Reportage sur le tournage deGODZILLA - 4ème partie : Entretien exclusif avec les producteurs Mary Parent et Alex Garcia
Article Cinéma du Vendredi 28 Mars 2014
Alors que nous observons la mise en place du matériel pour le plan suivant, Gareth Edwards sort de la tente dans laquelle sont installés les moniteurs, vient nous saluer de manière informelle et sympathique. Il rejoint Bryan Cranston et Aaron Taylor-Johnson qui arrivent sur le plateau. Les deux acteurs portent des combinaisons anti-radiations qui les recouvrent des pieds à la tête, ainsi que des masques à gaz. Une première prise de vues commence. La caméra et l’opérateur sont soulevés par la grue et positionnés à quelques mètres du sol, afin de filmer la scène en plan large et en légère plongée. Cranston avance dans la rue tout en ne lâchant pas des yeux le compteur Geiger qu’il tient dans sa main gauche. Taylor-Johnson le suit à quelques pas de distance. Hors champ, deux dresseurs donnent le signal du départ à leurs chiens, qui courent vers les acteurs et passent à côté d’eux sans s’arrêter. Cranston examine encore son compteur geiger, arrête de marcher, puis retire son masque et sa cagoule. Taylor-Johnson lui dit « Hé, qu’est-ce tu fais ? Tu es devenu fou ?! », ce à quoi Cranston répond « Tout va bien. C’est incroyable, mais il n’y a plus aucune trace de radiations mortelles. Tout est sain à nouveau. Je le savais !.. Tu peux retirer ton masque, tu ne risques rien. Allez, on continue. On ne doit plus être loin maintenant. Peut-être quatre ou cinq pâtés de maisons, tout au plus.» Les deux comédiens reprennent leur marche et sortent du cadre. Via un mégaphone, un assistant de production relaie le signal « Coupez ! » de Gareth Edwards. Trois autres prises similaires sont tournées, avec de légères modifications des intonations des acteurs et des mouvements de la caméra. Même pendant une scène toute simple comme celle-ci, c’est étonnant de voir à quel point Bryan Cranston joue remarquablement bien, avec un naturel confondant. A chaque prise, on a l’impression que le personnage qu’il incarne prononce ces mots et vit cet instant pour la première fois. L’équipe s’interrompt alors et déplace la grue dans le sens inverse pour filmer le contre-champ de la même scène. Nous en profitons pour rejoindre les deux producteurs exécutifs du film.
Entretien avec Alex Garcia et Mary Parent, producteurs exécutifs
Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau
Qu’est-ce qui pousse le personnage que joue Bryan Cranston à pénétrer dans la zone mise en quarantaine pour aller fouiller les vestiges de son ancienne maison ?
Alex Garcia : Nous jouons avec la notion de complot dans ce film. Joe Brody croit que l’on a cherché à dissimuler certaines informations cruciales pendant et après la catastrophe qui a eu lieu quinze ans plus tôt, et il espère en trouver les preuves dans un document qui se trouve dans cette maison. C’est aussi un pèlerinage émotionnel, car son fils Ford n’a pas eu le temps de dire adieu à cet endroit familier quand il était enfant.
Comment avez-vous abordé cette modernisation de Godzilla ?
Alex Garcia : Nous avons essayé de préserver tout ce qui a fait de lui une icône de la culture populaire depuis près de 60 ans.
Mary Parent : Le personnage a conservé son intégrité, et nous tentons de lui rendre hommage en le présentant de la manière la plus spectaculaire et la plus intéressante possible.
Pourquoi Legendary Pictures Entertainment, parmi toutes les sociétés de productions indépendantes américaines, est-elle celle qui a décidé de ressusciter GODZILLA, en association avec Warner et avec la Toho ?
Mary Parent : Ah, c’est un vaste sujet ! (rires) Legendary aime les histoires avec des héros, des méchants, des scènes spectaculaires, des grands thèmes, des images étonnantes. Godzilla n’est pas n’importe quel monstre : il a une attitude, une personnalité.
Et inversement, pourquoi GODZILLA était-il un sujet qui convenait bien à la personnalité et au fonctionnement de Legendary ?
Alex Garcia : Parce que c’est un sujet capable d’attirer des réalisateurs à la forte personnalité, avec une vision originale, comme Gareth. Legendary a la réputation méritée de soutenir totalement la vision des réalisateurs avec lesquels elle travaille.
Allez-vous ressusciter aussi d’autres adversaires de Godzilla que l’on a vus dans les productions de la Toho, comme Rodan ou Mothra ?
Alex Garcia : Non, mais nous avons repris les éléments mythiques créés par la Toho. Gareth a trouvé le moyen de proposer un film inventif et original au public d’aujourd’hui, tout en restant fidèle aux racines du personnage.
Mary Parent : Gareth voulait que les émotions des protagonistes humains sonnent juste et soient intégrées à un contexte tout à fait crédible. Une fois que tout cela est établi et que le public croit à la réalité de ce qu’on lui présente, le récit peut aller vers des situations plus fantastiques, car les spectateurs ont acquis assez d’empathie envers les personnages pour se préoccuper de ce qui va leur arriver. Mais tout est ancré dans le réalisme. Et Gareth travaille très dur pour soigner le moindre détail. Il est certainement le réalisateur qui travaille le plus intensément que j’aie vu de toute ma carrière. Et il dégage une énergie positive qui se communique à toutes nos équipes.
Parlez-nous du processus du casting. Vous avez réussi à intéresser des acteurs formidables à ce projet, alors qu’un sujet comme GODZILLA aurait pu les décourager…
Mary Parent : C’est vrai, mais quand ils ont rencontré Gareth, et qu’il leur a raconté sa vision du film et leur a présenté le script, ils ont été sous le charme. Les acteurs que nous avons approchés ont été assez vite séduits et nous n’avons pas eu à argumenter longtemps pour qu’ils viennent travailler avec nous.
Alex Garcia : Le premier GODZILLA de 1954 est vraiment notre pierre angulaire, notre point de repère, car il était traité sérieusement. Mais Gareth vous en parlera mieux que nous.
Quel a été votre rapport avec la saga GODZILLA, à titre personnel ?
Mary Parent : J’ai toujours été une grande fan de Godzilla. J’ai vu la plupart des films dans lesquels il est apparu. Il a à la fois un statut de « méchant » et de héros, et au cours de la saga, et on se rend compte qu’il n’est pas un simple monstre, mais un personnage plus complexe qu’on ne pourrait le croire. Et il est toujours impressionnant à regarder quand il entre en action. Je le trouvais très spectaculaire quand je regardais les films originaux à la télévision pendant mon enfance, mais avec la technologie dont nous disposons aujourd’hui, il va devenir plus sidérant qu’il ne l’a jamais été. Nous avons vu les premiers rendus de certains plans d’effets numériques, et je crois que quand vous les verrez, vous serez très étonnés. Ils vont avoir un impact visuel absolument ahurissant. En 2014, nous avons enfin la possibilité de montrer Godzilla en action comme on ne l’a jamais vu auparavant et de lui rendre vraiment justice.
Alex Garcia : J’ai le même sentiment que Mary. Godzilla est un personnage très impressionnant, une force de la nature devant laquelle on se sent humble et fragile.
La suite de notre reportage exclusif sur le tournage de GODZILLA paraîtra bientôt sur ESI !