Entretien exclusif avec David Elsey, créateur du maquillage du Fauve dans X-MEN LE COMMENCEMENT
Article Cinéma du Jeudi 20 Octobre 2011

A l'occasion de la sortie de X-Men Le commencement en Blu-ray et DVD le 19 octobre, découvrez notre nouvelle série d'entretiens!

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Récemment Oscarisé pour sa collaboration avec Rick Baker sur les effets spéciaux de maquillage de THE WOLFMAN, David Elsey et son épouse Lou ont été chargés de concevoir le nouvel aspect du personnage de Hank McCoy pendant et après sa transformation en créature à la fourrure bleue, surnommée « le fauve »…

Tout d’abord, félicitations pour l’Oscar que vous avez partagé avec Rick Baker pour votre travail commun sur THE WOLFMAN. Nous sommes ravis que vous ayez été récompensés pour les maquillages du film, même si nous aurions souhaité que vous ayez eu l’occasion de créer plus d’effets de maquillage et de créatures animatroniques, et qu’il y ait un peu moins d’effets 3D au final…

Merci…Nous aussi, nous aurions aimés qu’il y ait un peu moins de trucages numériques. L’ironie de la situation, c’est que nous avons encouragé la production à utiliser de la 3D au début, afin de mêler le meilleur des effets que nous pouvions faire au meilleur de ce que la synthèse pouvait produire ! Mais en fin de compte, la production a choisi de faire l’un OU l’autre, ce qui était une mauvaise décision de sa part. En dépit de cela, et de quelques autres regrets, nous sommes globalement assez contents de la manière dont notre travail a été utilisé dans le film.

Parlons à présent de X-MEN LE COMMENCEMENT…Avez-vous eu la possibilité de créer librement le design du fauve, ou est-ce que le studio, Matthew Vaughn ou les producteurs ont souhaité établir un lien visuel entre le jeune fauve et le mutant adulte qui était apparu dans X-MEN 3 ?

Oui, on nous a laissé beaucoup de liberté pour concevoir le design. Matthew Vaughn nous a encouragé à donner un aspect nouveau à ce personnage. Dans ce film, l’idée est que nous découvrons le Fauve juste après sa métamorphose, tandis que dans X-MEN 3, nous le voyons bien plus tard, à un moment de sa vie où il a pu modifier un peu son « look » en fonction de ses propres goûts. Dans X-MEN LE COMMENCEMENT, il ressemble beaucoup au personnage tel qu’il apparaît dans les comics. Nous avons d’ailleurs emprunté des caractéristiques faciales à plusieurs représentations du Fauve, datant de différentes époques des BDs. Quand on étudie l’évolution graphique du personnage, on se rend compte qu’à certains moments, il a un aspect plutôt félin, tandis qu’à d’autres, il peut apparaître soit simiesque, soit plus humain. Nous avons fait la synthèse de toutes ces apparences pour produire celle que vous avez pu voir. Heureusement, quand on m’a engagé pour ce film, les options de design étaient largement ouvertes…

Y a t’il toutefois un dessinateur de Marvel qui vous a inspiré plus particulièrement ?

Non. J’aime beaucoup les différents aspects qui ont été inventés pour le Fauve, et j’ai essayé de m’inspirer de chacun d’entre eux, par petites touches, afin de créer notre propre version du personnage.

Avez-vous créé des effets spéciaux de maquillage pour la scène de métamorphose de Hank McCoy en Fauve ? Des faux pieds ou fausses mains, par exemple ?

Nous avons fabriqué toutes les différentes parties de son corps, en plus du maquillage facial , c’est à dire un costume, des pieds et des mains, mais nous ne nous sommes pas occupés des effets de la métamorphose, qui sont réalisés avec des effets numériques. La séquence de transformation est montrée en point de vue subjectif, celui de Hank, ce qui est très intéressant.

Avez-vous collaboré avec l’équipe des effets visuels de la même manière que pour THE WOLFMAN ?

Nous avons collaboré avec eux, mais d’une manière nettement moins importante que pour THE WOLFMAN. Nous avons décidé de l’aspect que le Fauve a à la fin de sa métamorphose, mais John Dykstra, qui est une légende dans le domaine des effets visuels, et son équipe se sont chargés de tout ce qui précédait.

L’équipe des effets numériques a t’elle scanné et photographié les sculptures et les maquillages que vous aviez crées pour reconstituer le Fauve en 3D ?

Oui, ils ont scanné en 3D puis photographié en haute résolution et sous tous les angles tous les éléments de maquillage que nous avons fabriqué. Nous avons fait de nombreux tests pour cette séquence, et nous avons même sculpté des phases intermédiaires de la transformation de Hank McCoy en Fauve.

Pouvez-vous nous expliquer comment le maquillage du fauve a été créé et appliqué, étape par étape ?

Oui, avec plaisir. Cependant, il faut d’abord que je précise que je n’ai pas été le premier maquilleur qui avait été engagé pour faire ce travail. A l’origine, c’était le studio Spectral Motion qui avait été choisi. Ils ont proposé un design pour le Fauve qui n’a pas correspondu à la direction dans laquelle Matthew Vaughn voulait aller, et de ce fait, on a fait appel à moi assez tardivement. Nous avons perdu plusieurs mois à cause de ces circonstances, et j’ai dû lancer le processus de design très très vite pour réussir à faire ce travail dans les délais imposés. La première étape a consisté à prendre beaucoup de photos de Nicholas Hoult, qui joue Hank McCoy / le Fauve, et à retravailler ces images avec les logiciels Photoshop et ZBrush. J’ai essayé de trouver quelque chose qui puisse plaire à Matthew, ce qui n’était pas facile, parce qu’il y avait déjà eu des centaines d’illustrations faites autour de ce personnage, dont aucune ne lui convenait !

Comment avez-vous réussi à le séduire avec votre design ?

Ma proposition revenait vraiment aux racines de BD du personnage. Une fois que j’ai établi le look qui me plaisait, j’ai réalisé un modelage du personnage très rapidement, en une journée, puis nous avons montré ce travail à Matthew. Il a tout de suite adhéré à notre démarche et nous a dit de continuer dans cette voie. L’étape suivante a été de mouler le visage et le corps de Nick Hoult, et de travailler sur les positifs en plâtre de ces moulages pour modeler dessus la transposition de ce que j’avais fait sur la maquette du personnage en pied, et faire en sorte que tout cela se prête à la création de prothèses efficaces. J’ai voulu impliquer Nick dans ce processus dès le départ, car je voulais qu’il se sente le plus à l’aise possible en portant ce maquillage et ce costume, et puisse jouer sans gêne.

Nous avons rencontré Nick Hoult, et il n’a rien du physique massif du Fauve…

Non ! Comme vous avez pu le constater, transformer le jeune homme qu’est Nick en bête au pelage bleu est une transformation énorme, et nous avons travaillé étroitement ensemble pour que cette métamorphose se passe bien. Nous avons fait faire les dents de telle manière qu’il puisse parler avec, même s’il faudra qu’il se double par la suite pour être plus intelligible.  Nous avons d’ailleurs fabriqué les dents en amont afin de voir jusqu’à quel point nous pouvions modifier la ligne de sa mâchoire et la forme de la bouche uniquement avec ces prothèses dentaires. Nous l’avons moulé ensuite, et c’est cette empreinte de son visage avec sa bouche déformée par sa fausse dentition qui a été le point de départ de la conception de son maquillage. C’est à partir de là que nous avons déterminé jusqu’où nous pouvions pousser le design des prothèses tout en le laissant parler, bouger et exprimer des émotions par ses mimiques. Quand il est maquillé en Fauve, la fausse mâchoire de Nick est beaucoup plus proéminente que sa vraie mâchoire. Nous lui avons fabriqué des lentilles de contact sur mesure, et bien sûr les prothèses et le costume adaptées à son physique.

Comment s’est-il soumis au processus du maquillage ?

Je dois dire que Nicholas a été formidable tout au long de ce travail. Non seulement, il a eu de bonnes idées pendant toute la partie de la conception du maquillage et de costume, mais il a fait preuve aussi de beaucoup de patience pendant les essayages, la pose des prothèses, etc. Il nous a aidé aussi à déterminer jusqu’où nous pouvions pousser le design, afin de trouver le bon équilibre entre ses vrais traits et la transformation. C’était un processus très enrichissant. Une fois que cela a été fait, nous nous sommes attaqués au problème délicat des poils. C’était un des autres aspects du maquillage et du costume qui devait être parfaitement réussi, parce que Matthew Vaughn avait une idée bien précise de la manière dont nous devions représenter les poils du Fauve. Il ne voulait pas qu’ils aient cet aspect dense et épais, proche d’une chevelure humaine, du Fauve interprété par Kelsey Grammer dans X-MEN 3. Il souhaitait donner au personnage une vraie fourrure animale. Mais toute la question était de savoir comment nous allions obtenir cet aspect et surtout comment nous allions pouvoir poser un tel pelage sur une structure de costume qui produise un rendu réaliste en bougeant. C’était notre gros obstacle suivant. Par chance, j’avais déjà été confronté à ce problème sur THE WOLFMAN, et  mon épouse, Lou Elsey, avait été responsable de la fourrure sur ce film. Elle fait un travail remarquable dans ce domaine. Elle a inventé plusieurs designs et moyens techniques afin d’obtenir ce que nous souhaitions pour le Fauve. L’un des objectifs était de parvenir à donner des directions très précises aux poils, à partir de leur implantation. Il fallait que cette implantation soit extrêmement maîtrisée, car la direction des poils allait être utilisée pour souligner les lignes de la sculpture du personnage. Lou a donc développé différents moyens pour donner des angles et des directions précises aux poils implantés dans les prothèses, le costume, les pieds et les mains. Le travail qu’elle a fait sur les jambes était spectaculaire. Une fois cette étape franchie, nous avons fait un test de maquillage en réunissant tous ces éléments, et tout s’est mis en place assez rapidement. Nous avons maquillé Nicholas, nous lui avons fait enfiler son costume et nous sommes allés le montrer ainsi à Matthew. A notre grand soulagement, dès que Matthew a vu Nick, il a dit « C’est ça ! ». Il a adoré le résultat et nous a simplement demandé des petites modifications de texture et deux ou trois autres petites correction que nous avons faites rapidement. Quand le maquillage a été définitivement approuvé, nous avons entamé une course contre la montre pour faire en sorte que toutes les prothèses et les copies du costume et des autres éléments soient prêts à temps pour le tournage.

Pouvez-vous nous expliquer comment vous êtes parvenus à maîtriser la direction des poils de la fourrure ?

Avec plaisir, car c’est un travail intéressant, dont on parle peu habituellement. La plupart du temps, quand les gens implantent des poils, ils ont tendance à leur donner une direction uniforme et apparemment « logique ». Cependant, si vous prenez le temps d’observer vraiment la fourrure d’un chien ou d’un gros félin, vous vous rendrez compte que cela ne fonctionne pas ainsi dans la nature : les poils changent souvent de direction, de manière abrupte. Ils ne se contentent pas d’être dirigés vers le haut ou vers le bas. Dans la réalité, ils forment des pics et des creux, des petites spirales, des sortes d’étoiles, et ce sont tous ces petits détails que les gens ont tendance à ignorer quand ils tentent de reproduire ces pelages. Du coup, le résultat est bien trop régulier pour paraître naturel. Nous avons essayé de dupliquer tous ces effets de changements de direction, et nous nous en sommes servis « graphiquement » pour souligner la sculpture et la musculature du personnage du Fauve. Lou et moi avons travaillé de manière très détaillée sur tous ces effets de fourrure. J’ai eu de la chance de l’avoir à mes côtés, car elle est vraiment la meilleure de tout le métier dans ce registre ! Tous ces reliefs créés avec la fourrure se marient parfaitement avec les traits et le physique du personnage. Par exemple, nous voulions être en mesure de voir sa peau au travers de la fourrure du cou, tout en créant une continuité avec la fourrure épaisse qui descend de sa tête vers sa nuque et son dos. Pour parvenir à ce résultat , nous avons créé des pics de poils implantés dans des directions opposées sur son dos, qui entrent en contact les uns avec les autres. Les poils du bas de la tête sont dirigés en avant - vers le bas, donc – tandis que ceux qui se trouvent sur les épaules sont dirigés en arrière – vers le haut – et rejoignent ceux de la tête. Nous voulions aussi souligner l’anatomie du cou, et les deux tendons en diagonale que l’on voit de chaque côté de l’avant de la gorge. De la même manière, nous avons implanté les poils dans deux directions opposées afin qu’ils se rejoignent sur le long des parties saillantes des tendons, en les soulignant. Ainsi, au lieu de dissimuler cette partie du corps du personnage en la recouvrant, la fourrure la met en valeur. Le même procédé a été appliqué à son visage, ses bras et ses jambes. C’est l’un des aspects du personnage du Fauve dont je suis le plus satisfait. Sa fourrure a des textures très variées qui la rendent très intéressante.

Comment créez-vous concrètement cette implantation ? Quels sont les supports de fourrure que vous employez sur les différentes parties du corps et du visage du personnage ?

La chose qui différentie la fourrure des cheveux, c’est que la fourrure a une longueur uniforme, et que les extrémités des poils, contrairement à celles des cheveux, sont plus fines. C’est ce qui fait que si vous prenez une brosse et que vous essayez de « coiffer » votre chien ou votre chat en changeant la direction de ses poils, ça ne marchera jamais. La fourrure reprend toujours sa position initiale. De ce fait, quand vous concevez une implantation de fourrure, il faut d’abord que vous visualisiez précisément les effets que vous voulez créer avant de vous lancer, car une fois que les poils sont mis en place, il n’y a plus rien à faire. On ne peut ni les couper, ni les coiffer d’une quelconque manière. Lou et moi avons entamé cette approche du design de la fourrure sur Photoshop, en commençant par le visage, puis en prolongeant ce traitement sur le reste du corps. En ce qui concerne le visage, l’implantation a été faite poil par poil. On donnait à chaque poil l’inclinaison souhaitée en le poussant dans la mousse de latex sous cet angle, avec une aiguille au chas cassé qui fonctionne comme une fourche miniature. Quand le poil dépassait de l’autre côté de la prothèse, il était fixé de ce côté-là avec de la colle Pros-Aid, afin d’être solidement maintenu. En ce qui concerne la tête, nous avons employé un procédé particulier de placement de fourrure sur un filet extensible. Quand on confectionne une perruque traditionnelle, on noue un ou plusieurs longs cheveux en faisant une boucle dans la trame d’un tulle ou d’un tissu élastique qui ressemble à un filet. Dans le cas d’une fourrure dont les poils mesurent de 1,5 à 3 cm, il est quasi-impossible de parvenir à faire un nœud : les poils sont trop courts. Nous avons donc mis au point une méthode pour retirer le support de la fourrure que nous avons utilisée, afin de transférer ses poils sur un réseau élastique en forme de filet, qui s’adaptait à la forme de la tête de Nick. Cependant, à ma grande surprise,  sur certaines parties du visage, Lou a trouvé un moyen de créer de minuscules postiches de fourrure, dont les poils étaient méticuleusement noués, et que nous pouvions coller sur les prothèses, puis récupérer pendant le démaquillage. Cette fabrication était si délicate que nous n’avons trouvé qu’une seule personne qui soit capable de nouer ces poils de fourrure à la perfection sur une sorte de tulle élastique. Ces postiches-là ont été conçus pour pouvoir être fixés sur les contours de la mâchoire, et sur le sommet de la tête, sur ces endroits où la peau se contracte et s’étire beaucoup, et qui doivent rester très flexibles. Tout ce travail a été extraordinairement délicat, et a nécessité des milliers d’heures de travail. Chaque prothèse sur laquelle les poils étaient implantés n’était utilisée qu’une fois : après le démaquillage, la prothèse était ruinée, et bonne à jeter. Et tous les duplicata de cette prothèse que nous préparions pour les autres journées de tournage devaient être rigoureusement identiques dans les moindres détails. Heureusement, les petits postiches de fourrure réutilisables nous ont permis de gagner du temps. Mais la majorité des poils du personnage a été implantée.

Cela se voit, car le résultat est superbe de finesse.

Merci !

Comment les lentilles de contact ont-elles été créées ?

Eh bien au départ, nous avions envisagé de fabriquer des lentilles sclérales, qui auraient donc recouvert toute la surface visible de l’œil, mais après en avoir parlé avec Nick, nous nous sommes dits que nous le changions déjà tellement que nous allions nous en tenir à de « simples » lentilles de contact. Comme par le passé, nous travaillons avec des opticiens pour fabriquer des lentilles sur mesures pour l’acteur, d’après un design que je dessine, et ensuite elles sont testées, modifiées si nécessaire, et finalisées.

Combien de temps l’application du maquillage durait-elle ?

Au départ, quand nous avons réalisé le premier test de maquillage, elle durait quatre heures et demie. Mais par la suite, nous sommes arrivés à la réduire à trois heures. Notre record a été de deux heures et demie, après un long moment de pratique ! Ensuite, il fallait faire enfiler à Nick son costume, ses bras, ses jambes, ses pieds et ses mains, puis mettre en place ses dents et ses lentilles de contact. En tout, la transformation complète durait environ cinq heures. Bien sûr, pendant le processus, nous ménagions aussi des temps de pause.

Avez-vous créé aussi une sous-couche de musculature en mousse, sous la partie externe du costume avec la fourrure bleue ?

Oui, absolument. Nick est arrivé sur le tournage en pleine forme physique, car il s’était entraîné comme un fou pour jouer ce rôle. Comme il est grand et plutôt fin, même après s’être beaucoup musclé, il n’avait pas encore le physique que nous estimions nécessaire pour avoir la silhouette du Fauve. Nous avons donc créé une musculature artificielle fixée sur un costume pour obtenir le résultat souhaité.

Est-ce que ce costume est composé d’une structure de Lycra sur laquelle sont fixés des volumes de muscles en mousse de latex ?

Oui. C’est une sculpture de corps que nous avons faite et tirée en mousse de latex, et dont nous avons séparé les différentes parties de manière à ce que les éléments des masses de muscles puissent jouer davantage en laissant le lycra s’étirer. Les bords des muscles peuvent également passer les uns au dessus des autres quand Nick adopte certaines postures. La couche du costume sur laquelle les poils sont fixés peut coulisser par-dessus ces muscles comme une peau, ce qui permet d’obtenir un rendu très réaliste.

Combien de duplicata du maquillage et du costume avez-vous eu à créer pour les cascadeurs ou les doublures de Nicholas Hoult ?

Nous avons fabriqué autant de prothèses pour Nick que pour sa doublure tournage, en dépit du fait qu’il n’y a que très peu de plans dans laquelle elle apparaît. Et nous en avons fabriqué aussi une quantité équivalente pour sa doublure cascade, mais nous n’avons posé que très rarement ces prothèses sur le cascadeur. En constatant cela, et pour faire gagner du temps à tout le monde, nous avons fini par fabriquer un simple masque qu’il pouvait porter. Le masque était constitué des prothèses en mousse de latex  fabriquées pour Nick, qui étaient collées sur un support de plastique rigide thermoformé en forme de crâne qui s’adaptait au visage du cascadeur, et qui reproduisait les volumes du visage de Nick. De cette manière, quand il portait le masque, il ressemblait comme deux gouttes d’eau à Nick maquillé en Fauve. Comme nous lui avions fabriqué aussi une dentition, le cascadeur pouvait ouvrir la bouche et agir sur le masque pour changer un peu d’expression. Ces mimiques étaient rudimentaires, bien sûr, comparées à ce que Nicholas pouvait faire avec les prothèses collées comme une seconde peau sur son visage, mais elles étaient suffisantes pour la courte durée des plans de cascades, ou pour des scènes filmées en plans larges.

Avez-vous une idée du nombre total de séries de prothèses que vous avez fabriquées pour Nicholas Hoult et pour ses doublures ?

Environ 35 séries complètes de prothèses. Chaque série comprenant tout ce qui était utilisé pour faire le maquillage complet du personnage.

Quelles étaient les difficultés liées à la fabrication des mains et des pieds du Fauve ?

Le plus complexe dans la transformation des mains et des pieds, c’est de réussir à donner l’impression que leur anatomie a été modifiée, tout en laissant les vraies mains et les vrais pieds de l’acteur fonctionner normalement. Les spectateurs ne doivent pas avoir l’impression qu’il porte de gros gants ou des souliers épais. Pour éviter cela, nous avons sculpté les doigts de pieds du Fauve de telle manière qu’ils soient toujours recourbés en dessous du niveau de la plante des pieds. Ainsi, dès que Nick soulevait ses pieds, ses orteils se recourbaient naturellement, comme s’ils bougeaient. Et inversement, quand il posait ses pieds à terre, les orteils s’écartaient. C’était un petit détail qui fonctionnait très bien. En ce qui concerne les mains, nous avons fabriqué des gants assez classiques, avec une fermeture éclair placée à l’intérieur.

Quel a été le défi le plus difficile à relever au cours de ce projet ?

Comme bien souvent, le principal défi à été de se lancer dans la réalisation du maquillage trop peu de temps avant le début du tournage. Même si nous avons réussi à aller au bout de toutes les démarches artistiques et techniques que nous avons entreprises, nous aurions aimé disposer de plus de temps pour affiner les choses. Il a fallu courir constamment, et nous étions dans une situation où nous n’avions pas le droit à l’erreur : soit les options que nous avions choisies allaient marcher, soit elles seraient inutilisables ! Et dans ce cas-là, nous n’avions pas le temps suffisant pour concevoir ou fabriquer un « plan B » ! C’est cette lutte contre la montre qui a été la plus dure, car la création de ce personnage représente une quantité de travail colossale. Nous aurions pu gagner du temps s’il avait été décide que le pelage du fauve ressemblait à des cheveux, mais comme Matthew voulait de la fourrure, nous avons été contraints de résoudre de nombreux problèmes nouveaux, et d’investir énormément de travail dans la création de chaque prothèse, avant même que nous n’intervenions directement sur l’acteur.

Avez-vous créé d’autres effets de maquillage pour le film ?

Non. C’est un peu inhabituel , car quand je suis engagé sur un film, je m’occupe normalement de tous les maquillages du projet. Mais étant donné que je suis arrivé assez tard par rapport au début du tournage, je ne me suis occupé que du Fauve. Sur ce tournage, qui a été fait dans des délais relativement courts, le travail de maquillage a été réparti entre plusieurs studios : certaines personnes s’occupaient de Mystique, d’autres d’Azazel…

Quels souvenirs garderez-vous de X-MEN, LE COMMENCEMENT , en dehors des délais de travail trop courts ?

Créer le Fauve a été un projet passionnant et très excitant à réaliser. C’était amusant de travailler sur un film comme X-MEN, LE COMMENCEMENT. Je dois encore rendre hommage à Nicholas Hoult, car je peux dire que sans sa coopération totale, sa créativité et son enthousiasme de tous les jours pour ce maquillage et ce personnage, nous n’aurions pas pu obtenir un si bon résultat. Une bonne coopération entre maquilleur et acteur est indispensable quand on crée un personnage aussi poussé. Nous avons eu de la chance que Nick se passionne pour notre travail, et s’implique totalement dans sa réalisation. Il voulait que le personnage ait un bel aspect, qu’il paraisse crédible, et puisse refléter toutes les émotions de son jeu d’acteur. Si le Fauve fonctionne si bien dans le film, c’est à 80% parce que Nick nous a laissé faire tout ce que de nombreux acteurs refusent de faire habituellement, parce qu’ils préfèrent se simplifier la vie et passer un minimum de temps dans la loge de maquillage. Pour vous donner un exemple de la manière dont Nick s’est consacré à ce travail, j’aimerais vous montrer les dents que nous avons fabriquées pour lui : elles sont énormes ! Et pourtant, Nick les a emmenées chez lui pour pouvoir s’entraîner avec elles tous les jours, non seulement pour réussir à parler, mais aussi pour prendre un accent distingué à la Kelsey Grammer, rappelant ses intonations dans X-MEN 3 !

Juste pour mesurer l’exploit que vous avez accompli, combien de temps s’est-il écoulé entre le jour où vous avez été engagé et celui où vous avez fait le premier test de maquillage du Fauve pour le montrer à Matthew Vaughn ?

Six semaines.

C’est incroyable que vous y soyez parvenu dans ces délais !

Oui. En tout, entre le premier jour et le début du tournage, nous n’avons disposé que de deux mois et demie. C’était si intense que je frissonne encore un peu quand je vois quelque chose qui a la même nuance de bleu que la fourrure du Fauve ! (rires)

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