TARZAN : Entretien exclusif avec le réalisateur David Yates – 2ème partie
Article Cinéma du Vendredi 07 Octobre 2016

TARZAN est de retour dans une adaptation aux images d’une beauté à couper le souffle, à redécouvrir dès le 9 Novembre en Blu-ray !

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Quelles sont les premières images qui ont surgi dans votre esprit quand vous avez commencé à imaginer les scènes du film ? Et plus tard, avez-vous utilisé une méthode particulière pour lister toutes les représentations iconiques de l’univers de Tarzan que vous vouliez inclure dans votre mise en scène ?

Vous savez, la première chose qui m’a vraiment hanté et surexcité à propos de ce projet était la perspective de rendre hommage à l’esprit du continent Africain, et à la noblesse et la grâce des différentes communautés qui le composent. Dans ce récit, nous montrons comment la tribu des Kuba aide Tarzan à « sortir de la jungle » et à découvrir peu à peu le monde des hommes. Il y a quelque chose de très touchant et de très beau dans la vie paisible que mène cette communauté agraire, et dans sa manière généreuse d’adopter, de nourrir et d’aider ce jeune être sauvage. Il y a aussi des passages superbes qui montrent comment le petit Tarzan grandit au milieu des singes Manganis, en étant élevé avec beaucoup de tendresse et de compassion par la femelle Kala. Leur relation fusionnelle est très touchante. A l’inverse, il y a un autre singe appelé Kerchak qui est très agressif et violent, et qui ne supporte pas de voir que cette créature étrange et sans fourrure ait été adoptée par Kala. Il essaie par tous les moyens de chasser Tarzan du groupe des Manganis. Ce sont vraiment ces valeurs, ces émotions et ces images d’un monde vierge et sauvage qui m’ont inspiré quand j’ai commencé à visualiser le film…Tout comme l’héroïsme de Tarzan qui va non seulement sauver Jane lorsqu’elle va se trouver en danger, mais aussi toute la communauté Kuba qui l’avait adopté. C’était cet aspect émotionnel et viscéral de l’histoire qui me plaisait le plus…Et en ce qui concerne votre question portant sur l’imagerie classique de Tarzan dans la culture populaire, il y a un plan dans le film où on le voit debout sous la pluie, complètement entouré par les singes Manganis qui forment sa « meute » en quelque sorte, dont il est clairement le mâle dominant, le chef. Je pense qu’après voir vu les différentes incarnations de Tarzan au cinéma, dans les comics et sur les couvertures des romans, ce visuel-là concentre et symbolise tout ce qui est au cœur du mythe du personnage : un homme quasi-nu vivant à l’état sauvage, en osmose complète avec les éléments, la faune et la flore de la jungle. Les liens qu’il a établis avec ses frères singes Manganis sont extrêmement puissants et durables. Et puisque nous parlons d’approche visuelle, je dois dire que j’ai énormément insisté auprès de notre merveilleux chef opérateur Henry Braham pour qu’il cadre toujours les grandes mains de Tarzan, parce que celles des singes sont très différentes et qu’ils les utilisent de toute autre manière. Pour les humains, elles constituent un précieux outil de communication. Vous verrez donc beaucoup d’images des mains d’Alexander Skarsgard dans le film, ainsi que de celles des autres acteurs qui incarnent Tarzan à différents moments de sa jeunesse. Je suis fasciné par l’architecture et la beauté des mains humaines, et pendant que notre héros apprend à s’en servir comme de précieux outils, on voit aussi le « vécu » de ses mains représenté par les traces des blessures, coupures et autres hématomes qu’il a récoltés. Et ces mains si différentes de celles des singes symbolisent aussi les relations humaines que Tarzan va découvrir plus tard en sortant de la jungle et en découvrant la tribu des Kuba.

Vous rendez hommage au fameux cri de Tarzan créé pour les films avec Johnny Weissmuller, et aux célèbres bandes dessinées de Burne Hogarth, qui sont unanimement considérées comme des chefs d’œuvre des comics…

Nous utilisons effectivement un cri de Tarzan car il aurait été impossible d’imaginer notre film sans cet élément fondateur du personnage, mais il s’agit de notre propre version, et non pas d’une copie de celui des films des années 30. Je dois dire que le cri original des films avec Johnny Weissmuller était merveilleusement évocateur. Il suffit de l’entendre pour avoir envie de revoir ces vieux films ! Nous utilisons notre version de ce cri seulement deux fois dans cette aventure, mais à des moments très importants. Nous reprenons aussi à notre manière le fameux dialogue « Moi Tarzan, toi Jane » du TARZAN, L’HOMME-SINGE de 1932 avec Johnny Weissmuller et Maureen O’Sullivan. Quand le méchant de notre histoire, le Capitaine Rom incarné par Christoph Waltz, réussit à capturer Jane et qu’elle lui affirme que Tazan ne tombera pas dans un piège aussi grossier, destiné à l’attirer jusqu’à lui, Rom lui rétorque : « Il est Tarzan, vous êtes Jane, il viendra vous chercher ! » C’est une réplique amusante et un petit clin d’œil aux anciens films que les cinéphiles comme vous semblent avoir apprécié. Il y a aussi des références visuelles aux magnifiques bandes dessinées que vous avez citées, surtout pendant les scènes où Tarzan devient Tarzan en luttant contre le chef Mbonga, qui est incarné par Djimon Hounsou. Je dois préciser que pendant la première partie de notre film, Tarzan essaie de se comporter en se conformant aux usages de son héritage victorien, puisqu’il est Lord Greystoke. Mais tout ce contexte civilisé lui est enlevé petit à petit aux cours des péripéties de cette histoire. C’est ainsi qu’il revient aux racines de son enfance sauvage pendant la seconde partie du récit, et que nous le découvrons alors comme le Tarzan des comics, très musclé, incroyablement agile et fort, en phase totale avec la faune et la flore de la jungle. Il redevient cet être humain unique, extraordinairement puissant et aussi dangereux qu’un fauve quand on s’en prend à lui ou à ceux qu’il protège. Nous avons voulu inverser la présentation traditionnelle du personnage en ce sens où nous le découvrons d’abord dans ses beaux habits de Lord anglais, vivant dans le luxe tranquille de la bonne société. Il est ensuite entraîné à nouveau en Afrique, et participe à la mission qu’entreprend George Washington Williams, le personnage incarné par Samuel L. Jackson. Et au fur et à mesure que Lord Greystoke se retrouve dans des situations de plus en plus dangereuses, il abandonne petit à petit ses vêtements d’homme civilisé qui l’entravent, et ne garde que son pantalon pour se battre torse nu lorsqu’il redevient pleinement Tarzan. Il renoue ainsi avec tous les pouvoirs sauvages qu’il avait auparavant, et constate qu’ils sont restés intacts en lui.

La suite de cet entretien bondira bientôt de liane en liane pour revenir sur ESI !

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