Boliloc : un fabuleux spectacle !
Article Spectacles du Mardi 24 Juin 2008

Par Pascal Pinteau

Si vous n’avez jamais eu l’occasion d’assister à un spectacle de Philippe Genty et Mary Underwood, ruez-vous à Paris, au théâtre du Rond Point où se joue jusqu’au 6 juillet BOLILOC, le nouveau voyage dans l’imaginaire auquel nous invite ces deux créateurs inspirés. BOLILOC mêle toutes les disciplines du théâtre – mime, sketches, marionnettes, danse, comédie – pour créer une magie qui touche toutes les générations. Les comédiens Scott Koehler et Alice Osborne rivalisent de talent, et les manipulateurs invisibles donnent vie à de nombreuses apparitions inoubliables. Il faut saluer Christian Hecq, l’homme chauve du trio, qui arrache des hurlements de rire à la salle. Ses mimiques, ses attitudes, ses petites répliques , tout tombe à la perfection, à la seconde près. Ce comédien est incroyable, absolument exceptionnel. Un génie comique. De la joie, de l’étonnement, de la beauté, de l’émotion, voilà ce qui vous attend dans ce formidable spectacle. ESI ne saurait trop vous inciter à le découvrir au plus vite.

Du 27 mai au 6 juillet à 20h30. Dimanche à 15h relâche les lundis et les dimanches 1er et 8 juin. durée 1h30

tarifs / salle Renaud-Barrault : plein tarif 33 euros / groupe (8 personnes minimum) 20 euros / plus de 60 ans 24 euros. Demandeurs d’emploi 16 euros / moins de 30 ans 14 euros / carte Imagine R 10 euros

Répétition d'une scène du spectacle de Philippe Genty, BOLILOC. Cette scène ne fait pas partie du spectacle. Elle a été abandonnée.


Entretien avec Philippe Genty

Que se passe-t-il dans Boliloc ?

Cela commence par une scène de cabaret avec une ventriloque. Celle-ci commence par se dédoubler ce qui est normal pour une ventriloque, mais voilà qu’elle se démultiplie en différentes personnalités lesquelles ne tardent pas à entrer en conflit les unes avec les autres. Alors le personnage du ventriloque plonge à l’intérieur de lui-même pour tenter de régler les conflits avec ces personnages qui le dévorent de l’intérieur. Mais, au fond, dans tout cela ce qui m’intéresse c’est de confronter les comédiens-danseurs présents sur scène à des matériaux, des objets, qui peuvent avoir la forme de paysages, par exemple. C’est un voyage intérieur dans lequel le personnage principal va réussir à faire la paix avec ses monstres.

Comme tous vos spectacles, c’est très visuel…

Je fonctionne beaucoup sur l’image, c’est vrai. Les personnages doivent se confronter à des objets étranges comme des boîtes labyrinthiques, par exemple. À un moment, ils sont pris dans un puzzle qui devient un paysage mouvant où s’épanouissent des fleurs énormes, gigantesques, comme des océans. C’est plein de métamorphoses. Alors il faut que les images changent rapidement ce qui suppose un important travail sur les matériaux.

C’est proche du surréalisme, du rêve, de l’inconscient…

Oui, dans le sens où Freud dit que les rêves font ressurgir les désirs et qu’ils nous laissent le matin sur des interrogations. Ces images me disent quelque chose, mais quoi je l’ignore. Donc on a ce sentiment du rêve. Les choses surgissent de la scène ; il n’y a jamais d’entrée latérale car cela n’existe pas dans mes rêves. Il y a dans le spectacle cette nécessité des choses qui surgissent et qui s’en vont. Pour moi la scène est plus le lieu du subconscient qu’autre chose. Donc je cherche à aspirer le spectateur dans ce lieu-là en l’obligeant à être actif. Le spectateur est continuellement dans un processus où il doit s’interroger. Pour moi le théâtre est un lieu artificiel, ce n’est pas le lieu de la réalité. C’est le contraire du théâtre stanislavskien. Car je suis plutôt du côté de Gordon Craig, d’un théâtre où tous les signes ont leur importance : la lumière, la musique, les sons, les objets, l’ombre, etc.

Boliloc

mise en scène Philippe Genty et Mary Underwood

avec Christian Hecq, Scott Koehler, Alice Osborne

assistant Éric de Sarria

musique René Aubry

création lumières Baptiste Bussy

costumes Eugenia Piemontese ainsi que l’Atelier Couture du Théâtre des Célestins à Lyon

directeur technique Olivier Pot

équipe technique/manipulation Emmanuel Laborde, Philippe Zielinski, Guislaine Rigollet

plasticiens Sébastien Puech, Carole Allemand, Sophie Coëffic

assistés de Aurore Huber et Tomoe Kobayashi

production exécutive Maison de la Culture de Nevers et de la Nièvre

Le parcours de Philippe Genty

Avant 1938 : aucune trace de Philippe Genty.

1956 à 1957 : aurait été brièvement aperçu dans une école d’art graphique à Paris.

1962 à 1966 : Sa plus longue échappée dans une 2CV Citroën, à travers 47 pays, 8 déserts, tout en tournant un film pour l’UNESCO sur les théâtres de marionnettes à travers le monde.

1967 : Mary Underwood sa future compagne le découvre dans un état de délabrement avancé.

1968 à 1975 : Cherche désespérément une méthode pour organiser son chaos, spectacles en cabaret et à la télévision.

1976 à 1979 : Renonce à organiser son chaos. Il entre dans une compagnie de théâtre qui porte le même nom que lui ce qui lui permet de poursuivre sa fuite, incognito. Tournées aux USA, Japon, Afrique, Australie, Grande Bretagne, Chine, URSS, France, Amérique du Sud, Inde etc... Seule l’Islande prudente ne lui ouvre pas ses frontières.

1980 à 1983 : Tente vainement d’échapper à l’étiquette de marionnettiste ou de magicien du spectacle. Il crée avec Mary Underwood Rond comme un cube & Désirs parade.

1984 à 1990 : Explore les blessures et les refoulements de l’enfance comme source d’écriture. Création de Sigmund Follies et de Dérives.

1991 à 1995 : Expérimente la confrontation entre deux espace-temps, l’image peut-elle poser des questions existentielles en se passant des mots ? Prix de la critique au Festival d’Edinburgh. Création de Ne m’oublie pas et de Voyageur immobile.

1996 à 1999 : Tente de pacifier avec ses monstres intérieurs. Création de Passagers clandestins production Adélaïde Festival – Australie. Création de Dédale plongeon dans un labyrinthe d’abîmes financiers. Il vend ses services à l’Exposition Universelle de Lisbonne pour redresser les comptes de la Compagnie en créant et mettant en scène Océans et utopies dans un stade couvert de 10 000 places, 200 comédiens, danseurs, artistes de cirque et techniciens. « Un hameçon à un public qui ne va jamais au théâtre ». 525 représentations entre mai et septembre. Trois millions trois cent mille spectateurs.

2000 : Pacifie avec ses monstres. Se persuade naïvement qu’en témoigner pourrait aider quelques spectateurs. Création du Concert incroyable dans le cadre de la Grande Galerie de l’évolution avec 40 choristes et 12 comédiens danseurs.

2000-2003 : Reprise de Sigmund Follies qui devient Zigmund Folliesavec Eric de Sarria et Rodolphe Serres.

2003 : Création de Ligne de Fuite. Travail d’expérimentation autour de la lumière. Création de l’illusion de bas fonds. Ce spectacle marque aussi une nouvelle collaboration musicale avec René Aubry. Tournée internationale jusqu’en octobre 2005.

2005 : Reprise de Zigmund Follies avec Eric de Sarria et Philippe Richard. Début des répétitions pour La Fin des Terres.

2007 : En mai reprise des répétitions pour la nouvelle création, Boliloc qui sera présentée les 23 et 24 novembre à la Maison de la Culture de Nevers.

Philippe et Mary animent régulièrement des stages en France et à l’étranger, et en profitent, comme en Australie, pour aller caresser le dos des crocodiles.

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