La critique ESI : ZACK SNYDER’S JUSTICE LEAGUE, la splendide renaissance d’un film mutilé
Article Cinéma du Lundi 15 Mars 2021



Par Pascal Pinteau

En préambule, je voudrais dire que si je faisais partie de ceux qui ont défendu la première version de JUSTICE LEAGUE malgré ses défauts lors de sa sortie en 2017, c’est parce que j’avais eu la chance d’assister au tournage du film, de rencontrer Zack et Deborah Snyder, de parler avec les acteurs et les artistes des équipes de décoration et des costumes, et d’avoir ainsi un bon aperçu de la vision initiale du réalisateur et des séquences qui étaient prévues. Après le drame qui l’a frappé et son remplacement par Joss Whedon, puis la demande expresse du patron du studio de ramener la durée du film à moins de deux heures pour assurer un plus grand nombre de séances par jour, je savais pertinemment que ce qui allait subsister serait une version largement tronquée de la vision de Zack Snyder. Cependant, les moments familiers qui subsistaient me laissaient espérer qu’un jour peut-être, nous pourrions voir le film tel qu’il avait été imaginé et tourné dans un director’s cut. D’autres fans de la vision sombre et âpre de Snyder sont allés beaucoup plus loin et ont plaidé avec tant d’enthousiasme et de passion que les dirigeants de la Warner les ont entendus et ont saisi l’occasion de financer la restauration de JUSTICE LEAGUE, telle que nous aurions dû le découvrir à l’origine, pour en faire l’une des exclusivités de la chaîne à péage HBO MAX. Fruit de longs mois de travail, et d’un investissement considérable que l’on comprend en voyant l’ampleur de ses effets visuels achevés, ZACK SNYDER’S JUSTICE LEAGUE est présenté dans un montage de quatre heures, découpé en chapitres, et dans un format « full frame » presque carré qui donne plus de choses à voir en haut et en bas du cadre habituel, comme c’est le cas dans les présentations prévues pour les salles IMAX.

Et le résultat est formidable.

Commençons par évoquer les améliorations les plus spectaculaires. L’animation du méchant principal du film, Steppenwolf, a été entièrement refaite, son design totalement modifié, et maintenant le personnage est crédible, impressionnant, intéressant à observer, et aussi plus subtil, car il a des comptes à rendre à son maître, l’impitoyable Darkseid, que l’on se réjouit de voir enfin, et ce, dans plusieurs séquences. Les saynètes grotesques avec la gentille petite famille russe barricadée dans une maisonnette près de la centrale nucléaire ont disparu, tout comme les formations de minéraux multicolores qui surgissaient du champ de bataille pour concrétiser une happy end à laquelle il ne manquait plus d’un feu d’artifice. Éliminée aussi l’ouverture « humoristique » avec le voleur capturé par un Batman sur la piste d’un paradémon. Idem pour le petit clip montrant Superman filmé « grâce à un smartphone », avec des effets hasardeux de gommage 3D de la moustache que Henry Cavill devait continuer à porter pendant la production de MISSION : IMPOSSIBLE - FALLOUT. Débarrassé de tout ce bricolage, ce bric à brac, le film retrouve sa dignité, son sérieux, et son approche véritablement mythologique des super-héros. Des pans entiers de l’histoire de Cyborg et de son père sont révélés, et le parcours émotionnel de ce personnage joue un rôle capital dans le récit et dans le combat final. Toutes les séquences ont plus de souffle, sont mieux ancrées dans les éléments concrets des décors et des environnements, et ont plus de punch, allant même jusqu’à décrire des affrontements sanglants. Les conflits entre les membres de l’équipe sont mieux traités, leurs failles et leurs regrets aussi. Idem pour la résurrection de Superman, plus émouvante, tout comme son retour en force dans son costume noir. Fidèle à sa vision sombre de l’univers DC, Zack Snyder clôt le film sur une note d’espoir, sans cacher que d’autres menaces s’annoncent, comme Bruce Wayne le pressent dans un nouveau cauchemar apocalyptique qui ravira certains et déplaira à d’autres. Quand défilent les dernières images de cette fresque de quatre heures qui semble en durer seulement deux, on se prend à rêver. Bien sûr, la Warner a déjà annoncé que le projet de suite de JUSTICE LEAGUE était abandonné, et que ce volet restauré allait clore pour de bon l’ère Snyder des productions DC. Mais si le film bat des records d’audience sur HBO MAX et en VOD ailleurs, qui sait si la perspective d’un match retour contre Darkseid ne deviendra pas soudain une nouvelle priorité pour le studio qui sait jouer la carte du Multiverse quand c’est utile ? En attendant, profitons déjà de cet événement exceptionnel qu’est ZACK SNYDER’S JUSTICE LEAGUE, réjouissons-nous que la Warner l’ait rendu possible, et savourons-le comme il le mérite !

NB : En France, Justice League Snyder Cut sera d'abord disponible à l'achat digital le 18 mars, en même temps que les USA. Par la suite, il sera possible de louer le film sur toutes les plateformes VOD dès le 31 mars.

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