Suite au succès de la trilogie des Pirates des Caraïbes, les studios Walt Disney Pictures ne pouvaient pas abandonner une si juteuse franchise ! Après le déluge de scènes d'action et d'effets visuels des deux précédents opus, ce quatrième volet change de réalisateur et se concentre sur les nouvelles aventures de Jack Sparrow, parti à la recherche du plus grand des trésors : la jeunesse éternelle...

Par Pierre-Eric Salard



Lorsque les studios Disney annoncent en 2001 qu'ils comptent développer un long-métrage autour de l'univers de Pirates of the Caribbean, personne n'y croit. Inaugurée en 1967 en Californie (et reproduite en 1992 à Disneyland Paris), la légendaire attraction des parcs Disneyland propose une croisière scénique – en bateau – dans le monde des flibustiers et de la piraterie. A l'aide de décors époustouflants, de marionnettes animatroniques plus vraies que nature et d'un air entêtant, elle s'est forgée une place de choix dans le cœur des visiteurs. Mais pour beaucoup, cette idée d'adaptation cinématographique traduit un manque d'imagination flagrant de la part des dirigeants du célèbre studio créé par Walt Disney (notons que cette attraction fut la dernière à laquelle le cinéaste a participé avant de décéder !). Un premier script, signé par Jay Wolpert (Le Comte de Monte-Cristo), est réécrit par Stuart Beattie (30 jours de nuit, Australia) en 2002. Lorsque le prolifique producteur Jerry Bruckeimer (Top Gun, Armageddon, Prince of Persia; les sables du temps) rejoint le projet, il confie le scénario au duo Ted Elliott (Aladdin, Shrek) et Terry Rossio (Godzilla, Déjà Vu). Ces derniers s'inspirent du livre Sur des mers plus ignorées de Tim Powers, ajoutant des éléments surnaturels. Tourné en partie sur les îles de Saint Vincent et des Grenades, Pirates des Caraïbes : La malédiction du Black Pearl, réalisé par Gore Verbinski (The Ring), inaugure les mésaventures du Capitaine Jack Sparrow (Johnny Depp) et de Will Turner (Orlando Bloom), qui partent - plus ou moins volontairement - au secours d'Elizabeth Swann (Keira Knightley), enlevée par Hector Barbossa (Geoffrey Rush). A la sortie du film, durant l'été 2003, le succès est aussi inattendu que spectaculaire. Friand de rôles atypiques, Johnny Depp est enfin propulsé au firmament hollywoodien ; il obtiendra même une nomination aux Oscars dans la catégorie du Meilleur acteur dans un rôle principal !Le film rapportant plus de 650 millions de dollars de recettes à travers le monde, les studios Disney sont prompts à donner le feu vert à deux autres opus, tournés simultanément par Gore Verbinski. Dans Pirates des Caraïbes 2 : Le secret du Coffre Maudit, sorti en 2006, Jack Sparrow doit affronter le terrible capitaine du Hollandais Volant, le tentaculaire Davy Jones (superbement réalisé en images de synthèse par Industrial Light & Magic, et incarné par Bill Nighy), ainsi que l'imposant monstre Kraken. L'année suivante, l'intrigue de Pirates des Caraïbes 3 : Jusqu'au bout du monde débute là où celle du volet précédent s'est terminée (les deux films représentant les deux principaux actes d'un même récit). William Turner, Elizabeth Swann et un Capitaine Barbossa revenu d'entre les morts s'associent pour sauver Jack Sparrow, promis à un destin menant à la folie. L'anti-héros convoquera tous les pirates pour libérer Calypso, la déesse des mers, afin de mettre un terme à la menace représentée par la Compagnie des Indes et Davy Jones... Le succès est toujours au rendez-vous : le second opus remporte 1,06 milliard de dollars, alors que le troisième en récolte 960 millions ! L'épilogue de cette trilogie nous apprend que si l'arc narratif du couple formé par William Turner et Elizabeth Swann est terminé, Jack Sparrow et Barbossa se lancent quant à eux dans une course contre la montre pour trouver la Fontaine de Jouvence. Le producteur Jerry Bruckheimer, ainsi que les dirigeants de Walt Disney Pictures, ne pouvaient décemment pas laisser dormir une franchise possédant un tel potentiel commercial...

Une histoire moins complexe

Dès 2006, alors que Pirates des Caraïbes 3 : Jusqu'au bout du monde n'est même pas encore sorti, Johnny Depp déclare que même si l'aventure est censée se terminer avec le troisième volet, il serait prêt à endosser son costume de pirate pour une nouvelle trilogie ! Parallèlement, le président du groupe Disney Motion Pictures, Mark Zoradi, estime que la franchise ne sombrera pas dans l'oubli ! « Un épisode indépendant, ou un film dérivé, est possible », ajoute Jerry Bruckheimer la veille de la Première de Jusqu'au bout du monde. Enfin, au cas où les fans n'ont pas compris le message, l'ancien président des Walt Disney Studios, Dick Cook, déclare, après le premier week-end d'exploitation du troisième volet; qu'il est intéressé par la perspective de produire un quatrième volet. Afin d'attiser l'impatience des flibustiers en herbe, les studios décident d'attendre plusieurs années avant de produire un quatrième volet. Ainsi, le 25 septembre 2008, à l'occasion d'un événement Disney, Dick Cook et Johnny Depp, habillé en Jack Sparrow, annoncent qu'un nouvel opus est prévu pour 2010 ou 2011 ! Deux mois plus tard, Jerry Bruckheimer déclare que Ted Elliot et Terry Rossio ont écrit une première ébauche de scénario. Les langues se délient, et de nombreuses rumeurs font leur apparition : la réalisation serait confiée à Tim Burton (qui développe alors son adaptation d'Alice au pays des Merveilles pour Disney), Johnny Depp obtiendrait un cachet de 50 millions de dollars (un record absolu !), et le frère de Jack Sparrow pourrait être joué par Sacha Baron Cohen (Borat). Ces informations sont rapidement démenties par Terry Rossio. « Aucune des rumeurs n'est fondée ! Les studios ont une attitude bien trop protectionniste pour permettre que de véritables éléments du script soient dévoilées ! » On sait cependant que les scénaristes ont un temps pensé à éclairer le passé de Jack Sparrow – et donc de son père, incarné par Keith « Rolling Stones » Richards dans le troisième opus. Certaines séances de brainstorming auraient également donné naissance à des histoires d’aventures teintées de science-fiction, proches des romans de Jules Verne : des machines volantes, l’Atlantide, bref une uchronie de style steampunk ! Mais il sera finalement décidé de rester dans des territoires narratifs moins risqués... En avril 2009, le réalisateur Gore Verbinski informe Disney qu'il préfère s'attaquer à l'adaptation du jeu vidéo Bioshock (il sera finalement le producteur de ce projet maintes fois repoussé, qui devrait être mis en scène par Juan Carlos Fresnadillo, et signe le film d'animation Rango). Jerry Bruckheimer se tourne alors vers Rob Marshall, le réalisateur de Chicago, Mémoires d'une Geisha et Nine. « Pirates des Caraïbes est une importante franchise pour Disney », ajoute le producteur. « Nous aimons le personnage de Jack Sparrow, et Johnny Depp est très excité à l'idée de reprendre son rôle ». L'objectif avoué est de retrouver l'essence de la franchise - les personnages -, et non de développer un film à l'intrigue complexe. « Les circonvolutions narratives des derniers volets sont trop compliquées », explique Johnny Depp. « Je n'ai jamais vu les films, mais c'est ce qu'on m'a dit (rires) ! Vous savez, le film parfait n'existe pas. Un quatrième opus pourrait nous donner une autre chance, qui sait. Quand il s'agit de cinéma, je suis un véritable gourmand (rires). Nous pourrions nous inspirer d'une pièce de (Samuel) Beckett ; Jack Sparrow pourrait même apparaître dans un costume traditionnel de geisha (rires) ! » Même Bill Nighy se dit prêt à reprendre le rôle de Davy Jones ! « Je suis techniquement mort, mais qui s’en soucie ? Tout le monde est mort dans les Pirates des Caraïbes (rires) ! Ils ont tué Johnny Depp et Geoffrey Rush. La mort n’est pas permanente dans cet univers. J’ai très envie de revenir ». Mais ce signal à l'attention des scénaristes restera lettre morte.

Cure de Jouvence

En septembre 2009, à l'occasion de la convention D23 Disney, Johnny Depp apparaît sur scène, à nouveau grimé en Jack Sparrow, pour dévoiler le titre du film : Pirates of the Carribean: On Stranger Tides (qui sera renommé La Fontaine de Jouvence en France). Cela confirme que l'épisode se déroulera juste après l'épilogue de Jusqu'au bout du monde. Le titre anglais est le même que celui d'un livre écrit en 1987 par Tim Powers (Les Voies d'Anubis), On Stranger Tides (en Français : Sur des mers plus ignorées), et pour cause : les studios Disney se sont procurés les droits d'adaptation du roman en 2007 ! Juste retour des choses : cet ouvrage était la principale source d'inspiration de la saga Pirates des Caraïbes, ainsi que de la série de jeux vidéo Monkey Island (qui a elle-même été pillée par les auteurs de la trilogie). Cet ouvrage se déroule à la fin du 17ème siècle, dans un Nouveau Monde empreint de magie. Voguant vers la plantation qui lui revient de droit, Chandagnac est capturé par des pirates et sera forcé de se joindre à eux. Il devra s'initier aux fabuleuses puissances du vaudou, puis mener une lutte sans merci contre les magiciens, les pirates, les zombies, la folie et la mort ! Les scénariste Ted Elliot et Terry Rossio précisent cependant que la quatrième opus ne sera pas une adaptation littérale du roman, mais qu'ils en utiliseront plusieurs éléments. « Nous voulions une histoire sur Barbe Noire et la fontaine de jouvence, et Tim Powers a écrit un roman dessus... », explique Terry Rossio. « Il s'est avéré que pour écrire cette histoire, il nous fallait le livre. Il est brillant et Tim Powers est un auteur fantastique... et le titre est vraiment terrible ! » Tim Powers se dit très heureux que son livre soit utilisé comme base narrative du quatrième opus. « C'est génial ! J'adore la trilogie ! Mais mon personnage, Chandagnac, ne ressemble absolument pas à Jack Sparrow. Ils devront donc faire d'importantes modifications au récit. Cela ne me dérange absolument pas ! Mon roman continuera d'exister, et je pourrai découvrir cette histoire d'un nouvel oeil ! » Les studios Disney annoncent alors que le quatrième opus de la saga sortira aux États-Unis le 20 mai 2011. Il sera projeté en 3D relief dans les salles équipées. Au cours de cette histoire pleine d’action, où vérité, trahison, jeunesse éternelle et mort forment un cocktail explosif, le capitaine Jack Sparrow retrouve une femme qu’il a autrefois connue. Une histoire d'amour est-elle possible, ou cette femme n’est-elle qu’une aventurière sans scrupules qui cherche à l’utiliser pour découvrir la légendaire Fontaine de Jouvence ? Lorsqu’elle l’oblige à embarquer à bord du Queen Anne’s Revenge, le bateau du terrible pirate Barbe-Noire, Jack ne sait plus ce qu’il doit craindre le plus : le redoutable maître du navire ou cette femme surgi de son passé…

Une équipe qui gagne

Mais quelques jours après que le titre et le synopsis du film aient été dévoilés, un événement manque d'enterrer le projet. Dick Cook, président des Walt Disney Studios depuis 2002, est sommé de quitter son poste en septembre 2009 - la faute incombe aux résultats mitigés des dernières productions Disney au box-office. Le départ de l’homme qui a permis le rachat de Pixar attriste son ami Johnny Depp. En effet, il avait convaincu ce dernier, en 2002, d'accepter le rôle de Jack Sparrow, après avoir insisté pour que l'acteur puisse jouer ce personnage à sa manière atypique ! « Alors que les autres cadres du studio n'appréciaient pas mon interprétation, Dick m'a toujours soutenu », révèle Johnny Depp. « Il m'a toujours fait confiance. Je suis choqué et très triste qu'il soit mis à la porte malgré son rôle prépondérant dans le succès de la trilogie... » Suite au départ de Dick Cook, le comédien avoue ainsi ne plus être enthousiaste à l’idée de tourner dans Les Pirates des Caraïbes 4. Alors que la pré-production bat son plein, le projet est en danger d'être emporté par le fond... « Plus personne ne se parle », regrette alors Tim Powers. « Ils restent tous dans leurs coins, en souriant, afin que le navire ne chavire pas... Mais il faudrait discuter, non ? » Dick Cook semble avoir écouter les conseils de l'auteur, puisqu'il est allé convaincre Johnny Depp de continuer malgré tout l'aventure. « Notre discussion m'a redonné confiance », confie l'acteur. « Cela m'a beaucoup aidé. Et puis j'apprécie l'idée que le réalisateur Rob Marshall va offrir une toute nouvelle perspective à cet univers... » Terry Rossio, quant à lui, précise que le budget du film sera bien plus élevé que celui du premier opus, mais inférieur au troisième - qui avait explosé pour diverses raisons. Alors que le tournage est annoncé pour l'été 2010 à Hawai et en Angleterre, le casting débute. Si Johnny Depp pense qu'il n'y aura jamais assez de Jack Sparrow dans cette franchise, Orlando Bloom et Keira Knightley ne feront pas parti de l'aventure. Rappelons que l’histoire de Will Turner et Elizabeth Swann se termine clairement à la fin de Jusqu’au bout du monde ! « Ces films ont été une expérience fantastique », explique Keira Knightley. « Mais j'ai tourné la page. Je suis très impatiente de découvrir le film suivant ! » Orlando Bloom partage son sentiment. « J'ai adoré jouer dans cette saga, mais j'ai envie de faire des choses différentes. J'imagine que mon personnage continuera éternellement à vivre parmi les poissons (rires). Et je suis sûr que le prochain film sera fantastique : Johnny Depp y participe ! En outre, je pense que Rob Marshall et Johnny étaient faits pour collaborer ; cet acteur possède un jeu quasiment musical... » Geoffrey Rush, quant à lui, incarnera à nouveau le capitaine Hector Barbossa, alors que Kevin R. McNally jouera une fois de plus le camarade de longue date de Jack Sparrow, Joshamee Gibbs. Le guitariste des Rollins Stones, Keith Richards, reprendra le rôle du capitaine Teague. Rappelons que Johnny Depp s'était fortement inspiré du look du musicien pour créer son personnage...

Les sirènes du succès

Le directeur de la photographie des trois précédents volets, Dariusz Wolski, est également de retour, tout comme le superviseur des effets visuels Charles Gibson, le coordinateur des cascades George Marshall Ruge et le superviseur des effets spéciaux John Frazier. On ne change pas une équipe qui gagne ! Le réalisateur Rob Marshall, quant à lui, a invité le directeur artistique de ses films Chicago et Mémoires d'une Geisha, John Myhre. Le montage du film a été confié à Michael Kahn (Prince of Persia), David Brenner et Wyatt Smith (Nine). Penelope Cruz, qui a déjà collaboré avec Rob Marshall pour Nine, tiendra le rôle de la femme surgi du passé de Jack Sparrow, alors que le rôle de Barbe Noire, le plus affreux pirates qui ait existé, a été confié à Ian McShane (Deadwood, Coraline). Dans la réalité, Barbe Noire était un pirate anglais qui sema la terreur dans les Caraïbes entre 1716 à 1718 à bord du Queen Anne's Revenge (La Vengeance de la Reine Anne), un ancien navire français. Sam Claflin (Les Piliers de la Terre), Max Irons (Dorian Gray), Stephen Graham (Snatch), Gemma ward (The Strangers) et la française Astrid Bergès-Frisbey (La Première Étoile) rejoignent également le casting. Ces deux dernières joueront des sirènes ! Richard Griffiths (Vernon Dursley dans la saga Harry Potter) incarnera le roi George II de Grande-Bretagne. Début 2010, après un long voyage débuté au Bahamas, le navire Black Pearl de Jack Sparrow est arrivé sur l'île d'Oahu (où a été tournée la série Lost), à Hawai. Le tournage y a débuté le 14 juin dernier, avant de continuer - en studio - à Los Angeles, à partir du mois d'août. Plusieurs scènes ont également été tournées au sein des studios Pinewood, près de Londres, ainsi qu'au Old Royal Naval College de Greenwich. Johnny Depp nous a offert un premier aperçu de ce quatrième volet à l'occasion de la convention Comic Con de San Diego, en juillet dernier. Filmé – en 3D ! - sur une plage d'Hawaï, un teaser montrait Jack Sparrow, une bouteille de rhum à la main, déclarant qu'il s'apprêtait à partir à la recherche de la Fontaine de jouvence. Une quête qui nécessitera, selon l'inénarrable capitaine, une carte ensanglantée, ou un bloody Mary... ou les deux ! Il nous promet une aventure avec des zombies, des coupeurs de gorge, des sirènes... et Penelope Cruz ! De quoi motiver les spectateurs à partir à l'abordage, le 18 mai prochain...

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