GODZILLA : Dans les coulisses d’un remake titanesque. Suite de notre entretien exclusif avec Bryan Cranston (BREAKING BAD) !
Article Cinéma du Jeudi 08 Mai 2014

Exclusif ESI – GODZILLA , dans les coulisses d’un remake titanesque. Suite de notre entretien avec Bryan Cranston (BREAKING BAD )

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau



Le personnage de Walter White que vous incarniez dans BREAKING BAD a été tellement marquant, et vous a valu un tel succès dans le monde entier que le choix de votre premier grand rôle principal après la série a dû être bigrement difficile…

Effectivement, j’ai réfléchi longtemps à la manière de tourner la page de BREAKING BAD. J’ai pensé qu’il fallait que ce soit un rôle très dynamique, et comme je savais que cette première apparition après la série générerait inévitablement des comparaisons, j’ai choisi le projet le plus différent possible. Je voudrais préciser en disant cela que je ne voudrais surtout pas que ce soit pris pour de l’arrogance. Certes, je souhaitais « rompre » avec BREAKING BAD, mais je suis extrêmement fier de la qualité de la série et de ses scénarii. Je mesure la chance extraordinaire que j’ai eu d’interpréter ce personnage. GODZILLA est totalement différent de la série dans le sens où on ne peut vraiment pas comparer les deux. Voilà ce que je voulais dire ! Mais attention, je ne veux surtout pas jouer non plus les acteurs snobs qui dénigrent les films de pur divertissement et qui ne s’intéressent qu’à des adaptations de grandes classiques de la littérature ou à des œuvres dramatiques pesantes. Je suis ravi de participer à un film aussi amusant et spectaculaire que celui-ci, et je pense qu’il arrive à un moment parfait dans ma carrière. Même s’il est très différent, il y a quand même des éléments similaires dans les motivations des personnages. Comme Walter White, Joe Brody veut protéger sa famille et se met dans des situations dangereuses…et la relation père-fils joue un rôle important dans l’histoire.

Poursuivons le jeu des comparaisons, alors : dans BREAKING BAD, le jeune partenaire de Walter White, avec lequel il avait une relation quasi paternelle, était joué par Aaron Paul, et dans ce film, votre fils est joué par Aaron Taylor-Johnson…

Oui, j’ai changé d’Aaron ! (rires) Aaron Taylor-Johnson est un partenaire très agréable et un jeune homme sympathique. Il est très intelligent et il suffit de voir ses films pour constater qu’il a un registre d’acteur très étendu, qui va de la fantaisie humoristique de Kick-Ass au romantisme intense d’ANNA KARENINE en passant par l’énergie virile de son rôle de soldat dans GODZILLA. J’apprécie la manière dont il traite chaque scène avec simplicité, sans vouloir en faire trop. Cela prouve qu’il a beaucoup de maturité pour un acteur si jeune.

Est-ce que votre personnage a quelques interactions directes avec Godzilla dans le film ?

Mmm… Godzilla pourrait vous en parler, mais pour l’instant, il se repose dans sa caravane, qui est la plus grande de toutes celles qu’on à mises à la disposition des acteurs, cela dit en passant. On doit jeter une chèvre dedans toutes les dix minutes pour le nourrir, sinon il pousse l’un de ses célèbres cris. Il se comporte vraiment comme une star, il est très pénible, mais il joue bien les destructeurs. Quand il arrive sur le plateau, il est toujours prêt à ravager tout un quartier ! On voit pourquoi il n’a jamais cessé de travailler depuis 1954, c’est un vrai pro ! (rires) Mais blague à part, ce qui est intéressant à propos de ces interactions avec Godzilla et les autres créatures, c’est que cela vous oblige à employer d’autres parties de votre palette d’acteur. Comme votre personnage se retrouve dans des situations qui sont totalement différentes de celles que vous avez pu vivre dans votre vraie vie, cela vous contraint à utiliser votre imagination pour deviner quelles pourraient être ses réactions, ses émotions. Quand vous vous retrouvez face à un écran vert , vous devez imaginer l’ampleur colossale de ces bêtes, où elles se trouvent, la vitesse à laquelle elles se déplacent, les directions dans lesquelles elles se dirigent, et les dégâts qu’elles provoquent. Pour réagir de manière crédible, vous devez arriver à visualiser tout cela assez précisément dans votre esprit. En soi, ce n’est pas difficile à faire pour un acteur. Mais tout se complique quand il s’agit d’un groupe d’acteurs qui doivent réagir de manière convaincante ensemble. Là, il faut que tout le monde se coordonne et visualise au même moment les mêmes mouvements des créatures et les mêmes actions. C’est cela qui devient un défi ! Nous avons dû mettre au point une méthode de tournage complètement différente pour ces scènes, et je pense qu’elle servira à nouveau pour d’autres films.

Comment se passe votre travail avec Gareth Edwards ? Il est passé de la réalisation d’un film à tout petit budget dans lequel il faisait quasiment tout à cette superproduction…

Vous savez, l’une des raisons pour lesquelles je me trouve ici aujourd’hui, c’est que j’ai vu son film MONSTERS, et qu’il m’a énormément impressionné. Non pas seulement parce qu’il présentait une histoire intéressante avec un suspense bien mené, mais parce que Gareth a su créer une atmosphère captivante en faisant preuve de beaucoup de retenue dans sa mise en scène d’évènements extraordinaires. Exactement comme Steven Spielberg l’avait fait dans LES DENTS DE LA MER, en évitant de créer des effets chocs faciles qui auraient consisté à faire surgir le requin géant tout le temps pour faire sursauter les spectateurs dans leurs fauteuils. En créant des temps d’attente, en multipliant les moments où l’on ne voit pas les monstres, et où on ne voit que leurs traces, il crée une tension chez les spectateurs et leur donne l’envie de les voir surgir. Le développement des personnages était également très fort, très bien conçu. Quand il m’a contacté pour me proposer le rôle de Joe Brody, Gareth m’a demandé de visionner MONSTERS. J’ai beaucoup aimé ce film, et après, quand nous avons discuté du projet, j’ai constaté qu’il avait l’esprit ouvert aux idées et suggestions que l’on pouvait lui proposer. Voilà les raisons pour lesquelles j’ai accepté de jouer dans GODZILLA. Gareth possède une excellente diversité de talents en tant que réalisateur : il a non seulement une vision très claire de ce qu’il veut, mais il est aussi assez malléable et flexible pour adapter sa vision aux propositions des acteurs et à ce qui se passe pendant les répétitions des scènes et pendant le tournage. Il ne nous enferme pas dans un cadre restreint, trop rigide. Il est prêt à changer des séquences si cela s’impose, en dépit du fait qu’elles ont été préparées avec une grande minutie. Il ne s’accroche pas à une idée prédéterminée si l’on trouve une meilleure idée ou une manière plus efficace de raconter différemment les mêmes choses. J’en ai parlé avec lui. Je lui ai dit « Gareth, tu es passé d’un film qui disposait d’un budget de 200 000 dollars à une superproduction de 200 millions de dollars. Tu aurais toutes les raisons d’être sur les nerfs, horriblement tendu et inquiet ! » (rires) Pourtant, Gareth reste calme. Il refuse de se laisser déstabiliser par des considérations extérieures au tournage. Il avance sereinement, et il se débrouille vraiment bien pour gérer tout cela. Il m’a épaté.

L’ambiance sur le tournage semble à la fois sereine et concentrée…

Oui, et j’ai remarqué que c’était souvent le cas lors des tournages de films qui se passent à Vancouver. C’est la troisième fois que je viens tourner ici, et c’est toujours un plaisir. Pour moi, quand vous vous trouvez dans une région dans laquelle il y a des forêts qui donnent sur la mer, vous avez la plus belle combinaison de paysages naturels possible. Les jours de pause, je vais me promener à pied ou en bicyclette dans le parc Stanley pour recharger mes batteries et me détendre. Cela peut sembler futile, mais cela vous aide vraiment à mieux travailler.

Votre personnage de savant est-il fasciné par Godzilla de la même manière que les chasseurs de tornade le sont par les déchaînements de la nature ?

Non, car au départ, Joe Brody ne sait pas encore que des bêtes géantes vont se manifester. Ce n’est pas comme si Brody et son fils savaient qu’elles se trouvaient là dès le début et suivaient leurs pistes pour les localiser. Brody analyse les choses de manière scientifique, en évaluant des hypothèses, et quand il comprend ce qui se passe vraiment, cela le prend complètement par surprise. Il ne pouvait même pas concevoir que des créatures aussi colossales puissent naître, se développer, et semer de telles destructions sur leur passage. Dans la scène que vous venez de nous voir jouer, Brody essaie encore de déterminer ce qui s’est réellement passé il y a quinze ans. Et quand il découvre la réalité, il est trop tard pour se plonger dans l’examen scientifique de ces créatures. Brody et son fils sont obligés de passer rapidement en « mode survie » et de se débrouiller pour surmonter les épreuves les unes après les autres ! (rires)

Bryan Cranston nous quitte alors pour répéter la mise en place du plan suivant. Il s’agit du contrechamps de ce qui a été tourné auparavant, l’autre axe de l’exploration de la zone de quarantaine. Il fait un point rapide avec Aaron Taylor-Johnson et Gareth Edwards et tout reprend vite. Après le tournage de quelques prises, c’est le jeune comédien qui vient à notre rencontre, encore vêtu de sa combinaison militaire…

La suite de ce dossier de taille « Kaijuesque » paraîtra bientôt sur ESI !

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