[Archives] “Derrière les prises” de Kung Fu Panda : les réalisateurs !
Article Animation du Mercredi 30 Mars 2016

Par Jérémie Noyer

“Viens avec moi, petit Scarabée. Aujourd'hui nous allons parler de la quête de soi et sa réalisation à travers un dur labeur. Du meilleur 'toi'' que tu puisses être, pour devenir ton propre héros. Et cela tu l'apprendras à travers l'histoire de Po, aussi connu sous le nom de Kung Fu Panda.

Enthousiaste, fort et pour toute dire un peu maladroit, Po était le plus grand fan de Kung Fu dans les parages... ce qui n'est pas l'idéal quand on travaille tous les jours dans le magasin de nouilles de sa famille. Mais quand il fut choisi, de façon inattendue, pour accomplir une ancienne prophétie, les rêves de Po devinrent réalité et il joignit le monde du Kung Fu pour étudier aux côtés de ses idoles, les Cinq Furieux légendaires, Tigresse, Grue, Mante, Vipère, et Singe, sous le commandement de leur gourou, Maître Shifu. Mais avant qu'ils ne le sachent, le léopard des neiges vengeur Tai Lung se dirigeait droit dans leur direction, et la tâche revint à Po de défendre tout le monde de la menace approchant. Pourrait-t-il faire de son rêve de devenir un maître de Kung Fu une réalité? Po mit tout son cœur à l'ouvrage, et le héros improbable découvrit finalement que nos plus grandes faiblesses se révèlent être nos plus grandes forces.

Et pour t'aider à te plonger dans cette légende, j'ai fait appel à deux maitres qui seront pour toi les meilleurs des guides: les réalisateurs de Kung Fu Panda (2008) eux-mêmes, John Stevenson (ancien scénariste et storyboarder de quelques-uns des plus grands projets animés de Dreamworks, réalisateur de la série animée Father of the Pride et ancien marionnettiste sur The Muppet Show) et Mark Osborne (animateur et réalisateur de More, court-métrage en Stop Motion récompensé à plusieurs reprises). Ils vont t'initier aux secrets mystiques les plus profonds de cette histoire qui vient tout juste de prendre vie sur nos écrans par la magie de l'animation.

Maintenant, va, Scarabée, et trouve ta voie...”




Quand on vous a proposé ce projet, qu'est-ce qui vous a le plus attiré ?

John Stevenson : Je pense que ce qui nous a attiré tous les deux était le côté "arts martiaux" de Ce projet. J'adore ce genre de films, particulièrement les films d'arts martiaux “Wuxia”, davantage que le type de films contemporains avec Bruce Lee à cause de ces mondes magiques et mystiques et de l'héroïsme, où les gens accomplissent de grands exploits. Nous voulions donc essayer de créer un vrai film d'arts martiaux en utilisant l'animation, et en créer un qui soit drôle. Non pas parce que ce serait une parodie, mais parce que les personnages eux-mêmes seraient drôles. Mark Osborne : Je pense que ce qui m'a attiré n'est pas seulement l'opportunité de faire un film d'animation sur le Kung Fu, ce qui me semblait parfait et le moment idéal en raison des dernières innovations technologiques rendant cela possible, le fait de se frotter à un tel genre épique, et d'essayer de lui rendre justice. Mais aussi, pour moi, c'était une grande opportunité de collaborer avec Jack Black, dont je suis un très grand fan, et cela semblait être le media parfait et l'opportunité parfaite pour créer un vrai personnage de fan, comme le fan le plus extrême jamais vu au cinéma, et permettre à ce fan de devenir le héros du film. C'était une immense chance pour un raconteur d'histoire.

Comment avez-vous réussi à vous entendre et à partager le travail de réalisateur ?

MO : Parfois bien, parfois pas bien! Ce fut un très long chemin, mais nous nous sommes mis d'accord dès le début sur le fait que nous voulions aller de l'avant et créer la meilleure version du film possible en faisant équipe, et non en entretenant un rapport conflictuel. Je pense par moments, le conflit aide à renforcer le film et, par moments, c'était vraiment bien d'avoir quelqu'un d'autre pour partager la pression. Mais en général c'était une expérience qui en valait la peine. Nous nous entendons très bien, maintenant!

JS : En gros, la façon dont nous avons réparti le travail, la façon la plus efficace de traiter les choses était que je m'occupe de tout le côté artistique, lumières et couleurs. L'après-midi j'allais travailler avec notre équipe scénaristique et Mark travaillait avec les animateurs parce que c'est son domaine.

MO : Oui, je passais la plupart de mon temps à travailler avec l'équipe d'animation et à travailler de manière très proche avec Dan Wagner, notre chef d'animation, et Rodolphe Guenoden, notre chorégraphe pour les combats, qui est aussi un animateur fantastique et animateur superviseur sur ce film. C'est devenu notre approche des choses la plupart du temps, mais dans chaque aspect du film, nous collaborions très intimement parce que nous savions que la seule façon de faire quelque chose qui soit solide était de garder un dialogue très ouvert à chaque occasion afin de créer le même film ensemble à l'opposé de faire les choses séparément.

JS : Quel que soit le différend que Mark et moi pouvions avoir à tel ou tel moment, nous tenions à résoudre cela entre nous afin de présenter toujours une seule approche cohérente du film à l'équipe.

Contrairement à la plupart des films animés de Dreamworks, Kung Fu Panda a quelque chose d'intemporel...

JS : Ce fut une décision très naturelle parce que c'est le film lui-même qui le demandait. Nous ne voulions pas d'un Shrek. Nous voulions juste essayer de créer un véritable film d'arts martiaux et cela aurait été une erreur si nous y avions mis des références à la culture actuelle alors qu'il a son propre monde, cela aurait été à l'encontre de ce que nous voulions faire: créer une histoire mystique.

MO : Ce fut difficile mais je dois dire que le Studio a supporté jusqu'au bout notre désir de faire quelque chose de différent parce qu'ils s'étaient rendus compte de la valeur de notre projet et cela correspondait au désir du Studio de se diversifier. C'était une époque où le Studio expérimentait vraiment dans différentes directions. Donc, pour nous, durant la première moitié de notre expérimentation sur ce projet, c'était comme: “Voyons si nous pouvons faire ces choses différentes.”

JS : Il y eut une période durant laquelle nous n'avions pas toutes les réponses et les choses n'avançaient pas. Mais une fois que nous savions les personnages sympathiques, l'histoire solide, que le travail sur le film était bon, que notre vision du film allait marcher, on se saurait imaginer plus grand soutien de la part du Studio!

MO : Aussi, nous voulions nous concentrer sur les personnages et il y avait certaines choses en matière de blagues que nous voulions éviter… et l'équipe est très fière de cela!

JS : De la même façon, il n'y a pas de chansons pop dans le film. Nous avons toujours voulu avoir un score orchestral, sans aucune référence pop.

Kung Fu Panda était un défi en soi en matière d'animation. Pouvez-vous m'en toucher quelques mots ?

MO : Le plus grand défi de tous était le Kung Fu. Etant donné que nous avions “Kung Fu” dans notre titre, et vu que nous devions nous inspirer des grands films de Kung Fu et des graphismes des arts martiaux, nous avons revu tous ces films avec l'espoir de faire encore mieux, ou au moins de faire quelque chose d'un peu différent. En tout cas, nous ne pouvions pas faire moins. Nous avons mis la barre très haute. La première piste que nous avons explorée fut de comprendre comment nous pourrions tirer le maximum des personnages animaliers et tirer le maximum de ce monde animé. Il ne s'agissait pas simplement d'animation mais de chaque aspect de la production, caméra, lumière, etc, tout ce qui aide à rendre nos combats aussi stylistiquement similaires à ces films mais créés en animation, et avec toute cette technologie derrière les personnages animés qui a vraiment aidé nos animateurs à faire quelque chose de jamais vu auparavant. Nous avons alors tiré le maximum des aptitudes en animation et de leurs caractéristiques animales. Pas question de voir les câbles qui permettent aux acteurs de voler comme c'est le cas dans certains films de Kung Fu. Au contraire, pour nous, c'était une façon de perfectionner le Kung Fu et proposer une cohérence du point de vue physique. C'était notre plus grand défi, parce que nous voulions notre Kung Fu aussi fondé que possible, et que tout le jeu des acteurs soit aussi fondé que possible, de sorte que les gens ne puissent pas distinguer qu'il s'agit d'animation et que nous puissions faire tout ce que nous souhaitions. Nous voulions vraiment ressentir le poids de ces personnages, que les gens croient ce qu'ils voient.



Votre équipe était vraiment internationale. Est-ce que vous considérez cela comme une aide à la différence, comme vous dites ?

JS : Dreamworks est international. Nous avions des techniciens de partout dans le monde, Europe, Asie, Afrique, Inde... Ce lieu est un foyer pour les meilleurs talents possibles dans le monde peu importe le pays d'où ils pourraient venir. Je suis anglais, vous savez. Notre équipe était un grand mélange d'artistes internationaux à tous les niveaux de la production, de l'animation jusqu'au département artistique. Nicolas Marlet, par exemple, est l'un des concepteurs de personnages les plus innovants que j'ai jamais vus et je voulais vraiment qu'il ait la chance de concevoir un film en entier.

MO : Je pense que nous avions un processus essentiellement basé sur la collaboration dans notre projet et quand il s'agissait de travailler avec l'équipe d'animation, tout le monde travaillait ensemble, tout le monde donnait de son opinion, lançait des idées. Il y avait sensibilités différentes de par les différents pays représentés. Notre équipe d'animation avait plutôt l'allure des Nations Unies de l'Animation!

JS : C'est un mélange de personnes de grands talents mais légèrement différentes culturellement de personnes issues d'Amérique, et cela pousse tout le monde dans une sorte de pot-pourri d'artistes ayant un passé et une vision très forts. Ce qui en ressort est d'autant plus puissant.

MO : Prenez l'école française par exemple. Nous avons fait venir certains artistes français sortant tout juste de l'école et cela a eu une influence majeure sur le film, avec une approche plus subtile par rapport à l'interprétation et une approche plus sophistiquée, plus retenue, avec les personnages. Voilà quelque chose qui venait de nos animateurs français.

Vous avez également fait appel à Daniel D. Gregoire, un artiste issue du cinéma en prises de vue réelles, que vous avez approché pour faire de la prévisualisation sur le film, ce qui est une façon de faire plutôt inhabituelle. Un mot là-dessus ?

JS : Comme je disais, le plus grand défi pour ce film, artistiquement et techniquement, concernait nos scènes d'action, la façon dont elles se différencient d'autres films animés ou entrent simplement en compétition avec les gros blockbusters d'été. A partir de là, le passage du storyboard 2D vers la 3D était très critique. Nous ne voulions pas que le film ressemble à un film animé; nous voulions qu'il ressemble à un film d'action en prises de vue réelles au niveau photographie et technique. Daniel Gregoire avait une immense expérience niveau prévisualisation sur beaucoup de grosses productions comme Star Wars et La Guerre des Mondes de Spielberg. De ce fait, nous avons commencé à travailler avec lui sur notre première séquence d'action, qui est l'évasion de la prison de Tai-Lung. Nous savions qu'il fallait mettre la barre plutôt haut et il fallait aussi fixer les choses, fixer ce que nous voulions faire. Ainsi, Dan est intervenu et il a commencé à travailler avec certains artistes de notre département layout, l'endroit où nous faisons la photographie notre film, et l'un d'eux s'appelait Gary Lee. Lui et Dan ont cherché à traduire les storyboards en 3D et à ajouter des choses que le storyboard ne pouvait exprimer ou représenter. Ce fut incroyablement utile dans cette scène, qui était une séquence de six minutes que nous avons finalement coupée en deux parce que trop importante et coûteuse, car ce procédé a généré des tonnes d'idées et nous a aidés à comprendre techniquement comment tous ces dessins pouvaient être traduits en 3D. Le système que nous utilisons pour nos layouts est très bon pour certaines choses, mais il n'est pas particulièrement rapide. De ce fait, l'un des bénéfices de la prévisualisation était que cela pouvait générer et mettre en forme beaucoup d'idées, de possibilités, rapidement et nous aider à prendre nos décisions plus rapidement étant donné que nous savions qu'elles marcheraient. Ce fut donc une étape capitale pour nous.

MO : Pour nous, c'était une extension de l'histoire plus que tout. C'était aussi prospectif que peuvent l'être nos storyboarders quand ils font leurs dessins en 2D mais cela nous permettait d'être dans un certain espace physique et tirer le maximum de cet environnement. Je pense que ce fut un énorme pas en avant pour nous pour comprendre ce qui était possible en matière d'histoire, ce que nous pouvons faire différemment des films d'animation du passé et où nous pouvons nous améliorer. Ce fut une situation similaire à celle qu'on vécu les artistes en prises de vue réelles il y a quelques temps, quand on leur un paragraphe, une poursuite en voiture ou autre, et qu'il leur fallait trouver des idées basées sur le décor qui a été conçu. Ce fut donc une étape facile pour nous, et un procédé très libérateur.

JS : Parce que, de manière conventionnelle, on peut passer directement du département "histoire", du storyboard et de l'animatique au layout, là où on place la caméra. Mais cela ne donnait pas beaucoup d'espace pour l'expérimentation en matière de layout, et cela rendait les choses un peu complexes dans les grandes scènes d'action. Ajouter cette étape supplémentaire nous donnait donc la liberté d'expérimenter rapidement des angles et des variations et de lancer la production avec les meilleurs choix.

Vous avez mentionné la 2D, et il y a effectivement une séquence animée dessinée à la main de manière traditionnelle, réalisée par James Baxter, qui ouvre le film. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur l'association inattendue de la 2D et la 3D au sein du même film ?

JS : Je pensais que cela serait marrant d'avoir une séquence 2D dans un film 3D.

MO : Et l'“inattendu” faisait partie du concept du film!

JS : Démarrer le film avec quelque chose qui surprendrait les gens parce qu'ils s'attendent à voir un film d'animation géré entièrement par ordinateur était rigolo. Nous adorons la 2D. Et cette séquence nous ravit. Elle est graphiquement plus stylisée que la plupart des dessins animés en 2D. Il y a là une sensibilité plus graphique et la japanimation fut d'une énorme influence.

MO : C'était un coup de chapeau, mais c'était aussi une façon géniale pour nous de montrer la vie intérieure du personnage et le contraste entre sa vie rêvée et sa réalité. Je pense que, quand vous voyez ce personnage passer de la 2D à la 3D, vous comprenez plus ou moins tout ce que vous avez besoin de savoir sur lui et son conflit interne. Pour nous, c'était une façon excitante de communiquer visuellement et stylistiquement beaucoup de l'histoire de façon économique. Nous sommes toujours à la recherche de nouveaux moyens visuels pour raconter des histoires au lieu d'écrire et de parler. Nous avons donc utilisé tous les outils disponibles pour communiquer cette histoire.

JS : Nous voulions aussi avoir un très bon générique de fin parce qu'un film d'animation possède un très long générique et regarder ce texte sur un écran noir est plutôt ennuyeux. Donc, afin de créditer toutes les personnes ayant travaillé très dur sur le film, nous voulions trouver quelque chose pour y parvenir et aider en même temps à faire avancer l'histoire ou apporter une nouvelle extension à ce monde. Nous avons donc eu l'idée d'utiliser le même style graphique en 2D avec lequel nous avons démarré le film.

Comment avez-vous créé la voix musicale de cet univers avec les compositeurs Hans Zimmer et John Powell ?

JS: Il était très important selon nous, tandis que nous rédigions au début du film une liste de choses que nous voulions faire ou ne pas faire, de ne pas avoir une bande son qui comporte des chansons pop. Nous voulions une approche plus traditionnelle, et une musique orchestrale. Nous voulions faire un grand film épique. Nous savions aussi qu'il nous fallait un accompagnement à très grande échelle du film. Nous avons eu beaucoup de chance que deux des meilleurs compositeurs d'aujourd'hui, disposant tous les deux d'une capacité à créer des paysages musicaux luxuriants, acceptent de travailler ensemble sur notre film. La musique de Hans est gigantesque, majestueuse et épique tandis que John a apporté une multitude d'idées passionnantes et innovantes. Nous adorons sans réserve cette musique!

MO : Nous leur avons dit au tout début que nous voulions que notre film soit une histoire intime à propos d'un personnage, mais la toile de fond devait être en même temps épique, avec un monde très formel et martial. C'était pour nous ce contraste fort entre ces deux éléments qui étaient la chose la plus importante dans notre histoire, et nous voulions qu'ils explorent cet aspect. Hans nous a donné ce grand thème épique de guerrier dragon, à la fois lyrique et émotionnel et John est celui qui nous a fourni la musique de Po, très simple et très humble. Venant d'eux deux, nous savions que cela serait le mariage parfait parce que le film était un mariage des extrêmes. Ce fut donc formidable qu'ils puissent travailler ensemble. Ces artistes ont vraiment mis du cœur à l'ouvrage et ce fut une expérience plutôt incroyable pour nous!

Pour chaque d'entre vous, quel fut le moment le plus exaltant de ce processus ?

JS : La meilleure partie pour moi fut le travail avec les acteurs. Ce fut incroyablement intéressant parce que tout le monde avait une façon tellement différente de travailler. Le travail de Dustin était totalement différent de celui de Jack. Ils étaient tous fascinants à regarder. J'ai appris beaucoup en regardant ces personnes. Tous sont des individus géniaux à côtoyer. Ils sont intelligents, marrants et immensément talentueux et passer du temps avec Angelina Jolie, Dustin Hoffman, Jack Black et Jackie Chan et toute l'équipe fut un grand moment! L'animation est le contraire du spontané. Cela prend tellement longtemps. Mais c'est lors de l'enregistrement des voix que l'on retrouve cette spontanéité.

MO : La partie la plus agréable pour moi fut de travailler avec les animateurs. J'ai adoré de nombreux aspects durant l'élaboration de Kung Fu Panda, comme l'enregistrement des voix avec les acteurs, mais travailler avec les animateurs et se rendre au Studio chaque matin pour voir le travail qu'ils accomplissaient même si c'est une étape beaucoup moins spontanée du procédé, fut vraiment fantastique. Il y a une telle lumière et vitalité que ces artistes ont su mettre image par image dans cette histoire! Tellement de possibilités d'expression dans le moindre geste qui permettent de renforcer l'histoire ou le thème que chaque jour fut un bonheur de collaborer avec des gens aussi coopératifs et ouvert. Pour moi, voir ce qu'ils faisaient et ensuite pouvoir travailler avec eux et guider ce processus fut très excitant! Cela me manque vraiment, maintenant. Je me balade dans les couloirs du studio d'animation même si je ne suis plus censé être là, juste pour dire: “Hey! Vous vous souvenez de moi?” Ce fut vraiment un immense plaisir!



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