Exclusif : Entretien avec Mike Newell, le réalisateur de PRINCE OF PERSIA : LES SABLES DU TEMPS - Troisième partie
Article Cinéma du Jeudi 20 Mai 2010

Retrouvez la seconde partie de cet entretien


Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Revenons maintenant à PRINCE OF PERSIA : avez-vous travaillé sur le futur DVD du film pendant le tournage, comme cela se fait de plus en plus souvent aujourd’hui ?

J’ai assez peu travaillé pour le DVD et le Blu-Ray du film pendant le tournage, à l’exception de petits trucs racontés devant la caméra de l’équipe du making of, et de d’une petite chose que j’ai filmée pour les bonus, au Maroc, puis à Los Angeles.  A la fin du montage, je me suis rendu compte qu’il n’y aurait pratiquement aucune scène coupée à ajouter dans les bonus. Il y a peut-être une qui va sauter avant que nous établissions la version « définitivement définitive » du film, mais nous n’avons pas encore tranché pour l’instant. Les premiers montages du film que j’ai faits tournaient autour de 120 minutes, alors que la version presque finalisée à laquelle je suis parvenu dure 108 minutes. Je ne suis pas arrivé à cette longueur de film en coupant des scènes entières, mais plutôt en condensant l’ensemble du film, en raccourcissant  énormément de petites choses partout. Mais nous n’avons rien jeté.

Donc à l’heure actuelle, vous n’avez pas le projet de créer une version longue du film, destinée à une sortie vidéo ultérieure ?

Je ne crois pas que nous le ferons. Je ne suis pas partisan de ce genre de choses, car je considère que la seule version du film qui doit exister est celle que l’on a montrée en salles au public. Point final. Bien sûr, si les conditions du tournage n’ont pas permis au réalisateur de finaliser son film comme il le voulait, la possibilité de pouvoir retravailler son ouvrage pour une sortie ultérieure en vidéo est là totalement justifiée. Mais s’il a travaillé dans de bonnes conditions, comme c’est mon cas, et si le film est bien celui qu’il voulait faire, ce qui est aussi mon cas, alors, il n’y a aucune raison de produire un film inutilement trop long, juste pour dire aux fans « Eh, il y a dix minutes inédites dans cette version ! Achetez-là !»

Avez-vous enregistré un commentaire ?

Oui, et même si c’est un exercice assez difficile, parce qu’il est compliqué de monologuer pendant près de deux heures, le tournage a été tellement plaisant que j’ai été ravi de parler du travail de toute l’équipe technique et de tous les acteurs. Ils ont été formidables.

Une superproduction comme PRINCE OF PERSIA  est une gigantesque machine. Est-ce difficile de  conserver son enthousiasme et de à filmer les scènes avec une passion toute fraîche, même au bout de la onzième heure de travail du 53ème jour de tournage ?

C’est terriblement difficile. Et franchement, je ne sais pas comment j’y parviens, ni comment les autres réalisateurs procèdent, mais je crois que l’un des moyens de se régénérer est de s’isoler mentalement de toute cette énorme machinerie. Mais je dois préciser que si j’ai pu y parvenir, c’est parce que je bénéficiais de l’aide d’une merveilleuse équipe d’assistants réalisateurs. Ce sont ces gars-là qui ont tourné la séquence de la charge de la cavalerie que vous avez vue ce matin. Je suis allée sur les lieux avec eux, je leur ai donné mes indications sur la manière dont je voulais que l’action se déroule, et les angles de prises de vue dont j’avais besoin, mais ensuite, ils ont tout mis en place dans les moindres détails et ont tout filmé. C’est leur travail que l’on voit à l’image, même si c’est mon regard qui a déterminé ce que seraient ces prises de vues. Ils étaient totalement à l’écoute de ce que je leur demandais, et pas une seule fois je n’ai été déçu par les images qu’ils m’ont présentées. Je suis très exigeant, et si cela n’avait pas correspondu précisément à ce dont j’avais besoin, je l’aurai fait refaire. Quand on tourne un film comme PRINCE OF PERSIA , avec le temps et les moyens qui ont été mis à ma disposition, on ne peut pas se contenter de filmer les choses de manière banale. Je m’y suis toujours refusé, quelles que soient les difficultés à résoudre. On m’a toujours laissé la possibilité de concevoir des choses personnelles et surprenantes. Et je l’ai utilisée à chaque fois.

Vous avez annoncé il y a peu de temps que votre prochain projet serait l’adaptation d’un grand classique de la littérature fantastique anglaise destinée à la jeunesse, BOX OF DELIGHTS (La boîte aux délices). Pourriez-vous nous en dire quelques mots ?

Avec plaisir. Je n’ai pas encore lu la première version du script, car le scénariste travaille dessus en ce moment-même. J’espère la recevoir dans très peu de temps. C’est comme vous le disiez une merveilleuse histoire pour enfants. Elle décrit un monde fabuleux vers lequel l’imagination d’un petit garçon est irrésistiblement attirée. Et une partie de l’intrigue tourne autour d’un objet qui s’appelle « La boîte aux délices ». C’est vraiment un titre formidable ! Je l’adore ! C’est une histoire qui a déjà été adaptée deux ou trois fois par la télévision anglaise, et je dois vous confesser, car je suis extrêmement âgé, que je l’avais d’abord écoutée à la radio quand j’étais enfant, en 1949/1950. Cette adaptation radiophonique était tellement réussie qu’elle s’est gravée dans mon esprit et que je n’ai jamais pu oublier cette histoire. Je vais donc tenter de l’adapter pour le cinéma, du mieux que je le pourrais.

Pourriez-vous nous décrire une journée paradisiaque et une journée d’enfer pendant le tournage de PRINCE OF PERSIA ?

Oui, et je vais d’abord vous parler de la journée d’enfer ! Il s’agit du jour où nous devions tourner dans les dunes de sable. Cela ne fait pas partie du montage que vous avez vu ce matin. Il s’agit d’une autre séquence qui se déroule entièrement dans ces dunes, en plein désert. Le problème principal, quand on doit tourner là, c’est qu’il est pratiquement impossible de marcher dans ce sable. Il est dur et il se détache en plaques qui se dérobent sous vos pieds. Chaque pas que vous faites vous demande trois fois plus d’effort que lorsque vous marchez sur un sol dur. C’est épuisant. Pour nous aider à nous déplacer, l’équipe de production a déniché ces deux garçons de 22 ou 23 ans, qui conduisaient des motos à trois roues, avec deux énormes pneus à l’arrière. On m’a dit « Ne t’inquiète pas, ces gars-là vont pouvoir t’emmener partout dans les dunes. » J’en ai pris bonne note et j’ai dit à un de ces garçons que je voulais aller jusqu’au sommet de la plus haute dune, pour voir le paysage depuis ce point-là.  Nous sommes partis, moi en passager arrière de la première moto conduite par ce jeune gars, et mon assistant me suivait sur la seconde moto. Et pendant le trajet, je me suis rendu compte que ces deux pilotes n’avaient pas la moindre idée de ce qu’il fallait faire pour parvenir tout en haut de la dune ! Ils essayaient de monter par un des côtés les plus abruptes de la dune, puis ils constataient qu’une grosse plaque de sable se mettait à glisser presque verticalement sous nos roues, et ils essayaient à nouveau un peu plus loin, sans que ce soit plus probant ! Pendant ce temps-là, comme je me retrouvais à quinze mètres au-dessus du vide, pendant que les parois de la dune s’effondraient sous la moto, tout ce que je pouvais faire , c’était de hurler « Mais arrêtez, bon sang de @#* ! ! » C’était terrifiant et je devenais hystérique ! (rires) Après que je me sois mis à protester, ils ont fait demi-tour, et nous avons alors descendu la pente à pic, alors que le sable se dérobait en avalanche! C’était encore pire ! (rires) Un peu plus tard, j’ai compris avec horreur que ces jeunes types gagnaient leurs vies en promenant sur leurs motos des jeunes filles de 18 ou 20 ans venues de Hambourg ou de Manchester pour passer leurs vacances au Maroc. Leur spécialité consistait à dire à ces charmantes touristes de passer leurs bras autour de leurs torses musclés de jeunes dragueurs pendant qu’il conduisaient à toute allure dans les dunes, en glissant sur les pentes pour les faire hurler ! (rires) Il n’était pas question que je me mette à crier comme une de ces jeunes demoiselles, tout en aggrippant le torse du pilote ! J’ai détesté ça ! Je suis descendu de la moto et je suis rentré à pied avec ma dignité intacte ! Et en ce qui concerne la journée idéale, je pense aux moments extraordinaires passés dans les montagnes de l’atlas, à l’aube. Les paysages devant nous, éclairés par le soleil levant, formaient un panorama d’une beauté extraordinaire…

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