[Archives] Les maquillages de Pandorum - Entretien avec Shane Mahan, du studio Legacy Effects
Article Cinéma du Dimanche 14 Fevrier 2016

Superviseur des effets de créatures de PANDORUM, Shane Mahan dit volontiers qu’il doit son succès au fait de s’être retrouvé au bon endroit au bon moment. Mais il fait preuve d’un excès de modestie. Né et élevé dans la petite bourgade de Greenville, dans l’état américain du Michigan, Mahan a passé une grande partie de son enfance à regarder les films d’épouvante diffusés à la télévision, puis a réalisé des courts-métrages en Super-8 dont les héros étaient le conte Dracula et le monstre de Frankenstein. Après avoir écrit et mis en scène des pièces de théâtre à l’école, puis terminé ses études secondaires en 1981, il s’est installé à Hollywood, a décroché quelques stages et a réussi à montrer son portfolio à Stan Winston, qui l’a aussitôt engagé pour rejoindre l’équipe de TERMINATOR en 1983. C’est là qu’il a travaillé par la suite, collaborant à ALIENS (1986), PREDATOR (1987), ALIEN NATION (1988), LEVIATHAN (1989), PREDATOR 2 (1990), TERMINATOR 2 (1991), JURASSIC PARK (1993), INTERVIEW AVEC UN VAMPIRE (1994), LE MONDE PERDU: JURASSIC PARK (1997), INSTINCT, INSPECTEUR GADGET et GALAXY QUEST (1999), APPARENCES (2000), PEARL HARBOR et A.I: INTELLIGENCE ARTIFICIELLE (2001), BIG FISH (2003), CONSTANTINE, LA GUERRE DES MONDES et ZATHURA: UNE AVENTURE SPATIALE ( 2005), SKINWALKERS (2006), IRON MAN et INDIANA JONES ET LE ROYAUME DU CRÂNE DE CRISTAL (2008) et G.I. JOE: LE REVEIL DU COBRA (2009). Après la disparition de Stan Winston, Mahan s’est associé avec ses amis et collaborateurs de longue date John Rosengrant, Lindsey MacGowan et Alan Scott pour fonder le studio Legacy Effects.

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

En préambule à cet entretien, précisons que nous allons éviter de révéler qui sont les créatures et quelle est leur origine afin de ne pas gâcher les surprises de PANDORUM à nos lecteurs qui ne l’auraient pas encore vu.

Très bien, faisons cela !

Comment le projet Pandorum a-t’il débuté pour vous, et quelles ont été les premières indications que le réalisateur Christian Alvart et le producteur Robert Kultzer vous ont donné concernant les effets de maquillage dont ils avaient besoin pour figurer les créatures ?

Tout d’abord, je dois préciser que nous avons été impliqués dans le projet parce que nous connaissons Robert Kultzer, qui est l’un des producteurs du film. Nous avions déjà travaillé avec lui sur Détour Mortel. Il s’est associé avec Jeremy Bolt, qui produit les films de la série Resident Evil, ainsi que d’autres projets comme Course à la mort. Robert et Jeremy sont venus nous voir avec ce projet qui était très intéressant, afin de nous demander de les aider à concevoir le design des créatures et les effets de maquillage. Robert m’a envoyé le script, que j’ai lu et que j’ai trouvé très intéressant, vraiment bien construit. C’est Christian Alvart qui l’a écrit, et il a fait un beau travail. L’histoire est très prenante d’emblée, très excitante. C’est exactement le genre de choses que nous avions envie de créer. Cela faisait déjà un bon moment que nous n’avions pas eu l’occasion d’intervenir sur un film d’horreur et de Science-Fiction. Ces derniers temps, les films sur lesquels nous avons travaillé étaient plutôt légers, amusants. C’étaient des films d’aventure, des comédies. Nous étions donc ravis de revenir à des atmosphères d’antres sinistres et obscures, à un film d’épouvante jouant sur le sentiment de claustrophobie. Nous avons donc commencé à travailler sur les designs des créatures qui sont des chasseurs. C’est tout ce que je révélerai à leur propos, pour ne pas trop en dire...Avec le budget dont il disposait, Robert pensait que nous ne pourrions pas faire autant de choses que ce que nous sommes parvenus à faire en fin de compte. Nous avons réussi à mettre au point une approche efficace des prothèses faciales et corporelles, et des effets de maquillage. Les créatures présentent des formes de mutations très effrayantes et très intéressantes. Voilà ce qu’elles sont.

Christian Alvart vous a-t’il donné des indications au sujet des créatures ?

Il nous a laissé lui proposer plusieurs séries de designs pour nous rapprocher du but. Dans ce cas-là, généralement, les réalisateurs réagissent de deux manières différentes. Soit ils ont tendance à pousser les concepts graphiques encore plus loin, soit ils nous disent « Atténuez un peu les choses. » Christian nous a surtout expliqué comment il imaginait que les créatures devaient bouger. Il tenait à ce que les designs n’entravent en aucun cas la capacité de mouvement des acteurs, et il s’est focalisé sur les silhouettes de ces personnages. Nous avons donc collaboré très étroitement avec les responsables allemands du département des costumes, qui ont fabriqué les vêtements des créatures. Les silhouettes des personnages sont importantes, car c’est souvent tout ce que l’on perçoit d’eux. Les costumes ont été conçus pour avoir l’aspect d’assemblages d’objets divers, trouvés dans le vaisseau spatial. Il était très important que l’on obtienne une apparence brute, bricolée à la main, que l’on comprenne que les personnages ont fabriqué leurs tenues eux-mêmes. Ainsi, quand on les découvre enfin en plein lumière, et que l’on comprend qui ils sont, leur aspect n’en est que plus choquant. Certains des designs ont été réalisés avec l’intention qu’ils soient complétés par des ajouts numériques sur les visages. Nous les avons conçus en jouant avec l’anatomie de la face. La plupart des prothèses faciales ont été réalisées en silicone, tandis que les prothèses corporelles étaient réalisées en mousse de latex.

Vous avez donc bénéficié d’une totale liberté pendant la phase de conception des personnages ?

Oui, en effet. C’était très appréciable. Le studio était dans une phase de transition à ce moment-là. Je crois que nous avons commencé à travailler sur Pandorum juste avant le décès de Stan. Il me semble qu’en dehors d’AVATAR, c’est l’un des tout derniers projets sur lequel figurera le nom du Studio Stan Winston…

Avez-vous du tenir compte de certaines contraintes, et incorporer des aménagements techniques dans le design des créatures ?

Techniquement, nous avons simplement veillé à ce que les têtes des créatures soient suffisamment légères. Nous avons construit des structures très légères pour soutenir le volume des têtes surdimensionnées. La chose la plus importante, c’était de nous assurer que les acteurs jouant ces personnages pourraient bouger sans être gênés.

Qui étaient les superviseurs des effets de maquillage de votre équipe ?

Lindsey MacGowan, Arjen Tuiten et moi-même. Nous nous sommes rendus à Berlin et nous avons engagé ensuite des maquilleurs allemands sur place. Nous avons aussi bénéficié de l’aide d’étudiants de plusieurs écoles de maquillage, qui nous ont aidé à appliquer les maquillages corporels, et c’était très sympathique. A certains moments, nous avions jusqu’à vingt personnes en plus qui venaient nous donner un coup de main.

Les étudiants allemands devaient être surexcités à l’idée de travailler avec vous sur les effets spéciaux de maquillage d’un grand film de Science-Fiction !

Oh oui, ils étaient très enthousiastes. C’était formidable. C’était une équipe de gens très sympathiques et très motivés. Ils ont beaucoup apprécié cette expérience et nous aussi.

Les acteurs qui jouent les rôles des créatures étaient-ils suspendus par des câbles quand ils devaient courir à quatre pattes, sur leurs mains et leurs pieds ?

Quelquefois. Mais le reste du temps, nous utilisions tous les trucs du métier, en fonction de chaque plan. Ils étaient quelquefois suspendus, mais à d’autres moments, nous utilisions simplement des acteurs très athlétiques, qui étaient capables de courir ainsi, sans l’aide de câbles.

Avez-vous été contraints de construire des prothèses corporelles particulières pour dissimuler les harnais que certains acteurs devaient porter ?

Non, nous avons simplement posé des prothèses autour des harnais. Dans la plupart des cas, c’est le département des costumes qui s’est occupé des harnais. Ils ont géré tout ce qui en dépendait. En revanche, nous avons dû fabriquer des pieds en caoutchouc, parce que le sol des décors était composé de grilles métalliques dans lesquelles se trouvaient certains éléments pointus. Les acteurs n’auraient pas pu courir pieds nus sur ces grilles sans se blesser. Il fallait qu’ils portent quelque chose pour protéger leurs pieds.

La suite de cet entretien est disponible par ici

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