PACIFIC RIM : Entretien exclusif avec Charlie Hunnam (Raleigh Becket) et Rinko Kikuchi (Mako Mori) - Dernière partie
Article Cinéma du Jeudi 27 Juin 2013

[Retrouvez la précédente partie de cet entretien]


Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Comment avez-vous trouvé le film, au niveau visuel ?

Charlie Hunnam :
Incroyablement spectaculaire. Vraiment bluffant. Personnellement, je dois dire que d’habitude, je ne suis pas fan des effets réalisés entièrement en images de synthèse. J’aime avoir le sentiment d’être immergé dans la réalité au cinéma. Bien souvent, je remarque que 5% des effets 3D paraissent artificiels et cela suffit à me faire « sortir du film », parce que soudain, je n’y crois plus, et je me rappelle que tout cela est truqué. Objectivement – même si faisant partie de l’équipe du film, je ne peux pas être entièrement objectif – je n’ai jamais eu cette impression en regardant PACIFIC RIM, et cela en dépit du fait que certains plans d’effets visuels n’étaient pas encore finalisés à 100%, mais seulement à 70%. Bien sûr, cette « suspension de l’incrédulité » que le film parvient à créer chez le spectateur est due en grande partie à la manière dont Guillermo a choisi de mettre en scène chaque action et de filmer chaque plan. Je n’ai jamais travaillé avec un réalisateur qui soit un tel maître des mouvements de caméra. Il a tout compris de la manière de raconter une histoire par le biais des images. Le moindre angle de prise de vue, le moindre cadre, le moindre déplacement de caméra ont une signification et aident à faire progresser le récit. C’est impressionnant. Par exemple, dans une scène où le personnage de Rinko se met vraiment en colère, il a pensé à baisser légèrement la caméra au moment où elle devient furieuse, afin de la filmer en contre-plongée et de lui donner ainsi une stature dominante. Sa mise en scène combinée à la performance de Rinko rend la scène encore plus efficace. J’ai énormément appris en observant la manière dont Guillermo travaille.

Rinko Kikuchi : Moi aussi. C’était un privilège et une chance de voir un tel maître du fantastique à l’œuvre !

Charlie, Raleigh Becket est-il cynique et un peu perdu quand nous le découvrons dans le film, ou a-t-il simplement perdu tout espoir à propos du sort de l’humanité ? A-t-il aussi ses propres démons à combattre ?

Charlie Hunnam :
Oui, Raleigh est tout cela à la fois. Vous savez, dans le monde de PACIFIC RIM, la société a été complètement chamboulée par les attaques des Kaijus. On en parle constamment dans les médias, et les pilotes des Jaegers qui partent les combattre deviennent par la force des choses des vedettes, des sortes de « rock stars ». Ils se retrouvent souvent sur les couvertures des journaux, car chacun sait qu’ils représentent l’élite de l’élite, et qu’il risquent leurs vies en allant toujours sur le front, au contact direct avec les Kaijus. Le public les considère comme des sauveurs, comme ceux qui vont peut-être éviter l’extinction de l’espèce humaine. Si certains pilotes se sont laissés griser par cette célébrité, ce n’est pas le cas de Raleigh. Je me sens d’ailleurs assez proche de lui à ce sujet, car même si je suis médiatisé en tant qu’acteur, je me fiche de la célébrité et de la richesse, car ce n’est pas cela qui me motive. Ce qui me passionne, c’est de raconter des histoires. Raleigh est un pur. Il s’est engagé pour combattre cette menace dès qu’il a vu les images de l’apparition de ces monstres à la télévision. Je pense que Travis Beachman et Guillermo ont certainement pensé à la réaction de tous ces jeunes américains et américaines qui se sont enrôlés dans l’armée quand les Etats-Unis ont subi l’attaque du 11 Septembre 2001. Raleigh, comme eux, est mû par le désir de protéger la population innocente, même au péril de sa vie. Au début, il est optimiste et persuadé que la stratégie de construction des Jaegers va permettre d’anéantir les monstres et de régler le problème. Mais il se passe un incident terrible qui le prive de la possibilité de faire partie des pilotes de l’alliance mondiale contre les Kaijus. Cela le rend amer, mais ce qui lui a fait le plus de mal, c’est la perte de son co-pilote, qui est mort au cours de la mission. Et dont il était très proche.

A la façon dont vous en parlez, on imagine qu’il s’agissait de son frère…

Charlie Hunnam :
Oui, c’est bien cela. Il est hanté par cette mort, et comme cela arrive très souvent chez les soldats qui ont survécu à une attaque alors que leurs camarades sont morts, ou chez les policiers qui patrouillent en tandem et dont l’un est tué, Raleigh éprouve un terrible sentiment de culpabilité. Il pense sans cesse « Pourquoi n’est-ce pas moi qui ai été tué ? Qu’est-ce que j’aurais pu faire pour le sauver ? » Raleigh est tourmenté, et réticent à l’idée de redevenir pilote à cause de ce sentiment de culpabilité, même si au fond de lui, il rêve de retourner au combat pour se rendre utile. Mais dans son état d’esprit actuel, il se sent brisé, et incapable de réaliser les mêmes prouesses qu’avant.

Retrouver confiance en lui est donc l’un des aspect de son évolution au cours du film ?

Charlie Hunnam :
Oui. Il faut qu’il arrive à se prouver à lui-même qu’il n’est pas encore un type lessivé, fini. Et qu’il est digne de se retrouver dans une position où il exerce à nouveau de grandes responsabilités.

Revenons à la mort de son frère pendant cette mission. Comme les esprits des 2 pilotes étaient liés par le système du pont neural au moment où elle est survenue, cela signifie-t-il que Raleigh a pu ressentir mentalement et physiquement la mort de son frère ?

Charlie Hunnam :
Oui, il a effectivement senti son frère mourir... Le film explore toutes les facettes des traumatismes ressentis par les combattants.

Rinko Kikuchi : C’est aussi ce qui se passe pour mon personnage. Mako doit faire de terribles efforts pour que sa haine des Kaijus et son désir de vengeance n’amoindrisse ni ses capacités de concentration, ni la justesse de ses décisions pendant les combats. Le processus de sélection des pilotes étant très sévère, elle doit se maîtriser en permanence. C’est une obligation pour être choisi, car l’un des éléments les plus importants qui assure le bon fonctionnement de l’union des deux esprits des pilotes et de l’intelligence artificielle de l’ordinateur de bord est justement la capacité de « faire le silence dans ses pensées ». Si l’on n’est pas en mesure d’y arriver, on risque de parasiter le processus de pilotage du Jaeger par des pensées inutiles, susceptibles de créer des ralentissements ou même des incidents. En fait, il faut arriver à être « zen » !

Charlie Hunnam : Oui, et d’ailleurs Stacker Pentecost, le personnage que joue Idris Elba dans le film, dit à un moment « Il ne faut rien emmener avec soi quand on plonge dans le Drift.» Il faut laisser ses émotions, ses peurs, ses névroses et ses espoirs derrière soi, et ne plus être qu’une page blanche. Sans passé ni futur.

Rinko Kikuchi : Raleigh et Mako doivent apprendre tous les deux à faire taire leurs démons intérieurs pour être vraiment efficaces au cours de leur mission.

Charlie Hunnam : Comme les esprits sont fusionnés dans le « drift », si l’un des partenaires se met à avoir peur, il va communiquer immédiatement ses craintes, ou pire encore, son début de panique à son co-pilote. C’est très dangereux car cela risque d’affecter la justesse de leurs réactions, et donc la manière dont le Jaeger va réagir lui aussi. Et le robot est une machine colossale qui peut devenir extrêmement dangereuse si l’on fait de fausses manœuvres en la pilotant. Mais le bon côté des choses, c’est que le calme d’un pilote peut aussi rassurer son partenaire et rétablir la sérénité au sein du « drift ».

Rinko Kikuchi : Bien sûr, les pilotes novices comme Mako ont plus de mal à maîtriser leurs émotions que les pilotes chevronnés comme Raleigh.

Raleigh croit-il toujours à l’amour quand il rencontre Mako Mori ?

Charlie Hunnam :
Non, je ne le pense pas. Au début du film, il ne croit plus en rien. Il a encore la volonté de survivre, et c’est à peu près tout ce qui lui reste. Ce n’est pas le genre d’homme qui irait jusqu’à se suicider, mais comme il a tout perdu, il se contente de vivre au jour le jour.

Toutes les scènes qui décrivent les tourments de Raleigh ont-elles été conservées dans le film ? Ou certaines ont-elles été coupées afin ne pas trop alourdir l’ambiance de ce qui semble être avant tout un grand spectacle ?

Charlie Hunnam :
Nous avons tourné beaucoup plus de scènes autour de la trajectoire émotionnelle de Raleigh, qui montraient plus en détail ce qu’il était devenu après avoir été renvoyé de l’alliance, l’endroit où il vivait, etc. Mais comme toujours pendant le processus de montage, beaucoup d’idées intéressantes ont du être coupées afin que le film ne soit pas trop long. Mais on les retrouvera peut-être dans les bonus des éditions vidéo !

[En discuter sur le forum]
Bookmark and Share


.