Dossier AVATAR - Exclusif : Entretien avec Zoe Saldana (Neytiri) - Seconde partie
Article Cinéma du Dimanche 16 Mai 2010

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Retrouvez le première partie de cet entretien


Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Quelle a été votre source d’inspiration principale pour développer la force de caractère de Neytiri ?

Ma mère. Elle est extraordinaire. Beaucoup de gens vous diraient certainement la même chose à propos de leurs parents, mais ma mère était vraiment ma Sarah Connor et ma Ripley pendant toute mon enfance. Elle était à la fois très forte, très courageuse, et avait aussi la capacité d’apprécier la fantaisie et l’excentricité. Elle nous encourageait toujours à nous exprimer. Nous étions trois sœurs à la maison, et nous avons grandi dans un environnement qui n’était hostile en rien aux hommes. Ma mère n’avait des idées préconçues sur personne, qu’il s’agisse d’un garçon ou d’une fille. Elle nous laissait aller au bout de nos passions et de nos rêves. Je considère qu’elle a été mon premier professeur d’art dramatique, sans le savoir. Si un jour, je décidais de me comporter comme un garçon, et de m’habiller ainsi, elle me disait, « OK, Zoe tu es un garçon ! »et me laissait aller dans cette tenue à l’école ! (rires) Une fois, j’ai eu envie de me raser la tête pour voir ce que cela faisait, et elle m’a laissé faire. Quand il m’arrive d’hésiter de faire quelque chose parce que ce n’est pas vraiment raisonnable, je repense à mon enfance, et souvent, je me dis « Et puis zut ! » et je le fais. Nous étions vraiment des excentriques. Il nous arrivait même de célébrer Noël en mars ! (rires)

Pouvez-vous nous dire ce qu’a vécu Neytiri, avant que l’histoire d’AVATAR ne commence ?

Ce qui lui est arrivé ressemble un peu à l’intrigue de LA MEGERE APPRIVOISEE de Shakespeare. Neytiri est une princesse rebelle, fille du leader de son clan. Mais plutôt que d’agir en princesse, elle voudrait être une guerrière. Elle ne supporte pas qu’on lui dicte ce que sa vie doit être. Et déteste accomplir les tâches qui sont réservées aux filles. Elle n’a aucune envie de succéder à son père et de diriger le clan. Elle préfère vivre dans la jungle, chasser et se nourrir seule, en toute indépendance. Quand elle rencontre Jake, elle se rend compte qu’il est lui aussi un rebelle dans l’âme.

Avez-vous tourné des scènes d’amour physique assez longues entre les deux personnages ?

Oui, et elles ont été très intéressantes à tourner ! (rires)

James Cameron est très exigeant avec lui-même et avec ses collaborateurs. Quelles ont été les scènes les plus difficiles à tourner ?

Cela va sans doute vous surprendre, mais ce sont justement les scènes de baisers !

Vraiment ? Pourquoi ?

A cause des problèmes techniques liés aux équipements que nous portions. Embrasser n’est pas difficile en soi, je suis toujours partante pour le faire ! (rires) Cela fait partie des petits plaisirs de ce métier. Mais c’est complètement différent quand on travaille sur un plateau de capture de performance, à cause de la technique. Il y avait d’un côté toutes les caméras qui enregistraient nos mouvements grâce aux sphères et aux repères disposés sur nos costumes, et nous portions aussi chacun une mini-caméra fixée à notre casque, et placée en face de nos visages, pour enregistrer nos expressions. On nous avait collé aussi des petits points verts sur le visage. Les repères corporels permettaient de nous situer dans l’espace, et les caméras faisaient bouger automatiquement les muscles faciaux de nos personnages 3D. Mais vu la manière dont les caméras étaient placées, nous ne pouvions absolument pas approcher nos lèvres pour nous embrasser. Il était donc impossible de filmer normalement ce moment d’intimité. Mais c’était également très amusant par d’autres aspects…

Comment avez-vous réussi à tourner ce baiser, en fin de compte ?

Comme les supports de nos caméras entraient en collision dès que nous nous approchions l’un de l’autre, nous avons compris qu’il allait falloir tricher un peu. Nous avons fait semblant de nous embrasser en laissant une bonne vingtaine de centimètres entre nos visages,ce qui était assez bizarre. Et il fallait mimer les mouvements du baiser comme cela, parce que Jim allait avoir besoin de ces informations pour l’animation des personnages. Nous avons aussi retiré nos casques et nos caméras pour tourner la scène normalement, mais là aussi, nous avons eu des problèmes, par exemple quand l’un des petits marqueurs qui étaient placés sur mon visage est venu se coller sur la bouche de Sam. C’était très drôle par moments ! (rires)

Tout cela n’est pas évident quand on doit jouer une scène d’amour…

Oh, il faut garder son sens de l’humour dans ce genre de situations. Nous étions tellement gênés par ces obstacles techniques que nous en devenions un peu timides. Jim était mort de rire quand il nous observait. Il est toujours très respectueux du travail des acteurs, mais si jamais vous trébuchez devant lui, il sera le premier à éclater de rire et à vous dire « Mais qu’est-ce qui t’arrive ? ». Pendant que nous tournions cette fameuse scène d’amour, il nous disait, « Allez, Sam et Zoe, je sais que vous pouvez faire bien mieux que ça ! »

Quelles sont les facettes de votre personnage que vous avez trouvées les plus attirantes ?

Ce que j’aime particulièrement à propos de Jake et de Neytiri, c’est que Jake pourrait tout à fait être une femme, et Neytiri un homme. Ils sont totalement androgynes dans leur comportement. Ce sont deux êtres qui cherchent à donner un sens à leurs vies, et qui, ce faisant, finissent par se trouver l’un l’autre. Ils essaient d’unir deux mondes et c’est très beau. Et ce que j’aime chez Neytiri, c’est sa force au combat, ses qualités de guerrière, et d’héroïne en font un mélange de Sarah Connor et d’Ellen Ripley. Je ne sais pas comment l’expliquer autrement.

Vous semblez être une vraie fan de Science Fiction !

Oh oui, complètement ! D’ailleurs quand le service de marketing de Paramount me préparait à faire le tour du monde pour parler de STAR TREK (dans lequel Zoe Saldana joue le rôle de Uhura, NDLR), ils me disaient « Zoe, ce serait bien si vous pouviez dire de temps en temps dans les interviews que le film plaira aussi aux femmes, et qu’elles ne doivent pas hésiter à aller le voir. » Quand j’ai entendu cela, je me suis dit « Mais pourquoi devrais-je dire ça ? Elles ne vont pas venir d’elles-mêmes, quoi qu’il arrive ? Vous voulez rire ! » J’étais persuadée que toutes les filles aimaient la Science Fiction autant que moi. J’ai été élevée au sein d’un foyer où les films que nous regardions en famille étaient  2001, L’ODYSSEE DE L’ESPACE, E.T., COCOON et BLADE RUNNER. J’ai été désolée d’apprendre que toutes les filles ne partageaient pas cet enthousiasme. Sommes-nous vraiment toutes programmées génétiquement pour ne lire que les œuvres romantiques de Jane Austen ? Jane Austen est une romancière formidable, mais si elle avait écrit quelques histoire se déroulant dans l’espace, ce serait encore bien mieux ! (rires) J’ai été élevé par une maman qui pensait comme cela.

Qu’est-ce qui vous attiré à ce point dans la Science-Fiction ?

Je ne le sais pas. Je crois qu’en tant qu’artiste de cinéma, j’ai horreur de me limiter à des choix tout tracés. Il y a des gens qui rêvent d’incarner Napoléon, et peut-être que mon rôle idéal serait de jouer Joséphine, ou un autre personnage historique de ce genre. Mais jouer une extraterrestre, c’est quand même un défi autrement plus intéressant ! J’ai passé sept mois à essayer de me « déshumaniser ». Je me souviens qu’à un moment, j’étais assise autour de la table, pendant un repas familial, à l’époque où je faisais mes recherches pour tourner AVATAR. Quelqu’un m’a demandé si je voulais des pommes de terre, et instinctivement, j’ai soufflé comme un chat en colère. Evidemment, au moment où je l’ai fait, je me suis dit « Oh bon sang, qu’est-ce que je suis en train de faire ?! », mais il fallait que j’en passe par là, pour ne plus avoir le réflexe d’agiter ma main ou ma tête de gauche à droite pour signifier que la réponse était « non ». J’ai tenté de m’immerger complètement dans le rôle. Réussir à devenir le personnage est ma motivation principale, en tant que comédienne. Et arriver à travailler avec des fans qui ont la même tournure d’esprit que la mienne, c’est tout simplement le paradis !

Après avoir grandi en regardant tant de films de SF, que ressentez-vous à présent que vous êtes apparue dans STAR TREK et dans AVATAR ?

Par moment, c’était assez surréaliste. J’avais l’impression de me retrouver à côté de moi, en train de m’observer. Quand je voyais Jim préparer sa caméra sur le plateau ou quand je discutais avec Sigourney Weaver, j’avais presque envie de me pincer pour vérifier que je ne rêvais pas. Tout d’un coup, je me disais « Oh, bon sang, je suis en train de parler avec Ripley, et c’est le créateur de TERMINATOR qui nous dirige ! » En fait, Jim EST le terminator. Il ne s’arrêtera pas tant qu’il n’aura pas obtenu ce qu’il cherche. Son sens du détail est infaillible et en le voyant travailler, il était tellement impressionnant qu’il m’est souvent arrivé d’en avoir la chair de poule.

Vous vous trouviez, Sam Worthington et vous, constamment dans l’œil du cyclone qu’est AVATAR. Vous êtes-vous jamais sentis en danger pendant le tournage ?

Non, jamais, car Jim avait prévu un environnement de travail parfaitement sécurisé afin que nous ne risquions jamais de nous blesser. Dans les scènes d’action, nous portions des harnais et étions suspendus à des câbles pour éviter de nous faire mal si nous glissions d’un élément placé dans le studio pour représenter un rocher, ou une grande branche. Des gens nous surveillaient à tout moment pour nous aider au cas où, quand nous sautions partout pour enjamber des obstacles. Mais il y a eu quelques incidents malgré tout. Une fois, alors que nous courrions, j’ai perdu Sam de vue pendant la bataille. Et je me suis arrêtée en me disant « Mais ou diable est-il passé ? D’après ce que l’on m’a raconté,  je l’ai frappé par accident et je l’ai mis K.O. sans m’en rendre compte, en lui cassant aussi le petit doigt… Il est aussi arrivé qu’un cheval me marche dessus, et que je tombe d’une autre monture. Il y a eu des moments où vous voyiez Jim dire « Et…Action ! » puis observer la scène sur un moniteur, tout en l’écoutant avec son casque. Et puis on entendait un grand bruit et il demandait « Qu’est-ce qui vient de se passer ? » Quelqu’un lui répondait alors « Oh, un des chevaux vient de marcher sur Zoe ». On voyait alors Jim courir comme au ralenti vers moi, alors que le cheval refusait obstinément de bouger et de libérer mon pied. C’est comme si l’animal pensait « Il n’y a vraiment pas de quoi paniquer ! » (rires) Jim est arrivé, a tapoté les flancs du cheval, et l’animal a soulevé sa patte. Tout le monde est alors venu me retirer ma chaussure pour voir si j’étais blessée. Ma jambe est restée insensible pendant deux jours…

La suite de cet entretien paraîtra la semaine prochaine.


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