Lego Batman : Un festival de références
Article Animation du Lundi 29 Juillet 2019

Au premier trimestre 2014, La Grande aventure Lego (The Lego Movie) bénéficie d’un succès inattendu, aussi bien critique que commercial. Les aventures d’Emmet séduisent les enfants, mais aussi les adultes grâce à des situations hilarantes bien menées et des références par milliers. Batman en est l’un des piliers, puisqu’il rejoint Emmet dans sa quête… malgré son caractère bougon. Cette nouvelle version de Bruce Wayne, qui est autant un hommage qu’une parodie du personnage, a depuis eu les honneurs, en 2017, de son propre film dérivé…

Cette version Lego de Batman fut en réalité inventée bien avant la production du film d’animation 3D La Grande aventure Lego. Des sets Batman apparaissent ainsi dans les rayons des magasins de jouets dès 2006. Ils permettent de construire la Batcave et plusieurs véhicules emblématiques du personnage. Parallèlement, Warner Bros Interactive Entertainment confie le développement d’un jeu vidéo, Lego Batman : The Videogame (2008), au studio Traveller’s Tales. En 2005, cette société britannique avait composé une formule magique avec Lego Star Wars, une relecture humoristique de la trilogie de George Lucas. Le succès fut immédiatement au rendez-vous. Depuis lors, Traveller’s Tales a décliné sa formule en y appliquant l’imagerie de nombreuses licences, dont Le Seigneur des Anneaux et Indiana Jones. Lego Batman fut, lui, le cinquième jeu. Il engendrera deux suites directes et un spin-off (Lego DC Super-Villains, sorti en octobre dernier). Si le personnage apparaît dans un cartoon destiné à promouvoir les sets de Lego en 2008, il faut attendre 2013 pour qu’il soit le héros d’un long-métrage d’animation destiné au marché de la vidéo : Lego Batman: The Movie – DC Super Heroes Unite (qui accompagne la sortie du second jeu vidéo).



Une popularité redoublée

Dès l’année suivante, il attire la lumière des projecteurs grâce à sa présence parmi les protagonistes de La Grande aventure Lego (février 2014). Écrit et réalisé par le duo Phil Lord et Christopher Miller (qui avaient précédemment signé Tempête de boulettes géantes et 21 Jump Street) et produit par Warner Bros, ce film introduit Bruce Wayne en tant que «Maître constructeur», capable de construire tout ce que lui permet son imagination, sans avoir besoin d’instructions (ou de notices). À la grande déception du naïf héros de cette aventure, Emmet, Batman est également le petit-ami – particulièrement imbu de lui-même – de Lucy (doublée par Elizabeth Banks). Le doublage du personnage est effectué par le comédien Will Arnett («Arrested development», «Les Désastreuses Aventures des orphelins Baudelaire»). «Phil et Chris m’ont dit :“nous voulons que tu fasses ce film, et tu n’as pas le droit de refuser”», s’amuse le comédien. Les trois hommes devaient originellement collaborer sur Tempête de boulettes géantes (2009), mais cela n’avait pas pu se concrétiser. La Grande aventure Lego présente certes une version parodique, exagérée du personnage, mais essentiellement respectueuse de son identité et de sa mythologie. Outre de nombreuses références aux précédentes incarnations du superhéros de la maison d’édition DC Comics (qui appartient aux studios Warner Bros), les aficionados purent retrouver certains traits caractéristiques de Bruce Wayne – qui parvient même à sympathiser avec Han Solo et Lando Calrissian… avant de voler l’hyperdrive du Faucon Millenium ! Warner Bros ne perd pas de temps et annonce, en octobre 2014, que le personnage, très populaire auprès du public, est destiné à devenir dès 2017 le héros arrogant et sarcastique du premier film dérivé de La Grande aventure Lego.



La ligue des grands méchants

Phil Lord et Chris Miller étant occupés par la préproduction de Solo : À Star Wars Story (un projet dont ils seront ultérieurement écartés), Chris McKay (Robot Chicken), qui leur prêta main-forte pour superviser l’animation de La Grande aventure Lego, est invité à reprendre le flambeau. Alors que le précédent film se déroulait au sein des multiples dimensions Lego, ce spin-off – dont la création est à nouveau confiée au studio Animal Logic — s’inscrit dans le monde des superhéros DC Comics. Tenu de respecter des délais compressés, Chris McKay soumet l’idée de s’inspirer des célèbres comédies des cinéastes David Zucker, Jim Abrahams et Jerry Zucker (les fameux ZAZ), dont la série des Y-a-t ’il un flic ? «Je leur ai dit que je voulais faire comme si Michael Mann réalisait Jerry Maguire, avec beaucoup de blagues», ajoute-t-il. «L’opportunité de faire un genre différent de long-métrage Batman m’intéressait vraiment. Que se passe-t-il quand la mission de Batman consiste à résoudre ses propres problèmes ?» Il propose également de faire référence aux multiples déclinaisons de la mythologie de cet univers, qu’elles soient issues des comics ou des longs-métrages. Pour la seconde fois consécutive, le comédien Will Arnett prête sa voix à Bruce Wayne. «Pourquoi ce Batman a-t-il un caractère aussi trempé ? Pourquoi est-il si mal luné ? Explorer sa mauvaise humeur a toujours été notre intention». Coécrit par Seth Grahame-Smith, Chris McKenna, Erik Sommers, Jared Stern et John Whittington, l’histoire raconte comment Bruce Wayne adopte le très jeune Dick Grayson (qui enfile bientôt le costume de Robin), alors que le Joker prépare son coup le plus spectaculaire : libérer les méchants les plus puissants du multivers Lego, enfermés dans la Zone fantôme (issue des comics Superman). Parmi eux se trouvent notamment King Kong, Voldemort, les Daleks de Doctor Who, Sauron, l’Agent Smith de Matrix, etc. Autant dire que l’affrontement s’annonçait explosif. Ces hilarantes mésaventures permettront toutefois à Batman d’apprendre à compter sur ses alliés, dont Alfred Pennyworth, Barbara Gordon/Batgirl et, évidemment, Robin.



Une lettre d’amour

Les clins d’œil à l’ensemble des composantes de la licence Batman sont autant nombreux que bien amenés. Des serials des années 1940 à l’interprétation grognonne de Ben Affleck dans les récents Batman v Superman et Justice League, des films de Tim Burton à la trilogie de Christopher Nolan, de la série des années 1960 avec Adam West au sublime dessin animé des années 1990, des premiers exemplaires de Detective Comics à la vision de Frank Miller : toutes les nuances de Batman sont invoquées dans ce qui est, en somme, une lettre d’amour pour le personnage. Sans oublier une panoplie de méchants issus de l’ensemble des supports. Les références ne se limitent cependant pas à la mythologie Batman, puisque Superman (et plus particulièrement celui des deux premiers films mettant en scène Christopher Reeve), Wonder Woman, Green Arrow et bien d’autres superhéros de la Justice League et de l’écurie DC Comics participent aux festivités. Enfin, les opportunités offertes par le multivers LEGO permettent d’inviter plusieurs vilains et créatures monstrueuses parmi les plus célèbres de l’histoire du cinéma. Même les Gremlins de Joe Dante sont de la partie. Au-delà de son humour et de son aspect autoparodique, le film Lego Batman est ainsi un très bel hommage adressé aux films de genre. Une lettre d’amour qui n’a fini d’être écrite, puisque cette version animée de Batman côtoie toujours Emmet et Lucy dans La Grand aventure Lego 2 (2019). Et semble particulièrement proche d’un nouveau personnage, la Reine Whatevra Wanabi. Bruce Wayne a également programmé son rendez-vous suivant : Chris Mckay a annoncé en décembre dernier qu’il allait réaliser un second opus du spin-off consacré à Bruce Wayne. «Nous continuons à faire des films qui nous semblent amusants, car au fond nous sommes tous des enfants de douze ans», déclare le producteur Dan Lin. «Et c’est pour cela qu’ils fonctionnent». Le chevalier noir ne risque donc pas d’arrêter de casser des briques. Bookmark and Share


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