Imax : L’écran fantastiquement…géant !
Article 3-D Relief du Vendredi 29 Mai 2009

Par Pierre-Eric Salard

L'année 2007 marque une première à Hollywood : le réalisateur Chris Nolan décide de tourner quatre scènes de son Dark Knight directement au format IMAX ! Jusqu'en 2008, les salles IMAX diffusaient soit des documentaires, soit des films traditionnels convertis au célèbre format extra-large. L'exploitation du second volet des aventures de Batman dans le parc américain de salles IMAX a rencontré un large succès, confirmant le désir des spectateurs d'apprécier le cinéma dans un format « plus grand que nature ». Dès lors, les annonces se sont succédées. De Shrek 4 à Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé, les prochains blockbusters bénéficieront d'une sortie simultanée dans les salles traditionnelles et les complexes IMAX. En France, les salles de projection du parc du Futuroscope proposent également tous les formats IMAX créés à ce jour. Il aura fallu pourtant près de quarante ans pour que le système s'impose au grand public...

En quête de largeur

Depuis les origines du septième art, les cinéastes ont toujours tenté de dépasser les limites du 35 mm, le format standard. En 1927, le réalisateur Abel Gance tourne son Napoléon pour une exploitation sur trois écrans. La même année, le français Henri Chrétien invente l'Hypergonar, une lentille cylindrique placée devant l'objectif d'une caméra. L'idée consiste à filmer à travers ce prisme, qui comprime un champ de vision large des côtés vers le centre en créant ce que l'on appelle une anamorphose, c’est à dire une image déformée, qui peut être reconstituée pour être vue correctement. Les images sont alors « étirées » en hauteur. À la projection, un anamorphoseur inversé, fixé à l'objectif du projecteur, rend toute sa largeur à l'image. La grande astuce du procédé, c’est qu’il permet d’obtenir une image panoramique à partir d'une pellicule 35 mm classique. Dans les années 1950, la popularité croissante de la télévision vide les salles et pousse les studios 20th Century Fox à acheter le brevet de Henri Chrétien. L'exploitation de l'anamorphose au cinéma débute alors en 1953 sous l'appellation de Cinémascope. Le premier film tourné dans ce format est La Tunique d'Henry Koster. Permettant de mettre en valeur de vastes paysages, le Cinémascope lance la mode de l'écran large. De nombreux procédés sont lancés peu après, avec plus ou moins de succès. On peut citer notamment le format ToddAO (film 70 mm à défilement vertical) et le Cinérama (trois prises de vue diffusées sur un écran panoramique). Lors de l'Exposition Universelle de Montréal en 1967, certains films sont projetés sur plusieurs écrans simultanément, dont In the Labyrinth du réalisateur Roman Kroitor. Devant le succès rencontré par ces techniques novatrices, Kroitor s'associe avec trois cinéastes et entrepreneurs, Graeme Ferguson, Willam C. Shaw et Robert Kerr. Ils fondent la société Multiscreen Corporation, qui deviendra ultérieurement l'IMAX Corporation.

Haute résolution

Après avoir étudié les difficultés techniques engendrées par les systèmes de projection multiples, très encombrants (ce fut une des raisons de la disparition du Cinerama), le quatuor jette les bases du système Multivision. Utilisant un projecteur unique mais très puissant (dont l’ampoule dégage une puissance lumineuse de 15 000 watts !), ce système fait défiler une pellicule 70mm horizontalement - et non verticalement comme à l'inaccoutumée – et utilise la surface équivalente à trois images 70mm classiques. Afin de laisser un maximum de place à l'image, une pellicule IMAX ne comporte pas de piste sonore : elle est reportée sur une bande magnétique 35 mm, synchronisée avec le film. Les films tournés en Imax nécessitent cependant des caméras aux contraintes pour le moins imposantes : à cause du défilement horizontale, les pellicules sont extrêmement longues ! L'autonomie des caméras n'est donc pas très élevée. Mais le format IMAX propose une résolution d'image dix fois supérieure au 35 mm. L'expérience visuelle est alors particulièrement immersive ! Les images remplissent totalement la vision périphérique des spectateurs, qui ont l'impression d'être littéralement projetés dans le film...



Vision panoramique

La technologie fut introduite auprès du grand public lors de l'Exposition Universelle d'Osaka, en 1970, grâce au film Tiger Child. Mais il faut attendre l'année suivante pour que la première salle IMAX permanente soit inaugurée à Toronto. Plusieurs variantes de la technologie sont ensuite créées, dont l'Omnimax en 1973 (renommé depuis IMAX DOME). Cette technique nécessite l'utilisation d'une lentille panoramique lors des prises de vues, permettant d'englober un champ de vision de 180 degrés. Le film est ensuite projeté sur un écran hémisphérique, invitant les spectateurs au sein même de l'image. Une autre variante attire les faveurs du public depuis son apparition en 1986 : l'IMAX 3D. Afin de créer l'illusion du relief, ce procédé utilise deux caméras, représentant l'oeil gauche et l'oeil droite. Elle sont séparées par une distance équivalente à celle entre nos deux yeux et enregistrent les images sur deux pellicules. Projetées simultanément, ces dernières donnent l'impression de voir les images en trois dimensions grâce à deux techniques différentes - nécessitant le port de lunettes dans les deux cas. La polarisation utilise des lunettes à cristaux liquides : l'oeil gauche ne perçoit que l'image de la lentille gauche, et inversement. L'autre procédé consiste à porter des verres d'obturation LCD. Ils sont synchronisés avec le projecteur, qui alterne rapidement l'affichage des images de gauche et de droite...

Du documentaire au cinéma

Près de trois cents salles IMAX ont été ouvertes depuis 1971, en grande majorité sur le continent nord-américain. La moitié de ces salles se trouvent au sein de centres éducatifs et culturels Mais cette situation n'est pas le fruit du hasard : jusqu'à l'aube du nouveau millénaire, le réseau IMAX diffusait uniquement des documentaires. Abordant des problématiques scientifiques ou les secrets de la nature, ces oeuvres ont remporté l'adhésion du public. Certains documentaires ont même nécessité d'envoyer les imposantes caméras IMAX dans l'espace (Destiny in Space, 1994) ou sous les mers (The Living Sea, 1995) ! Un sacré exploit... Les années 1990 voient également la création d'une innovation sonore : la bande magnétique 35 mm est remplacée par un enregistrement numérique. Au cours de cette décennie, plusieurs cinéastes ont abordé la réalisation au format extra-large. En 1995, Jean-Jacques Annaud réalisa avec Les Ailes du courage le premier film de fiction en IMAX. Le concepteur sonore de la saga Star Wars et de Wall-E, Ben Burtt, s'attela en 1996 à la création de Special Effects : anything can happen, un documentaire dévoilant les secrets des effets spéciaux. Pour les besoins du film, Industrial Light & Magic tourna à nouveau, mais avec des caméras IMAX, la célèbre scène d'ouverture de Star Wars : Un Nouvel Espoir ! La création de cette scène était elle-même filmée au format IMAX pour illustrer le documentaire : la boucle est bouclée... L'année suivante, le format est enfin récompensé par l'industrie : il reçoit un Oscar technique pour ses innovations visuelles et sonores ! Il faut cependant attendre 2002 pour que la mariage entre le cinéma et l'IMAX soit consommé...

A la conquête d'Hollywood

Pour s'implanter dans l'industrie cinématographique, l'Imax Corporation lance l'IMAX DMR (Digital Re-mastering). Cette nouvelle technique de post-production permet de retravailler numériquement l'image d'un film en 35mm afin de la transposer en haute résolution. Sur une pellicule classique, l'image est comprise dans un support souple recouvert d'une émulsion. Lorsqu'elle est projetée sur un écran IMAX, la qualité de cette image brute est proche d'une chaîne de télévision dont la réception serait mauvaise ! Le logiciel propriétaire d'IMAX DMR analyse mathématiquement chaque image et en extrait les éléments importants. La technique supprime le grain de l'image et lui offre une qualité visuelle cristalline. Les films peuvent donc être « gonflés » en IMAX et bénéficier d'une image incomparable. Le premier film à utiliser cette technologie est Apollo 13 de Ron Howard, en septembre 2002. The Matrix Revolutions devient en novembre 2003 la première oeuvre hollywoodienne à sortir simultanément dans le réseau IMAX et les circuits classiques. L'année suivante, Le Pôle Express est entièrement transposé en IMAX 3D. En juin 2006, Superman Returns devient le premier film traditionnel dont les scènes les plus spectaculaires sont converties en relief. Ces dernières années, de nombreux films ont bénéficié d'une sortie simultanée en IMAX : 300, Batman Begins, Spider-Man 3, Transformers, Je suis une Légende ou encore Kung Fu Panda... La liste s'allonge chaque année ! Alors que la mode du cinéma numérique en relief prend actuellement de l'importance, la sortie de Beowulf en IMAX 3D, en novembre 2007, fait forte impression.



Le relief du futur

Une nouvelle étape est franchie en 2008, lorsque quatre scènes de The Dark Knight sont tournées avec une caméra IMAX. Alors que le procédé IMAX DMR induit une perte de qualité, ces scènes offrent un confort visuel incomparable. Suite au succès de ce film, Hollywood se tourne lentement vers le tournage en IMAX. Les studios Paramount ont annoncé le tournage de plusieurs scènes clés de Transformers 2 en IMAX. « L'extraordinaire niveau de détails capté par la caméra IMAX nous offre un énorme potentiel », explique le réalisateur Michael Bay. « Ce format propulsera notre histoire vers de nouveaux sommets ! Je suis très excité à l'idée de partager l'expérience IMAX avec les fans de Transformers du monde entier... » Les studios Warner ont annoncé, en septembre 2008, que la copie IMAX d'Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé bénéficiera de 25 minutes utilisant le procédé IMAX 3D, dont le prologue et l'épique scène finale. IMAX Corporation a également signé un accord avec Dreamworks Animation à propos de la diffusion en relief de Monsters vs. Aliens, How To Train Your Dragon et Shrek 4. Ces films d'animation utiliseront les nouveaux projecteurs IMAX entièrement numériques : adieu les pellicules encombrantes ! « La croissance du réseau IMAX, additionné aux avantages économiques de notre nouveau système numérique, intéresse l'ensemble des studios », se félicite Richard L. Gelfond, co-président d'Imax Corporation. « A l'avenir, les spectateurs vont pouvoir profiter de notre spectaculaire format pour découvrir leurs films préférés d'une manière inédite ! » A l'approche de ses quarante ans, l'IMAX est-il le format du futur ? Encore faudrait-il que le parc français ne se limite pas à une demi-douzaine de salles...

Dont une bonne partie se trouve au Futuroscope, près de Poitiers – soit le plus grand rassemblement au monde de salles Imax !

Le Kinémax : une salle de 440 fauteuils dotée d'un écran plat géant de près de 600m², où est diffusé en 2009 un film de 25 minutes : Expédition Nil Bleu.
Le solido : conjuguant les technologies Omnimax et Imax 3D, cette salle de projection propose un écran hémisphérique de 900 m². 2009 : projection de Sous les Mers du Monde 3D.
L'Omnimax : Projection du film Dinosaures en 2009.
L'Imax 3D : Ecran plat de 540 m², diffusion des Astromouches.
Le Tapis Magique : Deux écrans IMAX séparés par un plancher de verre. Devant les 250 spectateurs se trouve un écran de 672 m². Sous leurs pieds, un autre de 748 m². Le spectateur « flotte » dans l'image... En 2009, diffusion des Voyageurs du Ciel et de la Mer.
Signalons également la réouverture en décembre 2009 de la sixième salle IMAX du Futuroscope, équipée en 4D (avec un simulateur). Elle accueillera l'attraction "Arthur l'Aventure 4D : Bienvenue chez les Minimoys".

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