OBI-WAN KENOBI : Entretien avec Deborah Chow, réalisatrice – 1ère partie
Article Cinéma du Lundi 06 Juin 2022

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Initialement envisagées sous la forme d’un long métrage, les aventures d’Obi-Wan Kenobi qui suivirent l’enfermement d’Anakin Skywalker dans la carapace noire de Dark Vador se dévoilent dans une minisérie à grand spectacle sur Disney +. Rappelons que ce changement de plan avait eu lieu peu après l’échec de SOLO au boxoffice. La direction de Disney avait incité Kathleen Kennedy et le comité directeur de Lucasfilm à réviser leur stratégie de développement de STAR WARS, sans anticiper alors que L’ASCENSION DE SKYWALKER serait aussi une déception. Inversement, le succès remporté par LE MANDALORIEN sur le petit écran a prouvé que son créateur Jon Favreau et son partenaire Dave Filoni avaient eu raison de respecter la vision de George Lucas, et de préserver ses personnages au lieu de les réduire à des rôles de faire-valoirs et de les sacrifier au rythme d’un mort par nouvel épisode cinématographique. Tout cela pour mettre en avant de nouveaux héros jamais devenus iconiques malgré tous les efforts de marketing déployés…

Aujourd’hui plus que jamais, l’avenir de STAR WARS se consolide dans les séries supervisées par Favreau et Filoni, dont l’esthétique, les effets visuels époustouflants, l’humour et le mélange d’émotion et d’action font renaître l’émerveillement et les rebondissements de la trilogie originale. La magie est de retour, chaque nouvelle série le prouve à sa manière. Ce n’est pas un hasard si George Lucas lui-même a déclaré être un fan du MANDALORIEN, alors qu’il n’a pas caché sa déception en découvrant les films écrits et fabriqués sur commande par JJ Abrams. Dans ces séries, il a bien retrouvé son univers, développé avec sensibilité et intelligence.

Les conséquences de LA REVANCHE DES SITH

Lucas lui-même n’avait guère convaincu en présentant de 1999 à 2005 sa trilogie de préquelles dont les morceaux de bravoure auraient pu tenir en un seul long film entièrement dédié à la chute d’Anakin. Après le faible épisode I, aussi transparent que l’annonçait son titre LA MENACE FANTOME, L’ATTAQUE DES CLONES avait suscité un regain d’espoir et LA REVANCHE DES SITH réussi à convaincre grâce à son final incandescent. En situant l’action d’OBI-WAN KENOBI une décennie après l’avènement de Vador, l’équipe créative de la série a laissé au maître Jedi et à son ex-disciple le temps de réfléchir à leurs actions passées, et de se préparer à une nouvelle confrontation. C’est à Deborah Chow, qui avait déjà dirigé deux excellents épisodes de la première saison du MANDALORIEN ( « THE SIN » et « THE RECKONING ») qu’a été confiée la production exécutive et la réalisation de tous les épisodes d’OBI-WAN KENOBI. Elle nous a parlé de cette expérience exceptionnelle, et nous nous sommes entretenus aussi avec Ewan McGregor et Hayden Christensen, qui retrouvent leurs rôles cultes.

Entretien avec Deborah Chow (Réalisatrice et Productrice Exécutive)

Comment avez-vous abordé cette réunion des deux personnages les plus iconiques de STAR WARS, à la fois en tant que fan et que réalisatrice ?


Franchement, je m’étonne encore d’avoir été choisie pour diriger la réunion de personnages aussi importants. Comme vous le savez certainement, j’ai fait mes débuts dans l’univers de STAR WARS en réalisant des épisodes du MANDALORIEN, puis ma collaboration avec Lucasfilm a évolué favorablement et m’a amené à m’occuper de cette nouvelle série. Mais ce n’était pas du tout prévu initialement, et je suis surprise de m’être retrouvée dans cette position et honorée d’avoir eu cette responsabilité et cette chance.

Même si elle est intitulée OBI-WAN KENOBI, la série va également être consacrée largement au côté obscur de la Force, avec les personnages de Vador et de l’inquisitrice Reva. Pouvez-vous nous en parler ?

Volontiers. L’action de notre série se déroule dix ans après les événements décrits dans LA REVANCHE DES SITHS. C’est un moment particulièrement intéressant dans la chronologie de STAR WARS, car la galaxie est plongée dans une période très sombre, juste après que l’Empire ait lancé le fameux Ordre 66, et initié l’assassinat de très nombreux Jedi. Ceux qui ont échappé à ces massacres de grande ampleur doivent se cacher ou vivre sous une fausse identité, dans la clandestinité. Le Grand Inquisiteur et Reva font partie des nombreux sbires de l’Empire dont la seule et unique tâche consiste à traquer et à éliminer les Jedi survivants. Et pendant ce temps, la puissance de l’Empire s’accroit inexorablement…Pour nous, concevoir une série dans un contexte où le côté obscur devient aussi fort, et pouvoir faire intervenir Vador et ses inquisiteurs était évidemment une formidable opportunité.

Comment avez-vous transposé en prises de vues réelles les personnages des inquisiteurs déjà apparus dans les séries animées STAR WARS ? Et en quoi sont-ils différents dans leur incarnation de chair et d’os ?

Transposer un personnage d’animation en un protagoniste qui va être incarné concrètement par un acteur est un processus complexe mais intéressant. Il y a toujours des défis particuliers à relever, notamment parce que les proportions des personnages animés s’éloignent souvent de celles d’un être humain pour leur donner des silhouettes encore plus frappantes. Mais avant de régler ces détails précis avec nos créateurs de costumes, d’accessoires et de maquillages, nous nous sommes d’abord astreints à respecter l’esprit du personnage, afin que les fans puissent aussi le reconnaître par son comportement, ses actions, sa présence physique et sa gestuelle.

En tant que réalisatrice, comment avez-vous veillé à ce que la série s’inscrive bien dans la continuité des préquelles, tout en se référant aussi à l’épisode IV de la trilogie classique ?

C’était effectivement l’un des aspects les plus difficiles du travail de développement de la série, puisque notre récit se déroule au milieu de ces deux trilogies, tout en étant directement lié aux événements récents vus dans les préquelles. Comme elles ont été tournées à la fin des années 90 et au début des années 2000, les préquelles ont bénéficié de ressources techniques numériques qui n’existaient pas dans les années 70/80, quand la trilogie originale a été produite. Leur style visuel est donc forcément un peu différent. Je dirais que narrativement, la série est plus proche des enjeux et des conséquences de ce qui s’est produit dans les préquelles. En ce qui concerne la vision globale du projet, ce qui m’intéressait le plus, c’était la perspective de pouvoir me focaliser sur Obi-Wan, notre personnage principal, et décrire son évolution, son parcours émotionnel, ses motivations. Je souhaitais que ses actions deviennent le moteur de tout ce qui allait se dérouler dans la série. Après avoir mis tout cela en place dans les traitements des six épisodes, nous avons su ce que nous devions développer visuellement, aussi bien en termes d’ambiances que de lieux, de personnages et d’accessoires spécifiques. L’aspect le plus délicat de cette tâche a consisté à créer un nouveau récit qui donne l’impression d’être lié de manière naturelle aux préquelles et à l’héritage de STAR WARS, tout en proposant une vision fraîche et originale aux téléspectateurs.

Découvrez la suite des confidences de Deborah Chow dans la prochaine partie de notre dossier OBI-WAN KENOBI ! Bookmark and Share


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