[Archives] MAN OF STEEL : La réinvention d’une icône américaine - Entretien exclusif avec le producteur Charles Roven, Seconde partie
Article Cinéma du Dimanche 27 Mars 2016

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Comment avez-vous travaillé avec Henry Cavill sur sa gestuelle, son jeu et son élocution pour développer à la fois son côté Superman / extraterrestre venu d’un autre monde, et son comportement en tant que Clark Kent ?

Le premier point important pour jouer le rôle, c’était qu’il puisse prendre un accent américain, ce qu’il fait très bien. Mais Henry est tellement doué en matière d’accent qu’il nous a présenté très tôt une imitation quasi impeccable de l’accent du Midwest. Henry a fait beaucoup de recherches par la suite pour maîtriser les intonations du Midwest, et plus précisément celles du Kansas. Il est extrêmement déterminé, et va au bout de toutes les démarches qu’il entreprend pour préparer un rôle. Il s’est rendu au Kansas pour s’imprégner de l’atmosphère et de l’état d’esprit des gens de cette région. Il s’est entraîné avec une assiduité remarquable pour que son physique ressemble le plus possible à celui de Superman. Et il a travaillé tous les aspects dramatiques de l’évolution et de la trajectoire émotionnelle du personnage pour être en mesure de livrer une interprétation parfaite.

Superman tente de « rester sous le radar » en voyageant incognito et en exerçant toutes sortes de métiers. Mais devient-il le reporter aimable et maladroit que nous connaissons tous, à la fin de ce film ? L’avez-vous transformé en journaliste « geek » dans cette version ? Ou ce nouveau Clark Kent intervient-il de manière moins comique, et elle aussi plus réaliste ?

Quand nous le rencontrons, Clark ne connaît pratiquement rien de ses origines, si ce n’est qu’il vient d’un autre monde et qu’il a grandi entouré de l’affection de ses parents adoptifs, les Kent. Il veut résoudre ce mystère et part à la recherche de réponses... Clark sait qu’il possède des pouvoirs extraordinaires, et au cours de son aventure, il doit affronter les conséquences de ses découvertes… Elle lui posent d’énormes problèmes, et des cas de conscience qu’il va devoir gérer. Rien n’est simple dans ces nouvelles situations…Et en ce qui concerne la manière dont Clark gère son identité à la fin du film, laissons la découverte de cette surprise aux spectateurs !

En termes d’effets visuels, quelle est la clé pour parvenir à rendre les pouvoirs de Superman époustouflants ? Employez-vous aussi des effets spéciaux réalisés « en direct » sur le plateau quand vous devez simuler sa force ?

Nous avons utilisé absolument tous les outils disponibles pour obtenir des images spectaculaires. Nous avons eu recours à des trucages de plateau ahurissants, vraiment remarquables. Il y a notamment une séquence pendant laquelle Clark vient au secours des équipes qui travaillent sur une plateforme de forage pétrolier en haute mer, alors qu’un incendie s’est déclaré. Nous avons construit les décors intérieurs et extérieurs de cette plateforme, et je peux vous dire que nos acteurs ont joué juste à côté de vraies flammes très impressionnantes, mais parfaitement contrôlées pour assurer leur sécurité. Nous n’avons jamais placé qui que ce soit dans une posture potentiellement dangereuse, même si nous avons utilisé beaucoup d’effets « en direct » afin d’obtenir les images le plus saisissantes possibles. Quelle que soit la scène, nous nous sommes organisés de manière à disposer de tous les moyens d’obtenir le résultat le plus réaliste possible , soit « en direct », soit en post-production. Il y a bien sûr énormément d’effets visuels dans MAN OF STEEL, ne serait-ce que pour représenter la manière dont Superman vole, qui est très différente des représentations précédentes…

Oui, vous avez eu l’excellente idée de reproduire des effets qui se produisent dans la réalité devant le nez des avions supersoniques, comme l’espèce de dôme créé par les ondes de choc que vous avez placé devant la silhouette de Superman…

Exactement !

En tant que producteur du film, quels ont été les aspects les plus complexes de votre travail ? Vous devez avoir ressenti une terrible pression venant du studio, car le retour de Superman est un enjeu énorme pour la Warner et pour DC Comics…

Oui, c’est vrai que l’on ressent cette pression. Comme vous le dites, travailler sur le retour d’une telle icône est une énorme responsabilité. Le logo de Superman doit faire partie des 5 logos les plus reconnus partout sur la planète ! Mais l’autre aspect très positif de cette lourde tâche, c’est l’honneur qui nous est fait. Franchement, je suis très reconnaissant et très heureux d’avoir pu participer à cette aventure, non pas seulement parce que j’espère que le film, qui est l’un des plus gros évènements de l’été, et qui a été réalisé avec un énorme budget, sera un grand succès pour notre studio, mais aussi parce que depuis le début du projet, nous nous sommes tous entièrement dédiés à sa réussite. Professionnellement et personnellement, MAN OF STEEL a occupé nos pensées, nos journées de travail et même quelquefois nos rêves pendant plus de 2 ans et demi. Quand on se consacre à ce point à un film, on a envie qu’il soit réussi non seulement pour pouvoir en être fier, mais aussi parce que des millions de fans l’attendent en espérant que vous ne vous êtes pas trompé. Nous espérons aussi faire changer d’avis les gens qui pensent que Superman est un personnage trop daté pour leur plaire. Cela fait beaucoup de responsabilités, qui vont dans toutes les directions ! Nous voulons plaire à tout le monde, mais nous avons voulu le faire en respectant notre intégrité artistique.

Pouvez-vous nous parler de la manière dont vous avez choisi les autres acteurs du film : Amy Adams dans le rôle de Loïs Lane, Russell Crowe dans celui de Jor-El, Michael Shannon en Général Zod, sans oublier Kevin Kostner et Diane Lane qui incarnent les Kent ?

Comme vous vous en êtes certainement rendu compte en découvrant les premières images du film, nous avons voulu travailler avec des acteurs qui sont au sommet de leur art. Nous sommes très fiers du script du film, et nous avons eu le plaisir que les comédiens que nous avons contactés soient aussi enthousiastes que nous après l’avoir lu. Ils ont vu qu’ils auraient des choses très intéressantes à jouer, et que les caractères de leurs personnages étaient bien approfondis. Nous avons proposé le rôle de Loïs Lane à Amy parce qu’il fallait rendre cette journaliste à la fois forte et très déterminée, mais aussi vulnérable par certains aspects. Par son jeu, Russell exprime l’élévation spirituelle de Jor-El, sa vision d’ensemble de la situation complexe dans laquelle se trouve sa planète. Russell voulait que l’on sente que Jor-El, qui est le plus grand savant de Krypton, prend des décisions intelligentes parce qu’elles sont mûrement réfléchies, et que sa noblesse d’âme lui donne une grande capacité d’empathie envers autrui...En ce qui concerne les parents adoptifs de Clark, ces cultivateurs du Kansas, nous voulions que l’interprète de son père représente une force tranquille, une sagesse, une bonté et une honnêteté qui marquent à jamais notre héros, et c’est la raison pour laquelle nous avons choisi Kevin Kostner. Diane Lane, qui joue Martha Kent, nous fait ressentir tout l’amour et le courage d’une mère confrontée à des situations très difficiles. Et je pense qu’en confiant le rôle de Zod à Michael Shannon, nous avons déjà révélé que ce personnage n’est pas un méchant ordinaire, mais un être bien plus complexe, dont le point de vue particulier pourrait presque se défendre. En le voyant, certains spectateurs se diront probablement « Je ne suis pas d’accord avec ses méthodes, mais je comprends son opinion et ses objectifs. » Dans MAN OF STEEL, Zod n’est pas un mégalomane, il a une vraie personnalité et des opinions bien tranchées directement issues de son passé. Je crois que plus qu’un simple adversaire de Superman, Zod est un personnage fascinant à découvrir et à observer…

Quelles ont été les scènes les plus difficiles à préparer et à tourner ? On imagine a priori qu’il doit s’agir des combats avec Zod et les autres kryptoniens…

La plupart des scènes du film sont extrêmement complexes. Le tournage a duré 120 jours, soit presque 2 fois plus longtemps qu’un film « normal ». Non seulement il a fallu préparer des scènes très compliquées, mais il a fallu le faire dans le cadre d’un gigantesque plan de tournage qui nous a amenés à nous installer simultanément dans 2 endroits de l’Illinois, à Chicago et dans la petite ville de Plano, puis à nous rendre à Vancouver, où nous avons tourné dans les studios locaux puis filmé sur l’île de Vancouver. Nous nous sommes rendus aussi dans les endroits les plus froids du Canada pour y filmer des glaciers, et dans le désert de Mojave, en Californie, pour tourner les scènes qui se déroulent dans une base de l’armée de l’air. A chaque fois que nous nous déplacions, nous voyagions avec une énorme caravane composée de dizaines et de dizaines de semi-remorques transportant le matériel technique, de véhicules-loges, de camions de cantine, etc… C’était un convoi aussi imposant que celui du plus grand cirque du monde ! (rires) Je profite de cet entretien pour témoigner notre reconnaissance aux militaires qui ont eu la gentillesse de mettre beaucoup de véhicules et d’engins à la disposition de la production pour tourner les scènes de la base et celles de l’attaque des Kryptoniens… Bref, la planification de ce tournage a nécessité des trésors d’habileté et d’organisation logistique. Et pour en revenir à votre question, oui, ce sont effectivement les grandes scènes d’action qui ont été les plus difficiles à préparer et à filmer. Il y en a énormément dans MAN OF STEEL et vous verrez que même si elles sont très spectaculaires, nous restons toujours focalisés sur les personnages, leurs buts et leurs émotions. Le danger de ce type de séquence, c’est de se laisser emporter par l’action pure. Nous avons donc veillé à ce que l’investissement émotionnel des spectateurs pour nos héros reste constant…. D’ailleurs, quand j’y songe, il y a très peu de séquences du film où l’on voit juste 2 personnes assises dans une pièce…(rires)

Cela vaut mieux, dans une aventure de Superman !

Oui ! (rires) Je crois que la scène la plus simple que nous avons tournée est celle dont je vous parlais tout à l’heure, quand Loïs demande à Superman la signification de son blason. Ils se trouvent dans une pièce d’interrogatoire, à l’intérieur d’une base militaire, et ils sont observés et filmés par la police militaire, au travers d’une glace sans tain…Mais c’est la seule !

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