VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE 2 : L’ILE MYSTERIEUSE - Entretien exclusif avec Randy Starr, co-superviseur des effets visuels
Article Cinéma du Mercredi 29 Fevrier 2012

Suite de notre visite du tournage de cet hommage 3-D à l’œuvre de Jules Verne !

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Quels sont les plus grands défis que vous avez à relever pour ce film, en termes d’effets visuels ?

Nous essayons « d’ancrer » chaque trucage numérique dans les éléments qui composent l’image réelle. Prenons l’exemple de l’extension de décor que nous sommes en train de préparer actuellement : nous avons disposé des fonds bleus derrière de vrais arbres et de vraies plantes, afin de pouvoir incruster ensuite les bourdons géants qui seront réalisés en images de synthèse. Au moment où nous parlons, notre seconde équipe est en train de réaliser des prises de vues des paysages d’Hawaï en hélicoptère, et ces fonds d’images serviront pour le reste de cette séquence, quand les héros du film chevauchent les bourdons et s’envolent. Grâce aux trucages numériques, nous mélangeons différents sites naturels, et réalisons des paysages composites qui sont encore plus beaux que ce que vous pouvez voir autour de nous. Nous allons notamment mélanger des vues d’une magnifique vallée qui se trouve de l’autre côté de l’île avec les images de la forêt dans laquelle nous nous trouvons. Notre but est de rendre ces paysages les plus intéressants possibles, tout en ajoutant une petite touche de mystère. Sur l’île de Kuaï, par exemple, nous avons filmé une vallée qui ressemble beaucoup au grand canyon : elle est composée de montagnes aux magnifiques roches rouges sculptées par l’érosion. Nous allons beaucoup l’utiliser dans une de nos séquences, car c’est un endroit atypique d’Hawaï, qui correspond parfaitement aux surprises que doit réserver l’île mystérieuse.

Pouvez-vous nous parler de la « caméra qui gazouille », cette plateforme d’appareils photos que vous utilisez pendant le tournage de plans destinés à être truqués ?

Cet appareil nous sert à enregistrer les sources lumineuses du paysage sur un périmètre de 360 degrés pendant que nous tournons un plan juste à côté. Par le passé, nous procédions différemment : nous utilisions un appareil photo sur lequel nous avions placé un objectif « Fish Eye » qui prenait une image de l’environnement en la déformant comme si elle était vue sur un dôme. Ensuite, nous pouvions reprendre cette image et la plaquer dans un dôme en trois dimensions dans l’ordinateur, afin d’obtenir un panorama à 360°. La « caméra qui gazouille » remplit la même fonction, mais en utilisant quatre appareils photos équipés avec des objectifs Fish Eye. Quand nous récupérons les fichiers de ces prises de vues en les combinant, nous pouvons former une image qui couvre entièrement l’intérieur d’une sphère pour représenter le panorama. En manipulant le curseur, vous pouvez voir le ciel, le sol, et faire un tour complet pour tout observer. De cette manière, quel que soit le moment de la journée et le numéro de la prise, nous sommes en mesure de savoir exactement à quel angle et dans quelle direction se trouvait le soleil, et où étaient placés chacun des projecteurs mis en place autour du décor. Grâce à ces informations, nous pouvons reconstituer toutes les sources d’éclairage et les utiliser pour éclairer de manière identique les éléments 3D que nous allons ajouter dans l’image, comme les bourdons géants. Nous avons développé des logiciels qui permettent à l’ordinateur d’analyser ces photos et de déterminer automatiquement l’intensité et la couleur des différentes sources d’éclairage, afin de les reproduire sur le lézard 3D.

Ce qui nous a surpris ce matin, c’est que cet équipement était placé quelques mètres derrière la caméra et non pas juste à côté…

Oui, c’est parce que nous plaçons la « caméra qui gazouille » à l’endroit où se trouvera la créature ou l’élément 3D qui sera ajouté plus tard. C’est à cet endroit-là dans l’espace que nous devrons reconstituer virtuellement l’éclairage naturel, et non pas là où la caméra est placée.

Les designs des créatures sont-ils déjà finalisés ?

Pas tous. Notre département de conception graphique a déjà réalisé ceux de la plupart des créatures, mais l’aspect des bourdons et des lézards sera déterminé un peu plus tard.

Vous êtes-vous chargé de la prévisualisation des scènes en 3-D Relief ?

Oui. Mon département a fait cela pour établir avec précision comment les choses allaient se passer en trois dimensions dans les principales séquences d’effets visuels, comme la scène de l’ouragan, le moment où les héros sont poursuivis par des lézards ou la séquence des bourdons. Les éléments ont d’abord été animés de manière traditionnelle, puis nous avons préparé une version œil droit et une version œil gauche de ces animations pour pouvoir les visionner en relief sur un grand écran. Nous avons pu tester ainsi les plans un par un sur grand écran et repérer tout de suite ce qui était payant et ce qui ne fonctionnait pas. Ce qui était flagrant, c’est qu’un montage rapide ne marche pas en 3-D, parce qu’il distrait constamment votre attention et fatigue vos yeux en les sollicitant trop vite pour converger sur des points de profondeur différents. On ne peut pas passer son temps à faire l’effort d’ajuster son regard tout en suivant bien la scène. Nous avons donc décidé de décrire les mêmes actions au sein de plans plus longs, afin que l’on profite confortablement de la scène.

Avez-vous regardé beaucoup de films 3-D pour les analyser, avant de travailler sur ce projet ?

Oui, énormément ! Tous les membres de notre équipe, tous départements confondus, ont fait leurs devoirs et son allés voir tous les films en relief disponibles, en salles et en Blu-Ray 3-D. Nous avons donc vu des très bons exemples de relief, et d’autres qui l’étaient nettement moins. AVATAR est sans aucun doute l’exemple de la perfection en matière de relief. Comme nous devions nous préparer à réaliser la séquence aérienne avec les bourdons géants, nous avons pris beaucoup de plaisir à voir celle de l’envol du héros dans le film d’animation de Dreamworks DRAGONS, qui était très réussi. Ce moment où le dragon survole la mer et passe au ras des rochers et des récifs était très spectaculaire. Elle nous a beaucoup inspiré.

La suite de notre reportage paraîtra bientôt sur ESI !

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