Exclusif ESI : Reportage sur le tournage de GODZILLA - Le retour du monstre mythique – 1ère partie
Article Cinéma du Lundi 03 Mars 2014



Le titan du cinéma japonais revient sur le grand écran, dans une histoire traitée avec un réalisme saisissant par le réalisateur Gareth Edwards (MONSTERS).



New Westminster, banlieue de Vancouver, Canada, le 16 juin 2013. C’est le long de voies ferrées, sous l’infrastructure d’un parking atypique - un long rectangle de béton de deux étages soutenu par de hauts piliers – que l’équipe de GODZILLA s’affaire en cette belle matinée d’été. Elle en est arrivée au 62ème jour de tournage sur 85, et dans deux semaines, elle quittera le Canada pour s’installer à Hawaï pendant les vingt derniers jours des prises de vues principales. Le chef décorateur Owen Paterson et ses équipes ont méticuleusement transformé ces structures ferroviaires et les façades des immeubles proches en un paysage urbain japonais post-apocalyptique, visiblement évacué en hâte une dizaine d’années auparavant. Des enseignes commerciales aux tubes néons brisés, savamment patinées et vieillies, ont été accrochées aux piliers, des stands de nourritures et des véhicules rouillés et couverts de poussière placés le long du chemin, et des devantures de boutiques greffées sur les murs des buildings. Des plantes grimpantes artificielles, des lianes et des feuilles mortes ont été disposées un peu partout sur les décors pour signifier que la nature a lentement mais inexorablement repris ses droits dans ces lieux déserts. Partout où se porte le regard, la qualité du travail des décorateurs force l’admiration : on chercherait en vain dix centimètres carrés de cet environnement qui n’aient pas été thématisés ! Tout est fait pour nous convaincre que nous nous trouvons dans une zone abandonnée des environs de Tokyo, dans un futur proche, jusqu’aux morceaux de journaux ou aux bouteilles de soda made in Japan qui jonchent le sol. Une ambiance mélancolique et poétique règne dans ce décor qui s’étend sur près d’un kilomètre de voies. Pas d’erreur, on retrouve bien ici la patte de Gareth Edwards, ce surdoué des effets visuels qui avait réalisé avec un minuscule budget de 800 000 dollars l’excellent MONSTERS, fascinant journal de voyage de deux américains qui traversent tant bien que mal le Mexique envahie par des monstres géants pour regagner les USA. S’il y avait un réalisateur idéal pour ressusciter Godzilla en mêlant trouvailles visuelles saisissantes et descriptions poétiques de décors ravagés, c’était bien lui ! En cette période post-Fukushima, le spectre de l’apocalypse nucléaire qui avait inspiré les créateurs du premier GODZILLA de 1954 - le réalisateur Ishiro Honda et le superviseur des effets visuels Eiji Tsuburaya – hante à nouveau les esprits. Chacun garde à l’esprit les images bien réelles de la catastrophe qui a suivi le tsunami, et qui a rappelé qu’une centrale nucléaire confrontée aux colères de la nature pouvait se transformer en un péril difficilement maîtrisable. Ce retour à l'esprit sérieux et réaliste du film original, et à une ambiance chargée de suspense, de mystère et d’évocations des dérives de la science est donc particulièrement judicieux. L’autre bon présage de qualité de ce nouveau GODZILLA, ce sont les acteurs qui ont accepté de participer à ce projet, séduits par le scénario de Max Borenstein, Frank Darabont et Dave Callaham. En tête du casting, on retrouve l’immense Bryan Cranston, vu récemment dans ARGO, et dont la performance dans le chef d’œuvre qu’est la série BREAKING BAD a été tout simplement exceptionnelle. Cranston incarne ici Joe Brody, un savant qui enquête sur de mystérieux phénomènes qui ont lieu au Japon, quinze ans après une catastrophe scientifique qui a coûté la vie à son épouse et irradié la région de Tokyo. Refusant de s’en tenir à la version officielle des faits, le scientifique entame alors un périple dangereux dans cette zone désertée, accompagné par son fils Ford (Aaron Taylor Johnson, le héros de KICK-ASS 1 & 2), un soldat d’élite qui le tient en partie responsable de la disparition de sa mère. Au fil de cette aventure, les liens distendus entre le père et le fils se retissent. Grâce à leur courage, ils vont découvrir non seulement l’existence de Godzilla, mais aussi d’autres créatures, aussi gigantesques que maléfiques, nées de cette terrible erreur due à l’arrogance scientifique. Notons que le rôle court mais important de la mère est tenu par Juliette Binoche, qui après avoir décliné l’offre de Steven Spielberg de jouer dans JURASSIC PARK en 1993, accepte 20 ans plus tard et pour la toute première fois de participer à un film fantastique à grand spectacle pour faire plaisir à son plus jeune fils. Dans cette prestigieuse distribution, citons aussi Ken Wanatabe (INCEPTION), David Strathairn (La saga Jason Bourne) et une brève apparition du vétéran de la série des GODZILLA japonais, Akira Takarada, apparus dans six d’entre eux, et notamment dans le premier, où il jouait le jeune savant qui découvre le moyen d’anéantir le dragon au souffle nucléaire. Pour en savoir plus sur le film, ESI a soumis à la question Ernie Malick, le représentant de la production auprès des médias, alors qu’il nous faisait observer qu’à cent mètres à peine des voies ferrées et du décor de la zone de quarantaine de Tokyo, des rues en pentes successives permettaient d’évoquer la ville de San Francisco ravagée après une attaque de Godzilla. 48 heures plus tôt, la production avait disposé là quelques voitures de police américaines à moitié écrasées, recouvertes de faux blocs de béton éparpillés un peu partout sur la route et la chaussée, afin de créer là aussi une illusion de paysage ravagé…



Entretien avec Ernie Malick

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Quel est le contexte des scènes qui vont être tournées aujourd’hui avec Bryan Cranston et Aaron Taylor-Johnson dans ce décor japonais ?

Le film débute en 1999, quinze ans avant les scènes que nous allons tourner aujourd’hui, et qui se situent elles en 2014. Joe Brody, le personnage de physicien nucléaire que joue Bryan Cranston, a détecté un événement géologique qu’il a pris pour un signe annonciateur d’un tremblement de terre. Son analyse des informations acoustiques l’a poussé à croire que l’épicentre serait situé directement sous la centrale nucléaire où il travaillait. Mais ce n’est pas exactement cela qui s’est produit, même si les conséquences ont été aussi tragiques…Quinze ans plus tard, Brody, accompagné par son fils devenu soldat veut revenir dans la maison qu’ils habitaient avant le drame, car il veut y récupérer certains documents enregistrés sur un disque dur. Toute cette zone de Tokyo et de ses environs a été placée en quarantaine, et les décors que vous voyez représentent les environnements que Brody et Ford vont devoir traverser pour parvenir jusqu’aux ruines de leur ancienne habitation. Les seuls êtres vivants que nos héros y croisent sont les descendants des chiens que leurs maîtres ont dû laisser derrière eux pendant l’évacuation de la région. Ces pauvres bêtes abandonnées sont retournées à l’état sauvage. Après avoir prélevé là-bas ce qu’ils y cherchaient, et avoir été confrontés aux souvenirs du passé – c’est dans cette maison que Ford a vu sa mère pour la dernière fois – Brody et son fils sont arrêtés par la police japonaise. Tout cela se déroule au début du deuxième acte du film.

Qu’est-ce qui a décidé Legendary et Warner à venir tourner ici à Vancouver ?

Les avantages fiscaux comme les réductions de taxes locales, et l’extraordinaire variété des paysages naturels et urbains que l’on peut trouver dans cette région de la Colombie Britannique, qui est environ deux fois plus grande que la Californie.Cette ville de New Westminster où nous nous trouvons a été la première capitale de la région canadienne de la Colombie Britannique. La capitale actuelle est Victoria, qui se trouve sur l’île de Vancouver. Legacy Pictures Entertainment, qui co-produit GODZILLA avec Warner a également tourné ici THE SEVENTH SON, un film fantastique qui se déroule au 17ème siècle, avec Jeff Bridges, Ben Barnes et Julian Moore. Et en 2014, c’est également ici que se tournera l’adaptation du jeu WARCRAFT réalisée par Duncan Jones. L’une des autres raisons pour lesquelles Legacy apprécie les tournages à Vancouver est la présence ici du second studio de la société anglaise d’effets visuels The Motion Picture Company, qui est l’un des acteurs majeurs dans le domaine des effets numériques. Et comme GODZILLA est un film dans lequel il y aura énormément d’effets visuels, il est très pratique de travailler avec eux ici pendant le tournage, et cela permet aussi de bénéficier de déductions fiscales supplémentaires. Beaucoup de tournages américains ont lieu à Vancouver depuis que la série THE X-FILES a permis de faire connaître tous les avantages de la région. Les producteurs et les studios apprécient aussi qu’il n’y ait aucun décalage horaire entre cette ville et Los Angeles, car cela facilite la communications avec les équipes. De plus, aller jusqu’à Vancouver depuis Los Angeles ne nécessite que 2h45 de vol, ce qui est très pratique. Beaucoup d’acteurs apprécient de pouvoir rentrer chez eux pendant le week-end pour retrouver leurs familles.

Les décors que vous nous avez montrés ce matin représentent la région de Tokyo et San Francisco, mais l’action de GODZILLA se déroule-elle également ailleurs ?

Oui, car l’histoire nous entraîne aussi aux Philippines, à Hawaï et au Nevada. L’essentiel du troisième acte se passe à San Francisco. Nous n’avons tourné que certaines vues de San Francisco sur place, avec notre seconde équipe, mais nos acteurs principaux ont tourné ici à Vancouver toutes les scènes qui sont sensées se dérouler là-bas. C’est l’un des grands avantages de cette région : où que vous tourniez, vous pouvez toujours trouver de quoi convaincre le public que l’action se déroule dans une autre ville ou dans un autre pays. La seule exception est Hawaï qui va jouer son propre rôle dans le film ! (rires)

La suite de notre reportage exclusif sur le tournage de GODZILLA paraîtra bientôt sur ESI !

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