OBI-WAN KENOBI : Entretien avec Ewan McGregor (Obi-Wan)
Article TV du Vendredi 17 Juin 2022

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Vous avez déclaré que pendant le tournage des préquelles de STAR WARS, vous vous étiez parfois senti « perdu dans les fonds verts » en raison de l’absence d’éléments et même souvent de personnages concrets autour de vous. Pouvez-vous nous dire si vous avez apprécié les avantages du tournage sur le plateau StageCraft, qui vous permettait de voir les environnements des scènes que vous étiez en train de jouer ? Est-ce que cela vous a aidé à les interpréter ?

Oh, StageCraft est vraiment un dispositif révolutionnaire, qui change totalement l’expérience de ce type de tournage en vous immergeant dans l’environnement des scènes. Les possibilités de l’utiliser sont infinies, car il permet aussi bien de représenter de vastes paysages que des décors intérieurs. Les infographistes de cette équipe peuvent créer les rues d’une mégalopole, ou les dunes et les montagnes d’un désert, puis tout préparer pour que l’on tourne ensuite des scènes qui se passent dans les couloirs d’un astronef ou dans une habitation d’un autre monde, à l’esthétique si délirante que la construction en dur d’un tel décor aurait été soit impossible à réaliser techniquement, soit aurait coûté des millions de dollars. Avec ce système, ils peuvent tout créer dans leurs ordinateurs et le faire apparaître ensuite autour des acteurs de manière crédible. Ils disposent simplement un sol et quelques accessoires en volume sur le cercle central du plateau. Cela peut être un fauteuil, un bureau, une colonne ou un encadrement de fenêtre, bref tout ce qui est utile pour créer un lien concret avec ce qui apparaît virtuellement sur le mur cylindrique d’écrans LEDs. Quand tout cela est en place, le tour est joué ! C’est vraiment extraordinaire à voir, et le résultat est phénoménal. Cette technologie fantastique change complètement notre expérience d’acteurs. Cela me rappelle tout ce que j’aimais quand on montrait des photos de tournage des grands classiques d’Hollywood, comme ces immenses plateaux sur lesquels étaient construits trois décors différents disposés en cercle afin que les caméras puissent pivoter pour passer immédiatement de l’un à l’autre, sans perte de temps pour les acteurs et les techniciens. On retrouve ce sentiment de magie cinématographique quand on joue sur le plateau StageCraft. D’abord parce que le sentiment d’immersion visuelle qu’il vous procure est très fort, et le résultat à l’image parfait, et aussi parce qu’il permet de mettre en place très rapidement un nouvel environnement. Sur le mur d’écrans LEDs, cela peut se faire très vite, en quelque minutes. Mais il faut un peu plus de temps pour préparer la décoration physique du sol et les accessoires concrets. Disons que le matin, on peut tourner les images d’un désert, et l’après-midi celle du cockpit d’un astronef. Même s’il s’agit d’un dispositif high tech, il renoue avec ce sens de l’émerveillement du vieil Hollywood. Et c’est sidérant de penser que nous ne sommes plus contraints de nous déplacer dans le désert, mais que nous pouvons l’amener sur notre plateau ! Pour être rigoureux, je dois préciser que nous avons quand même tourné un peu en extérieurs, en combinant ces vues avec les plans tournés grâce à StageCraft. Et on ne voit aucune différence !

Pourriez-vous nous parler de votre entraînement physique pendant la préparation de la série ? Combien de temps a-t-il duré et en quoi a-t-il consisté ?

Je me suis énormément entraîné pour ce projet, avec mon excellent coach personnel et ami Tony Horton. Cette préparation a été plus longue et plus intensive que toutes celles de mes projets précédents : elle a duré trois mois, à raison de cinq jours par semaine. Grâce à cela, j’étais dans une forme éblouissante quand le tournage a commencé, et puis comme les journées de travail étaient longues, je n’ai plus eu le temps de continuer à m’entraîner et j’ai perdu peu à peu le fruit de ces efforts ! (rires) Mais notre coordinateur des combats Jonathan « JoJo » Eusebio est l’un des meilleurs dans sa catégorie. J’avais déjà travaillé avec lui sur BIRDS OF PREY ET LA FANTABULEUSE HISTOIRE DE HARLEY QUINN. J’aime l’originalité de ce qu’il crée et j’apprécie énormément ses équipes de cascadeuses et de cascadeurs. Ils sont extraordinairement doués et précis. On se sent toujours en sécurité, entre de bonnes mains quand on tourne avec eux. L’entraînement pour les combats aux sabres laser et les cascades a débuté trois mois avant le tournage, par des sessions de trois heures, deux à trois fois par semaine. Quand on garde un tel rythme, votre forme physique et vos capacités s’améliorent très rapidement. Jouer une scène de combat dans un film, c’est un peu comme participer à un match de boxe : chaque prise ressemble à un round, et même si personne ne fait sonner une cloche, je peux vous dire que quand on crie « Coupez ! », vous êtes épuisé, en nage, et à bout de souffle quand vous retournez vous asseoir dans votre coin ! C’est extrêmement intense. Vous donnez toute votre énergie pendant ces quelques minutes, et vous devez être dans une excellente forme physique pour y parvenir et pour recommencer peu après. Ce que j’aime beaucoup dans l’approche de JoJo et de son équipe, c’est qu’il vous apprend la chorégraphie d’un combat au sabre tout en vous entraînant pour augmenter progressivement votre résistance physique à ces efforts. Vous ne vous en rendez pas compte au début, mais vous constatez vite que ça marche. On commence généralement par 20 minutes d’étirements et de réchauffement, et on termine de la même manière. A la fin du tournage de la série, je peux vous assurer que j’étais plus souple que je ne l’avais jamais été auparavant ! Les mouvements que ma tête et mes genoux étaient désormais capables de faire m’étonnaient ! (rires)

Après toutes ces années, avez-vous rapidement réussi à entrer à nouveau dans la peau d’Obi-Wan Kenobi, et dans ses pensées ?

Eh bien j’ai commencé par revoir tous les STAR WARS, des préquelles jusqu’à l’épisode IX de la saga, puis les spinoffs ROGUE ONE et SOLO. Ensuite j’ai lu des romans de science-fiction, parce que ce n’est pas un genre littéraire dont j’étais familier. J’ai lu un ouvrage d’un auteur écossais qui s’appelle Iain Banks. Il a écrit des oeuvres étonnantes comme le thriller COMPLICITE ou l’histoire d’amour atypique LE PONT, et aussi des récits de SF sous le nom de Ian Menzies Banks. Ses livres m’ont aidé à me replonger dans l’univers de l’anticipation. Le travail de développement de la série a commencé peu après, et j’ai parlé régulièrement du projet avec Deborah Chow, notre brillante réalisatrice. Comme je suis aussi producteur de la série, j’ai été impliqué dans le développement des différentes versions des scripts, mais c’est Deborah qui a dirigé ce processus. Je lisais toutes les nouvelles versions des scenarii, dès qu’elles arrivaient, et je donnais mon opinion sur ces modifications. Cela a été une excellente préparation, puis quand nous en sommes arrivés au tournage, incarner à nouveau Obi-Wan a été un plaisir. J’ai ressenti cela dès le début, quand j’ai participé à des tests filmés avec d’autres acteurs plus jeunes. Nous les avons tournés dans les décors du MANDALORIEN, avec leurs équipes techniques. C’était la première fois que je portais à nouveau ce type de tenue, dix-huit ans après la fin du tournage de LA REVANCHE DES SITHS. Ce jour-là, il s’agissait d’une évocation assez vague de l’aspect habituel d’Obi-Wan, car mon vrai costume n’était pas encore prêt. Nous nous sommes débrouillés avec un assemblage de vêtements récupérés dans la garde-robe des figurants du MANDALORIEN, pour composer quelque chose qui y ressemblait le plus possible. Et quand je suis arrivé sur le plateau, c’était amusant et merveilleux de découvrir les réactions des équipes de cette série, qui travaillent dans les studios de Manhattan Beach à Los Angeles. Elles sont composées de vrais fans de STAR WARS, et je m’en suis rendu compte dès que j’ai traversé le plateau pour filmer ces essais, en voyant les grands sourires teintés d’émotion sur leurs visages. Leur enthousiasme était palpable. Pourtant, je me sentais un peu rouillé, et il m’a fallu un petit moment avant de retrouver la manière de parler et les postures du personnage. Heureusement, les dialogues sont si bien écrits que cela m’a aidé. Depuis le début du développement de la série, ils ont été retravaillés et améliorés sans cesse, et les auteurs ont réussi à exprimer tout ce qui constitue la personnalité et les motivations d’Obi-Wan dans ses propos. Quand je lisais ces répliques avant le tournage, j’étais d’abord obligé de les entendre dans ma tête comme si c’était Alec Guiness qui les prononçait, ensuite j’étais rassuré et je pouvais les interpréter à ma manière. Quand des dialogues sont si fluides et naturels, ils sont faciles à jouer.

Découvrez notre entretien avec Hayden Christensen (Dark Vador) dans la prochaine partie de notre dossier OBI-WAN KENOBI ! Bookmark and Share


.