Cosplay : La parole aux créateurs - Première partie
Article 100% SFX du Mercredi 19 Novembre 2008
Propos recueillis par Pascal Pinteau
ESI célèbre aujourd’hui les « cosplayers », ces fans de cinéma, de séries animées et de BD, qui fabriquent des costumes étonnants avec autant d’astuce que de talent ! Si vous souhaitez nous montrer vous aussi vos costumes, le forum vous est ouvert, ainsi que de futurs articles sur le site !
Le « Cosplay », (nom né de la contraction des mots anglais costume et play) est désormais devenu aussi un phénomène français, après avoir passionné les fans américains et japonais. Pour en savoir plus, nous avons décidé d’interviewer quatre cosplayeurs émérites : Juliette, Mathieu, Nicolas (alias Briareos sur notre forum) et Sébastien. Voici leurs réponses croisées à notre questionnaire…
Comment avez-vous commencé à fabriquer des costumes pour votre plaisir ? Quel a été le « déclencheur » de cette envie ?
Juliette : J'ai toujours adoré me déguiser! Le jour où j'ai aperçu des photos de cosplays japonais dans un magazine que j'avais l'habitude de lire, j'ai tout de suite été séduite par le principe. J'ai toujours beaucoup aimé les dessins animés japonais, les manga et les jeux vidéo, et l'idée de pouvoir revêtir le costume de personnages qu'on aime m'a paru franchement sympathique. A vrai dire, cette idée m'avait déjà traversé l'esprit il y avait bien longtemps, je me souviens m'être inspirée de la tenue de « Emi magique » (héroïne de dessin animé des années 80) pour un costume de carnaval à l'école primaire... :) Je ne savais pas du tout ce que c'était que le cosplay à l'époque, et encore moins que cette pratique commençait à arriver en France! C'est en me rendant à la convention BD Expo à Paris en 1999 que j'ai pu assister pour la première fois à des concours de cosplay. Tout le monde avait l'air de bien s'amuser, il y avait une bonne ambiance, et certains costumes étaient franchement bien faits, ça m'a donné envie de participer aussi... J'ai donc décidé de me lancer l'année suivante, pour l'édition 2000 de BD Expo. En ce temps il n'y avait pas beaucoup de conventions par an, pas comme aujourd'hui! J'ai donc dû prendre mon mal en patience avant de pouvoir commencer.
Mathieu : J'ai commencé a construire des costumes quand je suis devenu fan de « Star Wars » (je le suis toujours), je voulais tellement être dans une armure de "méchant" que j'ai donc commencé a faire des costumes inspiré de cet univers. j'ai véritablement commencé le cosplay quand un amis m'a emmené visiter une convention de manga et de japanime, et là, j'ai vraiment été éblouï par certains costumes très impressionnants. J'ai vu des personnages qui semblaient tout droit sortit d'oeuvres manga ou de films… C’est ainsi que je me suis lancé dans cette nouvelle passion qu'est le cosplay.
Nicolas : C'était à l'occasion de la convention "cartoonist" en 1996 à Toulon...je me suis laissé entraîner par des amis étudiants de mon campus qui trouvaient le concept rigolo... Et on s'est tellement amusés que tout le groupe a sombré dans le cosplay pour plusieurs années ! Plusieurs le pratiquent encore.
Sébastien : Le film « Predator » a déclenché ma passion, à partir de là j’ai essayé de me rapprocher au maximum du personnage.
Quelles sont les principales difficultés quand on veut reproduire un costume de Manga ?
Juliette : Il arrive souvent que les personnages portent des vêtements aux coupes fantaisistes, pour lesquels il n'existe évidemment pas de patron. On doit donc se débrouiller comme on peut, en modifiant des patrons vaguement ressemblants ou en partant de zéro... De plus, les dessinateurs ne se posent pas la question de savoir comment leur personnage enfilent leurs costumes! Parfois, des éléments de costumes défient les lois de la gravité ou de la logique, c'est donc à nous de nous creuser la tête pour trouver comment faire tenir telle partie ou comment coudre tel morceau pour pouvoir l'enfiler sans trop altérer le costume. On doit souvent ruser et faire preuve d'imagination pour réaliser les costumes, l'important étant que le rendu final soit le plus proche possible de l'original. Au niveau des coiffures aussi, il faut bricoler: on peut assez rarement utiliser ses propres cheveux, donc on a recours à des perruques, qu'il faut recoiffer, recouper, parfois même teindre soi-même si on veut obtenir la bonne couleur :)
Mathieu : Pour les personnages de mangas, la principale difficulté est la gravité.....En effet, dans les mangas, les persos ont toujours des épaulettes de 1m de long, des épées de 3m, et des coiffures hallucinantes, et c'est très compliqué à reproduire ! Je suis donc toujours a la recherche des matériaux les plus légers et les plus résistants. Pour les personnages de films, le plus compliqué, c'est de trouver les bons tissus, car là, il faut souvent exactement le même tissu pour avoir le même rendu, et c'est un gros travail de recherche sur le net, dans les livres « art of » etc....
Nicolas : Dans les mangas, les personnages ont souvent des proportion corporelles improbables : alors soit on choisit un personnage ayant des mensurations comparables aux siennes, soit on triche !
Sébastien : A la base, pour les Predators, on a les images des films, mais on ne connaît pas la texture, les dimensions, les couleurs, les formes ni les reliefs du costume que l’on veut reproduire. Il faut réunir beaucoup de documentation pour y arriver.
Comment préparez-vous la construction d'un costume ? Comment choisissez-vous les matériaux qui vont vous permettre d'imiter les textures, l'aspect, les volumes des costumes originaux dans les répliques que vous fabriquez ? Où achetez-vous les matériaux que vous utilisez ?
Juliette : Personnellement, je fais plutôt des costumes à base de tissu (pas tellement d'armures ou autres). Quand je prévois de faire un costume, je réunis le plus d'images de référence possible et je regarde comment il est fait, afin de repérer les éventuelles difficultés et les morceaux qui risquent de poser problème. Ensuite je fais une liste de ce dont j'ai besoin: je note les couleurs de tissus qu'il me faut ainsi qu'une estimation du métrage, je regarde si un patron ne peut pas m'aider pour certaines parties, je cherche la bonne perruque sur internet... Pour choisir les tissus, le mieux est tout simplement de se déplacer dans les boutiques. A Paris, les cosplayeurs vont se fournir au "Marché St Pierre", près du Sacré Coeur, là où sont concentrés les magasins de tissus. Après, soit j'ai une idée précise du tissu que je souhaite utiliser et je cherche la bonne couleur, soit je n'en ai aucune idée et je regarde d'abord quelles sont les couleurs disponibles (et le prix aussi bien sûr! ^^ ) avant de choisir la matière.
Mathieu : Alors quand je choisis un perso a faire, c'est souvent pour le "defi technique" qu’il représente. Je regarde le perso, je le redessine, en décomposant son costume en plusieurs morceaux. Plus je fais des costumes, plus je découvre des gammes de matériaux nouveaux. Du coup, avec l’expérience, dans la plupart des cas, je sais d’emblée avec quels matériaux faire telle ou telle partie d’une tenue. Généralement, il ne reste que 10% du costume qui me pose de nouveaux problèmes à résoudre. Dans ce cas là, je fais des tests, j'avance et je tâtonne jusqu'à que je découvre comment faire. Les matériaux que l’on utilise dans le cosplay s'achetent souvent dans les magasins de bricolage, d'art, de tissus, les mercerie et......dans les magasins de sport (je pense notamment aux tapis de sol qui servent dans beaucoup de cas !)
Nicolas : L'argent est le nerf du cosplay : C'est plus amusant de fabriquer un costume complexe, mais il y a toujours une limite aux sommes qu'on peut dépenser. On n’emploie pas toujours les meilleurs matériaux possibles, mais ceux qui sont à la portée de sa bourse. De fait, il est très fréquent que j'utilise des matériaux de récupération : par exemple, je fais les poubelles de certains prothésistes pour récupérer des chutes de plastazote, une mousse thermoformable qui a des dizaines d'utilisations possibles en cosplay, mais qui serait inabordable s’il fallait l’acheter pour fabriquer un costume. Par contre, pour le tissu, difficile de le trouver ailleurs que dans un classique magasin de tissu au mètre. Maintenant que j'utilise de la résine stratifiée ou du latex pour certain costumes, ils sont plus beaux, mais je suis obligé d'en faire moins souvent pour ne pas faire exploser mon budget annuel alloué au cosplay !
Sébastien : Je démarre tout d’abord à l’aide d’une photo du film de la saga « Predator » qui me sert de modèle. Ensuite avec un mannequin et de la pâte à modeler je façonne chaque partie de l’armure en plastiline que je recouvre de RTV silicone. C’est ainsi que je fais le moule de l’élément en question. Je choisis aussi les matériaux en fonction du mouvement que devra effectuer cette partie de l’armure de « Predator ». Par exemple, la matière utilisée pour l’épaule (épaulette rigide) ne sera pas la même que celle utilisée pour le bras (souple). Ensuite je me procure la résine polyester, poly mousse ou latex, et j’utilise mes moules pour faire des tirages positifs. J’achète mes fournitures Dans les magasins de moulage et centres de bricolage style Castorama.
Quelles sont les astuces de fabrication dont vous êtes le plus fier (par ex la matière détournée de son emploi habituel qui vous a permis d'obtenir un effet superbe sur un costume, ou un accessoire impressionnant fabriqué à partir d'objets du quotidien détournés ) ?
Juliette : J'ai fabriqué assez peu d'accessoires en dehors de chignons comme celui qui complétait la tenue de Chibi, personnage de « Sailor Moon » (dans sa version US). J'ai acheté tout simplement des oeufs en polystyrène, puis j'ai collé des mèches dessus d'une manière particulière pour que l'effet obtenu ressemble à un chignon coiffé, et j'ai passé du vernis à ongles dessus au fur et à mesure pour éviter que les mèches se décollent avec le frottement...
Mathieu : Hummm, les seuls matériaux du "quotidien" que j'utilise, ce sont les tapis de sol (tapis de gym) pour faire des mascottes entières, ou des bouteilles en plastique pour faire les yeux de celles-ci. C'est un « truc » que beaucoup de cosplayeurs utilisent. Pour fabriquer des petits éléments, j'utilise souvent les oeufs de "chocolat surprise" ou des morceaux de boites en plastique, ou du carton de boites de céréales.
Nicolas : J'ai détourné un tapis de fitness d'un magasin de sport pour le transformer en robot géant... J'ai transformé du Linoléum en armure Jaffa de « Stargate SG1 »... J'ai transformé de la colle thermofusible en un masque à tête de mort... Au début, j’ai utilisé ces matériaux parce qu’ils étaient bon marché, mais ils se sont révélés finalement parfaits pour cet emploi.
Sébastien : J’ai simplement utilisé des matériaux appropriés au moulage. Ma fierté réside dans le résultat obtenu : par exemple, j’ai dû mélanger différentes teintes pour me rapprocher au plus prés d’un rendu métal.
La seconde partie de l'interview est disponible à cette page.
