L’HOMME INVISIBLE, de retour en salles le 22 Juin - 1ère Partie
Article Cinéma du Dimanche 07 Juin 2020

Découvrez ou redécouvrez le meilleur film d’épouvante de l’année au cinéma pour célébrer la réouverture des salles. Et lisez ensuite notre dossier pour tout savoir sur les coulisses du tournage !

Par Alain Wizible

SYNOPSIS

Cecilia Kass est en couple avec un brillant et riche scientifique. Ne supportant plus son comportement violent et tyrannique, elle prend la fuite une nuit et se réfugie chez sa sœur. Mais quand l'homme se suicide en laissant à Cecilia une part importante de son immense fortune, celle-ci commence à se demander s'il est réellement mort. Tandis qu'une série de coïncidences inquiétantes menace la vie des êtres qu'elle aime, Cecilia cherche désespérément à prouver qu'elle est traquée par un homme que nul ne peut voir. Peu à peu, elle a le sentiment que sa raison vacille…

LE CONTEXTE

Les monstres des studios Universal : Le début d'une nouvelle époque


Le personnage de l'Homme invisible fait partie intégrante de l'univers cinématographique des monstres Universal, à l'instar des figures légendaires de Dracula, du Loup-garou, de la créature de Frankenstein, de la Fiancée de Frankenstein, et de la Créature du Lac Noir. Si ces personnages tristement célèbres ont traversé les époques, c'est qu'ils sont atemporels et incarnent de nombreuses peurs et angoisses, au carrefour entre les découvertes scientifiques et la force éternelle de l'amour et de la mort. Avec INVISIBLE MAN, le studio inaugure une nouvelle approche de ces créatures mythiques. Une approche qui met à l'honneur des réalisateurs et scénaristes audacieux dont les idées renouvellent les enjeux des personnages. Cet opus en offre un bon exemple. Le scénariste et metteur en scène Leigh Whannell avait une vision inédite, à la fois captivante et terrifiante, du personnage et le studio était enchanté de la développer avec lui. À l'avenir, les films de monstres Universal appartiendront certes au genre horrifique, mais bénéficieront de budgets confortables, pourront explorer des registres variés et s'adresser à des publics différents. Ils ne composeront pas une saga dont les personnages se retrouvent d'un chapitre à l'autre, mais chaque nouvel opus constituera un film à part entière. Ce premier chapitre est supervisé par le producteur Jason Blum, des célèbres Blumhouse Productions. "Il s'agit du tout premier épisode d'une nouvelle génération de films 'Universal Monster'", déclare-t-il. "Universal en prépare d'autres, mais INVISIBLE MAN est le premier. C'est donc stressant et excitant à la fois". Le producteur de plusieurs gros succès du studio – la saga AMERICAN NIGHTMARE, SPLIT, GLASS et GET OUT – explique que les Monsters ont toujours beaucoup compté à ses yeux. "Notre société est adossée au studio depuis longtemps", ajoute Blum. "La relation privilégiée d'Universal avec le cinéma d'horreur remonte aux films de monstre des années 1930 et 1940. Cet héritage occupe une place majeure au sein du studio. J'ai eu un rendez-vous avec la PDG Donna Langley et elle souhaitait donner un nouveau souffle aux Monsters. Étant donné qu'on nous a souvent comparés à cette époque de l'histoire d'Universal, c'était une association assez logique". "Ces films de monstres me sont très chers", poursuit-il. "C'est pour cette raison que je souhaitais m'engager dans l'aventure. Notre objectif était de raconter une histoire ancrée dans la réalité d'aujourd'hui. Et c'est exactement ce qu'a fait Leigh avec INVISIBLE MAN".

Un personnage mythique et une histoire nouvelle

Le personnage de l'Homme invisible imaginé par H.G. Wells obsède Leigh Whannell depuis l'époque où il séchait l'école pour voir en secret les films de monstres Universal à la télévision. S'il apprécie autant le personnage, c'est que son histoire, contrairement à tant d'autres, n'a pas donné lieu à d'innombrables versions. "Quand on fait un film sur un personnage extrêmement populaire, on est sur la corde raide", souligne-t-il. "Vous n'avez qu'à interroger n'importe quel réalisateur ayant signé un film de la saga Star Wars pour connaître le degré de pression qu'il a subi en s'attaquant à un tel monument ! Avec l'Homme invisible, je me suis senti libre. Bien entendu, les gens connaissent le personnage, mais j'avais le sentiment qu'il faisait un peu figure d'outsider parmi les méchants du cinéma d'horreur. C'était exaltant de me demander ce que j'allais pouvoir faire vivre au personnage et dans quelle mesure je pouvais enrichir sa personnalité". Si Whannell a entamé sa carrière comme scénariste avec le court métrage SAW en 2003, puis le long métrage qui en a découlé – à l'origine d'une saga générant un milliard de dollars de recettes –, il a vraiment débuté comme acteur et continue d'ailleurs à jouer. En se produisant dans des films comme MATRIX RELOADED et des thrillers comme la saga INSIDIOUS, Whannell a vraiment saisi le travail du comédien… et son désir de repousser ses propres limites. Étant donné qu'il a écrit plusieurs films du genre, il est clair que le réalisateur affectionne le suspense et l'horreur. "Je suis un grand fan de cinéma d'horreur et j'ai beaucoup apprécié de pouvoir participer à des films du genre", explique-t-il. Pour autant, c'est après son dernier film qu'il s'est mis à s'interroger sur son intérêt pour le genre. "Après UPGRADE, je suis devenu accro au cinéma d'action", reprend-il. "Quand on est sur un plateau et qu'on orchestre une course-poursuite en voiture ou une scène de bagarre, c'est très addictif. Dès que j'ai terminé ce film, je me suis demandé quand j'allais pouvoir remettre ça ! À ce moment-là, j'étais certain que mon prochain projet allait être un film d'action qui vous prend aux tripes". Un homme averti en vaut deux : c'est alors qu'INVISIBLE MAN s'est invité dans la vie de Whannell. Quand on lui a téléphoné pour lui proposer un rendez-vous avec l'équipe du développement de Blumhouse pour évoquer d'éventuels projets, il ne se doutait pas qu'il aurait l'occasion d'imaginer une nouvelle aventure à l'un des personnages des Universal Monsters. Et cette simple discussion avec Blumhouse a abouti à une proposition qui a changé sa vie.

L'Homme invisible réinventé par Whannell

Tandis que le personnage de Wells était un scientifique qui basculait vers la folie, Whannell s'intéressait davantage à ce qui obsédait cet être maléfique. Au cours de son rendez-vous chez Blumhouse, il a compris qu'il fallait renverser le point de vue. "J'ai eu cette idée de manière spontanée, sans vraiment y réfléchir", confie-t-il. "J'ai suggéré que si on faisait un film sur l'Homme invisible, on devrait adopter le point de vue de sa victime. Par exemple, une femme qui réussit à échapper à son mari violent en pleine nuit et qui découvre ensuite qu'il s'est tué, sans y croire vraiment, surtout lorsque de mystérieux phénomènes commencent à se produire". Après ce rendez-vous, cette idée initiale n'a plus quitté Whannell. "Je n'arrêtais pas d'imaginer des scènes de ce film et de réfléchir à la manière dont je m'y prendrais pour le tourner", ajoute-t-il. "Ce n'est pas moi qui ai choisi ce projet : c'est lui qui m'a choisi. J'ai fini par me calmer, en me disant que ce projet m'accaparait beaucoup trop et que je si je voulais m'en libérer, il fallait que je tourne ce film". Il s'interrompt, puis reprend : "Je ne l'aurais pas fait si je n'avais pas senti qu'il y avait quelque chose d'exceptionnel qui me tendait les bras". Le réalisateur a laissé libre cours à son imagination en échafaudant le récit. "Je savais à quoi je m'attaquais", dit-il. "Le plus difficile consistait à bâtir une toute nouvelle histoire autour du personnage et à se demander de quel point de vue on se plaçait. J'ai ensuite pris l'habitude de noter toutes mes idées sur un carnet. C'était une occasion enthousiasmante car j'avais le sentiment que c'était un personnage qui n'avait pas été surexploité". Tandis qu'il élaborait un récit terrifiant sur l'obsession, il a envisagé l'histoire du point de vue de Cecilia Kass, architecte intelligente et douée de San Francisco, devenue captive d'Adrian Griffin, son petit ami violent et puissant. Lorsqu'elle parvient à fuir cet inventeur brillant, pionnier en matière d'optique, elle se cache grâce à l'aide de ses amis et de sa famille. Mais après le suicide de son ex, Cecilia commence à douter de sa mort et à se demander s'il n'est pas devenu invisible…en mettant à profit son invention révolutionnaire pour la torturer. Le problème, c'est que sa théorie est tellement délirante et paranoïaque qu'elle s'interroge sur son propre état mental, tout en cherchant à se défendre et à protéger ceux qu'elle aime. "Je n'ai pas élaboré dix versions différentes de cette histoire", précise Whannell. "La trajectoire d'une victime harcelée par l'Homme invisible s'est imposée presque immédiatement. J'ai fini par accepter l'idée qu'on n'avait pas forcément besoin de passer des semaines à se creuser la tête dans l'espoir de trouver quelque chose de mieux. Avec le recul, quand je repense au scénario, je sais que je voulais évoquer ces femmes victimes de violences qu'on ne prend pas au sérieux – qui tentent de prouver que quelque chose d'affreux leur est arrivé sans parvenir à en convaincre qui que ce soit. Mais je ne veux pas trop en dire parce qu'à mes yeux, l'un des plaisirs du cinéma, c'est d'observer les gens se faire leur propre idée".

Une histoire très actuelle

Deux fidèles partenaires de Whannell ont décidé de l'accompagner dans cette nouvelle aventure : Jason Blum, créateur et patron de Blumhouse Productions, et Kylie du Fresne, de la société australienne Goalpost Pictures. Ces deux structures avaient collaboré avec le cinéaste pour UPGRADE – et Blumhouse avait produit la saga INSIDIOUS écrite par Whannell. Autant dire que Blum et Kylie du Fresne avaient envie de renouveler l'expérience. La productrice, qui produit des séries et longs métrages dans son pays depuis plus de 25 ans, a été séduite par l'approche du parcours de la protagoniste. "Leigh a un talent fou pour écrire des personnages féminins forts", dit-elle. "C'est ce qu'il a fait dans la saga INSIDIOUS. Il sait créer des femmes mémorables si bien que je n'ai pas été étonnée du tout que sa relecture du mythe de l'Homme invisible adopte un point de vue féminin. Quand on parle d'INVISIBLE MAN, les gens partent du principe que le rôle-titre est le personnage principal, alors que c'est Cecilia (Elisabeth Moss). C'est ce qui rend l'approche de Leigh aussi originale et enthousiasmante. Il a renversé le point de vue traditionnel pour adopter celui d'une femme forte – et il a écrit un rôle magnifique". Selon la productrice, il s'agissait ainsi d'une histoire très actuelle, capable d'évoquer les violences conjugales et la perception des femmes dans les médias. "J'avais le sentiment que Cecilia appartient totalement à notre époque, y compris du point de vue des droits des femmes", explique Kylie du Fresne. "Leigh ponctue le film de ces thématiques et les intègre avec subtilité dans la trame narrative. Il raconte comment des femmes qu'on a fait souffrir – sous l'emprise d'un homme pendant un moment – ont le sentiment de perdre pied avec la réalité, et que la société les considère comme étant 'tout simplement hystériques' et estime qu'elles ont tout inventé. Ce n'est pas vrai. On le ressent très fortement à l'heure actuelle et le film l'évoque comme peu de longs métrages l'ont fait". Selon la productrice, si Whannell a su raconter la trajectoire de Cecilia avec une telle force, c'est parce qu'il a gagné le respect et la confiance de ses comédiens et techniciens. Grâce à la production, installée à Sydney, Whannell, lui-même originaire de Melbourne, a pu travailler avec plusieurs de ses compatriotes. "Leigh entretient des relations fidèles avec ses collaborateurs artistiques, et ça se voit à l'écran", indique Kylie du Fresne. "Les gens se mettent en quatre pour lui. C'est un gars de Melbourne qui a accompli une réussite exemplaire et donné naissance à la saga SAW avec James Wan. Du coup, quand il revient en Australie pour tourner ses films, les gens ont envie de se mettre en quatre pour lui : ils sont fiers de son succès. Il a un regard singulier d'une grande force sur les histoires qu'il raconte. C'est galvanisant de le voir mettre en images les récits dont il s'empare". Blum était, lui aussi, impressionné par les idées novatrices du réalisateur en matière d'angoisse. "Leigh excelle à terroriser le spectateur", dit-il. "Au fond, il n'y a pas tant d'angoisses différentes que ça, mais ce qui l'intéressait en s'attelant à INVISIBLE MAN, c'était de jouer sur toutes les formes de peurs qu'on peut imaginer et sur la suggestion plutôt que sur les effets de manche". Selon Elisabeth Moss, le film joue délibérément sur les codes du cinéma d'horreur. "Quand l'armoire à pharmacie s'ouvre et se referme, on s'attend à ce quelqu'un soit là", déclare la comédienne. "C'est la même chose lorsque la porte du réfrigérateur s'ouvre. On a pris un vrai plaisir à échafauder les effets de suspense. Comme lorsqu'on allume une lumière dans une pièce sombre et qu'on se rend alors compte que cette forme suspecte qu'on croit apercevoir dans un coin est … un portemanteau !"

La suite de notre dossier sera bientôt visible sur ESI. Bookmark and Share


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