Hellboy 2 : Abe Sapiens dit tout à ESI !
Article Cinéma du Mercredi 29 Octobre 2008

Entretien avec Doug Jones

Propos métamorphosés en français par Alienfactory, Pierre-Eric Salard et Pascal Pinteau.

C’est après avoir étudié la Pantomime pendant plusieurs années que Doug Jones s’est installé à Los Angeles en 1985. Il n’a plus cessé de travailler depuis, jouant dans plus de 25 films, plusieurs séries télé (dont la série Buffy contre les vampires (1997), dans l'épisode 'Hush' pour lequel il a été nominé deux fois aux Emmys awards) et plus de 90 spots publicitaires et vidéo-clips aux côtés d’artistes comme Madonna et Marylin Manson. Bien connu pour son travail d’interprétation de créatures diverses et variées, (tel le surfer d’argent dans le second épisode des 4 Fantastiques) il a aussi joué à visage découvert dans des films comme Adaptation , et des petites productions indépendantes comme A Series of Small Things de Phil Donlon. C'est son interprétation sensible et élégante de Abe Sapien dans Hellboy et du Faune et de « l’homme pâle » dans le Labyrinthe de Pan qui lui ont valu d’être reconnu par la critique et le public. spectateurs et des critiques.



Votre déguisement d’Ange de la Mort est particulièrement impressionnant dans le film. Comment faut-il de temps pour appliquer toutes ces prothèses ?

Du début du processus jusqu'aux touches finales, il faut environ 4 heures pour se glisser dans la peau de ce personnage. Cela comprend aussi les pièces du costume qui viennent s'ajouter et les ailes mécaniques qui sont attachées par la suite. Des techniciens viennent fixer les ailes, tandis que les habilleurs me font enfiler le costume qui se compose de plusieurs épaisseurs de tissu, d'os et d'une sorte de cage thoracique. Ensuite, les maquilleurs travaillent sur mes bras, ma tête et mon cou.

Combien de personnages interprétez-vous dans Hellboy 2 ?

J'interprète 3 personnages en tout : l'Ange de la Mort, dont nous venons de parler, Abe Sapien, bien sûr, et aussi le Chamberlain. C'est une sorte de majordome au service du roi Balor. Et cette fois-ci, Abe, mon personnage principal, a une petite amie !?

Cela doit représenter beaucoup de travail pour vous…

Vous pouvez le dire ! J’ai battu mes records de présence à l’écran dans ce film ! Le rôle d'Abe sapien a été considérablement amélioré, étoffé, et fonctionne à plusieurs niveaux. Et il y a tellement plus de choses intéressantes qui lui arrivent. Guillermo m'a écrit un rôle fantastique, et Abe participe à pratiquement toutes les scènes du film. Donner vie à deux personnages supplémentaires a représenté beaucoup de travail en plus, mais cela en valait la peine.

Comment avez-vous rencontré Guillermo del Toro ?

C'était en 1997. Je l'ai rencontré sur le tournage de Mimic, qui était sa première grosse production américaine. Je devais juste créer une gestuelle de référence pour l'équipe des maquillages de créatures. Ma participation ne devait durer que quatre jours. Lors de la seconde journée, à la cantine, Guillermo s'est assis à ma table. C’est ainsi que j’ai découvert ce réalisateur dont je n'avais jamais entendu parler ! (rires) Il m'a dit : "Vous avez déjà participé à ce genre de tournage, avec des maquillages spéciaux, non ?" Je lui ai répondu que c'était vrai, et il m'a demandé avec quels maquilleurs j’avais déjà travaillé. Il voulait tout savoir sur des artistes comme Stan Winston, Rick Baker et Tony Gardiner. J'ai été surpris de découvrir qu'un réalisateur peut rester un fan de cinéma... et ne pas posséder un égo surdimensionné ! Guillermo était resté un « geek » malgré son succès (rires). Il restera toujours un fan de cinéma. Il crée les films qu'il veut vraiment voir, et c'est ce que j'admire chez lui.

Quels ont été vos rapports avec Guillermo Del Toro ?

J'adore la façon qu'il a de me pousser à me dépasser, à aller au-delà de mes limites. Je lui dis : « Je ne peux pas faire tout ce que tu me demandes ». Il me répond : « Bien sûr que si ! » et finit toujours par avoir raison ! Guillermo fait partie de ces réalisateurs qui connaissent les acteurs bien mieux que nous ne nous connaissons nous-mêmes. Je connais mes limites, mais il peut lire en moi très facilement et savoir ce dont je suis réellement capable, comme il l’a fait quand nous avons travaillé sur le personnage du Faune pour le Labyrinthe de Pan. J'étais tellement sûr que je n'allais pas pouvoir jouer correctement le Faune, à cause de l'Espagnol. Les contraintes physiques, je savais que je pouvais m'en débrouiller, mais débiter les lignes de dialogue en Espagnol en même temps ? J'étais certain que je n'y arriverai pas, mais il était convaincu du contraire. Et ça a marché ! Je lui fais entièrement confiance, car Guillermo sait vraiment ce qu'il fait.



Que pouvez-vous nous dire sur le personnage de l'Ange de la Mort ?

L'Ange de la Mort est un personnage que l’on rencontre au cours d'une scène savoureuse du film, que je ne veux pas raconter pour ne pas en gâcher la surprise. C'est personnage à l’allure quelque peu féminine. Dans le script il est écrit 'elle' quand il est question de son aspect androgyne. Elle a été créée dans un but spécifique, pour un évènement qui n'a pas encore eu lieu, et elle attend depuis une éternité dans cette chambre. C'est pour cette raison qu’elle est craquelée et fanée. Quand vous la verrez dans le film, elle dira pourquoi elle a attendu si longtemps… Ce sera un grand moment du film, et je crois qu’il vous donnera envie qu'il y ait rapidement un troisième épisode d’Hellboy !?

Avec un nom pareil, on l’imagine diabolique… Est-elle vraiment neutre ?

Non, je ne crois pas qu’elle soit diabolique. C'est une autre caractéristique de Guillermo, quand il imagine tous ces merveilleux personnages qu'il me demande d’incarner. L’ange de la mort a l'air d’être une sorte de poltron maléfique, mais il possède aussi des qualités altruistes, un côté très protecteur. Quand vous verrez le film vous comprendrez ce que je veux dire. Il est absolument effrayant mais le but qu'il poursuit est très altruiste.?

Est-ce que vous transformer ainsi vous aide à vous évoluer en tant qu'acteur ?

Du point de vue de la performance, oui. En tant qu'acteur, j'aime bien commencer par sentir le personnage exister à l'intérieur de moi puis le laisser s'échapper et vivre sa vie. C'est très compliqué d'enfiler un costume comme celui de l’Ange de la mort, et très dur de jouer un personnage si éloigné de la réalité. Connaître l'aspect final que vous aurez une fois maquillé, puis subir ensuite les heures nécessaires à cette transformation physique vous aide à bien vous préparer pour incarner ce personnage.?

Etes-vous toujours aussi enthousiaste quand vous vous voyez transformé de la sorte, vous qui avez incarné tant de créatures dans les films ?

Est-ce que ce sont déjà de vieux souvenirs ? Mon Dieu comme le temps passe vite ! (Rire). Je suis toujours prêt pour un nouveau personnage! Me métamorphoser m'excite toujours, oui. Mais j'aime aussi jouer sans maquillage, dans des sitcoms et en guest-star, des rôles de détectives en Jeans et T shirt uniquement ! C'est génial. Voir des maquillages aussi élaborés que ceux d’Hellboy 2 et des créatures aussi magnifiques, ça m'excite toujours autant, bien sûr ! C'est vraiment ça la magie du cinéma. Peu importe quelques mois de torture si le résultat final reste éternellement gravé dans les mémoires des cinéphiles. Ça en vaut sacrément la peine !

Que pouvez-vous nous dire sur l'histoire d'amour d'Abe Sapien ?

Abe est amoureux pour la première fois. Mais ce n'est pas du remplissage : cette histoire d'amour est profondément imbriquée dans le récit du film. L’aboutissement de l’aventure dépend des choix que Abe devra faire. On le voit aussi dans plus de scènes humoristiques, aux côtés de son ami Hellboy. Guillermo a écrit des moment comiques absolument merveilleux. Je pense qu'Abe est plus heureux cette fois-ci, même s’il passe par des hauts et des bas. En plus, vous me verrez porter une arme pour la première fois ! Certains fans déplorent que j'utilise seulement une arme de poing, mais ce n'est pas comme si j'étais un bon samaritain ! (rires) Je botte aussi les fesses des méchants ! (rires)

D'où vous vient l'inspiration qui vous permet d’incarner ces personnages ?

Je n'en suis pas sûr. Beaucoup de personnages de Guillermo sont nés dans un petit carnet dans lequel il dessine des croquis et prend des notes. « L’homme pâle » et le Faune s'y trouvaient. Ce sont des créations issues de son cerveau malade ! Mike Minola, le créateur d'Hellboy, a participé au design de la tête en forme de crête du faune, d'après ce que j'ai compris. Des petites idées notées et dessinées comme ça évoluent, puis se retrouvent entre les mains de l'équipe de conception qui sculpte et fabriquent les costumes grandeur nature. Ensuite les maquilleurs m'aident à l'enfiler. Ces personnages sont le fruit du travail de beaucoup de monde !

Qu'avez-vous pensé des parodies du Faune que l’on peut voir sur YouTube

Mon Dieu ! Je n'ai jamais été parodié avant et maintenant il y a des parodies du Labyrinthe de Pan partout sur YouTube. Ça ne m'était jamais arrivé. Je suis acteur depuis 21 ans et je suis passé inaperçu pendant pratiquement tout ce temps. Les gens ont commencé à me remarquer à partir du premier Hellboy, en disant « qui c'est l’homme-poisson ? » ou disaient « Il me semble que j'ai vu ce type dans Hocus Pocus, Mystery Man ou Batman Returns » ou citaient d'autres films dans lesquels je joue un très petit rôle. Mais c'est le Labyrinth de Pan qui m'a vraiment attiré les faveurs de la presse, et mis un peu plus sous les feux des projecteurs, suivi par le Surfer d'Argent dans le second film des 4 Fantastiques. Ce timing était parfait."



Cela vous a-t-il donné de nouvelles opportunités ?

Oui, les offres que je reçois sont devenues plus intéressantes. J'ai désormais l'avantage de pouvoir obtenir davantage de rôles. D'habitude, les acteurs attendent près du téléphone, et dès qu’il sonne, ils disent : « Bonjour, Oui je prends ce rôle, je le prends ! » (rires) Maintenant, je peux lire les scénarii et dire « Oui, je veux participer à ce film, mais pas à celui-là ». C'est un énorme avantage !

Vous propose-t-on des rôles plus sérieux ?

Oui, je reçois ce genre d'offres : "nous aimerions vous offrir l'opportunité de jouer sans un masque. Qu'en pensez-vous ?"

Pensez-vous que vous allez participer à tous les films de Guillermo del Toro

Oui, tous ! (rires) En fait, je ne le sais pas. Guillermo prépare toujours de nombreux projets simultanément. At the Mountains of Madness devrait mettre en scène de nombreuses créatures. Guillermo a l'habitude de dire qu'il y aura toujours un monstre dans ses histoires, et que s'il y a des monstres, j'en jouerai focrément un... C'est gratifiant de savoir qu'il me fait confiance pour incarner les personnages qu'il crée.

La passion de Guillermo del Toro pour le folklore et la mythologie a-t-elle déteint sur vous ?

Je ne m'intéressais pas à ces histoires auparavant. Je n'ai jamais été un lecteur assidu de romans de science-fiction ou de comics. Mais plus je tourne dans ce genre de films, plus je m'y intéresse. Ce que j'apprécie dans le monde de la SF et du Fantastique, c'est que les fans sont intelligents et ouverts. Ils se fichent de votre beauté ou de vos muscles. Ce qui les intéresse, c’est la qualité de votre travail et les histoires imaginaires qui proposent plusieurs niveaux de lecture.

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