MOON KNIGHT : La création des décors et des costumes
Article Cinéma du Dimanche 17 Avril 2022

L’écriture du scénario puis la création des personnages et des décors ont nécessité des recherches approfondies sur l’histoire et la mythologie égyptienne. Deux égyptologues étaient chargés de conseiller l’équipe afin d’éviter les anachronismes. La chef décoratrice, Stefania Cella, tenait notamment à ce que les décors reflètent avec réalisme ceux de l’Égypte antique. Elle a donc collaboré avec les égyptologues et un directeur artistique égyptien pour s’assurer que ses créations étaient historiquement correctes.

L’équipe technique a construit des décors en taille réelle sur les plateaux des studios Origo à Budapest, en Hongrie, qui disposent d’une dizaine de plateaux - dont deux pour les effets visuels - d’une surface totale de 18 000 m2, et de quatre hectares de plateaux extérieurs. Tant de films historiques ont été filmés en Hongrie que l’équipe bénéficiait d’un accès privilégié à des spécialistes des statues antiques, de la poterie et des hiéroglyphes, notamment.

Du fait du soin particulier apporté aux décors, conformément aux instructions des égyptologues et au cahier des charges de Marvel, leur construction a demandé des efforts titanesques. Une équipe de sculpteurs italiens, la patrie de Stefania Cella, ont ainsi été embauchés pendant trois mois, rien que pour créer les statues des divinités égyptiennes qui se dressent dans la Chambre des dieux, où se déroule une grande partie des scènes d’action de la série. La Chambre elle-même a été construite sur un immense plateau de 4 375 m2, aussi haut qu’un immeuble de trois étages, orné de hiéroglyphes dorés en rapport avec la divinité.

Il y a également des hiéroglyphes dans la chambre funéraire, dont la conception rappelle symboliquement le personnage de Steven Grant. L’utilisation de l’eau sur le plateau, et de surfaces réfléchissantes sur d’autres décors, rappelle la dualité et la quête d’identité qui est au cœur de la série.

De même, pour les scènes du musée, l’équipe a dû créer de toutes pièces une grande exposition sur l’Égypte. La préparation et la construction ont pris des mois, et la salle a été remplie de colonnes construites artisanalement, de pièces provenant des collections réunies par l’équipe et même d’une boutique de souvenirs parfaitement achalandée. La minutie de Stefania Cella est apparente jusque dans les décors extérieurs. Karim El-Hakim atteste de son réalisme, et dit sur le ton de la plaisanterie que les décorateurs ont « fait venir l’Égypte à Budapest, jusqu’aux plaques d’immatriculation et aux T-shirts en caractères arabes. Je me croyais au Caire. Les odeurs, la fumée, les voitures, les tuk-tuks, les stands d’alimentation, et même les fruits en vente sur le marché… Tout était réaliste. C’était impressionnant. »

Le dynamisme et l’authenticité des séquences qui se déroulent au Caire étaient essentiels pour Mohamed Diab, dont May Calamawy se souvient qu’il voulait « s’assurer que les décors soient parfaits de bout en bout. Il voulait que les spectateurs aient l’impression que la série a été tournée en décors naturels. On a même été jusqu’à s’assurer que les journaux qui trainent par terre étaient égyptiens. » Oscar Isaac, qui est également un des producteurs délégués de la série, estime que la cheffe décoratrice a fait un travail remarquable. « C’est tout simplement stupéfiant. De mon point de vue, c’était très important, parce qu’on a vraiment l’impression d’y être, mais aussi parce que je vois qu’elle s’est vraiment donnée à fond. Je les voyais prendre des décisions lourdes de conséquences sur l’intrigue. La création de ces décors a demandé un énorme travail de réflexion. »

« Ce niveau d’investissement, et cette créativité, nous poussent tous à donner le meilleur de nous-mêmes », ajoute-t-il. Il a aussi fallu s’assurer que les rues de Budapest ressemblaient à celles de Londres. Heureusement, l’architecture néo-classique y est très répandue. Après quelques missions de reconnaissance, la production a identifié des rues avec des bâtiments brutalistes, et ajouté des véhicules (qui roulaient à gauche), des panneaux de signalisation, un bus à deux étages rouge, et de nombreux taxis.

Le Musée d’art hongrois a fait office de National Art Gallery. Pour les scènes d’intérieur, on y a créé des sections égyptiennes, dont une équipe de sculpteurs hongrois et italiens a construit toutes les statues. Cet énorme projet a nécessité plus de trois mois de travail. De même, les scènes de rue de Brixton ont été tournées sur un marché de Budapest, en changeant les panneaux. L’équipe a également trouvé une rue incurvée comme celle de Brixton, et redécoré un restaurant comme à Soho.

L’appartement de Steven Grant a été soigneusement conçu pour refléter le fait qu’il vit dans un grenier en forme de pyramide. Son appartement très atypique contient de nombreux livres, antiquités et cartes. Les livres divisent l’open space en deux parties, et son lit est sous la mezzanine, comme s’il dormait dans un tombeau.

Arthur Harrow, quant à lui, est censé vivre dans une sorte de communauté, dans le quartier de Spitalfields, non loin des chantiers navals. Étant donné que le décor devait se prêter à une scène de poursuite, des arches ont été créées pour des raisons esthétiques, avec une série d’escaliers qui évoquent les pyramides.

Toujours sur le thème égyptien, le manoir d’Anton Mogart (interprété par le regretté Gaspard Ulliel) comprend deux pyramides de verre inspirées de celle du Louvre, qui trônent au centre du jardin d’une grande propriété.

Le tournage s’est également déroulé dans le désert jordanien, notamment à Wadi Rum. Une sorte de retour aux sources pour Oscar Isaac : « Je n’aurais jamais cru que j’irais tourner trois projets en quatre ans dans ce désert », sourit-il. « Or c’est là-bas qu’ont été filmés STAR WARS, DUNE et, aujourd’hui, MOON KNIGHT. Ils ont même gardé les noms de routes qui font référence à STAR WARS. C’était marrant de retrouver certaines personnes. On voit vraiment les choses autrement dans ces immenses paysages, qui nous rappellent notre place insignifiante dans l’univers. »

Pour Mohamed Diab, tourner en extérieur était une aubaine. « J’adore le réalisme », dit-il. « Mon objectif, c’est de tourner le moins possible sur fond vert, surtout avec une histoire qui est peut-être le fruit de l’imagination de l’un des personnages. »

LES COSTUMES

Dans l’ensemble, les recherches de la costumière Meghan Kasperlik consistaient à étudier l’histoire des divinités, ainsi que le mode de vie et les pratiques funéraires des Égyptiens de l’Antiquité. Elle a notamment visité le Metropolitan Museum of Art, à New York, et s’est beaucoup documentée dans des ouvrages spécialisés et sur internet. Elle a longuement discuté avec Mohamed Diab de la culture égyptienne et proposé quelques ajustements pour la moderniser, afin de l’adapter à l’univers cinématographique Marvel. Elle voulait que les tenues de Steven Grant soient représentatives du quartier de Brixton, pleine d’inventivité mais avec quelques fausses notes, comme une chemise vintage un peu trop délavée, un pantalon à pinces et des chaussures richelieu avec des chaussettes grises.

La tenue pragmatique de Marc Spector est adaptée au climat désertique. Son costume est vieilli, avec un sweat à capuche qu’il peut mettre ou enlever, et un manteau pour le protéger du froid la nuit. Il porte un treillis et un gilet pratique, avec des poches. L’arrière du sweat à capuche et du gilet ont de multiples fonctions, préfigurant la cape de Moon Knight.

Les tenues d’Arthur Harrow, classiques et élégantes, s’inspirent de celles d’un chef de secte. Sa robe de lin de couleur rouille contraste avec les tons sable et neutres britanniques. Elle évoque celle d’un moine et lui donne un air mondain et cosmopolite, avec des sandales surdimensionnées. Harrow porte aussi deux bracelets ornés de symboles de l’Égypte antique qui font référence à la mort.

Pour Layla, la costumière s’est inspirée de la vie du personnage, au Caire et à Londres. Elle a regardé comment s’habillaient les immigrés à Londres, et s’est demandé comment le style de Layla avait pu évoluer depuis son arrivée. La jeune femme porte une veste customisée aux couleurs de l’Égypte, et a généralement un style assez athlétique, avec notamment des baskets confortables.

La cuirasse de Moon Knight est immédiatement reconnaissable par ses ennemis, car le nom de Khonshu y est écrit en hiéroglyphes, avec un croissant de lune au centre. Il porte des genouillères intégrées, des hiéroglyphes le long des cuisses qui rappellent le serment de Khonshu : «Lève-toi , reprends vie et deviens le poing de ma vengeance » et des bottes peintes à la main.

Ses écussons détachables lui servent d’armes (ils sont caoutchoutés pour faciliter leur manipulation). Les bandages qui entourent son masque rappellent ceux de la cuirasse, et une capuche en forme de bec recouvre le tout. Sa cape soyeuse est doublée d’un tissu couvert de hiéroglyphes.

À l’inverse, M. Knight porte un costume trois pièces taillé sur mesure, comme dans comics. Des références à Khonshu ornent les revers de la veste et du gilet, la cravate, et les boutons. Pour moderniser cette tenue, la costumière a ajouté une paire de baskets dont les sangles rappellent l’Égypte et les momies. Il porte également des gants blancs, et un masque sur mesure avec une coquille interne qui habille la mâchoire.

Enfin, le collier en cuir de Khonshu, cousu et peint à la main, évoque les larges colliers des élites de l’Égypte antique, et ses bandages ressemblent aux bandelettes de lin d’une momie.

Les costumes et accessoires des autres divinités égyptiennes incluent notamment des brassards dorés ou ornés de fleurs de lotus ou de cobras (pour les méchants), des pyramides sur les boucles de bracelet, du cuir texturé avec des symboles inspirés de pièces de musée, des scarabées (le symbole du bien), des hiéroglyphes, peintures et imprimés faits main, et des perles.

La conception des accessoires et des cascades de MOON KNIGHT vous sera décrite dans la prochaine partie de notre dossier ! Bookmark and Share


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