THE AMAZING SPIDER-MAN : Entretien exclusif avec Avi Arad, producteur
Article Cinéma du Lundi 02 Juillet 2012

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Alors que SPIDER-MAN 1 & 2 ont été de grands succès, SPIDER-MAN 3, qui présentait trop de méchants et de récits parallèles, a été accueilli avec des réactions mitigées. Comment avez-vous essayé d’éviter cela en abordant ce reboot ? Et plus généralement, quelles sont les différences principales entre la première trilogie et le début de celle-ci ?

Je suis d’accord avec vous : le premier et le second SPIDER-MAN étaient formidables, tandis que le troisième manquait de clarté. Le premier racontait tout naturellement les origines du personnage. Le thème du second, c’était « Je n’ai plus envie d’être un justicier, c’est trop dur et cela me contraint à faire trop de sacrifices dans ma vie. » Et dans le troisième, nous avons introduit la notion du côté obscur du personnage, avec l’influence que Venom a sur lui. Pour ma part, je pense que les deux premiers tiers du troisième épisode fonctionnaient assez bien, et que la gestion des émotions des personnages était satisfaisante. En revanche, quand nous en sommes arrivés au dernier tiers de l’histoire, pour différentes raisons qui tiennent à la manière dont les films sont faits, nous avons voulu traiter plus de choses que nous ne pouvions en raconter de manière satisfaisante. Et quand vous travaillez sur un projet aussi énorme qu’un SPIDER-MAN, avec des centaines de personnes qui travaillent sur les scènes qui se tournent chaque jour avec la première et la seconde équipe, il est trop tard pour changer de cap quand vous vous apercevez de ce qui ne va pas à ce stade de la production du film...Compte tenu de cela, le merveilleux Sam Raimi a travaillé très dur pour faire en sorte que la narration du film soit la plus claire possible, mais certains aspects de l’histoire sont devenus trop extravagants, trop éloignés de ce qu’un personnage comme Spider-Man fait habituellement. Je pense notamment au combat final avec l’homme de sable et Venom. C’est en cela que la fin du film n’était pas pleinement satisfaisante, même si paradoxalement, SPIDER-MAN 3 est l’épisode de la saga qui a rapporté le plus d’argent au boxoffice ! Comme vous le savez sans doute, nous avons tenté de produire un SPIDER-MAN 4 parce que nous aimions beaucoup l’équipe formée par Sam, Tobey et Kirsten, mais plusieurs d’entre nous ont estimé que nous ne disposions pas d’une histoire assez forte et assez originale pour qu’elle devienne naturellement un nouvel épisode que nous aurions envie de voir. Dans ces cas-là, si vous n’êtes pas enthousiasmé par une histoire, il ne faut surtout pas se forcer à la produire…Mieux vaut écouter son instinct.

Jusqu’à quel point aviez-vous développé le projet SPIDER-MAN 4 avec Sam Raimi ?

Nous avons fait écrire quelques scripts. C’était un processus assez ingrat car le concept, selon moi, ne fonctionnait pas. Vouloir corriger cette histoire dont la base était bancale, c’était comme tenter de visser une vis avec un marteau…Les différents éléments du récit ne se mêlaient pas de manière harmonieuse les uns avec les autres. En fait, Sam se sentait tellement responsable de la destinée de cette série de films qu’il a essayé d’arranger les choses jusqu’au bout, ce qui est tout à son honneur. Mais heureusement, comme tout artiste de cinéma, il n’a pas envie de s’associer à un projet s’il constate qu’en fin de compte, il ne dispose pas d’une bonne histoire à raconter. Pendant qu’il menait cette démarche, comme le petit groupe dont je fais partie était persuadé que l’on ne pourrait pas faire aboutir cette histoire-là, nous avons commence à développer parallèlement cette notion de reboot. Mais même si SPIDER-MAN 4 avait abouti, il aurait été le dernier film de cette série-là, avec cette équipe.

Vous aviez envisagé que le Vautour soit le méchant de SPIDER-MAN 4, et qu’il soit incarné par John Malkovitch…

C’est exact. Mais nous ne sommes pas allés jusqu’à négocier un contrat avec John, qui était effectivement l’un des acteurs que nous avions envisagés pour jouer le rôle du vautour. Par bonheur, ce projet n’a pas abouti, ce dont j’étais soulagé parce qu’il ne coulait pas de source, et nous avons choisi de raconter une partie encore inédite de l’histoire de Spider-Man, ce qui était une formidable opportunité.

Alors que la première trilogie de SPIDER-MAN était inspirée par de nombreuses scènes tirées des comics, le sous-titre de ce reboot est « l’histoire qui n’avait jamais été racontée »…

Ce qui définit les jeunes gens, ce sont les 6 ou 7 premières années de leur vie. Et dans le cas de Peter, nous apprenons qu’il grandit dans un foyer de la classe moyenne supérieure, élevé par des parent aimants, qui prennent soin de bien le stimuler intellectuellement et culturellement. Vous verrez pourquoi dans le film. Un jour, ils doivent s’en aller et disent à leur fils qu’il s’agit d’un voyage d’affaires. Ils lui recommandent d’être bien sage pendant qu’ils le confient à sa tante et à son oncle. Peter leur dit qu’il veut partir avec eux, mais ses parents lui disent que ce n’est pas possible. Ils l’embrassent tendrement, s’en vont…et ne reviennent jamais. Et personne ne peut expliquer pourquoi à Peter. Il n’y a aucune trace nulle part, aucune preuve de leur passage, même en faisant des recherches avec tous les moyens de communication et d’information actuels. Même après que le temps ait passé, à chaque nouvel anniversaire, ou pendant les week ends, Peter ne peut s’empêcher d’espérer… Il se dit « Ils vont peut-être revenir. » L’espoir renaît à chaque fois que quelqu’un frappe à la porte ou que le téléphone sonne à un horaire inhabituel, mais Peter est toujours déçu…

N’avez-vous pas craint que cette situation entraîne le film un peu trop loin dans le mélodramatique ?

Justement, nous avons décidé de ne pas montrer ces scènes-là dans le film, car nous savions que Marc Webb et nos formidables acteurs pourraient faire passer tout cela autrement, de manière très subtile. Mais ce mystère, cette interrogation permanente dans l’esprit de Peter, qui se demande ce qu’il est advenu de ses parents, et qui se demande aussi qui il est, nous a donné l’opportunité d’ouvrir une porte et de présenter la vraie vie quotidienne de Peter Parker d’une nouvelle manière. Nous avons regardé maintes fois 500 Jours Ensemble, et nous avons particulièrement apprécié le ton nouveau et original du film de Marc Webb. Tout sonnait juste. Cela n’avait rien à voir avec un traitement de feuilleton romantique, dans l’esprit des Soap operas. Les relations entre les personnages semblaient spontanées et réelles. Nous avions besoin d’une vision neuve. C’était terriblement important pour nous. Et cette approche a constitué le point de départ émotionnel de notre projet , qui est le point de vue d’un enfant adopté. Tout le monde peut aisément comprendre ce que l’on ressent dans ce cas-là. La seconde nouveauté dans notre approche, c’est la personnalité de Peter, qui n’est plus la même que dans la trilogie précédente. Quand nous le découvrons, il n’est pas effacé, humble et docile. Peter est un garçon solitaire parce qu’il a choisi de l’être. Il est heureux, pas du tout morose. Il adore se plonger dans les ouvrages scientifiques, et faire ses propres expériences. Je connais beaucoup de jeunes gens comme cela..De plus, Peter est plutôt beau garçon, et il n’est ni un laissé pour compte, ni un jeune homme défavorisé. Il est déjà un héros, et non pas une victime. Si on le provoque, il ne se laisse pas faire. Et il ne laisse pas non plus les brutes de son lycée martyriser certains élèves. Ce thème des brutalités scolaires nous intéressait, car les persécutions que subissent certains enfants à l’école sont un cauchemar pour de nombreux parents. J’en ai été témoin personnellement, et j’ai pu constater que l’on a du mal à réaliser à quel point cela traumatise les parents et les enfants qui en sont victimes. C’est affreux…Nous voulions aborder ce thème, mais de manière positive. Quand je songe à Peter Parker, je me dis qu’il est l’ami que j’aurais voulu avoir à l’école, parce que nous avons beaucoup de choses en commun… (En 1965, quand il avait 17 ans, Avi Arad s’est engagé dans l’armée israélienne pour défendre son pays, et a passé 15 mois dans un hôpital après avoir été grièvement blessé lors de combats. NDLR). Peter est un garçon courageux, qui a déjà l’âme d’un héros. Et ce sont les leçons que va lui donner la vie qui vont faire évoluer cette inclinaison naturelle à être un type bien, et l’amener à se surpasser. Bien sûr, ces activités vont le priver de certaines opportunités, car étant un garçon issu d’un milieu modeste, avec de grandes capacités dans le domaine scientifique, il ne va pas suivre la trajectoire professionnelle qui était toute tracée pour lui. Il est d’ailleurs intéressant de noter que la plupart des grands inventeurs actuels dans le domaine de la science et de la haute technologie viennent de ce milieu-là.

La suite de cet entretien prochainement sur ESI !

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