Jack le chasseur de Géants en Blu-ray & DVD : Entretien exclusif avec Nicholas Hoult (Jack)
Article Cinéma du Mercredi 21 Aout 2013

Nicolas Hoult, que nous avions rencontré l’année dernière pour X-Men Le commencement, tient aujourd’hui son premier rôle principal, celui de Jack, un jeune paysan entraîné bien malgré lui dans une aventure périlleuse au pays des géants… [Cet entretien a été réalisé pendant le tournage du film]

Entretien avec Nicholas Hoult (Jack)

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Bryan Singer vous a-t-il proposé de jouer dans Jack le chasseur de Géants pendant le tournage de X-Men, le commencement ?

Non, à ce moment-là, il m’avait simplement dit qu’il travaillait sur la prévisualisation des séquences du film qui serait son projet suivant. Je lui ai souhaité bonne chance et nous en sommes restés là, car je devais participer au tournage du nouveau Mad Max juste après X-Men, le commencement. Mais en fin de compte, le tournage de Mad Max a été repoussé de plusieurs mois, et Bryan m’a proposé de me présenter aux auditions pour Jack. Après les auditions, j’ai participé à une série de tests filmés, et c’est ensuite que Bryan, les producteurs et le studio m’ont définitivement choisi pour incarner Jack. Le processus a été plus long et plus compliqué que ce que vous suggériez : Bryan ne m’a pas offert le rôle sur un plateau d’argent ! (rires)

Comment Bryan Singer vous a-t-il décrit le film quand il vous a parlé du projet pour la première fois ?

En fait, nous en avons parlé après qu’il m’ait fait parvenir le script et que je l’aie lu. Il ne m’avait rien dit auparavant, à part « Lis le script ! ». Une fois que cela a été fait, je lui a téléphoné pour lui faire part de quelques remarques, et il m’a dit « Oh, ne t’inquiètes pas de cela, nous sommes en train de réécrire le scénario et nous avions déjà prévu d’intervenir sur les points que tu soulèves. » Et effectivement, ce qui m’avait gêné a été corrigé par la suite.

Comment avez-vous abordé ce film ?

Eh bien c’est un projet nouveau en ce sens que je n’avais jamais participé à un film dans le registre de la Fantasy. Il y avait déjà beaucoup d’effets visuels dans X-Men, le commencement, mais Jack m’a donné l’occasion de participer pour la première fois à un film tourné en relief, avec de nombreux combats et des interactions avec des personnages en images de synthèse. C’est un joli conte de fée, qui devrait plaire autant aux enfants qu’aux adultes qui aiment les récits d’aventures.

Appréciez-vous que le tournage ait lieu dans votre pays natal ?

Oui, c’est très agréable de travailler ici, avec de nombreux acteurs anglais, sous la direction de Bryan, qui est un excellent réalisateur, comme tout le monde le sait. L’histoire est bien écrite, amusante, très rythmée, et même si nous travaillons très sérieusement, il règne une bonne ambiance au sein de l’équipe. Les personnages que nous jouons sont intéressants et bien développés. Le script est une adaptation très spirituelle des deux contes traditionnels que sont Jack et le haricot magique et Jack le tueur de géants.

Quel genre de héros est Jack ?

Il a un côté « héros malgré lui », car il se retrouve entraîné dans une aventure imprévue. Au début de l’histoire, il n’a rien du héros typique, prêt à toutes les audaces. Il manque de confiance en lui, ne connaît pas les tenants et les aboutissants des situations dans lesquelles il se retrouve, mais comme il est persévérant, il s’accroche et continue à aller vers le but qu’il s’est fixé. C’est un bon garçon issu d’un milieu paysan très modeste, et il suit ce que sa conscience et son cœur lui dictent.

Parlons des géants… Vos interactions avec eux ont été filmées en partie en capture de performance, et en partie en décors intérieurs et extérieurs, alors que vous réagissiez aux animations préenregistrées de ces personnages… Pouvez-vous nous parler de la manière dont vous vous êtes adapté à ce processus ?

Oui, ce sont les deux manières dont nos interactions avec les géants sont réalisées. J’ai participé à plusieurs sessions de Mocap avec Bill Nighy, qui joue le géant principal, le général Fallon. Nous nous sommes retrouvés dans ce que l’on appelle « Le Volume », c’est à dire l’espace dans lequel les caméras placées partout autour du plateau enregistrent vos gestes simultanément sous tous les angles. Je regardais Bill Nighy jouer le rôle de Fallon et au même moment, nous pouvions voir son avatar provisoire, aux formes schématiques, sur les écrans du plateau. Et même sous cet aspect inabouti, la brillante performance de Bill transparaissait déjà. Quand nous tournons des scènes avec les géants dans les décors extérieurs, nous ne visionnons pas les animations schématiques pour caler nos mouvements, nous regardons les « previz » des scènes pour nous remémorer le déroulement de l’action. En dehors des gens qui tiennent des tiges avec de balles de Tennis orange pour représenter les yeux des géants, il y a aussi un garçon qui est harnaché avec une sorte de sac à dos qui sert de support à une tige sur laquelle est montée la découpe d’une énorme tête. C’est lui qui est chargé de nous courir après dans les scènes où nous sommes poursuivis ! (rires) Ce qui est nouveau, au point de vue technique, c’est que l’on peut nous filmer dans les paysages naturels où nous nous trouvons, puis rajouter les animations préenregistrées des géants en images de synthèse afin de voir si cela fonctionne bien à l’image. C’est très spectaculaire à voir, même ébauché ainsi. Et quand quelque chose « ne colle pas », par exemple parce qu’il y a un arbre ou un rocher à un endroit où le géant s’arrête, eh bien on reprend immédiatement la scène en décalant un peu l’action.

Est-ce que c’est un exercice facile pour un acteur ?

Eh bien, il faut se maintenir dans une sorte d’état hallucinatoire ! (rires) En sollicitant votre imagination, vous finissez par avoir l’impression d’être vraiment poursuivi par des géants. Visionner les animations provisoires des géants nous aide beaucoup à nous représenter mentalement leur présence quand nous tournons ces scènes d’action.

Ewan McGregor a passé beaucoup de temps devant des fonds verts quand il tournait les épisodes 1, 2 et 3 de Star Wars pour George Lucas. Vous a-t-il donné des conseils pour vous aider à jouer les scènes avec les personnages virtuels ?

Non, pas particulièrement. Il aurait pu me dire « essaie de jouer mieux ! » (rires)

Pouvez-vous nous parler un peu de ce que vous faites quand vous arrivez à Gantua, le pays des géants, pour tenter de retrouver la princesse Isabelle ?

Ce que j’ai beaucoup aimé dans le script, c’est la manière dont il décrit Jack dans sa vie normale à Albion, puis comment il se transforme peu à peu en vivant cette grande aventure à Gantua. Il prend peu à peu confiance en lui et en ses capacités, car il réalise que les soldats sont tout aussi démunis que lui quand ils sont confrontés aux géants, et que c’est la malice et l’intelligence plutôt que la force qui permettent de les vaincre.  Pour répondre plus précisément à votre question, Jack parvient à retrouver Isabelle une fois arrivé à Gantua, et il réussit à s’échapper avec elle. Il se produit ensuite certains évènements qui incitent les géants à quitter leur monde pour partir à l’attaque de celui des humains…On joue sur les différences d’échelles, car on voit d’abord les humains dans des environnements gigantesques, puis les géants arpenter un monde miniature. Je crois que c’est tout ce que je peux vous dire sans risquer de gâcher les surprises du film pour vos lecteurs.

Jack le chasseur de géants est une superproduction, et c’est aussi pour vous l’occasion de tenir votre premier rôle principal. Sentez-vous une grande responsabilité peser sur vos épaules à cause de cela ?

C’est une expérience nouvelle et intéressante. Auparavant, quand j’ai interprété des seconds rôles dans de grosses productions comme Le Choc des Titans, j’ai appris qu’il fallait que je saisisse au vol l’occasion de rendre mon personnage intéressant, dans le peu de temps qui m’était imparti. Dans les films de ce genre, vous ne disposez que de 6 ou 7 minutes en tout à l’écran pour faire vivre votre personnage de manière convaincante. C’est un exercice difficile, mais il provoque moins de stress qu’un rôle principal car on peut s’appuyer sur les performances des autres acteurs, étant donné que beaucoup de choses se passent en même temps. C’est vrai que je sens un poids plus important peser sur mes épaules cette fois-ci, mais il y a tant d’autres choses qui constituent le film que je ne me considère que comme l’un des nombreux éléments de l’aventure que nous nous préparons à présenter aux spectateurs. Donc je ne suis pas stressé outre mesure. Et ce d’autant moins que je suis entouré par Ian McShane, Ewen McGregor et Stanley Tucci !

Considérez-vous qu’il est désormais important pour un jeune acteur d’avoir l’expérience d’un tournage en relief ?

Je ne sais pas s’il est réellement nécessaire pour un acteur de se plonger dans la technique et de comprendre comment la 3-D Relief fonctionne afin d’améliorer sa performance dans un film tourné ainsi… En ce qui me concerne, je peux vous dire que je ne joue pas du tout de manière particulière à cause du relief, je procède comme d’habitude ! C’est plutôt Bryan Singer qui adapte sa mise en scène au relief, pour en tirer le meilleur parti. Nous les acteurs, nous savons qu’il maîtrise parfaitement ce qu’il fait et nous suivons ses indications de jeu, car il faut respecter des emplacements précis pour ne pas provoquer des effets relief inappropriés ou gênants. Mais en dehors de cela, nous ne jouons pas différemment.

Vous diriez donc que c’est surtout le tournage en Mocap qui change les conditions de votre travail d’acteur sur un tel film ?

Oui. D’abord parce que l’on se sent un peu idiot quand on porte un justaucorps avec des petites sphères réfléchissantes fixées un peu partout avec du velcro. On doit s’accrocher à son instinct d’acteur, à ses réflexes et à son imagination pour être capable de jouer tout une scène dans un espace neutre et quasiment vide, sans personne en face de vous. Il faut surmonter la gêne que l’on ressent d’être habillé ainsi, et se lancer en croyant vraiment à ce qui est sensé arriver.

Comment avez-vous travaillé les scènes romantiques avec Eleanor Tomlinson, qui incarne la princesse Isabelle ?

Pour être franc, il se passe tellement de choses dans le film que nous ne disposons pas de beaucoup de temps pour créer cette relation romantique entre nos personnages. Nous avons essayé de tirer le meilleur parti des moments du script qui sont consacrés à la relation naissante entre Jack et la princesse, afin de les rendre crédibles. Il fallait que l’on sente leur attirance mutuelle avant la séquence où le haricot magique pousse sous la maison et entraîne Isabelle vers Gantua, car juste après, les scènes d’action et de développement des autres points du récit se succèdent à un rythme très soutenu. Il ne reste plus beaucoup de place pour développer l’histoire d’amour entre Jack et Isabelle par la suite, car ils sont bien trop occupés à survivre et à s’évader du monde des géants ! Je dois dire que c’était un défi assez difficile à relever, car il ne fallait pas que l’on ait l’impression que Jack s’était exagérément attaché à cette princesse qu’il ne connaît que depuis deux minutes ! (rires) Nous avons fait de notre mieux pour montrer les affinités qui existent entre ces deux personnages, et suggérer un coup de foudre.

Quand Jack est confronté aux géants, il ne peut utiliser que son intelligence pour les combattre…

Oui, son intelligence, son sang-froid et ses capacités d’improvisations. Il parvient même à tuer un géant tout seul, de manière très astucieuse. Et pourtant ce n’est pas facile, car ils sont très rapides et vraiment colossaux. Jack invente des pièges à leur mesure, pour retourner leur force contre eux. C’est la seule solution qu’il puisse utiliser, car s’il essayait des les affronter lors d’un match de boxe, l’issue du combat ne serait pas en sa faveur ! Mais ne me demandez pas plus de détails, car la manière dont Jack se débarrasse des géants fait partie des surprises amusantes du film.

Vous souvenez-vous si l’on vous avait raconté l’histoire de Jack et le Haricot Magique, quand vous étiez petit ? Est-ce que c’est un conte qui vous avait frappé ?

Ce serait parfait que je vous réponde oui pour assurer la promotion du film ! Je pourrais même ajouter, la main sur le coeur « C’était mon conte favori quand j’avais 3 ans et à l’époque, déjà, je me disais que cela ferait un film très chouette dans lequel j’aimerais bien jouer ! » (rires) Mais ce serait un gros mensonge et je ne peux pas vous dire cela… Je connaissais vaguement le conte, comme tout le monde, sans me souvenir des détails précis de l’histoire. Le hasard a fait que j’ai vu à la télévision la parodie de l’histoire de Jack et le haricot magique avec Abbott et Costello (La Poule aux Œufs d’Or – 1952, NDLR), juste avant que le tournage de ce film ne commence…

Et alors, qu’en avez-vous pensé ?

Je dois dire que j’ai été abasourdi de voir à quel point le film était cheap et mauvais ! J’ai pensé « Bon sang, si notre version à nous est comme celle-là, je serai dans de beaux draps ! » (rires) Dans la version d’Abbott et Costello, le haricot géant doit mesurer à peine une trentaine de centimètres de large, et Costello, qui joue Jack, porte des collants et une petite jupette ! Ce n’est pas une tenue très pratique pour partir à l’aventure ! (rires) Ni très seyante !

Il y avait aussi une version musicale de l’histoire, produite pour la télévision par Hanna-Barbera à la fin des années 60. Il s’agissait d’un mélange d’animation et de prises de vues réelles, avec Gene Kelly dans le rôle du marchand qui vend le haricot magique au jeune Jack…

Je ne connais pas cette version-là. Pour être franc, j’ai préféré éviter ce voir les autres adaptations de ce conte. C’est le hasard qui a fait que je suis tombé sur celle avec Abbott et Costello. Mais cela m’a suffit, car pendant un moment, j’ai stressé en imaginant que j’allais devoir porter moi aussi des collants très ajustés et un pourpoint ! Heureusement, mon costume est très bien conçu. Il a une allure à la fois médiévale et moderne, et il semble tout à fait réaliste dans le contexte de l’histoire.

Est-ce que la popularité actuelle des contes au cinéma vous surprend ? Il y a eu Alice au Pays des Merveilles, deux versions concurrentes de Blanche-Neige, un Hansel et Gretel transposé en film d’action…

Je n’ai pas d’explication particulière à vous proposer pour justifier le regain de popularité de ces contes au cinéma, si ce n’est qu’il est toujours agréable de voir ces histoires modernisées et adaptées avec les nouveaux moyens techniques mis à la disposition des réalisateurs. Cela donne des films très divertissants à regarder, et qui conviennent particulièrement bien à l’emploi du relief. Comme cela a toujours été le cas par le passé, chaque nouvelle génération de conteurs reprend le récit original et lui ajoute ses propres trouvailles. Je crois que c’est cette opportunité qui intéresse les cinéastes, car ils peuvent broder sur un canevas très connu, tout en y ajoutant des idées personnelles. La version de Bryan de Jack le Tueur de Géants et Jack et le Haricot Magique est déjà originale en ce sens qu’elle mêle pour la première fois ces deux contes distincts. Bryan y a ajouté des scènes spectaculaires, parfois un peu effrayantes, mais aussi de l’humour, des personnages excentriques, des créatures impressionnantes et beaucoup d’action, afin que le film puisse divertir les spectateurs de tous les âges. Et même s’il y a beaucoup d’effets visuels très spectaculaires, ce sont toujours les performances des acteurs et les émotions des personnages qui restent au centre de l’histoire. Et la comédie naît des situations dans lesquelles les protagonistes se retrouvent, même si le contexte général de cet univers fantastique est traité sérieusement.

Trouver le bon équilibre entre humour et réalisme n’est pas facile…

Exactement. Si l’on va trop loin dans les gags, cela peut devenir une parodie, au risque que l’on se désintéresse des personnages. Et si le film se prend trop au sérieux, cela peut se retourner aussi contre lui. C’est la raison pour laquelle les personnages du film réagissent de manière normale et sincère aux évènements qui se déroulent, sans perdre leur sens de l’humour quand les choses deviennent absurdes. Je pense que les spectateurs apprécieront qu’ils se comportent ainsi, car cela leur permettra de s’identifier plus facilement à eux. Il y a des situations amusantes dans le film, particulièrement quand les personnages s’affolent pour trouver des moyens de survivre dans le monde des géants. Et en coulisses aussi, les techniciens et les comédiens ne perdent pas une occasion de plaisanter.

Pourriez-vous nous parler d’une des moments les plus amusants que de ce tournage ?

Je pense à une séquence qui a été filmée au tout début du tournage, dans la cathédrale de Norwich. Je devais courir dans un des couloirs du bâtiment avec Eleanor Tomlinson, dans une scène où nous sommes sensés être poursuivis par un géant. Il y avait toute une série d’armures exposées le long des murs du couloir. A l’insu d’Eleanor, l’équipe de décoration a fait porter une des armures à l’un des leurs, qui se tenait immobile au milieu des armures vides. Quand on savait où il se trouvait, on voyait juste ses yeux au travers de la fente de son heaume. Comme vous l’imaginez, quand Eleanor s’est approchée de cette armure, l’accessoiriste s’est précipité bras tendus vers elle, et la pauvre a sursauté en poussant un cri de terreur ! Je suppose que Bryan se fera un malin plaisir d’intégrer ce plan dans le film. (rires).

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