Grâce à Carlotta Films, nous pouvons redécouvrir - à partir du 1er juin prochain - l’un des films les plus personnels et les plus nostalgiques de Joe Dante, le réalisateur de nombreux films culte comme Gremlins, L’aventure intérieure ou Small Soldiers. Dans Panic sur Florida Beach (Titre original : Matinee, référence aux séances de cinéma de l’après-midi, destinées aux enfants), qu’il a tourné en 1993, Dante a reconstitué son adolescence de fan de films de monstres, en établissant un astucieux parallèle entre les ambiances angoissantes des films fantastiques de série B des sixties, et la peur d’une apocalypse nucléaire bien réelle qui aurait pu être provoquée par la crise des missiles de Cuba, en octobre 1962.

Par Pascal Pinteau



Tandis que le Président Kennedy ordonnait aux soviétiques de retirer leurs armes installées secrètement à Cuba et pointées sur les USA, le monde retenait son souffle, et plongeait allégrement dans la psychose atomique. Comme pendant toutes les grandes crises (ce fut déjà le cas dans les années 30, après le krach boursier du fameux « jeudi noir » de 1929) le cinéma fantastique était florissant depuis les débuts de la guerre froide, dans les années 50. En 1960, en plus des productions des grands studios, on vit apparaître de nombreux films indépendants à très petit budget, qui visaient surtout le public populaire des petites villes et des cinémas en Drive-In. Si le roi des films d’horreur fauchés (mais quelquefois très réussis) fut sans conteste Roger Corman, un autre cinéaste particulièrement astucieux tira lui aussi son épingle du jeu : William Castle. Sa spécialité consistait à pimenter la présentation de ses films en installant des dispositifs d’effets spéciaux dans la salle, pour faire sursauter les spectateurs à des moments bien précis du film. Le bouche à oreille enthousiaste qui était généré par ces trucages permettait à Castle d’amortir ses coûts de tournage, et de prospérer dans ce circuit de cinéma parallèle, en marge des films des grands studios.

Joe Dante reconstitue formidablement cette époque, et cet univers disparu des films d’horreur à gimmicks, dans Panic à Florida Beach. L’action se déroule dans la ville de Key West, située à seulement 150 km des côtes cubaines. Alors que la crise des missiles atteint son paroxysme, tout le monde pense au pire... Au milieu de cette paranoïa, Gene Loomis, un adolescent solitaire, attend la venue du producteur de films d’épouvante Lawrence Woolsey, qui va présenter sa dernière création, Mant !: l’histoire d’un homme transformé en fourmi géante après une exposition aux ondes radioactives. Son slogan : « Mi-fourmi, Mi-homme, 100% Terreur ! ». Projeté en « Atomo Vision » un des nouveaux procédés inventés par Woolsey, la présentation de Mant ! va provoquer bien plus d’événements qu’une simple séance de cinéma…



Tout en décrivant la vie d’une petite ville américaine des années 60, et les préoccupations de ses personnages ados et adultes,  Joe Dante réalise une oeuvre personnelle particulièrement attachante, au rythme nonchalant. Comme il l’explique dans l’excellent documentaire qui accompagne le film, ce sont ses magazines d’époque (tels « Famous Monsters » ou « Castle of Frankenstein »), ses posters et même ses propres dessins d’enfant que l’on voit dans la chambre du héros ado ! En cinéphile passionné, il rend un hommage amusé et sincère aux séries B du Fantastique et aux fameuses trouvailles de William Castle. John Goodman incarne parfaitement le clone de Castle, Lawrence Woolsey, mi-forain rusé, mi-cinéaste, mais 100% homme de spectacle ! Panic sur Florida Beach est une pépite qui recèle de nombreuses surprises, dont la toute première apparition de Naomi Watts au cinéma, dans un extrait de faux film parodiant les comédies Disney des années 60. Le clou du spectacle est bien sûr le savoureux Mant !, remarquable parodie des productions horrifiques de l’époque, qui bénéficie de la présence d’acteurs vétérans du cinéma de genre, de trucages très bien faits garantis sans images de synthèse, et de la supervision d’un certain Rick Baker. Un régal pour cinéphiles à découvrir en Blu-Ray (l’image HD est superbe) ou en DVD au plus vite !

Les suppléments de cette édition :

PARANOÏA EN FOURMI VISION (31 mn) Dans cet entretien exclusif, Joe Dante parle de ses influences cinématographiques et revient sur la genèse du film, au gré de nombreuses anecdotes personnelles.

"MANT! (L’HOMME-FOURMI)"  PRÉFACE DE JOE DANTE (6 mn) LE COURT-MÉTRAGE (1992 – Noir & Blanc – 16 mn) Nouveau master restauré en Haute Définition, supervisé par Joe Dante. Mant! (L’Homme-fourmi) est présenté dans sa version intégrale et en exclusivité mondiale !

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