PACIFIC RIM : Entretien exclusif avec Idris Elba (Staker Pentecost) - Seconde Partie
Article Cinéma du Jeudi 01 Aout 2013

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Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Quelles sont les relations entre Staker et Raleigh Bracket ?

Raleigh, que joue Charlie Hunnam, est un ancien pilote qui était jadis sous mes ordres. On découvre ce qui lui est arrivé au début du film, et pourquoi il a été renvoyé. Depuis cette époque, j’essaie de trouver un moyen pour qu’il puisse redevenir pilote. Et bien que j’aie plus besoin de lui qu’il n’a besoin de moi, nos relations sont encore conflictuelles, car Raleigh a toujours été une tête brûlée qui agit comme bon lui semble, quitte à passer outre quand il reçoit des ordres directs. Bien sûr, cela déplaît énormément à Staker Pentecost, parce qu’il a un caractère extrêmement rigide. Cependant, il ne peut nier que Raleigh est exceptionnellement doué, et il sait qu’il mérite une seconde chance. Ils s’affrontent un peu, mais ils finissent par redevenir amis. Pendant le tournage, j’ignorais que Charlie Hunnam était anglais, comme moi, car nous prenons tous deux l’accent américain dans PACIFIC RIM. Ce n’est qu’au bout d’un moment qu’il est venu me voir pour me dire (Idris Elba prend un accent anglais assez prononcé) « Dis, tu ne serais originaire de Newcastle ? » (rires)

Quelle est la trajectoire personnelle et émotionnelle de Staker dans le film ? Et quelles sont ses ambitions ? Ses buts ?

Quand on fait la connaissance de Pentecost dans le film, c’est un homme fatigué par un long combat, et déçu de n’être pas soutenu davantage par l’alliance militaire. Ce n’est que plus tard, qu’il a un sursaut et qu’il lui vient une idée qui pourrait peut-être provoquer un tournant décisif dans cette guerre que l’humanité est en train de perdre. Voilà son but ultime... On découvre aussi qu’il est gravement malade, car ayant fait partie de la toute première génération de pilotes de Jaegers, à l’époque où ces machines étaient des prototypes pas encore fiables, il a été exposé à de fortes doses de radiations… L’évolution de ce mal est l’un des fils de la trame de son histoire. Staker tient bon, et ne laisse rien paraître devant son équipe, mais il en arrive à un point où il prend conscience qu’il ne lui reste plus beaucoup de temps à vivre, de toutes manières. C’est ce qui emporte sa décision de combattre à nouveau : il peut ainsi mener des actions déterminantes jusqu’au bout de son existence. Mais avant d’accomplir cela, il tient à rallier toute son armée de pilotes et à la galvaniser pour qu’elle l’entraîner vers la victoire. Et comme Staker est un leader-né, qui sait inciter les gens à puiser en eux-mêmes des ressources dont ils n’ont pas idée, il réussit cela mieux que quiconque. C’est ce qui lui permet d’atteindre ses 2 objectifs.

Quelles étaient les difficultés liées à votre rôle ?

Je dirais que c’était la période d’adaptation à la manière de tourner de Guillermo. Par exemple, quand mon personnage entrait dans une pièce, allait s’asseoir, et parlait, Guillermo découpait la scène en tournant mon entrée à deux ou trois reprises, puis le moment où je m’asseyais, puis celui où je commençais à parler. C’était vraiment difficile pour moi de travailler ainsi, car au lieu de garder l’énergie de mon jeu dans une continuité, tout était fragmenté, divisé en petits morceaux…Mais je dois dire que cela rend bien dans le film, que j’ai vu récemment. C’est vraiment un découpage de style BD : plan d’action, gros plan avec des courtes répliques, plan d’insert sur un élément technique, plan large du robot, panoramique pour suivre le combat, etc. Au final, c’est très efficace, très rythmé, constamment intéressant, bref, exactement ce qu’il fallait faire dans un tel film.

Comment l’ambiance était-elle sur le plateau ?

Oh, très agréable. Guillermo est un garçon chaleureux, qui est à l’écoute et qui plaisante constamment, tout en veillant à ce que le rythme de travail soit très soutenu… Je me suis très bien entendu avec Charlie Day - qui est très drôle, comme le savent les gens qui suivent sa série PHILADELPHIA – ainsi qu’avec Charlie Hunnam et Rinko Kikuchi. Cette bonne entente était d’autant plus agréable que les journées de tournage étaient longues et intenses. Guillermo ne vous laisse pas le temps de souffler, il fait toujours avancer les choses rapidement.

Avez-vous été inspiré par de vrais chefs militaires ou de vraies situations de guerre quand vous avez commencé à vous préparer pour ce rôle ?

Non, car nous avons été inspirés davantage par des maîtres d’arts martiaux que par des officiers comme des colonels ou des généraux. La discipline qui régit la vie de Stacker est plus « Zen » que martiale. C’est ce qui lui permet parfois de ployer, même s’il a un caractère rigide.

Quelle a été votre réaction quand vous avez vu le film quasi-terminé, il y a quelques jours de cela ?

J’ai été impressionné. Tout est si incroyablement détaillé…J’ai découvert des choses qui avaient été tournées quand je n’étais pas encore là, comme la séquence qui se déroule à Hong Kong, et qui est extraordinaire. Rien qu’en termes de moyens de production, on est époustouflé par tout ce que l’on voit à l’image. Ces robots ont une allure sensationnelle et les scènes de combats sont incroyables. C’est un énorme divertissement dans lequel tout est fait pour en mettre plein les yeux. J’ai hâte de montrer le film à ma fille de 11 ans, car elle va l’adorer.

Comment Guillermo travaille-t-il avec ses acteurs ? Quel genre de réalisateur est-il ?

Guillermo sait exactement ce qu’il veut et il sait vous l’expliquer clairement. Cependant, il tient à vous laisser agir avec votre propre créativité, car s’il a fait appel à vous, c’est aussi pour tirer partie de votre personnalité et de vos idées. Par exemple, si votre personnage doit pleurer, il ne vous montrera pas comment il veut que vous pleuriez : il vous expliquera avec beaucoup de passion ce qu’il veut ressentir en vous voyant jouer. Il vous décrira le résultat à obtenir, mais ne vous imposera pas une manière d’y parvenir. Il peut aussi lui arriver de donner des indications de jeu ou de gestuelle très précises, mais uniquement quand il s’agit de scènes très courtes, comme une entrée dans une pièce, la manière d’ouvrir une porte, etc. Dès qu’il s’agit d’émotions et de choses subtiles, il laisse les acteurs agir. Il m’a toujours laissé faire ce que j’avais naturellement envie de faire. Et il pouvait aussi lui arriver de me dire « Bon, donne-moi un peu plus d’émotion maintenant… Voilà, c’est bien ! Et penses-tu qu’à ce moment-là, Staker pourrait aussi commencer à avoir un peu faim ?! » (rires).

Vous avez déjà joué beaucoup de beaux rôles à la télévision et au cinéma. En reste-t-il encore auxquels vous rêvez depuis longtemps ?

Je viens d’accomplir un vieux rêve en incarnant Nelson Mandela dans un film qui va bientôt sortir. C’était une expérience fantastique en tant qu’acteur, parce que je n’ai rien à voir avec ce grand homme, ni physiquement, ni au niveau de mon caractère. J’ai fait de mon mieux pour devenir totalement Mandela. J’ai vu le film récemment et je peux dire que j’en suis très fier.

Avec la combinaison que vous deviez porter, les scènes tournées sur fonds verts et les autres contraintes liées aux trucages de plateau, aviez-vous quelquefois plus de mal à vous concentrer pour apporter toute la sincérité et la vérité voulue à votre interprétation ?

C’est toujours un défi de passer d’un tournage « classique » à celui d’un film dans lequel il y a constamment des mises en place de trucages sur le plateau et des préparations de plans destinés à être combinés avec des effets visuels. Cela vous contraint à vous ajuster à tout ce qui se s’organise techniquement autour de vous, et à recourir davantage à votre imagination d’acteur, tout en vous appuyant sur la vision et les directives du réalisateur. Heureusement, Guillermo a tenu à faire construire le plus de choses possibles. Nous avons tourné dans de nombreux décors géants, notamment dans celui qui représentait la base de lancement du Jaeger. Un morceau du pied du robot avait été construit « en dur » pour que nous ayons une meilleure idée de l’échelle de cette gigantesque machine. Quand nous nous trouvions dans ce décor, Guillermo nous disait « Pour voir ce robot qui est immense, il faudrait que vous vous penchiez beaucoup en arrière ! Et à ce moment-là, Whoosh !! Il y aura de puissantes rafales de vent qui viendront de cette direction, et qui viendront vous fouetter le visage ! » Bien sûr, il n’y a rien de tout ça sur le plateau pendant que Guillermo vous raconte ce qu’il voit dans sa tête…(rires)…mais cela vous aide quand même à compléter les décors par le biais de votre imagination ! Le poste de pilotage a été construit aussi à taille réelle, et tout le décor pouvait bouger afin de simuler les déplacements du robot…

Charlie Hunnam et Reiko Kikuchi nous ont expliqués que le tournage des scènes de pilotage n’était pas de tout repos…

Actionner les commandes du Jaeger était un exercice physique vraiment infernal. Nous étions suspendus par un câble, mais la combinaison, même si elle était ventilée, tenait horriblement chaud, et il fallait déployer beaucoup d’efforts pour tirer et pousser les leviers de cette machine qui étaient reliés à nos bras et à nos jambes. Après avoir passé une dizaine d’heures à tourner ce genre de scènes, je peux vous assurer que vous n’aviez pas envie de vous attarder sur le plateau…Vous ne pensez qu’à décamper au plus vite de là ! (rires) Mais pour revenir à ce que vous me demandiez sur la manière d’exprimer de la vérité dans mon jeu d’acteur, je savais très bien que si je me retrouvais réellement dans un habitacle, face à un monstre colossal de 90 mètres de haut, ma première réaction serait de crier (Idris Elba se met à hurler) « Oh mon dieu !!! » et de m’enfuir immédiatement ! (rires) Mais comme je joue un leader qui garde son sang froid, je peux me projeter dans cet état d’esprit-là, et sentir tout aussi naturellement la manière dont il réagirait, lui. Encore une fois, tout repose sur votre imagination, même si le script a été bien écrit et que Guillermo veille sur votre manière d’interpréter la scène.

Portiez-vous aussi un « cool suit », une combinaison avec des tubes dans lesquels on fait circuler de l’eau froide, pour vous rafraîchir ?

Oui, mais je n’aime pas cela, car au bout d’un moment, le « cool suit » produit l’effet inverse de celui que vous recherchez et vous êtes complètement frigorifié…Plutôt que de risquer d’attraper une grippe à cause de cela, j’ai préféré transpirer normalement, et faire régulièrement des pauses en buvant de l’eau pour me réhydrater.

A quel entraînement physique avez-vous été astreint avant de tourner le film ?

J’ai fait de la musculation et de la gymnastique dans une salle d’entraînement de kickboxing à Toronto. L’ambiance qui y régnait m’a beaucoup plu. Il y avait un vieux maître, un authentique Sensei, qui était extraordinaire. Avant de nous montrer un exercice à faire, il nous disait toujours (Idris Elba prend un accent chinois) « Tlèèès facile ! Tlèèès facile ! » et après, il faisait des « pompes », en mettant un bras derrière son dos et en s’appuyant seulement sur deux doigts de son autre bras ! (rires)

Guillermo vous a-t-il montré des illustrations et des maquettes des Kaijus et des Jaegers, ainsi que des prévisualisations des combats, pour vous aider à visualiser ce qui se passait à l’extérieur des robots et de la base de commande, scène par scène ?

Oui. Je crois qu’il nous a montré les premiers éléments du film plus d’un an avant le début du tournage. Plusieurs décors avaient déjà été construits sous forme de maquettes, et nous avions pu nous rendre compte du soin remarquable apporté à la conception des moindres détails… Je me souviens qu’il y avait déjà beaucoup de scènes animées préparatoires que l’on pouvait visionner.

Vous avez donc pu voir tous les Jaegers et tous les monstres ?

Oui, nous les avons vus, et nous avons pu découvrir toutes leurs caractéristiques. Nous avons appris qu’il y avait aussi différentes catégories de créatures, et que leurs particularités allaient jouer un rôle dans le déroulement du récit.

Quelle est la part d’humour que l’on trouve dans PACIFIC RIM ?

Vous allez peut-être avoir du mal à le croire, mais il y a un petit côté humoristique et des clins d’oeils parfaitement assumés dans le film. C’était inévitable avec un tel univers, ces robots géants, ces monstres, ces types en combinaison…Ce que vous verrez dans PACIFIC RIM est de la Science-Fiction de la meilleure qualité qui soit, avec des visions incroyablement détaillées de cet univers imaginaire. C’est aussi fouillé que STAR WARS, mais même si l’histoire est racontée avec sincérité, elle ne commet pas l’erreur de se prendre trop au sérieux. Vous comprendrez mieux ce que je veux dire dès que vous aurez vu les premières scènes du film, quand vous découvrirez ces personnages qui sont tous hors du commun, et « plus grands que nature ». Tout est amplifié, accentué avec des petites touches d’humour, et projeté dans l’imaginaire.

Quelle a été la scène la plus difficile à jouer et pourquoi ?

Il s’agit d’une scène qui se déroule dans le « compod », le poste de commande du Jaeger. Elle était compliquée à jouer parce qu’elle était à la fois très physique, et qu’il fallait exprimer beaucoup de sentiments très forts. C’est très difficile d’être relié à une telle machinerie, de faire autant d’efforts pour la faire bouger, et de réussir à livrer une performance chargée d’émotions… Et c’est encore plus dur de répéter cela 25 fois de suite au fil des prises et des différents cadrages de la même scène. Le reste de mes scènes était plus simple, car elles se déroulaient dans la base centrale. Je portais une combinaison et je disais mes répliques…Cela, c’était facile ! (rires)

Pour conclure, que pouvez-vous nous dire sur les actions de votre personnage de Heimdall dans THOR, LE MONDE DES TENEBRES ? Trouve-t-il le moyen de réparer le pont de l’arc-en-ciel qui mène d’Asgard jusqu’aux autres monde du royaume ? Combat-il aux côtés de Thor ?

Je n’ai pas le droit de révéler des choses précises, car Marvel m’a demandé de respecter un embargo très strict sur l’intrigue du film. Mais je peux cependant vous dire que c’est une version vraiment très intéressante des aventures de Thor, car le réalisateur a choisi de montrer cette fois-ci des perspectives nouvelles de cet univers de dieux et de demi-dieux. Il y a bien une histoire parallèle qui a été prévue spécialement pour Heimdall dans cet épisode, avec des développements des évènements vus dans le premier film, comme les conséquences de la destruction du pont de l’arc-en-ciel…

Heimdall a-t-il plus de choses à faire dans cet épisode ?

Bien sûr que non : il n’est que le portier ! (rires) Non, je plaisante : il est effectivement plus actif cette fois-ci.

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