Entretien exclusif avec Simon Kinberg, scénariste et producteur de X-MEN DAYS OF FUTURE PAST - 2ème partie
Article Cinéma du Jeudi 19 Juin 2014

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Quel est l’arc narratif et l’évolution personnelle de Wolverine dans cet épisode ? Comment ses relations avec les autres mutants en sont-elles modifiées ?

Les plus grands changements relationnels de Wolverine ont lieu avec les gens qu’il rencontre alors qu’ils sont plus jeunes. Pendant la plus grande partie du film, le Wolverine du futur est inconscient, parce que sa conscience a été projetée dans son enveloppe corporelle de 1973. Pour moi, le point principal du film, c’est la manière dont Wolverine devient un leader pour le jeune Charles Xavier, et comment il va lui enseigner ce qu’il a lui-même appris du vieux Xavier, ce qui est un retournement de situation ironique et passionnant. Dans le premier X-MEN, Wolverine était presque une épave, un vagabond amnésique et sans identité errant sans but. Le professeur Xavier lui avait appris à s’intégrer à une équipe et à se préoccuper des autres. Wolverine lui rend le même service dans ce film, et c’est la relation centrale de cette histoire. Wolverine devient une figure paternelle pour le jeune Charles, et il s’affirme comme un vrai leader. Même si Logan a fini par s’intégrer aux X-Men, il ne les a jamais commandés comme il le fait au cours de cette aventure. Auparavant, il était guidé par des gens qui avaient plus d’expérience que lui : par le professeur Xavier, par Jean Grey et par Storm, notamment. En se projetant dans le passé, en 1973, il devient le premier X-Men qui ait jamais existé puisqu’à ce moment-là, Charles n’a pas encore formé officiellement les X-Men. Le cœur du film est donc la rédemption du jeune Charles et la manière émouvante dont Wolverine l’aide.

Est-ce difficile d’écrire une histoire de voyage dans le temps tout en évitant les paradoxes temporels ? Vous êtes-vous retrouvé bloqué par certains paradoxes pendant l’écriture du scénario, et vous ont-ils contraint à changer certains éléments de l’histoire ?

Oui. Le script de DAYS OF FUTURE PAST est de très loin le plus difficile que j’aie eu à écrire de toute ma carrière, justement pour la raison que vous évoquez. J’espère ne plus jamais avoir à travailler sur des histoires de voyages temporels, car c’est terriblement complexe à gérer tout au long du processus d’écriture ! Surtout quand vous travaillez sur une intrigue qui implique une douzaine de personnages principaux, deux versions des trois personnages principaux, et que vous alternez les scènes entre le futur et le passé de 1973… Dans la plupart des films où il est question de voyage dans le temps, une fois que le ou les héros ont fait ce bond dans le passé ou le futur, ils restent sur place pendant 90% de l’histoire. C’est par exemple le cas de RETOUR VERS LE FUTUR, où Marty reste dans les années 50 jusqu’à la conclusion. Idem dans TERMINATOR. Or, contrairement à la grande majorité de ces films, nous avons choisi de faire des allers-retours narratifs entre le futur et le passé, afin de montrer les actions parallèles des personnages. L’un des choses auxquelles Bryan tenait le plus, c’était d’établir une liste très précise de règles qui allaient nous permettre d’éviter les paradoxes temporels. Nous avons passé beaucoup de temps à la mettre au point. Nous avons parlé à des professeurs de physique et Bryan s’est entretenu avec James Cameron qui a amplement prouvé qu’il était un expert dans ce domaine. Nous avons vraiment fait le tour de tous les spécialistes pour lister avec eux les différentes manières d’éviter ces paradoxes, ou de les contourner. Nous avons déterminé une loi qui , je l’espère, nous a mis à l’abri de cela. Elle établit que « L’effet papillon » - autrement dit que les répercussions multiples d’une modification du passé - ne se produit qu’après qu’un seul événement très précis ait eu lieu pendant le processus du voyage temporel de Wolverine. C’est ce qui nous permet d’éviter de considérer, comme dans d’autres films, que la moindre petite modification du passé peut avoir des conséquences considérables. Dans notre récit, cet enjeu repose sur un seul événement pivot, ce qui simplifie énormément les choses.

Vous avez écrit le script de X-MEN L’AFFRONTEMENT FINAL, dans lequel Xavier, Jean Grey et Cyclope étaient tués. A présent que Xavier a été ressuscité, allez-vous vous servir des modifications créées dans la continuité temporelle pendant DAYS OF FUTURE PAST et en profiter pour faire revivre ces membres populaires de l’équipe des X-Men ?

(rires) Non, nous n’allons pas faire revenir à la vie les personnages des X-Men dont vous parlez, mais en revanche, nous allons changer la continuité temporelle qui avait été décrite auparavant dans la première trilogie X-MEN. Cela signifie qu’après ce film, personne ne pourra dire si les événements présentés dans ces trois premiers films vont se produire ou pas dans cette nouvelle continuité. Personne ne sait quelles répercussions parallèles vont être créées par le changement intervenu. Quoi qu’il arrive, le monde que l’on va découvrir à la fin de DAYS OF FUTURE PAST, sera un monde nouveau, dans lequel tout pourra arriver.

Quelles ont été vos sources d’inspiration pour écrire les scènes dans lesquelles on voit les mutants chassés par les robots sentinelles ? Quelle est l’ampleur de ces batailles dans le film ?

Mon inspiration principale a été la BD originale, et mes films de voyage dans le temps préférés comme ceux de la saga TERMINATOR. En fait, il y a seulement quelques batailles contre les armées de terminators dans ces films, car le reste de l’action se déroule principalement dans les années 80 et 90. Dans notre film, il y a deux types de robots Sentinelles : les Sentinelles du futur, qui sont extrêmement sophistiquées, rapides et dangereuses, et les Sentinelles des années 70, qui en sont encore à la première génération de prototypes. Elles fonctionnent de manières très différentes. Vous verrez dans le film des scènes de batailles avec ces robots qui se déroulent dans le passé et dans le futur. Dans les séquences du futur, les sentinelles interviennent en très grand nombre, et on les transporte dans d’énormes vaisseaux, d’où elles sortent en volant comme des nuées d’insectes. Ce sont des images très impressionnantes. Les robots du passé, eux, se battent de manière plus traditionnelle, plus lente, avec des armements classiques.

Pouvez-vous nous parler de la personnalité et des motivations de Bolivar Trask, l’inventeur des sentinelles, et nous dire quels sont ses alliés politiques ?

Bolivar Trask ne s’est allié avec aucun pays. On le voit au début du film et à la fin. C’est un inventeur qui travaille pour les Etats-Unis. Il est passionné par son projet de robots Sentinelles et il veut le faire aboutir à tout prix. Si c’est la lutte contre les mutants qui lui permet d’obtenir le financement pour créer ces robots, c’est parfait pour lui. Il n’a pas d’état d’âme à ce sujet. Et s’il fallait s’allier avec un pays ennemi de l’Amérique pour arriver au même résultat, il le ferait sans hésiter non plus. En ce qui concerne sa motivation, nous voulions qu’elle soit complexe, et ne pas nous borner à dire seulement qu’il veut faire aboutir son projet technologique. Nous expliquons que Trask a un projet et qu’après avoir vu des amis et beaucoup de gens mourir pendant la guerre du Vietnam, il ne veut plus qu’une autre guerre se produise. Dans son esprit, la seule manière d’unifier tous les pays est de désigner un ennemi commun qu’ils pourront combattre tous ensemble : les mutants. Aussi bizarre que cela puisse sembler, Bolivar Trask croit sincèrement qu’en sacrifiant les mutants, et en les désignant au public comme les responsables de nombreux problèmes, il va sauver toute l’humanité.

Comment avez-vous essayé de donner à chacun des nouveaux mutants comme Warpath, Blink, Bishop ou Sunspot des occasions de briller dans le film, tout en exprimant leurs personnalités ?

C’est très difficile, car il y a énormément de protagonistes dans cette histoire, beaucoup de mutants, de robots, de personnages principaux et de personnages secondaires…Bien sûr, nous voulions donner des choses intéressantes à jouer à chacun des acteurs. Tous les mutants que vous avez mentionnés vivent dans le futur apocalyptique. Il se passe beaucoup de choses dans cette partie du film, non seulement en termes de scènes d’action où on les voit utiliser leurs pouvoirs, mais aussi de par les descriptions de leurs comportements et de leurs caractères. Certains travaillent bien en équipe et sont disciplinés, d’autres sont des solitaires taciturnes qui n’en font qu’à leur tête, quelques uns ont peur des sentinelles et peuvent agir lâchement... La plupart de ces personnages n’apparaissent que dans des scènes courtes, mais nous avons l’occasion de les voir s’exprimer et de découvrir leurs personnalités au cours des séquences d’action et des combats.

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