les films que vous avez vus pendant votre enfance, et qui vous ont donné envie de devenir une actrice ?

C’est une question difficile, parce que quand j’étais petite, je regardais constamment Toy Story ! (rires) Disons que c’est Toy Story qui m’a donné la vocation ! (rires)

Quand vous voyez Lovely Bones, arrivez-vous à voir Susie Salmon sur l’écran, ou vous voyez-vous vous-même ?

La première fois que je l’ai vu, j’étais encore trop proche de mes souvenirs de tournage. Je voyais un film dans lequel j’avais travaillé et je n’avais pas le recul nécessaire.  Ce n’est qu’à la seconde vision que j’ai accepté que la fille qui était sur l’écran était Susie Salmon, et que l’on me racontait l’histoire de Lovely Bones. Mais je crois que tout dépend du film. Quant on tourne très longtemps sur un film, on a plus de mal à se détacher du travail du tournage, et à voir le film comme un spectateur lambda. J’ai eu beaucoup plus de facilité à apprécier Atonement, car je n’avais travaillé dessus que pendant quatre semaines. 

Y a t’il un projet de suite à La cité de l’ombre, qui serait basé sur les autres livres de la série ?

Pas pour l’instant. Je me rappelle que beaucoup de gens nous ont demandé, à Harry Treadaway et moi, si nous allions tourner dans un autre épisode de la saga. Nous avons beaucoup apprécié ce tournage, et je serais ravie de participer à une suite, en tous cas. Et ce serait génial si nous pouvions retrouver Gil Kenan, qui est un réalisateur formidable.

Avez-vous aimé porter les costumes et la coiffure d’une adolescente des années 70 ?

Oui, c’était très amusant. Beaucoup d’actrices n’aiment pas porter des perruques, parce que l’on a un peu l’impression de porter un gros chapeau de laine sur la tête toute la journée, mais j’en avais déjà porté une sur Atonement. Et j’aime bien les pantalons à pattes d’éléphant ! Ce qui tombe bien, puisque j’ai dû en porter pendant huit mois !

Quels sont vos prochains projets ?

Ahh, j’aimerais pouvoir vous le dire, mais je ne peux pas. Je peux juste vous révéler que ce n’est pas une comédie ! (rires)  C’est encore un drame, mais plus léger que celui-ci.

Etant une adolescente, pensez-vous que ce film puisse être vu par les adolescents ?

Oui. Les plus âgés, en tous cas. Beaucoup de mes amis vont aller le voir. J’espère qu’il leur plaira. Je pense que l’aspect romantique de l’histoire va leur plaire, ainsi que les aspects optimistes du récit.

Quel est selon vous le message du film ?

Je crois que la chose la plus importante à dire, c’est que le film n’est pas uniquement consacré au meurtre de Susie Salmon. C’est ce qui se passe après sa mort qui est le plus important. Ce qui l’amène à progresser et à accepter sa disparition. Et pour parvenir à évoluer, elle doit prendre conscience que l’amour qu’elle éprouve pour sa famille est plus important que la haine qu’elle ressent pour son assassin. Et ses parents doivent accomplir la même démarche pour surmonter ce deuil. Le message, c’est que c’est l’amour qui est le plus important…

Puisque votre mère est à nos côtés, nous aimerions vous demander, Madame, comment vous et votre mari, qui est comédien, participez au choix des films de votre fille…

Madame Ronan : Nous lisons tous les scripts qui sont adressés à Saoirse, pour nous assurer que les histoires pourront lui convenir. Si nous les aimons et que notre agent les aime aussi, nous les faisons lire à notre fille, pour qu’elle décide elle-même si elle a envie de s’impliquer dans ces projets ou pas. A ce stade, elle prend ses décisions elle-même. C’est nécessaire de trier les projets en amont, pour éliminer ceux qui ne sont pas appropriés, qui ne correspondent pas à son âge, ou qui ne sont tout simplement pas assez bons…

En tous cas, félicitations pour la manière dont vous gérez la carrière de votre fille ! Vous devez être très fière d’elle.

Oui, très fière. Elle travaille très dur pour donner le meilleur d’elle.

Ce doit être une épreuve pour vous, sa maman, de voir ce film…

Bien sûr, mais Lovely Bones est un si beau film… Même s’il est parfois dur et triste, ce qui en ressort, c’est une énergie totalement positive et réconfortante.

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