Cœur D’encre : Entretien avec Andy Serkis
Article Cinéma du Vendredi 06 Fevrier 2009

Les débuts d’une nouvelle saga de Fantasy…

Par Pascal Pinteau

Meggie, une adolescente passionnée de lecture, vit en compagnie de son père Mortimer, réparateur de livres. Un jour, un étrange individu nommé «Doigt de poussière » fait irruption dans leur vie. Il prétend savoir des choses que Meggie ignore : ce qui est réellement arrivé à sa mère, qui a disparu depuis plusieurs années, et pourquoi Mortimer ne lit jamais un livre à voix haute… Meggie ne tarde pas à découvrir que son père possède le don de faire surgir des livres objets et personnages imaginaires. Hélas, ce pouvoir a déjà provoqué bien des dégâts. Capricorne, un brigand sans foi ni loi, a ainsi quitté les pages du livre Cœur d’encre pour se retrouver dans le monde réel, qu’il compte bien conquérir pour en devenir le maître absolu…Avant d’être adaptée au cinéma, cette histoire écrite par la romancière allemande Cornelia Funke a d’abord été un best-seller de la littérature jeunesse. Aussi célèbre outre-Rhin que l’est J.K. Rowlings (Harry Potter) Cornelia Funke est à la fois illustratrice et auteur de récits de Fantasy. Après Le prince des voleurs, transposé au cinéma en 2006 pour le marché allemand, Cœur d’encre est la première adaptation d’une œuvre de Cornelia Funke qui bénéficie d’un budget conséquent et d’un casting international. Aux côtés de la nouvelle venue Eliza Bennett (Maggie) et de l’incontournable Brendan Fraser (Mortimer), on découvre avec plaisir Helen Mirren dans le rôle d’une collectionneuse de livre excentrique et l’excellent Andy Serkis, bien connu des fans de fantastique pour avoir incarné Gollum et King Kong, dans un rôle à sa démesure : celui du sinistre Capricorne. Effets-speciaux.info a eu le plaisir de s’entretenir avec cet acteur anglais aux multiples talents pour évoquer sa carrière, son interprétation de Capricorne et ses projets à venir…



Entretien avec Andy Serkis

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Après vos études aux beaux-arts, vous êtes devenu peintre, vous avez construit des décors, mis en scène des pièces, et triomphé au théâtre. Au cinéma, vous avez été un des pionniers de l’interprétation de personnages via le système de capture de performance capture, c qui vous a permis de devenir un inoubliable Gollum dans la trilogie du « Seigneur des Anneaux », et un « King Kong » tout aussi impressionnant pour Peter Jackson. Quand vous songez à ces nombreuses activités artistiques, quelles sont celles dont vous êtes le plus fier ?

Mon travail avec Peter Jackson est tout en haut de la liste, parce que , d’une certaine manière, il est arrivé un peu comme un accident, un hasard heureux dans ma vie. Je suis persuadé que nous sommes tous tributaires de petits évènements imprévisibles, qui peuvent avoir des conséquences majeures. D’une manière générale, je dirais que je fais toujours confiance à l’instant présent, et au destin, car j’ai déjà eu l’occasion d’en bénéficier plusieurs fois. Jouer les personnages de Gollum et de King Kong m’a permis non seulement de développer ma créativité d’acteur, mais aussi d’expérimenter d’autres manières de réaliser un film, qui ouvrent des perspectives fascinantes pour le futur du cinéma. Je crois que c’était une période très importante de ma vie, pendant laquelle nous essayions de transposer un processus tout à fait organique – le jeu d’un acteur – et de l’appliquer à la 3D grâce à une technologie révolutionnaire. Heureusement, Peter Jackson a du cœur, et sait que ce qui est le plus important, ce sont les émotions qu’expriment un personnage. Il ne souhaitait pas se borner à repousser les limites de la technologie ; il voulait repousser les limites de la transposition de la performance d’un acteur pour créer le personnage le plus saisissant qui soit. J’éprouve une immense fierté pour le travail que nous avons accompli en créant Gollum, puis King Kong. Mais j’ai également des souvenirs formidables de pièces de théâtre que j’ai interprétées. J’ai joué le rôle de Iago dans un superbe Othello mis en scène par Braham Murray en 2002. Ce qui est formidable quand on joue ce rôle, c’est que le public vous aime et en même temps se reproche d’éprouver de la sympathie pour un tel individu ! (rires) J’ai gardé aussi un bon souvenir d’un personnage qui s’appelait « Dog Boy », que j’ai incarné en 1992 dans une pièce de Brian de Angelis intitulée Hush. « Dog Boy » est un schizophrène qui a tué son chien. Il fait irruption dans la maison d’un couple de la classe moyenne et essaie de se rendre sympathique en étant docile et gentil, car dans sa tête, il est devenu son chien. Mais il devient rapidement menaçant et fini par les garder en otage. La pièce montre comment ce couple réagit à cette situation. C’était un rôle captivant, dans lequel je devais m’impliquer profondément…

Peter Jackson vous avait-il vu jouer ce rôle qui avait été salué par des critiques enthousiastes ? Car Gollum est lui aussi schizophrénique, partagé entre deux personnalités, l’une positive et aimable, et l’autre terrible et agressive…

Non, Peter n’a pas vu la pièce ! Mais comme vous le dites, c’est très étrange, car c’est un peu comme si je m’étais préparé au rôle de Gollum dix ans plus tôt ! Encore un hasard…



Qu’est-ce qui vous motive le plus à ce stade de votre carrière ?

La réalisation. C’est devenu mon but numéro un, car c’est en faisant cela que je peux satisfaire pleinement tous mes besoins créatifs.

Grâce à la capture de performance, vous avez été métamorphosé en créature souffreteuse et en gorille géant. Avez-vous le sentiment qu’il existe un lien, une sorte d’héritage artistique entre vous et les grands acteurs du cinéma fantastique qui ont dû se grimer pour devenir des créatures ? Nous pensons à des acteurs comme Lon Chaney, Boris Karloff, Vincent Price, Christopher Lee…

Absolument ! J’ai vraiment le sentiment de m’inscrire dans une continuité de leur travail, de cet amour de la création d’un personnage qui vous pousse à aller jusqu’au bout d’une transformation extrême. Je me sens une affinité avec ces grands acteurs dont les rôles nous ont tellement touchés. Et je ressens la même chose vis à vis de John Hurt dans Elephant Man. Il a réussi une composition absolument bouleversante. Bien sûr, je suis aussi ému par le jeu d’acteurs qui n’ont pas recours à une métamorphose physique, mais qui réussissent cependant à devenir des êtres complètement différents. Je me souviens avoir été fasciné par la prestation de John Millis dans La fille de Ryan de David Lean, et par de nombreuses composition de votre compatriote Isabelle Huppert. Quelle grande actrice ! Elle réussit à faire passer des choses très profondes et très subtiles avec une simplicité confondante…

Quel est le plus grand plaisir que l’on ressent quand on joue « derrière un masque » si j’ose dire ? Que ce soit grimé, ou équipé d’un costume de capture de performance…

Je dirais que plus un personnage est éloigné de moi, plus j’éprouve de plaisir à l’interpréter. J’ai été particulièrement gâté à ce point de vue avec Gollum et King Kong, bien sûr ! (rires) Que je sois dissimulé, comme vous le dites, ou pas, cet éloignement me permet de jouer comme je l’aime, c’est à dire en « amplifiant la réalité ». Je préfère cette approche à un jeu trop réaliste qui peut devenir parfois un peu ennuyeux pour les spectateurs. Je crois qu’utiliser des artifices est une meilleure manière d’exprimer la réalité !

Votre performance de méchant dans « Cœur D’encre » est très savoureuse. On sent que Capricorne jubile en se comportant comme un tyran. Comment vous êtes-vous préparé à jouer ce personnage dont le cœur est aussi noir que de l’encre ?

La première fois que j’ai lu le script, je me suis dit que le plus délicat allait être de trouver le juste équilibre entre l’humour du texte et le côté terrifiant et dangereux du personnage de Capricorne. Il fallait que je sache jusqu’où je pouvais aller dans les limites d’un film destiné à tous les publics. Ian Softley, notre réalisateur, m’a conseillé de me fier à la réalité de chaque situation. C’était un bon conseil, car cela m’a permis d’ancrer mon interprétation de scène en scène, et d’éviter certains clichés des contes fantastiques. J’ai tenu compte du fait que Capricorne a souffert auparavant, lorsqu’il était un être sans importance, méprisé, repoussé par les puissants. Depuis qu’il est passé du livre Cœur d’encre, dont il est l’un des personnages, dans le monde réel, grâce au pouvoir magique d’un lecteur, il jubile d’être devenu le chef de toute une armée de soldats issus eux aussi du livre. Il souffre de terribles illusions de grandeur alors qu’il n’a aucun don exceptionnel, aucune qualité particulière. Il s’est juste trouvé là au bon endroit et au bon moment, ce qui est une des caractéristiques de beaucoup de leaders fascistes devenus dictateurs, comme Hitler et Mussolini. Alors que de bons dirigeants vont se servir du pouvoir pour en faire plus, pour être au service des autres, son attitude est à l’inverse : il veut en faire le moins possible et en profiter lui-même le plus possible !

D’après vous, qu’est-ce qui fait un « bon » méchant ? Quelles sont les caractéristiques qui le rendent attachant, d’une certaine manière ?

Il y a plusieurs façons d’interpréter un méchant. Certains acteurs choisissent d’en faire des êtres totalement mauvais, et ne jouent que sur ce registre, ce qui peut très bien fonctionner, et donner des résultats très efficaces à l’écran. Mais en ce qui concerne Capricorne, j’ai pensé qu’il était important se sentir sa paranoïa, et sa peur d’être chassé du monde réel pour retourner dans le livre. C’est cela qui alimente ses craintes et la plupart de ses décisions. Pour ma part je ne crois pas au concept du « mal à l’état pur ». Je crois que les actes les plus horribles que les gens peuvent accomplir sont toujours le produit des époques et des circonstances. Les pires monstres sont toujours convaincus qu’ils ont eu raison d’agir comme ils l’ont fait. Ils échafaudent toujours une théorie qui leur permet de justifier tous leurs actes, même les plus ignobles. Et ils sont persuadés qu’en s’expliquant, tout le monde va les comprendre et les soutenir ! Au fond, ce sont surtout des gens qui sont incapables de se mettre à la place des autres, d’imaginer leurs souffrances. Qui ne ressentent aucune empathie. Qui croient détenir la vérité.

Avez-vous lu le livre pour vous aider à composer le personnage de Capricorne ?

J’ai lu le livre pour connaître le passé de mon personnage, mais pas pour composer mon interprétation, parce qu’un livre et le script qui en est tiré peuvent être très différents, à la fois dans leur tonalité, mais aussi dans la manière dont certains évènements sont présentés. Si vous travaillez à partir du livre, vous pouvez même commettre des erreurs et aller dans la mauvaise direction. Il faut inventer le personnage à partir du script, et trouver dans les scènes les détails qui vont vous permettre de l’enrichir, de lui donner de la profondeur, de la richesse.

Avez-vous eu l’occasion de parler de votre rôle avec Cornelia Funke, l’auteur de « Cœur d’encre » ?

C’est drôle que vous me posiez cette question, car j’en parlais justement avec elle tout à l’heure : pendant le tournage, nous n’avons cessé de nous rater à quelques minutes près, pratiquement à chaque fois qu’elle nous rendait visite ! De ce fait, nous n’avons pas eu l’occasion de parler en détail de Capricorne, mais je pense que si Cornelia avait été épouvantée par mon interprétation, elle me l’aurait fait savoir ! (rires)

Vous avez déclaré que vous vous étiez inspiré du comportement d’Hitler pour incarner Capricorne, mais dans le Showbusiness, certaines personnes peuvent se comporter de manière extrêmement méchante…Vous êtes-vous inspiré ne serait-ce que partiellement de personnes que vous avez pu côtoyer vous-même dans ce métier ?

Je ne peux pas citer de nom, mais il y a assurément un acteur avec lequel j’ai joué, et qui pourrait incarner Capricorne sans que ce soit un rôle de composition ! (rires) Oui, vous avez raison, il peut arriver que l’on croise des gens horribles dans ce métier, mais heureusement, je dois dire que c’est très rare, et que les rapports entre acteurs sont plutôt agréables et chaleureux. Pour revenir à ce que vous disiez, je me suis effectivement inspiré d’Hitler pour travailler les attitudes de Capricorne. J’ai notamment vu des documents d’époque sur sa vie quotidienne, et les films de propagande de Leni Riefenstahl comme Le triomphe de la volonté et Les dieux du stade, qui sont des odes au nazisme. C’était intéressant de voir comment s’était organisé le règne de terreur d’Hitler, et comment il voulait gérer son image. Il voulait être vu dans le décor grandiose de son château dans les montagnes d’Autriche, être entouré de tout un décorum qui le mettait en valeur. C’était important d’évoquer tout cela. Cœur d’encre est un film tous publics qui n’hésite pas à montrer des ambiances vraiment inquiétantes et des personnages effrayants. Je crois que c’est tout à son honneur. Je trouve que Ian Softley a fait un beau travail. L’histoire n’est pas « enrobée de sucre » ni adoucie parce que le film est l’adaptation d’un best seller de la littérature destinée à la jeunesse. C’est bien que ce récit de Fantasy soit traité avec réalisme.

Quels sont vos méchants de cinéma préférés ?

Le Joker interprété par Heath Ledger dans The Dark Knight, et le personnage de Jack Nicholson dans Shining.

Connaissiez-vous les livres de Cornelia Funke avant que l’on vous propose ce projet ?

Non, et je le regrette, car c’est une romancière de grand talent. J’ai lu le roman original et il m’a beaucoup plu. Cornelia est une femme très sympathique, qui déborde d’énergie et d’imagination.

Avez-vous tourné des scènes qui décrivent le passé de Capricorne, et qui ont été coupées au montage ?

Oui. Nous avons tourné les scènes qui montrent son arrivée dans le monde réel, ses réactions à ce moment-là, et la manière dont il va peu à peu assembler ses légions et terroriser la région. On voyait le moment où un barbier lui rasait la tête, et où Capricorne choisissait sa tenue du monde moderne. J’ai appris qu’Adolf Hitler avait engagé un acteur pour lui donner des cours de prononciation et de gestuelle, et l’aider à trouver les attitudes qui lui permettraient de captiver le public pendant ses longs discours. Je pense que Capricorne a certainement eu cette idée-là, lui aussi !

Quelles sont les scènes que vous avez particulièrement aimé jouer dans « Cœur d’encre » ?

J’aime beaucoup la scène où Capricorne dévoile ses plans et explique comment il va imposer son règne au monde entier. Ce qui est intéressant avec les personnages de dictateurs, c’est qu’ils sont complètement schizophrènes. Il peuvent se servir de leur charisme pour être charmants, mais d’une seconde à l’autre, dès que quelque chose s’oppose à leur volonté, il peuvent se transformer en monstres de brutalité. J’aime aussi le moment où Meggie est forcée à lire pour la première fois. Et où le personnage de Fenoglio, incarné par Jim Broadbent, essaie de l’aider à combattre Capricorne.

Est-ce c’est agréable de jouer quelqu’un qui s’abandonne à ses mauvais instincts ?

(rires) Oui, c’est plaisant d’être le roi ! (rires) Ce qui amusant quand on joue un personnage de ce genre, un dictateur, c’est que cela ne nécessite presque aucun effort, parce qu’il y a toujours des gens autour de vous pour faire les choses à votre place ! (rires) J’ai adoré avoir une armée de gens autour de moi, qui répondaient à mes moindres ordres ! (rires) Je peux vous dire que chez moi, ce n’est vraiment pas comme ça que les choses se passent. Je m’occupe de coucher les enfants, de les réveiller le matin et de leur préparer le petit déjeuner, puis de les conduire à l’école ! (rires)

Avez-vous choisi de jouer ce personnage parce que vous saviez que vos enfants auraient la possibilité de voir ce film ? Ce doit être une motivation importante pour un acteur qui est aussi un père…

Oui, je pense qu’être père de jeunes enfants vous pousse à vous intéresser aux films fantastiques destinés à tous les publics. Mais au-delà de cette motivation personnelle, ce qui compte d’abord, c’est de choisir les bons projets. Je savais que le résultat final serait bon parce que j’avais confiance en Ian Softley, dont je connaissais la sensibilité et le talent, et que j’avais apprécié la qualité de l’histoire écrite par Cornelia Funke. Je n’aurais jamais choisi un film uniquement pour faire plaisir à mes enfants. D’autant plus que chaque tournage signifie qu’il faut que je m’absente pendant une assez longue période, ce qui est pénible pour ma famille. Mes enfants sont jeunes et il est important que je sois le plus souvent possible à leurs côtés pendant cette période cruciale de leur développement. Je choisis donc les projets auxquels je participe avec beaucoup d’attention.

Comment ont-ils réagi à vos rôles, jusqu’à présent ?

Ils m’ont demandé « Papa, pourquoi joues-tu toujours des personnages horribles ? ». Ce à quoi j’ai répondu, en me penchant vers eux, avec l’air mauvais « Vous savez bien pourquoi, non ? » ! (rires)

Pourquoi avez-vous eu envie de vous raser le crâne pour interpréter Capricorne ?

Je pense que c’était le moyen le plus simple d’exprimer le fait qu’il veut couper tous les liens entre l’époque médiévale décrite dans le livre dont il est issu et le monde réel moderne dans lequel il se trouve à présent. Capricorne pense qu’il a l’air particulièrement élégant coiffé et vêtu ainsi. Vous avez sans doute remarqué que les gens les plus branchés se rasent souvent la tête de nos jours ! (rires)

Quels sont les souvenirs les plus amusants que vous avez gardés de ce tournage ?

Je me souviens d’une scène qui a été coupée au montage, et qui montrait l’arrivée de l’ombre de Capricorne dans le monde réel, juste avant qu’il ne se matérialise complètement. La scène devait être tournée avec de la vraie fumée sur le plateau, puis être complétée ultérieurement avec des effets numériques. La fumée était sensée ramper sur le sol, puis remonter le long du mur. Evidemment, il est très difficile de diriger de la fumée avec une telle précision. Il a fallu tourner de nombreuses prises, et comme le plateau était complètement enfumé après, il fallait tout aérer à chaque essai, et attendre un temps fou que tout cela se dissipe ! C’était horrible !

Vous êtes extrêmement populaire parmi les fans de fantastique et de Science-Fiction. Est-ce que cela vous fait plaisir d’être considéré comme un acteur « culte »? Ce doit être quelquefois un fardeau, aussi…

Personnellement, je ne me considère pas comme un acteur lié à un genre particulier, parce que je joue dans des films très différents les uns des autres. Mais il est vrai que je suis plus particulièrement connu pour mes rôles dans Le seigneur des anneaux et King Kong. En tous cas, je n’ai jamais eu de soucis à cause des fans de Fantastique et de SF : ils sont charmants avec moi !

Vous demande-t’on souvent de prendre la voix de Gollum ?

Oui, c’est vrai ! (rires) J’admets que les gens me le demandent assez souvent. (rires)

Ou puisez-vous l’intensité que vous projetez dans vos personnages ?

Dans ma passion pour le personnage que j’incarne. Je me lance à corps perdu dans cette interprétation. J’essaie de trouver quelles sont les souffrances du personnage, ses frustrations, ses aspirations.

Pensez-vous que les techniques de fond bleu et de captures de performance vont changer à jamais le cinéma ?

Ce ne sont que des outils en plus. Des possibilités offertes aux cinéastes. De plus en plus de films utilisent la 3D, mais dans bien des cas, ils l’utilisent mal, parce que les images de synthèse prennent le pas sur l’histoire et sur les personnages. Et quand cela arrive, le film ne tient plus debout, et le résultat est catastrophique. Heureusement, il me semble que beaucoup de gens s’en rendent comptent désormais, à la fois dans le public et parmi les réalisateurs. L’effet de nouveauté de la 3D s’est estompé, et je crois que les progrès réalisés ces dernières années vont dans le bon sens. On arrive à créer des images 3D plus réalistes, que l’on peut utiliser de manière minimale et discrète, sans que cela chamboule tout le film. L’autre aspect de ces techniques, c’est bien sûr la possibilité d’utiliser un mode de narration nouveau, dans lequel les acteurs agissent grâce à des techniques très éloignées de celles du cinéma traditionnel, grâce à la capture de performance. On en a déjà eu un exemple dans Beowulf, même si personnellement, je ne suis pas fou du résultat final. Cela ouvre de vastes perspectives, aussi bien pour les films du futur que pour les jeux vidéo à venir. Je travaille beaucoup sur ces techniques, en supervisant les enregistrements de captures de mouvements pour des jeux vidéo. Mes enfants, par exemple, ont tendance à passer plus de temps à jouer avec leur console qu’à regarder des films. C’est un phénomène dont l’industrie du cinéma doit absolument tenir compte. Je crois que les acteurs vont devoir se familiariser avec ces techniques nouvelles, parce qu’elles permettront un jour de réaliser des divertissements interactifs qui auront la richesse dramatique d’un film, et l’interactivité d’un jeu.



C’était très sympathique de vous voir jouer Lumpy le cuistot râleur dans « King Kong », et Alley, l’assistant de Nikola Tesla dans « Le prestige ». Quels sont les souvenirs que vous gardez de ces deux rôles ?

Je me suis bien amusé en jouant Lumpy, particulièrement pendant la scène où il se trouve face à face avec Kong, sur l’énorme tronc d’arbre qui enjambe le ravin. C’était drôle de jouer les deux personnages à la fois ! Et la mort de Lumpy était assez cool à tourner et à voir, une fois terminée. Cette séquence a traumatisé mon fils à jamais ! Il était assez jeune quand il a vu le film, et il m’a dit « Papa, ça faisait quoi d’être avalé par ce ver géant ? » (rires). J’ai été très content de tourner dans Le prestige. C’est un très beau film. Et c’était un plaisir de travailler avec David Bowie. Il était charmant et très drôle quand nous travaillions ensemble. Et Christopher Nolan est un réalisateur de grand talent.

Avez-vous déjà commencé à parler avec Guillermo del Toro et Peter Jackson des deux films qui vont être tirés de « Bilbo le Hobbit » ? Gollum y joue un rôle encore plus important que dans la trilogie du Seigneur des anneaux…

Oui, nous nous sommes rencontrés. J’en ai parlé une fois avec Guillermo, puis à une autre occasion avec Peter. Il s’agissait juste de premiers contacts, de discussions basiques. Guillermo et Peter en sont encore aux toutes premières étapes du projet. Je ne sais rien de précis sur le film, en dehors du fait qu’ils feront appel à moi dans quelques temps, quand ils auront avancé.

Pensez-vous que l’aspect de Gollum sera légèrement différent de celui que l’on a vu dans Le seigneur des anneaux ? L’histoire de Bilbo le Hobbit se passe bien avant ces évènements-là…

Dans Le retour du roi, on a pu voir comment Smeagol trouve l’anneau, tue son ami pour le posséder, puis se cache pour contempler sa trouvaille, et se métamorphose peu à peu. Donc, j’imagine qu’il aura à peu près le même aspect qu’à ce point-là de l’histoire.

Que pouvez-vous nous dire des deux films que vous vous apprêtez à réaliser, « Dark Blue Rising » et « Freezing Time » ?

Ces deux projets sont actuellement en cours de développement. J’essaie de voir comment nous pourrons organiser leur tournage, et de faire coïncider toute cela avec le tournage de Tintin, qui devrait débuter bientôt. Dark Blue Rising est un thriller psychologique qui se déroule à Budapest et Freezing Time raconte l’histoire d’Eadweard Muybridge, le photographe qui a inventé le principe du cinéma en décomposant le mouvement, et dont l’existence a été marquée par des évènements dramatiques (NDLR : Eadweard Muybridge avait tué l’amant de sa femme et avait été acquitté après un procès retentissant). Je suis très impatient de commencer à travailler sur ces films. Ce sera une nouvelle étape de ma carrière…

[Retrouvez notre entretien avec Andy Serkis à propos de Tintin]


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