PACIFIC RIM en Blu-Ray : Entretien exclusif avec Charlie Day - Seconde partie
Article Cinéma du Mercredi 27 Novembre 2013

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Le fait que votre personnage porte des tatouages de Kaijus sur ses bras et son torse signifie-t-il aussi que sa fascination dévorante pour ces créatures en a fait une sorte de « paria » du monde scientifique ? Et plus largement, son amour des Kaijus doit le rendre insupportable quand il est confronté à des gens qui ont tout perdu – leurs familles, leurs maisons – pendant les attaques de ces monstres…

Oui, Newt est vraiment un marginal, rejeté par la communauté scientifique, mais il se moque de sortir du cadre « normal » du monde de la recherche. Ce n’est pas le cas de son collègue de laboratoire, qui est plutôt strict, conservateur, qui porte une blouse blanche et des chemises bien repassées, et qui aimerait préserver sa réputation. Newt, lui, s’habille comme une star du rock, et se moque qu’on le regarde de travers à cause de ses tatouages, sa veste de cuir, sa cravate étroite, et de la musique techno qu’il écoute constamment. Cela fait partie du personnage qu’il s’est construit, mais c’est aussi sa vraie nature. Beaucoup le jugent arrogant, mais en fait, il a raison, et c’est grâce à ses intuitions que la situation va changer. Pour Newt, les Kaijus sont les créatures les plus complexes et les plus fascinantes que l’on ait jamais vues sur terre, et il considère qu’en tant que telles, on devrait les traiter avec un peu plus de respect que des bêtes à abattre à tout prix. Il est bien sûr conscient des dizaines de milliers de morts et des dévastations qu’elles ont provoquées, et vers la fin du film, il en arrivera à regretter de s’être fait tatouer des Kaijus sur le corps. Mais la fascination scientifique l’emporte tout de même…

A quel point les travaux officiels de Newt occupent-ils encore son temps ? A-t-il des contacts fréquents avec des officiers, des pilotes de Jaegers ? Est-il beaucoup plus intéressé par ses recherches du côté du marché noir ?

Ses travaux sont officiels, et jusqu’à présent, les autorités lui ont attribué un laboratoire et un budget. Mais comme Newt est un employé du gouvernement, il est obligé de se plier à des ordres qui limitent le champ de ses recherches. Cela le contraint à mener d’autres recherches de son côté, en secret, afin d’avancer comme il l’entend. Il prend aussi des risques qu’il n’a pas le droit de prendre, et c’est cela qui lui permet de faire ses découvertes les plus importantes. Une fois qu’il a franchi ce cap, il obtient la permission officieuse de poursuivre ses investigations du côté du marché noir. Il découvre ainsi que Stacker Pentecost, que joue Idris Elba, a financé depuis quelques temps une partie des activités du revendeur du marché noir. Il comprend que c’était pour Pentecost un moyen de protéger le programme des Jaegers, car certains membres du gouvernement veulent le supprimer pour faire des économies, et se borner à construire des murailles géantes autour des villes pour repousser les Kaijus, ce qui ne permettrait pas de régler le problème. Pentecost me donne le feu vert pour rechercher le cerveau secondaire dont j’ai besoin pour avancer dans mes travaux.

Avez-vous joué avec les clichés qui entourent les personnages de scientifiques dans les films japonais de Science-Fiction ? On pense aux savants très sérieux qui se tuent à la tâche pour trouver une arme anti-Kaiju, comme dans le tout premier GODZILLA, ou aux génies du mal qui imaginent des moyens de contrôler les monstres pour accomplir leurs méfaits…

Oui, nous nous sommes amusés un peu avec tout cela. D’ailleurs, dans la première version de l’histoire, c’était Newt qui faisait toutes les principales recherches du film, puis Guillermo a décidé de les séparer entre deux savants avec des points de vue différents, en ajoutant le personnage de mon partenaire de labo, le docteur Hermann Gottlieb. C’était une excellente idée, car cela me permet de confronter mes idées à celle de Hermann et cela crée une relation beaucoup plus dynamique que si je travaillais tout seul dans mon coin.

Vous êtes-vous inspiré de véritables savants ou de personnes que vous connaissez en préparant votre rôle ?

Non, car je suis parti du principe que le monde dans lequel vit Newt n’existe que dans les pages du script et l’esprit de Guillermo. J’ai simplement essayé de lui apporter ma propre humanité et ma sensibilité. Cependant, pour me servir d’inspiration et m’aider à restituer son côté « enquêteur exalté » , Guillermo m’a conseillé de lire des ouvrages écrits par des « théoriciens du complot » comme il y en a tant aux USA…J’ai donc lu des ouvrages de gens qui croient que des extraterrestres se rendent régulièrement sur terre, ou que certains monolithes viennent d’autres planètes et sont dotés de pouvoirs magiques…(rires) Le pessimiste en moi a eu beaucoup de mal à résister à l’envie de jeter toute cette littérature à la poubelle ! (rires) Ensuite, Guillermo m’a recommandé d’écouter de la musique techno allemande, pour m’aider à m’imprégner de l’attitude de mon personnage. Et en fin de compte, j’ai essayé de trouver les points communs entre Newton et moi : son enthousiasme, son désir de résoudre des problèmes, et son côté parfois immature. L’essentiel de ma préparation pour donner l’impression de maîtriser les compétences scientifiques de mon personnage a consisté à me plonger dans les informations imaginaires de « la biologie des Kaijus ». Et je dois dire que Guillermo était absolument ravi de m’en parler, et même de m’en dire beaucoup plus que ce dont j’avais besoin ! (rires)

Le docteur Geiszler travaille-t-il aussi sur les Jaegers ?

Il se consacre principalement à l’étude des Kaijus. Bien que cela ne soit pas mentionné de manière spécifique dans le script, j’ai imaginé que Newt était le plus grand expert mondial dans ce domaine. Il les a étudiés pendant toute sa vie et s’est même fait tatouer des Kaijus sur les bras. Il se décrit lui-même comme un « groupie » de Kaijus. S’il pouvait en posséder un et en faire son animal domestique, il en serait ravi ! Les données scientifiques qu’il a pu obtenir sur ces monstres sont tellement différentes de celles des formes de vie terriennes que cela le fascine. Cette passion a même tendance à dévorer sa vie…On a découvert que les Kaijus sont issus de manipulations biologiques synthétiques…et Newt aimerait bien « décoder » la manière dont ils ont été conçus et créés. Ce serait peut-être aussi un moyen de comprendre comment on pourrait fermer le passage dimensionnel…

Mais participe-t-il à la fabrication d’armes capables de détruire les Kaijus ?

Non. Il y avait même un passage d’une précédente version du script dans lequel il était mécontent de les voir détruits comme ils le sont. Il comprend qu’on doive en arriver là en raison des dégâts qu’ils provoquent, mais cela le prive de l’occasion de les étudier vivants et de les comprendre…Si on lui en laissait le choix, et si c’était possible logistiquement, il préférerait qu’on les place dans une sorte de « Zoo pour Kaijus » !

Quelles découvertes le docteur Geiszler fait-il sur les Kaijus ? Finit-il par comprendre pourquoi ils viennent dans notre monde ?

Oui. Et je comprends aussi que ce n’est peut-être pas la première fois qu’ils sont venus sur notre planète…Ils viennent pour nous anéantir totalement en tant qu’espèce vivante, afin de préparer une future colonisation. Je réalise que leurs attaques ne sont pas déterminées au hasard et que tout correspond à un plan global. Je ne sais pas si on verra cela dans le montage final du film, mais l’une des idées de Guillermo est que les Kaijus sont en fait des armes biologiques construites de manière synthètique, et qu’ils viennent ici pour tout détruire, comme ils l’ont fait avant sur d’autres mondes…

Godzilla était donc un « freelance », tandis que ces Kaijus-là forment une armée professionnelle ?

C’est exactement cela ! (rires) Godzilla n’était qu’une petite alerte avant que les choses sérieuses ne commencent ! (rires)

Newton continue-t-il aussi à étudier la porte dimensionnelle ?

Oui.

Est-ce que la première réaction des humains confrontés à ce passage d’où surgissent des monstres ne devrait pas être d’y envoyer une série de bombes atomiques pour détruire ce qui se trouve de l’autre côté ?

Exactement. Et c’est ce qui s’est produit : ils ont essayé cela dans le passé, mais à chaque tentative, la bombe a ricoché sur l’entrée du portail et a explosé dans les profondeurs de l’océan Pacifique. Il y a une sorte de champ de force, de mur invisible qui empêche d’entrer dans le portail, alors que les Kaijus peuvent en sortir librement. Mon partenaire de labo pense que cela fonctionne avec un code temporel mathématique très précis, tandis que mon personnage est convaincu que cela a un rapport avec les caractéristiques biologiques des créatures. Le gouvernement envisage de faire exploser une bombe beaucoup plus puissante près du portail, et j’essaie de les convaincre que ce n’est pas la bonne solution, et qu’il faut chercher ailleurs, dans la nature des Kaijus. Et j’arrive à comprendre qu’il existe bien une sorte de « code-barre » dans leur biologie synthétique qui leur permet d’être identifiés par le portail et de le traverser sans encombre.

L’armée a probablement utilisé toutes sortes d’armes pour tuer les Kaijus. Pourquoi leurs missiles les plus puissants ne suffisent-ils pas à les blesser ou à les tuer ?

Je crois que c’est juste une question d’échelle. Ces bêtes sont si titanesques qu’un missile ne les égratigne même pas. C’est un peu comme si l’on donnait une pichenette à un dinosaure. La seconde raison, c’est la rapidité de ces créatures, car même si elles sont colossales, elles se déplacent assez vite pour esquiver des tirs de bombes. De plus, les Kaijus s’adaptent aux attaques des humains. Il y a même un moment dans le film où l’un de ces monstres produit un signal électronique qui stoppe net tous les engins, les véhicules et les équipements informatiques et électriques dans un périmètre de plusieurs kilomètres. On comprend alors que les Kaijus sont capables de déployer une véritable tactique, et qu’il ne s’agit pas que de brutes qui écrasent tout sur leur passage. Ils sont plus intelligents que cela.

Cependant, les Kaijus ne sont pas le fruit d’une évolution biologique, mais d’une évolution génétiquement manipulée…

C’est exactement cela.

Votre personnage tente-il aussi l’option que l’on a pu voir dans LA GUERRE DES MONDES pour tuer ces créatures, c’est à dire essayer de leur injecter des microbes, des virus qui puissent les affaiblir de l’intérieur ?

A ce point de l’histoire de PACIFIC RIM, les humains n’en savent pas assez sur la biologie des Kaijus pour pouvoir envisager de les contaminer ainsi. J’imagine que Newt a dû faire des tests de résistance à certaines bactéries avec les échantillons de tissus vivants qu’il a pu récupérer…mais à cause de la nature synthétique de ces organismes issus d’une autre dimension, il n’a probablement pas pu obtenir des résultats probants. Mais le problème principal n’est même plus de trouver un moyen de tuer ces créatures : l’urgence est de réussir à fermer au plus vite le passage dimensionnel pour empêcher l’arrivée d’autres Kaijus.

Newt dispose-t-il d’équipements ou même de vaisseaux particuliers pour mener ses recherches « sur le terrain ? » Se rend-il près de la faille dimensionnelle pour étudier ce phénomène ?

Non, car la faille est située à une telle profondeur que personne ne peut s’en approcher. Mes outils sont principalement des équipements de laboratoire, mais je me débrouille pour reconstituer la technologie d’un pont neural dans mes locaux, en assemblant des pièces récupérées ça et là, ou qui sont « tombées du camion ». Je fabrique aussi une sorte de casque à l’aspect assez primitif, qui permet de connecter mon cerveau à un autre cerveau.

En signant votre contrat, vous êtes-vous engagé à jouer votre personnage dans 2 films supplémentaires ?

Oui. Ils m’ont dit qu’ils souhaitaient que nous participions à 3 épisodes. Bien sûr, la suite dépendra du succès de ce premier volet…La fin de cette histoire se prêterait bien à une suite, en tous cas…

Et aussi à une trilogie, donc…

Absolument.

Va-t-on vous voir régulièrement dans des films de Science-Fiction à présent ? Y avez-vous pris goût ?

Je suppose que cela dépendra du public…Ou plutôt de Hollywood, si ce film marche bien ! En ce qui me concerne, même si j’aime énormément la SF, je mesure la chance que j’ai d’avoir un travail régulier à la télévision en tant qu’acteur, et je suis ouvert à tous les genres cinématographiques, pourvu que le projet soit intéressant. Si un autre PACIFIC RIM voit le jour, je serai le premier à arriver sur le plateau en courant, pour avoir le privilège de tourner à nouveau avec Guillermo, s’il décide de le réaliser.

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